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4848 est une année en quelque sorte perdue pour les sciences et pour les arts. Les ouvrages en trait de publication et les revues de tout genre ont été interrompues, ou ne se soutiennent qu'à grande peine, en paraissant seulement à de longs intervalles. La statue reste à peine ébauchée dans l'atelier du sculpteur, et le burin du graveur attend des temps plus heureux pour creuser patiemment le bois, le cuivre et l'acier. Les congrès scientifiques et archéologiques ne réunissent plus un nombreux concours d'adhérents et d'auditeurs venus de tous les points de la France pour mettre en commun leurs connaissances, les généraliser et surtout les populariser.

Ceux d'entre nous qui se sont rendus à ces assises de la science en sont revenus, toujours enchantés des relations qu'ils y avaient établies, toujours satisfaits des échanges d'observations, de communications, de renseignements qu'ils avaient pu faire avec des collègues jusqu'alors inconnus.

Comme toutes les sociétés archéologiques, nous avons subi l'influence des événements politiques; nos séances ont été plusieurs fois interrompues. Au lieu de onze réunions, nous n'en avons eu que sept dans le cours de l'année 1848; mais des travaux importants ayant été fournis par plusieurs membres de la Société, notre bulletin formera encore pour cette année un volume qui ne le cédera pas, je crois, en intérêt à celui qui l'a précédé. Il sera orné de nombreuses gravures et lithographies dues au talent si distingué de notre collègue, M. Victor Petit, et au crayon du jeune Villain, sourd-muet de Saint-Médard, dont le zèle et les progrès méritent tous les encouragements et les remercîments de la Société.

L'essai historique et archéologique de M. Decamp sur l'ancienne abbaye de Saint-Léger ouvre notre second volume. C'est une monographie complète de la vieille abbaye; l'archéologie et l'histoire ont eu une part égale

dans le travail de M. Decamp, et il reste bien peu de choses à dire après lui; cependant la question de date pour la construction de l'église est tellement importante que je pense, tout en partageant les idées émises par l'auteur, qu'elle devra être étudiée de nouveau.

Plusieurs des membres qui sont ici se rappellent encore avec plaisir les deux promenades archéologiques qu'ils ont faites à Braine, Limé et le Mont-Notre-Dame, et à Blérancourt, Manicamp et Quierzy. M. l'abbé Poquet s'est fait l'historiographe de nos excursions. Le compte-rendu comprend : 1o une courte description de l'église de Limé, monument peu important mais pas cependant dépourvu d'intérêt.

2o Une notice sur l'ancienne abbaye de Mont-NotreDame. M. l'abbé Poquet, sans négliger la description des restes de la magnifique église de Sainte-Marie, a traité avec un soin tout particulier ce qui concerne les souvenirs nombreux qui se rattachent à cette vieille collégiale.

3o Des détails intéressants sur l'église et l'hospice de Blérancourt, les observations critiques sur l'église nouvellement construite de Manicamp, et une description rapide du château de Quierzy.

Nous devons en outre à M. le secrétaire communication: premièrement, d'une lettre écrite par lui pour retourner le tombeau de Saint-Drausin, abandonné à Paris dans une cour du Louvre; deuxièmement, la liste des titres et cartulaires existant à la bibliothèque de Laon et intéressant la ville de Soissons; troisièmement, des renseignements précieux sur le château de Fère-en-Tardenois.

A la suite de ces excursions, est venue naturellement la notice historique sur Quierzy, par M. Suin. En voyant se dérouler devant elle cette série d'actes qui ont eu une si grande influence sur les destinées de la France, la société était étonnée qu'ils eussent eu pour témoins les

lieux tristes et presqu'abandonnés qu'elle venait de visiter et qui ne rappellent d'aucune manière le séjour des rois et des empereurs.

M. Williot a fait à la société un rapport étendu et complet sur la découverte qui a été faite près de Soissons, d'un vase de terre contenant plus de 2,000 médailles des règnes de Constantin, Maximin, etc.; dans la même séance ce rapport a été lu.

Il existait autrefois, à l'extrémité sud-ouest de l'ancien diocèse de Soissons, une abbaye célèbre pendant tout le moyen-âge et souvent nommée par les historiens du Valois; je veux parler de l'antique abbaye de Morienval. Deux de nos collègues, M. Clouet et M. l'abbé Daras ont poussé jusque là une reconnaissance archéologique des pius intéressantes; le travail dont elle a fourni la matière. à M. l'abbé Daras nous a donné à tous le désir d'aller visiter aussi l'église de Morienval, l'une des plus curieuses et des plus anciennes de notre pays.

L'article sur l'époque gauloise dans le canton de Braisnes, inséré dans notre premier volume, demandait une. suite; M. l'abbé Lecomte vient de nous la donner, en suivant dans les plus minutieux détails, toutes les traces que les Romains y ont laissées de leur séjour ou de leur. passage. Routes, ponts, villas, établissements militaires, médailles, objets d'art et de ménage; tout a été passé en revue dans le second article de M. l'abbé Lecomte.

Je ne vous rappellerai pas, Messieurs, quelques communications sans importance que j'ai eu l'honneur de vous faire dans le courant de l'année; mais je dois citer une notice sur le théâtre romain de Soissons. L'immense, intérêt qui se rattachait à ce monument, sans doute le plus considérable de tous ceux de la cité gallo-romaine, m'a forcé de donner à mon travail beaucoup plus de développement et d'étendue que je ne le voulais d'abord.

D'autres travaux avaient été promis pour cette année,

mais les circonstances que nous avons traversées expliquent facilement le retard que leurs auteurs ont mis à les produire.

Une première lecture a été faite à la Société par M. Perin, de notes historiques concernant la ville de Soissons, à partir de 1789. Mais notre collègue, ayant voulu réunir cette première partie de son histoire de notre ville pour la rendre aussi exacte et aussi complète que possible, elle n'a pu être comprise dans le second volume du Bulletin de la Société.

Au commencement de cette année, une décision importante a été prise par la Société : c'est l'impression de son Bulletin dans un journal du chef-lieu du dépar

tement.

Je crois que nous avons beaucoup à gagner à ce changement. Le Journal de l'Aisne paraissant tous les jours, au lieu de trois fois seulement par semaine comme le Courrier de l'Aisne, peut reproduire nos articles plus rapidement et avec plus d'exactitude; sa publicité étant beaucoup plus grande et s'étendant sur tous les points du département, le nombre des personnes qui s'intéresseront à nos travaux devra s'augmenter sensiblement. Nous avons donc de justes motifs d'espérer que l'influence que nous voulons exercer dans l'intérêt de notre pays, tendra à s'accroître tous les jours.

La Société doit savoir gré aux propriétaires du Journal de l'Aisne de lui avoir ouvert si largement les colonnes de leur journal; et M. Fleury, l'un d'eux, en acceptant le titre de membre correspondant, a montré l'intérêt et le prix qu'il attachait à nos travaux. C'est pour nous une garantie du soin avec lequel aura toujours lieu leur reproduction.

La Société remercie son président du zèle et de l'activité qu'il n'a cessé de déployer pour faciliter le progrès

des études historiques et archéologiques. Elle se félicite de pouvoir offrir cette année, malgré la difficulté des circonstances politiques si nuisibles aux arts, un volume aussi complet, aussi important que celui de l'année précédente. Elle a lieu d'espérer qu'en 1849, l'agitation des esprits, l'inquiétude et la gravité des évènements re viendront plus compromettre la nature de ses recherches et interrompre la régularité de ses séances mensuelles.

On procède ensuite au renouvellement du bureau qui, d'après les articles 5 et 6, § II du règlement, doit avoir lieu chaque année dans la séance de janvier (1).

MM. de Laprairie, l'abbé Poquet et Suin sont réélus, à l'unanimité, président, secrétaire et trésorier. MM. Williot et Decamp sont nommés, au second tour de scrutin, l'un vice-président et l'autre prosecrétaire-archiviste.

M. Suin rend compte à la Société de sa gestion de 1848 et des recettes qui lui restent à faire.

A propos du titre que la Société historique et archéologique de Soissons a pris dès son origine et qu'il désire voir maintenir à tout prix, M. de Noiron voudrait que la Société ne se bornât pas seulement à étudier et à décrire ces grands monuments qui font encore notre admiration, mais qu'on s'occupât un peu plus et des artistes qui ont su les élever, et des procédés qu'ils employaient à la confection de ces belles et magnifiques constructions. Puis entrant dans le vif de la question qu'il ébauche à grands traits, M. de Noiron pose en principe qu'à toutes les époques, tous les grands travaux ont été entrepris à

(1) Voir tom. I, pag. 8.

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