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accompagné dans sa guerre contre les Rustauds', le chargea de tracer le récit de ce grand événement, et, en 1526, parut Lhistoire et Recueil de la triumphante et glorieuse victoire obtenue contre les seduyctz et abusez Luteriens mescreans du pays Daulsays et autres, par tres haut et tres puissant prince et seigneur Antoine par la grace de Dieu duc de Calabre, de Lorraine et de Bar, etc. Quelques autres opuscules de Volcyr furent également composés d'après le commandement de son maitre, et ce dernier lui avait sans doute inspiré le projet, qu'il ne réalisa pas, « de faire quelque bon recueil des choses» qui s'étaient passées dans le duché de Lorraine, que, dans son style passablement emphatique, il appelait le parc d'honneur.

Peut-être est-il permis de ranger aussi parmi les écrivains officiels, bien qu'il n'en eût pas le titre, le poëte et prosateur Emond du Boullay, dont nous avons déjà parlé : ses Dialogues des trois estatz de Lorraine, sur la tresjoieuse Nativité de... Charles de Lorraine..., - sa vie et trespas des deux Princes de paix,- Les Généalogies des tresillustres el trespuissans Princes les Ducs de Lorraine, - Le voyage du duc Anthoine vers le Roy François Ier en 1545, et d'autres relations du même genre, ont été vraisemblablement rédigés pour répondre aux intentions des princes près desquels il remplissait les fonctions de héraut d'armes.

1. Cette guerre fut, on le sait, de même que l'avait été celle de René II contre le duc de Bourgogne, chantée dans un poëme composé par un chanoine de Saint-Dié, Laurent Pillard, plus connu sous le nom latinisé de Pilladius.

2. Voy. Recherches... sur les commencements de l'imprimerie en Lorraine, par M. Beaupré, p. 105, et dans le Journal de la Société d'Archéologie, 1855, notice sur Emond du Boullay.

Nous passons sous silence les auteurs, plus ou moins officiels, des généalogies fabuleuses de la Maison de Lorraine1, composées pour faire valoir des prétentions sans fondement, évidemment dans le but de plaire et de mériter des faveurs; ces auteurs ne méritent pas la qualification d'historiens.

A part ces généalogistes, nous ne trouvons, passé le règne d'Antoine, aucun écrivain auquel ait été confiée la mission de raconter les événements passés ou contemporains; car il ne parait pas qu'on puisse ranger parmi eux l'auteur du Discours des choses advenues en Lorraine', le procureur général Nicolas Remy, bien que son livre ne doive pas être confondu avec ceux qui n'ont plus d'autre mérite aujourd'hui que leur rareté.

Ce fut seulement Charles IV qui eut l'idée de faire composer une histoire des dues ses prédécesseurs : il donna cette mission à Jean Duplessis, procureur général de Barrois, dont l'ouvrage, entrepris et poursuivi au milieu des circonstances les plus fàcheuses, était achevé quand la Lorraine fut évacuée par les Français.

Léopold voulut achever de réaliser le projet que Charles IV avait conçu. Le travail de Duplessis, dans lequel il n'y avait ni recherches ni critique, n'ayant pas été jugé digne de voir le jour, le duc jeta les yeux autour de lui pour voir quelle personne il chargerait de la tâche qui s'était trouvée trop difficile pour l'ancien procureur général. Il songea d'abord au P. Benoit Picart, capucin

4. Voy. Digot, t. I, p. 420 et suiv.

2. Nous devons citer ici, comme ouvrage ayant un caractère officiel, la relation de la pompe funèbre de Charles III, écrite par Claude de La Ruelle, et qu'accompagnent les superbes planches représentant les magnifiques cérémonies qui avaient lieu à l'enterrement de nos ducs.

du couvent de Toul, puis son choix s'arrêta définitivement sur le prémontré Charles Hugo, natif de SaintMihiel, prieur de la maison que son ordre possédait à Nancy, et auteur de quelques ouvrages qui l'avaient fait assez avantageusement connaitre1 par lettres patentes données à Lunéville, le 19 mars 1708, Léopold le nomma son conseiller-historiographe. Ces lettres, les seules de ce genre qu'un duc de Lorraine ait délivrées, sont ainsi conçues :

« L'histoire estant une espèce de mausolée qui se doit à la mémoire des grands hommmes, et qui, en transmettant à la postérité leurs hauts faits, excite l'émulation des hommes vertueux par l'espérance qu'elle donne qu'imitant leurs vertus, ils survivront pareillement à eux-mêmes dans l'esprit de ceux qui les doivent suivre ; nous avons cru digne de nos soins de choisir une personne esclairée, prudente, exacte et fidèle à laquelle nous puissions confier le soin de composer l'histoire des ducs nos prédécesseurs et des princes de notre maison royale, soit pour conserver la mémoire de leurs grandes actions, que la confusion des guerres et le malheur des temps avoient empesché de passer jusqu'à nous, soit pour esclaircir les points obscurs des histoires précédentes; nous, à ces causes..., et sur la connoissance parfaite que nous avons des bons sens, suffisance, expérience, fidélité, prudence, exactitude, zèle et affection à notre service de notre cher et amé sujet naturel le père LouisCharles Hugo, prestre, docteur en théologie et prieur des chanoines réguliers prémontrés de notre bonne

1. Voy. Notice biographique et littéraire sur Dom Augustin Calmet, par Aug. Digot, p. 29.

ville de Nancy, et de son éloquence, de son style net et concis, de son érudition profonde, dont nous avons les preuves dans les divers ouvrages qu'il a donné au publique, et eu esgard que, dans la seule veüe de nous plaire, il travaille depuis plusieurs années, de son propre mouvement, à la recherche des faits historiques de nosdits prédécesseurs; avons... estably et retenu... ledit père Hugo pour remplir la charge de notre conseiller historiographe, pour doresnavant l'avoir, tenir, exercer... aux honneurs, authorités, prérogatives, prééminences, priviléges, exemptions,... revenus et émolumens y appartenans..., tels et semblables qu'en ont joui... les historiographes des ducs nos prédécesseurs, et aux gages et appointemens de mil cinquante frans barrois... »

Hugo se mit immédiatement à l'œuvre, et, dès 1711, les biographies de plusieurs ducs étaient terminées. Diverses circonstances', qu'il est inutile de rappeler ici, forcèrent Léopold à retirer à cet écrivain la mission qu'il lui avait confiée, et à chercher un homme capable de le remplacer. Son choix se porta sur Dom Calmet, que plusieurs écrits avaient déjà fait connaitre ; mais, les imprudences du P. Hugo, ayant rendu le duc très-circonspect,

1. Voy. ibid., p. 30. · Voy. aussi, dans les Mémoires de l'Académie de Stanislas, année 1842, Elege historique de CharlesLouis Hugo, par Aug. Digot, p. 117.

Le compte de la dépense de l'hôtel de Léopold, pour l'année 1716, contient la mention d'une somme de 100 livres délivrée au P. Hugo "pour son copiste de l'Histoire de Charles V ; ce qui semblerait indiquer que cette Histoire aurait été écrite par ordre du duc. (Voy. ibid., p. 167.)

Dans le compte de l'année 1700 on voit figurer une somme payée au P. du Poncet, jésuite, a pour le voyage qu'il va faire à Paris pour y composer l'histoire de S. A. S. Charles V ». (Voy. Durival, t. I, p. 92.)

il ne voulut pas charger formellement le savant bénédictin de travailler à une nouvelle histoire de Lorraine; il lui fit seulement savoir qu'il le verrait avec plaisir s'occuper de cet ouvrage.

Dom Calmet ne fut donc pas historiographe en titre, mais il en remplit véritablement les fonctions, et, grâce à lui, notre pays fut doté d'un livre qui, malgré les critiques fondées auxquelles il peut donner matière, est une source féconde de renseignements, à laquelle sont heureuses d'aller puiser toutes les personnes qui s'occupent d'études historiques.

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