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Analogie

avec

du Pérou.

fixées à leur ceinture, comme le faisaient les aborigènes du Pérou à l'époque de la conquête. Chez les Péruviens, ces noeuds s'appelaient quipos, autographes les quipos étranges dont quelques-uns ont eu les honneurs de la traduction. Qu'était-ce en réalité que cette espèce d'autographes? C'était une correspondance entre deux amants, dans laquelle la délicatesse des sentiments exprimés a révélé toutes les ressources que des moyens aussi bornés pouvaient fournir à l'imagination. Aujourd'hui encore, les sauvages de la Louisiane et du Canada se servent, pour le même usage, d'espèces de chapelets. Le langage des fleurs pourrait être regardé comme une variété de cette langue symbolique.

Si l'on en croit encore les vieilles traditions de la Chine, les caractères y furent inventés par un nommé Paou-Che. Avant d'être phonétiques, ils furent idéographiques ou figuratifs, et analogues, jusques à un certain point, aux hiéroglyphes de la vieille Égypte. Les mots poisson, oiseau, tortue, cerf, dragon, éléphant et mille autres, étaient représentés par l'image même de ces êtres, et parlaient aux yeux en même temps qu'à l'esprit. On inventa ensuite certains caractères de formes conventionnelles comme celles de nos animaux de blason. Dès lors, tout homme de loisir, tout calligraphe adroit s'appliqua à donner à ces représentations le naturel et la grâce compatibles avec les formes consacrées; et quand un talent calligraphique venait à percer la foule, ses écrits étaient recherchés, imités, reproduits sur la pierre ou sur le bronze. Les Mémoires historiques sur les peintres cé– lèbres, par Tchang-Yen-Youen, cités dans l'Encyclo

Les

caractères

sont

d'abord idéo

graphiques

ou figuratifs.

1

Le mode d'écriture

duellement.

pédie chinoise, disent : « Les ministres de la dynastie des Tchéou (1134-256 avant notre ère) instruisaient les fils de l'empereur dans les six sortes d'écriture, dont la troisième était dite « représentant la forme, siang hing. » C'est cette espèce d'écriture qui a donné l'idée de la peinture « hoa». On sait alors que si l'écriture et la peinture ont des noms différents, leur essence est la même.

Mais les besoins toujours croissants d'une littérature en progrès firent à la longue abandonner les formes purement pittoresques de l'écriture primitive. L'invention du papier amena, comme chez tous les change gra- peuples, la substitution d'un pinceau léger et flexible au style de fer; et un nouveau système graphique, compliqué, il est vrai, dans ses détails, mais admirable dans son principe et son application, changea d'objet l'émulation des calligraphes. Plusieurs classes de caractères furent adoptées; et, parmi ces classes, celle des caractères combinés, dont la diversité d'associations produisit autant de significations diverses. Ainsi, la combinaison des caractères soleil et lune, qui dans l'ordre physique expriment clarté, éclat, splendeur, signifièrent, dans un sens moral et métaphorique, noble, fameux, illustre. L'oubli fut figuré par l'union des caractères le cœur et la mort; l'inconstance et la légèreté eurent pour symbole l'union des signes pensée et jeune fille; flatter fut représenté par les signes mot et lécher; se vanter par montagne et parler. Là encore il y eut analogie entre la Chine et l'Égypte dans les opérations de l'esprit pour la formation de la langue. La grammaire égyptienne de Champollion le

Caractères figuratifs composés.

jeune contient en effet une série d'images ou signes généraux ou spéciaux qui rentrent dans le même système et qui ont servi à déterminer des nuances de la pensée en une certaine classe d'hieroglyphes. Par exemple, deux jambes en marche signifient le mouvement; un bras exprime la pensée d'action; la représentation d'une mère allaitant son enfant veut dire nourrir; un homme renversé à terre signifie défaite, et ainsi de suite. Des images simples les hiérogrammates allèrent, suivant le caprice de leur imagination, aux images de plus en plus composées.

Écriture

phonétique.

Du moment que la transformation fut opérée en Chine, le goût des curieux d'autographes reçut une direction nouvelle, et ces curieux composèrent presque toute la partie lettrée de la nation chinoise. N'ayant plus à s'inquiéter de la ressemblance des objets, ce fut la symétrie des traits nombreux dont chaque lettre se compose qu'on rechercha; ce fut l'harmonie des pleins et des déliés; ce fut la vigueur, la légèreté des contours, en un mot, le talent calligraphique, signe infaillible d'une grande habitude du pinceau, d'une grande persévérance au travail, par conséquent d'une grande érudition, si ce n'est d'un profond savoir. Car, hâtons-nous de le dire, il n'en est point chez les Chinois comme dans nos pays d'Occident, où une belle écriture peut être l'apanage d'un esprit peu cultivé. Chez eux, il y a corrélation nécessaire entre l'ha- Considération bileté calligraphique et l'instruction, parce que l'une a l'habileté et l'autre ne peuvent s'acquérir qu'en même temps, graphique. et pour ainsi dire par le même procédé, à savoir l'étude, sous toutes les formes possibles, matérielle et

qui s'attache

calli

Examen portant en Chine

sur la

intellectuelle, des grands monuments de la littérature chinoise. En un mot, la calligraphie en Chine n'est pas seulement un art, mais une science. On y possède un grand nombre d'écritures diverses, comme les anciens avaient la moulée, l'onciale, la cursive, comme nous avons la gothique, la moulée, la bâtarde, la coulée, la ronde, l'italique, l'anglaise, etc. On rapporte même qu'un empereur, Kien-Loung, ami des lettres et littérateur lui-même, fit écrire, l'an 1742, en trentedeux espèces de caractères ou écritures différentes, un poëme dont il était l'auteur, et où il chantait Moukden, la capitale de l'empire.

Aussi n'est-il pas surprenant que, dans les examens rigoureux où, par la collation des divers degrés aux calligraphie. lettrés, on ouvre aux hommes d'étude la carrière du mandarinat, on attache une égale importance à la composition et à l'écriture, à l'érudition et à une connaissance exacte des parties constitutives de chaque lettre classique. C'est à ce point que, pour ceux qui aspirent à devenir membres de l'académie de Péking, c'est l'empereur en personne qui examine les compositions, qui compte les traits des caractères employés, qui vérifie le parallélisme que doivent avoir les lignes de caractères dans tous les sens. On est donc sûr, quand on a affaire à un Hân-Lin ou académicien, de traiter tout à la fois avec un érudit, un littérateur distingué et un homme habile dans l'art calligraphique de son pays.

Bien entendu, les Chinois ont, comme nous, la cursive rapide, l'écriture à main levée. Tel pinceau qui aura formé de beaux caractères à main posée cessera

parfois d'être lisible à main levée. J'ai vu des autographes de l'avant - dernier vice- roi de Canton, le mandarin Yeh, mort dans l'Inde, prisonnier de l'Angleterre, déclarés illisibles par nos interprètes, tandis que d'autres écrits du même personnage étaient des morceaux de véritable calligraphie. Il en est de même des autographes du précepteur du prince impérial, le vice-roi Ki-Ing, haut commissaire de l'empereur, signataire de notre premier traité avec la Chipe, en 1844, nommé aussi plénipotentiaire, mais non admis, pour le traité nouveau signé par M. le baron Gros, et qui, dit-on, victime du vieux parti chinois, aurait payé de sa vie l'ouverture de son pays à la civilisation européenne. Du moins, l'annonce de la sentence capitale a été insérée dans la gazette officielle de Péking, du 23 juin 1858. Ce n'est pas, il est vrai, une raison suffisante de croire que cette sentence ait été mise à exécution, attendu que lorsqu'il s'agit des hauts personnages de l'empire, et surtout d'un parent de l'empereur, la cour de justice prononce très-souvent des dégradations, l'exil ou même la mort, sans que les condamnés quittent pour cela leurs fonctions et changent en quoi que ce soit leur manière de vivre. Seulement, ils s'abstiennent de porter les insignes des dignités dont ils ont été nominalement dépouillés. On croit cependant, sur le témoignage de voyageurs qui arrivent de la Chine, que l'ordre a été envoyé par l'empereur au malheureux Ki-Ing de se donner la mort, et que cette injonction a été intimée avec trop de sévérité pour qu'il ne s'y soit pas soumis en avalant du poison en présence des commissaires porteurs du rescrit impérial.

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