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« pour aucunes nécessités très-urgentes, touchant <«< grandement le bien public. » Sur cette aide, quelques fonds furent assignés à maître Pierre Pingrenon pour les travaux de la rivière de Touques, dont on avait décidé la canalisation depuis Lisieux jusqu'à la mer (152).

La perception de l'aide de 200,000 1. donna lieu à des difficultés qui se reproduisirent assez fréquemment pendant la durée des trèves. Le vicomte de Pontde-l'Arche ne put réussir à se faire payer d'une partie des paroisses de sa circonscription; les Français de Louviers les encourageaient à la résistance, en faisant valoir qu'elles étaient de leur parti, et ne pouvaient par conséquent être soumises à une imposition levée au nom du roi d'Angleterre. Le cas avait été prévu à Rouen dans une assemblée des commissaires de Henri VI et de Charles VII, et il avait été décidé que les impositions et les revenus des terres et des seigneuries en litige seraient perçus par des officiers commis ad hoc par les deux souverains. Malheureusement, comme c'était à prévoir, ces officiers ne s'accordèrent pas toujours sur les limites du territoire des deux puissances. Ainsi, cette année-là, Jean de Louraille, qui avait été envoyé à Louviers pour conférer avec les Français en qualité de commissaire de Henri VI, ne put rien en obtenir, et déclara qu'il se voyait dans la nécessité de renoncer à sa commission (153).

(152) Arch. de la S.-Inf., ETATS, no 218

(153) V. une pièce du 28 octobre 1445, aux Arch. Imp., KK, 648.

1445

Les appatis prélevés par les Français dépassaient d'une somme assez considérable ceux qui avaient été accordés aux garnisons anglaises. Pour compenser cette différence, Henri VI, par le traité de Nancy conclu au mois d'avril, s'engagea à payer à son oncle de France (ainsi désignait-on Charles VII dans les actes de la chancellerie anglaise) 4,500 1. t., et à la garnison de Bellème 1,078 l. t. par chaque trimestre. Nous ne saurions dire si cette somme fut imposée d'office, ou si ce fut en conséquence d'un vote des états; toujours est-il qu'elle fut fournie chaque année jusqu'à l'expiration des trèves (154).

Au mois de juillet, une aide de 30,000 1. t. fut votée dans une assemblée d'états tenue à Argentan, sous la présidence du duc d'York. Voici à quelle occasion : la trève une fois conclue, Charles VII et Henri VI se trouvèrent également embarrassés d'une partie de leurs troupes. Ils n'osaient les licencier, de peur de les pousser à la révolte, et d'autre part ils craignaient, en les gardant, d'exposer leurs sujets, déjà assez grevés d'ailleurs, à tous

(154) V. trois mandements des trésoriers et généraux gouverneurs des finances: l'un du 15 novembre 1445, dans un vidimus du garde du scel des obligations de la vicomté d'Auge; le second, dans un vidimus du garde du scel de la vicomté de Falaise, du 20 mai 1446, aux Arch. du Calvados; le troisième, du 27 décembre 1448, aux Arch. de l'Eure, B, 107. Arch. de la S.-Inf., ÉTATS, no 239. - M. Teulet, Catalogue, 545, 518. Rymer, t. V. p. 11, 3, 4, 7, etc.

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les excès d'une soldatesque indisciplinée. Le meilleur parti qui s'offrit était de les employer dans quelque expédition lointaine, où ils vivraient sur l'étranger et ne feraient tort qu'à lui. Ce fut la principale cause de l'expédition de Montbéliard et de Suisse, entreprise par Charles VII. Telle est aussi l'explication de cette permission donnée par Henri VI à 8,000 soudoyers anglais et normands de s'engager pour cette campagne au service du roi de France; permission qui, à première vue, doit paraître singulière, puisque, si Charles VII n'était plus un ennemi, ce n'était pourtant pas encore un allié. Ils partirent sous la conduite d'un capitaine gallois, Mathew Gothe ou Gough, plus connu sous le nom francisé de Matagon. L'expépédition n'eut qu'une assez courte durée; ils revinrent plus nombreux et plus tôt qu'on ne s'y attendait, et s'établirent de leur autorité privée dans cette partie de la Normandie que l'on appelait alors les BassesMarches. C'était le plus grand malheur qui pût arriver à cette contrée, déjà si déplorablement dévastée. Les plaintes, les murmures de toute la population mirent le duc d'York dans la nécessité d'agir; il sentit qu'il ne pouvait souffrir un pareil abus sans achever de discréditer le gouvernement anglais aux yeux du peuple, d'autant plus que les états, au mois de septembre de l'année précédente, avaient déjà accordé des secours au roi pour mettre les soudoyers à la raison. Il partit donc de Rouen pour la basse Normandie. grandement et notablement accompagnie de gens de conseil, de justice et de guerre. Il s'assura, au moyen de dons secrets, la soumission des chefs, et

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purgea le pays de ces bandes redoutées, qui ne vivaient que de meurtres, de pillage et de rapine (155). Les plus coupables furent punis d'une manière exemplaire; ceux dont il vit qu'on pourrait tirer parti furent incorporés aux garnisons et mis immédiatement à la solde. Les autres, des nations d'Angleterre, de Galles et d'Irlande, qui paraissaient peu propres au service, furent forcés de passer la mer sur un navire équipé à la hâte et à ses frais; on leur donna ce qui leur était nécessaire pour leur subsistance jusqu'à leur arrivée à destination. Mathew Gough, qui pendant longtemps s'était trouvé à leur tête, rendit dans cette occasion de grands services au gouvernement. Il fut chargé d'aller s'entendre avec quelques troupes de partisans qui s'étaient logés aux environs de Bernay, et de les « induire et mouvoir à vivre et eulx << gouverner courtoisement, si que plaintes n'en « dussent, à l'occasion d'aucuns oultrages, estre << faictes. » Il prit sous ses ordres et emmena dans le comté du Maine 100 hommes et 300 archers « ... des « mieulx en point et gens de faict... pour illec vivre <«<et eux gouverner le plus doulcement que faire se « pourroit. » Cette œuvre de pacification exigea des fonds assez considérables; le duc d'York se vit obligé de contracter des emprunts au nom du roi, à grand danger et à perte, et d'engager une partie de ses joyaux et de sa vaisselle d'or et d'argent. L'aide de 30,000 1., votée à Argentan, était precisément destinée à l'indemniser de ses avances et à fournir l'excédant de dépenses qui résultait de l'incorpora

(155) M. Teulet, Catalogue, 543.

tion des soudoyers dans les retenues des garnisons. Cette aide fut votée par « aucuns deputez et procu<«<reurs de la plus saine et entiere partie des gens des << estas du pays et duchié de Normandie, et auxquels << la chose touchoit le plus. » Elle fut assise par un gouverneur et un receveur spéciaux, et levée avec le quatrième paiement de l'aide de 200,000 I. t. (156).

Dans les derniers jours de novembre et en décembre, il y eut à Rouen, dans la chapelle de l'archevêché, un concile provincial convoqué sur la demande de Henri VI. Il s'ouvrit le 27 novembre; les points que l'on y traita étant exclusivement relatifs. à la discipline ecclésiastique, à la réforme des abus qui s'étaient introduits dans l'Eglise de Normandie, nous n'avons pas à nous en occuper. Nous nous bornerons à mentionner ici l'invitation adressée par le concile à tous les fidèles de faire des prières pour la conclusion de la paix entre les deux royaumes, et une requête des écoliers de l'université de Caen tendante à ce qu'on leur réservât une partie des bénéfices qui étaient à la collation des chapitres (157).

1446

Vers la fin de janvier, les états s'assemblèrent à Rouen. Henri VI leur fit exposer l'extrême désir qu'il avait de conclure la paix; dans ce but, il se proposait.

(156) V. Pièces justificatives, no xxv.

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(457) D. Bessin, Concilia, I, 188. Le chapitre de Rouen se fit représenter à ce concile par Ph. De La Rose, André Marguerie, Girard Folie, Jean Bidault, Jacques Deshaies et Thomas Ba

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