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Rev. Mar. 5, 1900.

DE

LA JURISPRUDENCE.

EXAMEN DOCTRINAL

Des principaux arrêts rapportés par les Recueils dans les cahiers de juillet 1851,

Par M. PAUL PONT,

Docteur en droit, juge au Tribunal civil de Châteaudun,

SOMMAIRE.

1. Vente judiciaire; agent de change; notaire. - Les agents de change ontils seuls, à l'exclusion des notaires, le droit de vendre des actions industrielles dépendantes d'une succession bénéficiaire, et cela encore que de fait, de pareilles actions n'aient pas été cotées à la bourse?

2. Jeu; action en justice; mandataire. Les spéculations sur la hausse et la baisse des fonds publics ou de certaines marchandises, présentent-elles ie caractère du jeu ou du pari que la loi civile destitue de toute action en justice?

3. En supposant l'affirmative, le mandataire qui sciemment sert d'intermédiaire pour ces opérations a-t-il une action en remboursement des avances par lui faites à son mandant?

4. Retour légal; enfant naturel.-L'existence d'un enfant naturel fait-elle obstacle à l'exercice du droit de retour, par le donateur, sur la totalité des choses par lui données au donataire?

5. Partage d'ascendants; acquêts. Le partage anticipé qu'un père fait par testament entre ses enfants, peut-il comprendre des biens faisant partie de la société qui existe encore entre lui et sa femme?

6. Communauté; femme; obligation solidaire. — La femme qui s'engage solidairement avec le mari a-t-elle droit à l'indemnité réservée par l'article 1431, lorsque l'obligation a pour objet un cantionnement solidaire donné par la femme et par le mari en faveur d'un enfant commun?

7. Rapport à succession; maître de poste; démission.

- La démission donnée

par un maître de poste en faveur de l'un de ses successibles constitue-t-elle un avantage sujet au rapport?

8. Enregistrement; pluralité de droits. — Les adjudicataires poursuivant la purge hypothécaire et les créanciers inscrits sont-ils des coïntéressés dans

1.

le sens de l'article 68, § 1, n° 30 de la loi du 22 frimaire an VII, tellement qu'un seul droit de notification soit exigible sur la notification faite par un seul et même acte, dans l'intérêt commun?

·(PARIS, 30 MAI, 11 JUILL. ET 2 AOUT 1851; Devill. et Car., 51, 1, 508 et suiv.)- Le recueil de MM. Devilleneuve et Carette rapporte, sous ces dates, trois arrêts desquels il résulte que les agents de change ont seuls, à l'exclusion des notaires, le droit de vendre des actions industrielles dépendantes d'une succession acceptée sous bénéfice d'inventaire, et cela encore que, de fait, de pareilles actions n'aient pas été cotées à la bourse. - D'un autre côté, il résulte de divers jugements successivement rendus par le Tribunal civil de la Seine, les 6 juin 1844, 11 avril 1845 et 16 février 1847, que les ventes judiciaires de meubles incorporels, spécialement la vente d'actions indivises entre un père et son fils mineur, et la vente de créances dépendant d'une succession bénéficiaire, devraient être faites en l'audience des criées par l'intermédiaire des avoués. Ces décisions ne sont pas plus l'une que l'autre, peut-être, à l'abri de la critique.

En matière de ventes publiques de meubles, la loi, on le sait, met à la liberté une entrave nécessaire sans doute, mais assurément très-marquée : elle ne permet pas au propriétaire d'agir librement et sous sa seule impulsion; elle exige de lui qu'il recoure à des officiers ministériels.

Ces officiers ministériels se séparent en deux catégories parfaitement distinctes. Les uns exercent une action qui s'étend à tout ce qui est du domaine de la convention, à tout ce qui constitue un engagement, à tout ce dont l'exécution est rejetée dans l'avenir; ce sont les notaires : les autres, simples intermédiaires entre le vendeur et l'acheteur, remplissent, en matière de ventes publiques, un office dont les effets ne survivent pas à la durée d'un fait matériel, le payement du prix en retour de la livraison de la chose; ce sont les commissaires priseurs, les huissiers, les greffiers, les agents de change, etc.

Une différence aussi marquée dans l'action de ces officiers ministériels, doit nécessairement se refléter dans les conditions de leurs pratiques respectives. Et, en effet, tandis qu'à raison de la

simplicité même de leurs fonctions, ceux de la seconde catégorie ne sont, pour ainsi dire, astreints à aucune formalité, ceux de la première, au contraire, doivent obéir à des règles nettement déterminées, et sans l'observation desquelles leurs actes seraient frappés de nullité.

On comprend, d'après cela, tout ce qu'il y a d'importance à ne pas se méprendre sur les attributions respectives de ces deux classes d'officiers ministériels.

La jurisprudence n'a pas su toujours, à cet égard, tracer avec exactitude et sûreté la ligne de démarcation. Les exemples d'empiétement abondent: si quelques-uns ont été réprimés, il en est d'autres que la tolérance des tribunaux tendrait, au contraire, à faire considérer comme une sorte de droit acquis pour les corporations envahissantes. L'usurpation est, toutefois, aussi caractérisée dans un cas que dans l'autre. Pourquoi donc la jurisprudence présente-t-elle, dans son ensemble, ce défaut d'harmonie? Peut-être parce qu'on ne s'est pas suffisamment enquis du principe général, en cette matière, et qu'à la place du principe général, guide sur lequel il est bon de s'appuyer toujours, on a quelquefois mis des considérations secondaires, susceptibles trop souvent de donner le change.

Il est remarquable que si des lois particulières sont faites en vue de donner à certains officiers ministériels les attributions de vendeurs à l'égard de certains objets déterminés, on ne trouve pas de lois faites spécialement en vue de conférer des attributions semblables aux notaires. Dans quelques-unes de ces lois, les notaires figurent sans doute et sont désignés comme pouvant procéder à la vente et la diriger; mais la désignation est faite de telle manière qu'on y doit voir non point la création d'un droit nouveau, mais le rappel d'un droit préexistant.

C'est qu'en effet, en matière de vente, les notaires ont une aptitude générale, des attributions complètes et absolues qu'ils empruntent moins à des lois spéciales qu'à la loi même de leur institution. Cette aptitude a été amoindrie au profit d'autres officiers ministériels; elle n'en est pas moins restée générale, en ce sens que tout ce qui n'en a pas été formellement détaché y est demeuré compris.

C'est bien là l'esprit dans lequel ont été rendues les décisions. judiciaires dans tous les cas où elles ont eu à consacrer, en faveur des notaires, un droit qui leur était injustement contesté.

au

Ainsi, la Cour de cassation, ayant à statuer sur la prétention élevée par les commissaires priseurs contre les notaires, relativement aux ventes volontaires des meubles incorporels, a dit : « Qu'il est d'autant plus raisonnable de placer la vente de fonds de commerce dans les attributions du notaire, que les ventes de cette nature, qui ne sont susceptibles d'aucune transmission manuelle emportant tradition, entraînent le plus souvent la nécessité de conventions accessoires..... dont les commissaires priseurs ne sauraient être les officiers instrumentaires, et dont, contraire, la rédaction en actes authentiques et exécutoires appartient exclusivement aux nolaires par la nature même de leur institution. » La Cour ajoute. « Que les notaires, auxquels la loi accorde assez de confiance pour assimiler leur ministère à celui des tribunaux eux-mêmes, quant à la vente aux enchères des immeubles appartenant à des mineurs (C. pr., 945), sont, à plus forte raison, aptes à vendre, dans la même forme, leur mobilier, surtout lorsqu'il se mélange d'objets corporels et incorporels dont la vente a besoin d'être faite simultanément..... (Arrêt du 23 mars 1836.) La Cour de Paris, à l'occasion du même différend, avait formulé des considérations identiques, dans ses arrêts des 2 mai 1811, 4 décembre 1823 et 15 juin 1833. Plus tard, à l'occasion d'une autre question, la même Cour a dit : « Que les notaires seuls sont institués pour recevoir et constater les conventions des parties, et pour donner un caractère d'authenticité aux actes qui les renferment; que si les huissiers et certains officiers publics participent avec eux au droit de faire les prisées et ventes publiques de meubles et effets mobiliers, ce droit, émanant de lois spéciales, doit être restreint aux seuls objets qui y sont énoncés..... » (Arrêt du 1er juin 1840.)

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Certes, le droit privatif des notaires est posé, dans tous ces textes, d'une manière bien nette. Il y est signalé, pour eux, comme une conséquence, non pas des attributions faites par des lois spéciales, mais bien de la loi même de leur institution. Des lois spéciales ont limité ce droit en conférant à divers officiers

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