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prince aussi peu traitable que l'était Henri V ne peuvent s'expliquer que par la misère et la dépopulation du pays (27).

Pendant la tenue des états de Rouen (janvier 1421), Henri V reçut dans la salle du château l'hommage du comte de Salisbury pour le comté du Perche, et celui d'Arthur de Bretagne pour le comté d'Ivry (28).

Les états durent être clos avant le 18 janvier, date des lettres que le roi adressa au trésorier et au receveur général pour leur enjoindre de procéder à la levée du premier paiement de l'aide de 400,000 1. (29).

Vers la fin du mois, après avoir mis ordre aux affaires de la province et en avoir confié le gouvernement à son frère le duc de Clarence, Henri V quitta Rouen et se rendit à Calais, où il s'embarqua pour l'Angleterre. Partout il fut accueilli au milieu des transports de la plus vive allégresse; mais ce qu'il y venait chercher, c'étaient moins les applaudissements du peuple que « deux choses qui lui estoient moult << nécessaires pour finir ses besognes, savoir : finan«< ces et gens d'armes.» A Westminster, en mai 1422, le parlement fut convoqué; il confirma le traité de Troyes et vota un fort subside, non toutefois sans quelque opposition et sans remontrances. A l'exem

(27) Rôle du 28 mars 1421, aux Arch. imp., K, 648. Je dois la connaissance de cette pièce et de toutes les autres qui sont indiquées sous cette cote à l'obligeance de mon confrère et ami M. Sainte-Marie Mévil, qui a bien voulu m'en adresser la copie. « L'an 1424 fu la plus forte année à passer en France et en Nor«mandie que oncques homme veist, de tous vivres et autres choses <<< nécessaires corps d'omme. » P. Cochon, Chronique normande, P. 443.

(28) Chronique de Normandie (ancienne édition), ch. cc LXXVIII, (29) Bréquigny, no 925.

ple du clergé normand, le clergé anglican s'imposa un dixième, et renouvela cet octroi au mois de septembre de la même année (30). Dans les premiers jours de juin, Henri V était de retour en France, et en mesure de pousser plus activement que jamais la guerre contre le dauphin.

Il n'y eut pas d'autre assemblée d'états du vivant de Henri V. A l'avenir, le gouvernement anglais évitera de demander d'un seul coup des sommes aussi considérables; les demandes seront plus modérées, mais elles seront en revanche plus fréquentes, et le peuple, en définitive, ne gagnera rien au changement.

1423.

La seconde réunion des états de Normandie fut postérieure de quelques mois à la mort de Henri V. Dans les premiers jours de février, les députés furent convoqués à Vernon, où le besoin de se rapprocher du théâtre de la guerre avait amené depuis quelque temps déjà Bedford et les gens du Conseil (31).

Les délibérations du chapitre de N. D. de Rouen permettent de déterminer avec assez de précision la durée de ces états. Le 28 janvier, les chanoines avaient nommé l'archidiacre Jean Guérin pour y comparaître en leur nom. Le 10 février, il était encore au milieu de ses confrères, mais à la veille de son départ; puisque, ce jour-là, Guillaume de Bau

(30) Rymer, t. IV, p. iv, 25.

(34) Arch. de la S.-Inf., ÉTATS, no 5.

dribosc, receveur des chapes, fut autorisé à lui remettre 15 l. pour ses frais de voyage. Le 25 du même mois, Guérin était de retour (32): c'est donc entre le 12 et le 24 février qu'il faut placer les états.

Les commissaires du roi, à la tête desquels se trouvait l'abbé Robert Jolivet, exposèrent aux députés l'importance qu'il y avait pour la sûreté de la province à s'emparer du Mont-Saint-Michel, d'Ivry, et de quelques autres places encore occupées par les Français. Ils obtinrent une somme de 50,000 1. t., qui dut être payée en entier avant le 1er août suivant (33). Un dixième fut octroyé par les gens d'Église. Un fait peut faire juger du peu d'empressement avec lequel il dut être payé vers ce temps-là, un demidixième ayant été accordé à l'archevêque de Rouen, dans trois diocèses sur sept, dans ceux d'Evreux, de Séez et d'Avranches, il fut impossible de trouver personne qui consentît à se charger d'en opérer la recette (34).

En n'admettant pas d'assemblée d'états entre celle de Rouen en janvier 1421, et celle de Vernon en février 1423, je ne dois pas dissimuler que je me mets en contradiction avec D. Bessin et M. de Gerville. D. Bessin donne pour titre à une note concernant

(32) Arch. de la S.-Inf., Registres capitulaires de Notre-Dame de Rouen. - L'abbé du Mont-Saint-Michel, Robert Jolivet, passa dix jours à Vernon comme commissaire du roi. Bib. Imp. Gaignières, 266.

(33) Arch. de la S.-Inf., ÉTATS, no 6.

(34) Ibid. F. de l'archev. Comptes de Gilles Deschamps, trésorier de la S. M. 1423 à 1424. — Le 13 novembre 1423, les chanoines de Rouen résolurent de convoquer sans bruit les prélats, afin d'avoir à aviser sur le fait du demi-dixième accordé à Vernon. - Peut-être s'agit-il d'un dixième autre que celui que nous avons mentionné. (Arch. de la S.-Inf. Reg. cap.)

une mission assez peu clairement définie de deux religieux de Fécamp auprès du duc de Bedford : «< Concilium provinciale apud Vernonium, exeunte ju<<nuario vel ineunte februario 1422, de mandato « Regis celebratum (35). » M. de Gerville, dans ses Recherches sur les Abbayes du département de la Manche, mentionne une décision adoptée par les états de Normandie, réunis à Vernon, en 1422, sur les plaintes des religieux de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Cette assemblée aurait donné l'ordre à l'official de Valognes de constater par une enquête l'importance des pertes qu'ils avaient éprouvées par suite des guerres (36).

Mais remarquons que les termes employés par ces deux auteurs donnent tout lieu de supposer qu'il y a là une méprise occasionnée par la confusion que l'on fait assez ordinairement de l'ancien et du nouveau style dans la manière d'indiquer les dates. D. Bessin, en effet, nous apprend dans sa note que les deux religieux de Fécamp prêtèrent serment de fidélité d'après l'ordre de Bedford; dans le récit de M. de Gerville, c'est aussi d'après l'ordre de Bedford qu'auraient été convoqués les états de Vernon : d'où il faut conclure que l'assemblée à laquelle il est fait allusion a suivi la mort de Henri V, et ne peut être par conséquent du mois de février 1422. Ce serment de fidélité annonce que la couronne était passée sur une autre tête; d'ailleurs Bedford n'aurait pas de son autorité privée convoqué les états de Normandie dans un moment où ses fonctions de régent le rete

(35) Concilia Rot. prov., p. i, 183.

(36) Mém. de la Soc. des Antiq. de Norm., II, 54.

naient en Angleterre, et lorsque Henri V se trouvait en France.

L'aide de 50,000 1. votée aux états de Vernon fut levée en vertu de lettres datées de Paris du 14 juin, et d'un mandement du trésorier général du 8 juillet 1423. Le paiement devait être complétement effectué au 1er août 1423 (37).

Cette année, les états furent convoqués deux fois encore, en juillet et en décembre. A Vernon, au mois de juillet, ils votèrent 60,000 1. t. « pour le paie«ment des souldoyers ordonnez pour la garde, sceurté « et deffence du païs et duchié de Normandie et pour le « recouvrement des places d'Ivry, le Mont-Saint-Michel, « Dreux, et autres voisines dudit païs (38). » Le 4 du mois précédent, le régent avait écrit à ce sujet à l'abbé du Mont-Saint-Michel, son chancelier et son conseiller intime. « Il fallait, lui disait-il, songer à << payer les soudoyers et les gens de guerre retenus « aux gages du roi pour la défense de la Normandie. « A la Saint-Jean, on allait leur devoir un quartier « d'année, et l'on n'avait rien à leur donner, parce « que les fonds qui leur étaient destinés avaient été (( dépensés au siége du Crotoy, qui durait encore, au

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(37) Arch. Imp. K. 648. Bib. Imp., Compte de Pierre Surreau, receveur général de Normandie pour l'année 1424, 9436 [4], 62, 63. Arch. de l'Eure, rôle de l'assiette de VIIIe 1. sur les paroisses de la vic. de Harcourt. Je dois la connaissance de ce document à l'obligeance de mon confrère et ami M. l'abbé P. Lebeurier, archiviste du département de l'Eure. Je n'ai pas eu moins à me louer de la complaisance et des utiles renseignements de M. Chatel, archiviste du Calvados.

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(38) Arch. de la S.-Inf., ÉTATS, nos 8 et 9. Bib. Imp., 9436 [4], 62, 63. Après son mariage Bedford vint à Vernon : « Et «<là amena sa fame, faisant grans joyes. Et là firent un grant << conseil où furent grant quantité de seigneurs et les bourgeois de «Rouen. » P. Cochon, p. 449.

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