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exécution charmante, qui laissent bien loin toutes les œuvres de pacotille consacrées de nos jours aux recueils de même nature. Enfin, le Journal des Dames et des Modes de la Mésangère, commencé à la fin du dernier siècle, contient une quantité considérable de costumes gravés d'après Bosio, Dutertre, Carle Vernet, Horace Vernet et Lanté. Les coiffures y jouent leur rôle. Un coup d'œil jeté sur tous ces recueils avant ou après une visite au Musée de Coiffures serait excellent pour s'y préparer ou se souvenir.

En vain eût-on lu avec fruit les Lois de la Galanterie (1), les dictionnaires de Furetière et de Richelet aux mots Cheveux, Coins, Bigottère, Tours, Tresses, Toupets, Perruque, etc.; en vain eut-on lu l'article de M. de Garsault dans l'Encyclopédie méthodique sur l'Art du Perruquier et du Barbier étuviste (2), on ne saurait qu'imparfaitement encore tout ce qu'il y a dans un coup de peigne, si l'on n'avait pas vu le musée parlant que nous citons. Rien là qui sente la prétention. On ne s'y vante pas de posséder une tresse de

volumes]. Du 15 juillet 1786 au 4 mars 1789, date de l'approbation. L'ouvrage complet est fort rare. Les figures sont de Duplessis-Berteaux et de Dutertre.

(1) Il y a un passage très-curieux du livre qui porte ce titre dans le Nouveau recueil des pièces les plus agréables de ce temps. 1644, in-8°, pp. 15-17.

(2) Cet article a été publié séparément en 1767, avec cinq planches in-fol.

On peut consulter également le Parfait ouvrage ou Essai sur la coiffure. Paris, 1775, in-8o, et un passage intéressant sur les perruques et les perruquiers dans l'Histoire des Français des divers états par MONTEIL; LVIe chapitre, dix-septième siècle. Voir la dernière édition, publiée en 1853, chez Victor Lecou, in-12, t. IV, p. 225.

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cheveux d'Absalon, tirée du cabinet de Bochart, ni la
Chevelure de Bérénice, ni la Boucle de cheveux enle-
vée. Ce sont tout bonnement des têtes à perruque;
mais quelles perruques! Point d'études rétrospectives
sur l'antiquité, sur le moyen âge, sur le seizième siè-
cle. Rien que deux seules perruques de cette dernière
époque.

L'une était du nombre des perruques blondes de
la première femme de Henri IV, cette reine Margot,
qui, par la seule vue de l'yvoire de son bras, selon le père
de Coste (1), triomphait des hommes les plus froids,
et qui, ajoutant la coquetterie de la chevelure à ses au-
tres séductions, faisait tondre ses pages pour dissimu-
ler, sous leurs tresses cendrées, les crins noirs rebelles
dont l'avait dotée la nature.

L'autre est un de ces terribles contrastes, une de ces
affreuses antithèses comme il s'en trouve parfois dans
les collections, un de ces poignants souvenirs dont on
voudrait éloigner l'horreur, mais dont, malgré soi, on
afflige son regard : c'est la perruque de toilette d'exé-
cution de l'infortunée Marie Stuart, rapportée de Fo-
theringay sur le continent par deux des Maries, après
l'exécution, le 18 février 1587. La triste relique est
accompagnée des authentiques qui ne laissent aucun
doute sur ses origines. Oui, une perruque de cette ma-
gnifique princesse, qui « paroissoit une vraye déesse »;
» la plus belle qui naquist jamais au monde »
de Charles IX amoureux (2)! Une perruque de cette

(1) Vies ov Éloges des Dames illustres, t. II, p. 301.

(2) BRANTOME, Dames illustres, Discours III.

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au dire

4

femme jadis si fière de sa superbe chevelure! Et de fait,
un détail qu'avaient jusqu'ici laissé ignorer les rela-
tions connues, et qui est constaté
et qui est constaté par le Vray rapport
de l'exécution faicte sur la personne de la royne d'Es-
cosse, publié par M. Teulet, des archives générales de
l'Empire (1), c'est que la longue captivité de Marie
Stuart lui avait fait perdre presque entièrement sa belle
chevelure, qu'elle avait fait raser le peu qui lui en res-
tait, et en portait une fausse.

Misérable victime, dont la beauté, sa dernière couronne, n'avait pas même été à l'abri des férocités de sa rivale!

« Le prochain coup de hache du bourreau, dit le rapport, fut justement sur le premier, par lequel sa teste fut tranchée du corps, sans qu'il retirast sa hache après le coup, de peur que de fortune, elle ne tinst à quelque peau. Et aussy tost l'exécuteur prit la teste et la leva, la monstrant au peuple, disant, selon la coutume God save the Queen! Dieu sauve la royne Éli

:

sabeth ! Comme il l'eust eslevée, ceste teste tomba soudainement de ses mains, pour ce qu'il ne l'avoit prise que par la peau de ses cheveux faux.....

« La teste estoit nue de cheveux devant et derrière, et rasée exprès....., et, en chaque costé, petits cheveux gris, mais non pas beaucoup.

"

Perruques

Non loin, et j'ai regret qu'il y en eût si peu, sont neuf à dix têtes du temps de Louis XIV, où cependant Louis XIV.

(1) Vray rapport, t. II, p. 881 du Recueil des papiers d'État relatifs à l'histoire d'Écosse au seizième siècle, publié par M. Teulet pour le Bannatyne Club d'Édimbourg, en 1852. Ce beau et bon livre a été l'objet d'un savant rapport de M. Mignet à l'Institut.

sous

les coiffures eurent leurs élégances, leurs grands maîtres et leurs ridicules. Malheureusement, ce peu qu'on en possède en notre musée n'est point classé par ordre chronologique, comme ce qui appartient aux règnes suivants, chose qui pourtant eût été bien facile en consultant les tableaux du temps et les traditions de théàtre. Ces perruques ne portent pas les noms sous lesquels elles étaient connues, et une seule est signée de la Martin, cette fameuse coiffeuse qui bretaudait (1) L'Hurluberlu. par plaisir à l'Hurluberlu la jeune duchesse de Nevers

comme un patron de mode; testonnait (2) la vieille madame de la Mothe à faire pàmer de rire le roi et toutes les dames sensées (3), et, suivant Ninon, faisait ressembler comme deux gouttes d'eau madame de Choiseul à un printemps d'hôtellerie (4). Cheveux coupés sur la tête et frisés naturellement par cent papillotes, avec quoi la pauvre madame de Nevers souffrait mort et passion toute la nuit, et avait une tête de chou ronde, sans que rien accompagnât les côtés, voilà l'Hurluberlu outré jusqu'à la folie (5). Quelques femmes poussent l'exagération si loin, qu'il y en a, s'écrie la marquise de Sévigné, qu'on voudrait souffleter (6).

(1) Mot de madame de Sévigné, et qui, au propre, signifie tondre inégalement un chien; au figuré, couper les cheveux très-court. (2) Accommoder la tête.

(3) Lettre de madame de Sévigné à sa fille. 18 mars 1671.

(4) La même. 1er avril 1671. C'est une allusion à ces estampes d'auberges de campagne représentant les Saisons, qui, de nos jours, ont été remplacées par la Belle Écaillère et les Souvenirs et Regrets

de M. Dubufe.

(5) ID., Lettre du 18 mars déjà citée.
(6) Lettre du 1er avril.

Mais le goût s'en mêle, on supprime les « cent petites
boucles sur les oreilles, qui sont défrisées en un moment,
qui siéent mal, et qui ne sont non plus à la mode que la
coiffure de la reine Catherine de Médicis ». Et avec ce
petit changement la duchesse de Sully et la comtesse
de Guiche ont eu l'art d'être charmantes. « Je suis ren-
due, » dit la marquise, et elle conseille l'Hurluberlu à sa
fille : « Cette coiffure est faite justement pour votre vi-
sage; vous serez comme un ange, et cela est fait en un
moment. Tout ce qui me fait de la peine, c'est que
cette mode, qui laisse la tête découverte, me fait crain-
dre les dents. » Et elle décrit la coiffure par le
pour
menu (1). Et cette coiffure devient celle de madame de
Montespan, de madame de Crussol, de « la petite
Thianges», et enfin de la reine, comme elle l'était de
madame de Nevers et de deux ou trois autres beautés
charmantes qui l'avaient hasardée les premières. Mais
madame de Soubise, qui craignait pour ses dents, se
révolta parce qu'elle avait déjà été une fois attrapée aux
coiffures à la paysanne. Elle eut le courage de ne se
point faire couper les cheveux, et une main habile lui
fit une coiffure qui était tout aussi bien que les autres
par
les côtés. Madame de la Troche suivit ce courageux
exemple. Il y avait encore de ce temps-là, où tout était
grand, des femmes de caractère.

C'était en 1671. Mais, en 1677, on est à cent ans de cette coiffure à l'hurluberlu, qui avait fait faire tant de sottises. L'exagération allait toujours son train sous

(1) Lettre de madame de Sévigné et de madame de la Troche à madame de Grignan. 4 avril 1671.

Madame de Sévigné adopte l'hurluberlu

pour sa fille.

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