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LA TOUR D'AVESNES

FT LES ORAGES

Au moment où l'on se félicite, à Avesnes, de voir établir un paratonnerre sur la tour de l'église, on ne sera peut-être pas fâché d'avoir quelques renseignements sur les périls que les orages de trois siècles ont fait courir à un édifice qui s'élève à une hauteur de 58 mètres 25 centimètres, sur un plateau auquel le bureau des longitudes attribue une altitude de 172 mètres. Quelques lignes suffiront pour résumer tout ce qu'apprennent, à ce sujet, les archives communales.

Après un mois d'une gelée très intense, la neige tombait abondamment le mardi 3 février 1666, et rien ne faisait présager un orage, quand, à midi précis, une effroyable détonation ébranla toute la ville, et presque aussitôt la cloche d'alarme se fit entendre. La foudre venait de tomber verticalement sur le dôme de la tour, au-dessus de la fenêtre qui regarde le midi, et avait embrasé l'extrémité inférieure de la face correspondante de la lanterne, vulgairement désignée sous le nom de baraque du quetteur. L'incendie, attaqué avec vigueur, ne fit que des dégâts insignifiants; avant une heure, il était complétement éteint et les Avesnois s'empressaient de rentrer chez eux, trop heureux qu'une alerte aussi vive n'ait pas eu pour eux de conséquences plus fâcheuses qu'un diner refroidi. Car, à cette époque, sous l'ample bonnet de dentelle comme sous l'humble cornette à petits plis », il n'y avait point d'Avesnoise qui n'eût cru grandement compromise sa réputation de « femme de ménage », si, chez elle, «la soupe » ne s'était point trouvée sur la table avant le premier coup de douze heures. L'émoi du lendemain de la Chandeleur n'était pas complétement oublié, et il défrayait encore parfois la conversation des bourgeois attablés devant une « canette » de cervoise, ou de bière d'absinthe, si la circonstance autorisait quelque extra, lorsque, le jour de la Pentecôte 1668, de grand matin, « la foudre s'attacha de nouveau à la tour », pour reproduire les termes de la note laconique, qui fait connaitre l'événement, sans mentionner aucune des particularités qui ont pu le caractériser. Tout ce qu'il est possible d'en dire, c'est qu'il y eut à peine un commencement d'incendie. Le danger fut plus sérieux cent quinze ans plus

tard, le 19 juin 1783, jour de la Fête-Dieu. Vers neuf heures du soir, le tonnerre tomba à peu près au même endroit qu'en 1666, et embrasa la fenêtre du dôme, qui fait face au midi. L'espèce de procès-verbal qui mentionne l'accident, sans être très explicite, signale « le zèle et l'activité » que déployèrent, dans cette circonstance critique, MM. du Magistrat, les bourgeois et la garnison; et, en parlant de plusieurs plaques de plomb complétement fondues, il semble laisser percer un assez vif sentiment d'effroi. Aussi l'alarme dut être grande à Avesnes, le 3 août de la même année, entre cinq et six heures du soir, quand, au milieu des réjouissances de la « kermesse », un ouragan furieux, accompagné de violents coups de tonnerre, fondit tout-à-coup sur la ville. Une véritable avalanche de grêlons, de la grosseur d'un œuf, fracassa les toitures et les fenêtres, non seulement de la tour et de l'église, mais de toutes les maisons de la ville, et étendit ses ravages, dans la direction de l'ouragan, du sud-ouest au nord-est, sur une zone de 13 à 14 lieues de longueur et de trois au moins de largeur. Cependant les tempêtes des passions humaines effacèrent bientôt le souvenir de celles de l'atmosphère, et quand, dans les premières années du XIX siècle, les Avesnois se trouvèrent exposés à un effroyable désastre, presque tous s'imaginèrent que c'était la première fois qu'un orage mettait en péril leur tour et leur église. Ce fut dans la nuit du 25 décembre 1811 qu'eut lieu l'accident qui a si vivement frappé ceux qui en ont été les témoins, qu'encore aujourd'hui les moins impressionnables ne peuvent guère en parler sans que leur langage ne trahisse une certaine émotion. La foudre tomba sur la partie septentrionale du dôme, et, tout-à-coup, la fenêtre qui s'ouvre de ce côté livra passage à une gerbe de flammes d'un éclat effrayant. Quand les premiers secours arrivèrent, le plomb fondu ruisselait de toutes parts et semblait devoir rendre impossibles toutes les tentatives de sauvetage. Un couvreur néanmoins, aidé de quelques hommes aussi intrépides que lui (1), parvint à couper une poutre, et arrêta ainsi les progrès de l'incendie. L'épouvante avait été si grande, qu'on songea un moment à abattre le sommet de la tour à coups de canon; expédient singulièrement énergique, mais sur l'efficacité duquel des personnes compétentes pourraient seules prononcer. Fort heureusement qu'en 1840 on n'eut besoin ni de celui-là, ni d'aucun autre. Un orage, en effet, se forma à l'improviste le 16 janvier de cette année, vers quatre heures après-midi, et au premier coup de tounerre, le fluide électrique tomba ou plutôt glissa le long de

(1) La notoriété publique désigne MM. Vandy, couvreur, Haller et Meurant, chasseurs de la garde impériale, en permission dans leur ville natale au moment du sinistre. li y aurait certainement bien d'autres noms à citer, si l'on possédait un procès-verbal détaillé de l'événement.

la partie orientale de la tour; mais il se releva brusquement à angle droit en rencontrant le faîte métallique du toit de l'église, et signala seulement son rapide passage en faisant voler en éclats une grande quantité d'ardoises. Depuis cette époque, la foudre n'a plus atteint la tour d'Avesnes, et dans quelques jours la ville sera enfin délivrée de la crainte de voir s'embraser soudainement une véritable forêt de poutres séculaires, suspendues à une hauteur où les moyens ordinaires de combattre les incendies deviendraient, sinon inapplicables, du moins à peu près illusoires; car, si dans les accidents de 1666, 1783 et 1811, on put, sans trop de difficultés, se rendre maître du feu, c'est que, chaque fois, il fut signalé et attaqué avec une promptitude que la meilleure volonté et la plus active prévoyance ne rendraient pas toujours possible.

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La chapelle de Fontaine, paroisse de Limont, canton de Maubeuge, renferme un précieux travail de sculpture, remarquable à plus d'un titre et bien digne de l'attention des archéologues.

Le rétable de Fontaine est placé au-dessus de l'autel et adossé au mur du choeur. Il est en bois de chêne et mesure 2 40 de largeur sur 2 60 de hauteur à son milieu et 1" 70 à ses côtés.

Il est divisé, dans le sens de la hauteur, en trois compartiments principaux séparés par des pilastres ornés de culsde-lampe destinés à servir de supports à des sujets qui n'existent plus. Celui du milieu, plus élevé que les autres, est terminé en cintre. Chaque compartiment est divisé en deux cases ou chambres superposées, profondes de 25 à 30 centimètres. Les scènes sont formées de pièces rapportées. Il eût été impossible à l'artiste, en raison de la pose dégagée des personnages, de les fouiller dans l'épaisseur du bois.

On ne peut rattacher ce travail à aucun genre particulier d'architecture. On y voit le style gothique encadré d'ornements légers appartenant au style fleuri de la Renaissance, ce qui en fixe l'époque au XVIe siècle.

Malgré les détériorations inévitablement amenées par le temps, ce rétable est encore dans un bon état de conservavation, et tel qu'il est il pourrait figurer honorablement dans les plus riches musées d'antiquités. Les costumes des personnages sont ceux de l'époque et de la contrée où les scènes retracées se sont passées. Les couleurs des vêtements et des décorations sont l'or, l'argent, le rouge et le bleu.

La perspective est bien observée et la hauteur des personnages est proportionnée à leur éloignement; les principaux, en très grand nombre, ont de 20 à 30 centimètres.

Les renseignements recueillis sur l'origine de ce rétable n'ont rien d'authentique. D'après la tradition il serait l'œuvre d'un moine de l'abbaye d'Hautmont dont les propriétés embrassaient une partie du territoire de Fontaine. N'est-il pas naturel, d'après cela, d'admettre avec les habitants du pays que l'abbaye en a doté une chapelle qui dépendait de ses terres, qu'elle avait peut-être érigée et qu'elle devait, par suite, entretenir.

Mais à quelle époque faut-il faire remonter l'existence du rétable à Fontaine ?- Même incertitude sur ce point. On assure cependant qu'elle est bien antérieure à la révolution de 89.

Le moine artiste a pris pour sujet la vie de saint JeanBaptiste, qu'il a divisée en six scènes. La première représente sa Prédication; la seconde le Baptême de J.-C.; la troisième, Jean devant Hérode lui reprochant son union incestueuse; la quatrième, le Festin d'Hérode; la cinquième, l'Emprisonnement de Jean, et la sixième sa Décollation.

I. -- LA PRÉDICATION.

Côté gauche du rétable. Case inférieure.

Le Messie est né : Jean, son Précurseur, prépare les hommes à entendre la parole divine. Il prêche le baptême de la pénitence et annonce la venue du Messie. A sa voix les peuples confessent leurs péchés et reçoivent son baptême.

La scène se passe dans le désert. A droite, à gauche et au fond, des palmiers; en avant et au milieu, un tronc d'arbre; un autre à gauche. Quatorze personnages des deux sexes,de tout âge et de toutes conditions, les uns assis, les autres debout,occupent la partie centrale de la case. Au milieu du premier plan, un personnage debout tournant le dos; il porte la gibecière du berger. Toutes les figures expriment l'attention et le recueillement.

Au fond, dans le lointain, un rocher. Dans une crevasse formant défilé, on voit la foule pressée qui vient entendre la parole de Jean. Trois personnages sont en tête de la colonne.

Au premier plan, à gauche, Jean-Baptiste debout, la main gauche posée sur un appui ou barrière, parle à la foule. Il a le bras droit levé, l'index dirigé vers le ciel, indiquant que de là viennent la vérité et la vie.

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Avant de commencer sa prédication, Jésus-Christ se fait baptiser par Jean-Baptiste, voulant ainsi donner au monde l'exemple de l'humilité.

Au milieu de la scène, le Jourdain. Sur le fleuve se trouvent deux barques de pêcheurs. La plus rapprochée porte deux hommes dont l'un est occupé à hisser une voile. A l'arrière plan, au fond, quelques maisons. A gauche et à droite des arbres et des troncs d'arbres. A gauche de la scène sept personnages parmi lesquels on distingue une ou deux femmes. Deux d'entre eux ont les mains jointes dans l'attitude de la prière. Au milieu du premier plan, le Christ nu est dans l'eau jusqu'aux genoux. De la main gauche il maintient sa ceinture; le bras droit est levé, le pouce et les deux premiers doigts sont dirigés vers le ciel. Jean-Baptiste, à genoux sur le rivage, verse de l'eau sur sa tête. A droite, un ange tient un manteau pour couvrir Jésus-Christ à sa sortie du fleuve.

Dans les nuages et dominant la scène on voit la figure du Pére éternel rappelant ces paroles de l'Ecriture : « Celui-ci est mon fils bien aimé..... écoutez-le ».

Deux sujets qui ornaient les pilastres, à droite et à gauche, n'existent plus.

III. JEAN DEVANT HÉRODE.

Compartiment du milieu. Case inférieure.

Hérode-Antipas gouverne la Galilée. Il répudie sa femme, fille d'Arétas, roi d'Arabie, pour épouser Herodiade, femme de son frère Hérode-Philippe. Cette union incestueuse ènflamme le zèle de Jean-Baptiste qui ose en reprocher le scandale au tétrarque.

La scène se passe dans une pièce du palais d'Hérode.

A gauche, deux servantes adossées au mur. Au fond six personnages formant groupe, dont l'un tient une hallebarde.

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