décharge de boëtes ou petits canons qu'ils s'étoient » procurez. Sa Majesté s'arrêta en ce lieu au milieu de la › campagne, pour y faire collation dans son carosse... > Au Village d'lvelize' les habitans de ce lieu rendirent > les mêmes devoirs à la Reine, que ceux du Village de Donnelay... On ne fit que passer à Marsal. « Au Bourg de Moyenvic toute la Bourgeoisie, qui est très> nombreuse, bordoit les ruës; une bande de violons se > fit entendre pendant tout le passage de Sa Majesté ».

La réception fut des plus solennelles à Vic, qui était l'étape du jour, et où l'on arriva sur les cinq heures ».

Les Capucins de ce lieu étant venus processionnelle➤ment se ranger sur le chemin dehors la porte de la > Ville, rendirent leurs hommages à Sa Majesté; le Grand Maitre des Cérémonies luy présenta les Officiers de › Ville, et les clefs des portes à la maniere accoutumée... > La Reine entra dans la Ville au bruit du canon du Châ>teau, la Bourgeoisie en bordoit les ruës; un détache

ment de cent cinquante hommes du Régiment de Nor> mandie étoit rangé en haye dans la place, comme dans > la cour du Château; l'Escadron de Cavalerie qui avoit précédé la marche, y étoit aussi rangé en bataille. » Sa Majesté entrant dans le Château, qui appartient à > M. l'Evêque de Metz, appercut les Armes du Roy et de > la Reine, qui étoient sur la porte en forme d'Arc de › Triomphe. La Reine étant arrivée dans son apparte» ment, M. le Marquis de Dreux présenta à Sa Majesté

1. Juvelize.

2. C'était le régiment du Maine: la marche était fermée par celui de Royal-Cavalerie.

3. Thomas II de Dreux, marquis de Brezé, dit le marquis de Dreux, mort le 26 mars 1749.

› le Clergé, la Justice, et les Officiers de Ville, chacun › selon leur rang, qui après avoir harangué Sa Majesté, > firent leurs presens de Ville, et après avoir rendu leurs ⚫ devoirs respectueux à la Reine, ils furent s'acquitter de › celuy qu'ils devoient à Son Altesse Sérénissime1, à qui > ils firent aussi des présens, Peu de temps apres l'arri>vée de la Reine, S. A. S. luy présenta le Prince de › Lixen2, de la Maison de Lorraine, Sa Majesté le reçut » très-gracieusement. La Reine soupa sur les sept heures > à son petit couvert dans une galerie assez grande, qui > fut remplie d'un grand concours de monde, et de grand › nombre de Seigneurs de la Cour de Lorraine, qui ⚫ étoient venus pour voir souper Sa Majesté... Toutes les ruës de la Ville furent éclairées par des lanternes et par › des feux de joye; et l'on entendit presque toute la nuit > tirer des petards et des fusées volantes. Les Soldats du › Régiment de Normandie firent garde aux environs du › Château, et la Bourgeoisie auprés des équipages ».

Nous touchons à la partie du voyage qui regarde plus particulièrement notre sujet, et aucun détail n'est désormais à négliger aussi transcrivons-nous, presque sans rien supprimer, la page qui va suivre.

Le 21 août, la caravane royale avait à parcourir une forte étape; car la route est longue de Vic, d'où l'on par tait, à Metz, où l'on se rendait. Sa Majesté s'étant » done levée à quatre heures, entendit la Messe dans la › Chapelle du Château, qui fut dite par l'Abbé More, › Chapelain du Roy, et partit ensuite à cinq heures... Un

1. La comtesse de Clermont.

2. Jacques-Henri de Lorraine, prince de Lixheim, né le 24 mars 1698, tué en duel le 2 juin 1734.

Escadron du Régiment du Maine Cavalerie, étoit rangé > en bataille dans la place du Château, de même qu'un Bataillon de celuy de Normandie Infanterie. La Bourgeoisie de cette Ville en assez grand nombre, tous avec des cocardes, étoient rangez en haye dans les rues, › présentant les armes, et criant à haute voix, Vive le Roy et la Reine.

A la sortie de la Ville, Sa Majesté fut saluée par une salve d'Artillerie qui dura assez long temps. L'on trouva auprès de Wie une Brigade de Maréchaussée, » qui précéda bien avant la marche, de même qu'un Es> cadron du Régiment du Maine Cavalerie; un autre Es› cadron du même Régiment fermoit la marche; Le guet » des Gardes du Corps du Roy a toujours entouré le carosse de Sa Majesté, y ayant deux Exempts à chaque portiere du carosse; sçavoir, le Vicomte de Suzy', le Comte d'Autichampt2, M. de Brecourt et le Comte de › Langeais.

>

Au village de Chambray à une lieuë et demic de › Wic, l'on trouva les habitans tous en joye faisant des feux devant leurs portes, et la Bourgeoisie de ce lieu > en très-bon ordre, rangée en bataille dans une prairie. > Ils avoient fait faire une Banniere d'une grandeur assez > considérable, où ils avoient fait peindre les Armes du Roy et de la Reine, et avoient élevé et attaché cette › Banniere entre deux arbres en forme de May, avec ces mots, Vive le Roy et la Reine, et avoient fait dresser › un grand feu de joye. L'attention des habitans de ce

1. Charles-François de Ronty, vicomte de Suzy.

2. Joseph de Beaumont, comte d'Autichamp, mort le 19 janvier 1739, à 53 ans.

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petit lieu fit plaisir à Sa Majesté. Le sieur de Revilé1, › Seigneur de ce lieu, fit faire dans son Château, une › décharge de boëtes et de canons, comme dans une Ville fortifiée, ce qui surprit agréablement toute la Cour.

>

» Sur la côte de Dême2, les habitans de ce lieu et des ⚫ lieux circonvoisins, s'étoient assemblez en très-grand > nombre ; ils avoient dressé un grand feu de joye, et fait › porter plusieurs boëtes qu'ils firent tirer au passage de > Sa Majesté, qui les fit récompenser. C'est dessus cette > montagne qu'on entendit tirer le canon de Nancy qui › en est éloigné de six lieuës; on pensa que c'étoit au » passage de M. le Duc d'Orléans, qui venoit de Luné› ville pour se rendre à Metz ce jour-là, pour y recevoir » la Reine ».

Nous avons souligné les mots Village de Chambray et Côte de Dême, parce que ce sont là précisément les deux têtes de notre Route, et qu'on ne saurait marquer d'une manière plus formelle que le cortège royal la suivit d'un bout à l'autre. En vue d'un aussi grave événement que le passage d'une jeune souveraine, la vieille voie avait fait toilette; et la tradition a transmis jusqu'à nos jours le souvenir des travaux de remise à neuf qui y furent exécutés à cette occasion. La reine y avait passé, et l'on avait joué des bras pour que la reine pût y passer : les corvées qui avaient précédé la fête, et la fête qui avait suivi les corvées, se gravèrent simultanément dans la mémoire des peuples, et la Route de France devint pour

1. Je crois qu'il fant écrire d'Ervillé.

2. Delme.

3. Louis, duc d'Orléans, né le 4 août 1703, mort le 4 février 1752. Il était fils du Régent, et neveu de la duchesse régnante de Lorraine.

eux la Route de la Reine, sans toutefois perdre entièrement son ancienne dénomination.

La Reine dina à Solgne dans la maison du sieur Gi> rardin Fermier, et en partit à quatre heures pour continuer sa route. L'on trouva à une lieuë de là, au » Cabaret de la Horgne à Greve, une troupe de Paisans de tout sexe des lieux circonvoisins; qui malgré la > pluye continuelle de ce jour, n'avoient pù se résoudre à se retirer... une école de jeunes païsans, à l'exemple de leurs peres, y avoient aussi attendu Sa Majesté, » pour luy donner des marques de leur profond respect > et de leur génie. Ils assiégerent une petite Ville qu'ils > avoient fait faire en relief, et fortifiée avec de la terre > où il y avoit plusieurs boëtes et quelques petits canons › de bronze et de bois, qui firent une effet proportionné » à leur force; à côté de cette petite Ville étoit un grand » feu de joye qu'ils avoient allumé, Sa Majesté les fit ré› compenser ».

Sur les neuf heures du soir, l'auguste voyageuse arrivait enfin à Metz, où nous la laisserons entrer parmi les magnificences d'une réception souveraine. Notons seulement que la pluye, qui avoit duré presque toute la > journée, cessa heureusement, et donna un temps le > plus serein et le plus calme pendant toute cette auguste › cérémonie. Si l'accueil avait été chaud, en effet, on a pu voir que le voyage avait été très mouillé : il en est du mauvais temps comme de la mort, et les reines y sont sujettes comme les simples bergères.

Les détails ci-dessus, que l'on trouvera certainement curieux à plus d'un titre, nous sont fournis par un petit volume imprimé à l'époque même, et dont voici le titre complet: Journal historique du Voyage de S. A. S.