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de l'Angleterre, ne peut rassurer en France contre les abus de l'autorité.

Il y a en Angleterre un tel équilibre entre les trois pouvoirs, le Législatif, l'Exécutif et le Judiciaire, qu'ils se tiennent réciproquement en respect; et un quatrième pouvoir, non moins imposant, veille sur leur union, sur leurs droits mutuels : je veux parler du pouvoir de l'opinion publique, pouvoir entretenu, stimulé, rendu presque impérieux par la liberté de la presse.

Les Ministres du Prince ont donc le besoin de ménager plusieurs autorités; et la protection du Monarque ne les garantiroit d'aucun des dangers auxquels ils seroient exposés en violant, dans un seul point, les droits constitutionnels de la Nation.

Cette protection ne leur procureroit pas non plus un dédommagement de ce qu'ils auroient souffert pour avoir sacrifié leur devoir à une servile déférence envers le Prince. Est-il une faveur du trône qui fût une compensation de leur honte au milieu d'un pays où l'opinion publique conserve le pouvoir de flétrir les esclaves?

Enfin, ce ne sont pas des hommes, sans nom, sans propriété, des hommes au commencement de leur fortune, qu'on peut indifféremment appeler au ministère en Angleterre ; car il importe au Gouvernement qu'ils aient le droit, ou par

leur naissance, ou par leurs facultés, de prendre séance au Parlement.

C'est ainsi, et par différentes considérations, que la responsabilité des Ministres en Angleterre est une chose réelle et très-réelle; mais tout est différent en France aujourd'hui, tout est en sens contraire. Point de Chambre des Pairs, qui en impose par son rang héréditaire; point d'assemblée politique représentative de la Nation; point de Parlement enfin établi dans l'esprit et le cœur du peuple et de plus, aucune liberté d'écrire, et l'opinion sans guide et sans puissance. Comment, avec une telle distribution politique, avec une disproportion si marquée entre l'autorité Exécutive et toutes les autres autorités, oseroiton mettre un ministre en accusation? ce seroit une entreprise aussi vaine que dangereuse.

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Ne le voit - on pas à chaque instant, en lisant le nouveau code constitutionnel? Il y a de sages paroles écrites les droits sont reconnus, les places sont désignées, les pouvoirs ont chacun leur dénomination, l'offensif est réglé, le défensif de même ; mais il n'y a d'armure donnée qu'au Gouvernement.

QUE deviendra la liberté au milieu de ces dispositions politiques ? Ce que voudra le Consul. Le Tribunat pourra lui en parler; mais il est

prévenu qu'on' n'est astreint, ni à l'écouter, ni à lui répondre. Le Sénat Conservateur est investi du droit d'annuller les actes inconstitutionnels; mais l'oseroit-il? et si jamais il s'y hasardoit; si, du fond de sa retraite silencieuse, il élevoit la voix, on se demanderoit ce que c'est ; et tout le monde un moment auroit peur, excepté le Consul.

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Er qu'il est foible, le langage qu'on emploie, dans le nouveau code, en parlant de la liberté, en parlant des emprisonnemens arbitraires ! Ce n'étoit pas alors le sujet dont on étoit le plus occupé ; et l'on ne s'en étonnera pas, si l'on se retrace le moment où ce code a été rédigé. « Le Gouvernement ( est-il dit) peut décerner » des mandats d'amener et des mandats d'arrêt » contre les personnes suspectes ; » mais si, dans un délai de dix jours après leur arrestation, elles ne sont remises en liberté ou en justice, il y a de la part du Ministre signataire du mandat crime de détention arbitraire. Voilà tout pour la liberté. Quelle foible sauvegarde, en considérant le pouvoir indépendant, le pouvoir formidable sous lequel ce Ministre se trouve placé !

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Encore auroit-il fallu remarquer que la garantie imposée à un Ministre signataire d'un mandat

d'arrêt, n'étoit pas équitable. En effet, on exige de lui, sous la peine décernée aux détentions arbitraires, que la personne arrêtée en vertu de ce mandat signé de lui, soit au bout de dix jours traduite en jugement, ou mise en liberté ; mais le Ministre a besoin de l'autorité du Consul pour faire relâcher un prisonnier, quoique le Consul ait eu besoin de la signature du Ministre pour compléter le mandat d'arrêt. On peut rendre un Ministre responsable de ce qu'il a fait, jamais de ce qu'il n'a pas fait, si, pour agir, si, pour obéir à la loi, la volonté du maître lui étoit nécessaire.

Ici, d'ailleurs, sa garantie ne doit commencer que dix jours après l'emprisonnement ; mais s'il étoit renvoyé pendant cet intervalle, que pourroit-on alors lui demander? il n'a plus d'autorité. C'est donc bien peu de chose, pour la sécurité publique, qu'une telle responsabilité.

REVENONS, en terminant, à une réflexion générale, et que nous avons déjà indiquée. La responsabilité du Ministre, et l'inviolabilité du Chef de l'Etat sont des conditions monarchiques, et nullement républicaines. L'idée de ménager, au nom même de la loi, celui qui commande, plus que celui qui obéit, cette idée extraordinaire n'a pu venir que dans un pays où

l'on a su faire du trône héréditaire et de son éclat perpétuel un moyen d'ordre et de liberté ; mais dans un pays où la suprématie est temporaire et de création, où elle ne tient rien d'ellemême, il n'y a point de raison pour sortir des règles communes, et pour transférer la responsabilité du Chef sur la personne du subalterne.

Je dirai plus : si dans une République on pouvoit en réalité changer ainsi les gradations naturelles, et rendre le Ministre garant de tous les faits du Gouvernement, c'est lui bientôt qui seroit l'homme marquant, qui seroit l'homme en autorité ; car il parleroit sans cesse au nom de la Nation, et son opinion, ses démarches, deviendroient l'objet constant de l'intérêt public. Mais, dans la Constitution nouvelle, on a donné trop de pouvoir au Chef de l'Etat, pour laisser à aucun de ses seconds la faculté de se mettre en parallèle avec lui par aucun droit, par aucune prérogative; et l'expérience prouvera que la responsabilité des Ministres foiblement appuyée de quelques paroles constitutionnelles, restera sans application, et ne sera d'aucun usage.

INDIQUONS, Cependant, une disposition d'une conséquence plus réelle, mais dans un sens absolument opposé aux idées de responsabilité, et destinée à déclarer indépendans les Agens du

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