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Le roi envoie des ambassadeurs aux rois chrétiens au sujet de l'union de l'Église

universelle.

1396.

AVANT la fête de Pâques, le roi Charles avait résolu, après mûre An du Seigneur délibération de son conseil, et suivant les avis de la vénérable Université de Paris, d'envoyer des ambassadeurs aux plus puissants princes de la chrétienté, afin de pouvoir sauver du naufrage et ramener au port du salut le vaisseau de l'Église, épouse de Jésus-Christ. Il députa donc vers les rois de Navarre 3, d'Aragon 4 et d'Espagne 5, monseigneur le patriarche d'Alexandrie et maître Gilles des Champs, docteur en théologie; il députa en même temps vers ses cousins les rois de Bohême et de Hongrie, l'évêque de Senlis, maître Pierre Plaon, et quelques autres nobles et savants personnages, en les chargeant de faire connaître à ces princes le projet qu'il avait conçu, et de les prier de vouloir bien travailler de concert avec lui à l'extinction du malheureux schisme qui divisait l'Église.

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Primus, de consensu ejus, magister Johannes Luqueti in jure divino, et dominus Robertus de Dours in jure canonico professores, ejusdem quoque professionis reliquis magistri Johannes Brevis Coxe et Petrus Regis, ab Universitate Parisiensi deputati cum multis aliis eminentis sciencie viris, comites individui itineris regiis sumptibus extiterunt. Tanta liberalitate rex usus est erga Universitatem filiam predilectam, quia erarium commune exaustum peccuniis in legacionibus similibus presentes nuncii alleguabant. Qui quamvis regi vale dicto recedentes ad unum finem tenderent, eamdem tamen fortunam in itinere minime pertulerunt.

Germanica namque cervicositas, predis semper assueta, huc illucque discurrens hostiliter, nuncios non passa est maximam partem Austrie, regnum Boemie vel introitum Hungarie absque conducencium et exploratorum mercenario conductu pertransire; et pluries pontes aquaticos destruere in parte oportuit, ne in predam insequencium devenirent. Sane cum sumptu maximo talia excercebantur; et, ut breviloquio utar, ultra inconveniencia ista cum tedio maximo peracta fuit profectio. Nam quamvis Coloniensis, Treverensis et Maguncie archiepiscopi, Austrie quoque et Bavarie duces et viciniores Alemani amborum ambassiatas libentissime audissent, rex tamen Boemie Universitati audienciam pluries denegavit. Prout fama publica referebat, qui premissi fuerant a domino papa Benedicto, equorum et jocalium cotidiana munera offerentes, ad hoc ipsum inducebant. Unde quociens audiencia poscebatur, respondebat : << Nolumus vos audire, sed si vultis populo predicare, ad eccle<< sias vos accedere et ibi stacionem facere placet nobis. » Quamvis vallidis precibus non mutaverit intentum, missis tamen cognati sui regis Francie curialiter receptis, responderat

De son côté, l'Université de Paris fit partir, avec les députés du roi et de son consentement, maître Jean Luquet, docteur en droit divin, messire Robert de Dours, docteur en droit canon, et deux autres docteurs, maître Jean Courtecuisse et maître Pierre Leroi, ainsi que plusieurs personnages d'un savoir éminent. Le roi fit les frais de cette ambassade, se montrant ainsi très généreux envers l'Université, sa fille bien aimée, dont le trésor commun, lui avait-on dit, était épuisé par les dépenses de plusieurs missions semblables. Les envoyés partirent après avoir pris congé du roi. Ils ne réussirent pas tous également dans une mission dont le but était le même.

En Allemagne, ils trouvèrent un peuple farouche, accoutumé à piller et à exercer toutes sortes de brigandages, qui ne leur permit ni de traverser l'Autriche et la Bohême, ni d'entrer en Hongrie, sans être escortés par une troupe mercenaire de guides et d'éclaireurs. Il leur fallut couper plusieurs fois les ponts derrière eux, afin de ne point tomber entre les mains de ceux qui les poursuivaient; ce qui les entraîna dans de grandes dépenses. Outre ces inconvénients, ils eurent à essuyer toutes sortes de dégoûts dans l'accomplissement de leur mission. Les archevêques de Cologne, de Trèves et de Mayence, ainsi que les ducs d'Autriche et de Bavière et les princes d'Allemagne, voisins de la France, accueillirent favorablement les deux ambassades. Mais le roi de Bohême refusa plusieurs fois audience aux députés de l'Université. C'était, disait-on, à l'instigation des gens envoyés par monseigneur le pape Benoît, qui lui faisaient chaque jour de nouveaux présents soit en chevaux, soit en pierreries. Aussi, toutes les fois qu'on lui demandait audience, il répondait : « Nous ne voulons pas vous << entendre; mais si vous voulez prêcher au peuple, nous vous per<< mettons d'aller dans les églises et d'y faire des stations. » En vain l'on employa les prières pour le faire changer de résolution. Toutefois, il accueillit avec courtoisie les envoyés de son cousin le roi de France, et leur répondit qu'il en délibérerait avec le clergé de son royaume, et qu'il s'empresserait de faire connaître à son bien aimé cousin le

quod cum viris ecclesiasticis regni super hiis consilium celebraret, et deliberacionem ipsorum cognato dilectissimo libentissime intimaret. Hiis similia benignissime respondens inclitus rex Hungarie, viam regis racionabilem dixit, intencionis quoque sue existere, prius cum prelatis et viris ecclesiasticis regni sui celebrato consilio, regem Boemie fratrem suum ad eam viam cessionis totis nisibus inclinare. Similem responsionem dederant archiepiscopi Treverensis et Colonie, duces quoque Austrie et Bavarie principesque vicini, addentes iterum quod pro via regis et Universitatis sustinenda se et sua exponerent, nunciosque eundo et redeundo curialiter exceptos donisque uberioribus cumulatos cum responsione ista ad regem remiserunt.

Sic cum importabili sumptu legacione peracta, circa festum Assumpcionis beate Marie nuncii redeuntes, que audierant, regi Karolo retulerunt ; qui exhilaratus gaudio, fervencius quam antea remansit in proposito, ceteros nuncios expectando. Illos sane Karolus rex Navarre ejus consobrinus, rex Arragonie, qui cognatam ejus germanam duxerat in uxorem, rex eciam Hyspanie, qui more predecessorum contra quoscunque viventes fedus amicicie cum eodem pepigerat, detinuerunt morosius. Hii, quantum affectuose flores lilii colebant, tanta curialitate eorum nuncios exceperunt, gaudentesque de incolumitate regis et prosperitate regni, legacionem eorum et quicquid rex ad unionem habendam prius cum prelatis et viris ecclesiasticis habita matura deliberacione concluserat, gratantissime audierunt. Racionabilibus igitur hii tres insignes domini adherendo, viam regis laudaverunt, et tandem exemplo ejus, eorum quilibet episcopos et viros ecclesiasticos regni sui statuit convocari, promittens quod infra breve super deliberatis ipsi nuncios desti

naret.

résultat de cette délibération. L'illustre roi de Hongrie leur fit une réponse à peu près semblable. Il leur dit que la voie proposée par le roi lui paraissait raisonnable, qu'il avait l'intention d'en conférer d'abord avec les prélats et le clergé de son royaume, et qu'il emploierait tous ses efforts pour faire adopter cette voie de cession à son frère le roi de Bohême. Les archevêques de Trèves et de Cologne, les ducs d'Autriche et de Bavière, et les princes voisins parlèrent dans le même sens, et ajoutèrent qu'ils étaient prêts à faire le sacrifice de leurs personnes et de leurs biens pour soutenir la voie proposée par le roi et par l'Université. Après avoir reçu les ambassadeurs avec autant de courtoisie à leur retour qu'à leur arrivée et les avoir comblés de présents, ils les renvoyèrent au roi avec ces assurances.

Les ambassadeurs s'étant ainsi acquittés de cette mission, non sans avoir dépensé des sommes considérables, revinrent en France vers la fête de l'Assomption de la bienheureuse Vierge Marie, et rapportèrent au roi Charles tout ce qu'on leur avait dit. Le roi en ressentit beaucoup de joie; plus affermi que jamais dans son dessein, il attendit avec impatience les autres envoyés. Le roi de Navarre Charles, son cousin, le roi d'Aragon, qui avait épousé sa cousine germaine, et le roi d'Espagne qui, comme ses prédécesseurs, avait conclu avec lui un traité d'alliance envers et contre tous, retinrent assez long-temps auprès d'eux les députés. Ils les accueillirent avec d'autant plus d'égards qu'ils portaient plus d'affection aux princes des fleurs de lis, et témoi– gnèrent leur satisfaction des heureuses nouvelles qu'on leur donna sur la santé du roi et sur l'état prospère du royaume; ils apprirent aussi avec plaisir le sujet de l'ambassade, et les mesures que le roi avait, après mûre délibération, arrêtées de concert avec ses prélats et son clergé pour parvenir à l'union. Ces trois illustres souverains approuvèrent donc les propositions du roi, et y donnèrent leur adhésion. A son exemple, ils résolurent de convoquer les évêques et le clergé de leurs états, et promirent de lui faire connaître sous peu le résultat de leurs délibérations.

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