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LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DE L'ÉCOLE IMPÉRIALE DES CHARTES,

QUAI DES AUGUSTINS, 13.

M DCCC LV.

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LOUIS XI,

M. DE TAILLEBOURG

ET

M. DE MAIGNÉ.

Dix-sept lettres missives antérieures à l'année 1480, toutes inédites et récemment découvertes au château de Serrant, en Anjou, dans le chartrier du duché de Thouars, sont imprimées ci-après une de Marie de Valois, dame de Taillebourg, no I; une de son mari, no VIII; une de M. de Maigné, no XIV; deux de Jean Chambon, lieutenant de Poitou, nos XIII et XV; la dix-septième d'une dame inconnue ', et les onze autres de Louis XI. Parmi ces dernières, trois sont des copies contemporaines, nos X, XI et XVI, et les cinq autres des pièces originales, portant la signature du roi de France. Celle de madame de Taillebourg est olographe. M. de Maigné et Jean Chambon ont non-seulement signé les leurs, mais encore écrit la formule de salutation. La lettre de M. de Taillebourg est une minute. On peut aussi considérer comme telle la réponse de la dame inconnue à la missive de Louis XI datée d'Arras, le 28 juillet, no XVII, réponse adressée par elle, sous forme de lettre close scellée en cire rouge, A MONSA DE TAILLEbourg, pour lui faire connaître les ordres qu'elle a reçus du roi, au sujet des filles de ce seigneur. Comme la plupart des documents de cette nature et de cette époque, nos lettres n'indiquent pas l'année à laquelle elles appartiennent. Il a été très-difficile de déterminer cette date. Nous

1. Nous disons plus loin que cette dame est probablement l'aïeule paternelle de François 1er, Marguerite de Rohan.

I. (Quatrième série.)

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eroyons avoir à peu près réussi pour celles qui portent les n" V à XVII; du reste, le lecteur en jugera lui-même.

Les onze dernières missives se rapportent toutes à un même objet, l'intervention du roi de France dans les affaires privées de M. de Taillebourg, sur lesquelles nous donnons quelques éclaircissements.

Les quatre premières ne constatent aucun fait remarquable; mais, quand même elles n'auraient pas l'incontestable mérite qui résulte de leur caractère confidentiel et du nom de leurs auteurs, nous n'aurions pas eu le courage de séparer ces vénérables textes, qui, après avoir été protégés par la même poussière, en sont sortis le même jour, réclamant, pour ainsi dire, à la lumière comme dans l'obscurité, la communauté de sort qui existe entre eux depuis près de quatre siècles.

Marie de Valois nous montre dans la première lettre, non-seulement une écriture belle et hardie, mais encore un style qui fait honneur à la fille de Charles VII et d'Agnès Sorel, ainsi qu'aux maîtres dont elle a reçu les leçons dans le château de Taillebourg 1.

Les trois suivantes sont de Louis XI. Celle du 23 juillet, no II, est datée du Puy-Notre-Dame, où les fidèles vont, encore aujourd'hui, vénérer la ceinture de la Vierge 2; elle témoigne de son affection, plus ou moins sincère, pour M. de Taillebourg, et de sa dévotion envers la mère du Christ, dont l'église, située en Anjou pour le temporel, et pour le spirituel en Poitou, servait de prétexte aux dévots pèlerinages dans lesquels le roi allait épier ce qui se passait dans les États des princes possesseurs d'apanages 3, les ducs de Guyenne et d'Anjou. Les lettres des 5 août et 4 février, nos III et IV, doivent se rapporter aux négociations par suite desquelles le comte et la comtesse de Penthièvre transportent au roi de France, en janvier 1480, tous leurs droits sur le duché de Bretagne 4. M. de Taillebourg, dernier représentant de la famille de Coëtivy, avait peut-être des prétentions au duché luimême, comme nous verrons plus loin qu'il en élevait sur l'un de ses principaux fiefs, la seigneurie de Raiz 5. En tout cas, Louis XI attendait de lui des renseignements positifs « pour faire sa matère seure. »

1. Il paraît probable que Pierre Daicon, en faveur duquel sa lettre est écrite, était l'un de ses maîtres.

2. Voy. Notre-Dame de Béhuard, par M. Jules Quicherat: Revue de l'Anjou, année 1853, pag. 136.

3. Voy. Bodin, Recherches sur Saumur, 1re édit., vol. I, pag. 200.

4. Voy. d'Argentré, liv. XIII, chap. 18.

5. Du Paz ne porte pas les Coëtivy dans son tableau des prétendants à la succession de Raiz. Voy. Histoire généal. de plusieurs maisons illustres de Bretagne, pag. 233.

Les cinquième et sixième lettres, aussi de Louis XI, intéressent particulièrement les archéologues.

Les personnes qui visitent Saintes n'y admirent pas seulement les édifices qui remontent à la domination romaine; de belles églises attirent aussi leur attention, celle de Saint-Eutrope surtout. A l'entrée de la magnifique crypte dans laquelle a été découvert, en 1843, le tombeau de l'apôtre de la Saintonge, patron de cette basilique, on remarque sur chacun des gros piliers de droite et de gauche deux inscriptions gothiques, l'une en relief, l'autre en creux 1. Elles portent qu'à deux reprises différentes, la crypte et l'église ont été restaurées et complétées, grâce à la munificence de Louis XI, la première fois lorsqu'il n'était que dauphin de Viennois, la seconde en 1477. Nos deux lettres concernent la dernière et la plus importante de ces restaurations. Il est probable qu'elle fut décidée pendant le séjour du roi à Saintes, au mois de mai et dans les premiers jours de juin 1472; mais, avant de faire commencer les travaux, Louis XI avait voulu qu'un devis en précisât l'étendue et la dépense. Odon de la Baume, prieur de Saint-Eutrope, sous l'administration duquel la première restauration a été exécutée, remplit incontinent les volontés du roi, qui reçoit le devis à Thouars, où il s'était arrêté au retour d'une excursion en bas Poitou.

Les deux lettres qu'il écrivit de cette ville à M. de Taillebourg, la dernière principalement, prouvent que les projets et les chiffres du prieur ne le satisfirent pas, à beaucoup près: il croit que le devis n'a pas été loyalement dressé, et il accuse la Baume ou de vouloir le tromper, ou de s'être laissé tromper lui-même. Le défiant monarque ne veut pas qu'on abuse de sa confiance et de son argent, soit en faveur des églises soit en l'honneur des saints, même lorsque, par leur intercession, il espère obtenir la guérison de quelque maladie ou infirmité 2. Il sait que les maîtres maçons ont des habitudes dont la tra

1. M. Jules Marion les a publiées en même temps qu'il a décrit les monuments de Saintes. Voy. Notes d'un voyage archéologique, pag. 12; et Bibl. de l'École des chartes, 2 série, vol. III, pag. 186.

2. Nous avons trouvé la pièce suivante, minute écrite sur papier, dans un des principaux recueils de Mémoires du règne du roy Louis XI (Bibl. Imp., Mss., coll. Béthune, vol. 8445, fol. 13):

Martir Christi Eutropi, tua Deo placita prece, sana me semper et ubique ab ydropica infirmitate. Ora pro me, beate martir Eutropi, ut ab Eutropisi valeam per te sanari.

Oracio.

Deus qui fidelibus tuis, per oracionem beati Eutropii, martiris tui atque pontificis, cunctis ejusdem memoriam facientibus, de quacumque infirmitate vel adversitate

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