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plus grand nombre des évêchés, qui ne remontaient pas à l'ancien temps, avaient été fondés par le roi ou par des particuliers, soit enfin dans la position de vassal des évêques et dans l'idée que le roi était leur protecteur naturel. Depuis la fin du IX siècle, la propriété du roi à tous les évêchés était un fait incontestable, ce qui demeura tel jusqu'à la fin du XII' siècle. On en voit apparaître quelques exceptions par suite de la création d'évêchés par d'autres personnes que le roi. Ainsi se fit la différence entre les évêchés d'empire et les autres.

Comme conséquence de son droit de propriété, le roi avait celui de disposer des évêchés. La concession se faisait dans la forme ordinaire des investitures qui avaient lieu dans l'État, sauf qu'on ajoutait ici l'usage de l'anneau. Les évêques établis prenaient possession de leur siège après les formalités remplies et y restaient aussi longtemps qu'on ne leur retirait pas la concession. Ils jouissaient sur leur siége de tous les droits que pouvaient exercer l'empereur1et étaient regardés comme le plus ferme soutien du royaume. L'hérédité n'existant point pour les charges ecclésiastiques, cela permettait des deux côtés aux intérêts de s'accorder. Il arriva, dès lors, que l'empire, aussi longtemps qu'il subsista dans sa grandeur comme idée et puissance réelle, prit un caractère éminemment ecclésiastique et grandit par suite de son alliance avec la papauté. Mais, d'un autre côté, la puissance des évêques fut par cela même amoindrie. Aussi, lorsque les empereurs entrèrent dans le mouvement des idées de réforme soit par conviction personnelle, soit par vue politique, on conçoit fort bien que

1 On peut faire ressortir ce fait par plusieurs exemples. Ainsi on peut citer le synode de Rome de 962, où le Pape fit seulement ce que voulait Otton. Konrad II révoqua en 1087 l'archevêque Aribert de Milan et le remplaça par son chapelain Ambroise, etc., etc., Cf. Giesebrecht loc. cit. II, 89, 598; Ficker Reichsfürstenstand, 274; Berchtold, Entwickelung der Landeshoheit, I, 87.

On connait ce que fit Henri III pour la suppression de toute simonie, l'établissement du célibat et la réforme de la papauté. Ce sont les empereurs qui ont fait le pape, tel qu'il est devenu sous Grégoire VII.

la grande puissance des évêques leur paraissait le plus sûr moyen pour retenir et réunir un Etat qui se démembrait de plus en plus dans la féodalité. Quand furent tombées toutes les bornes qui arrêtaient la formation du pouvoir ecclésiastique, il arriva un moment où ces deux puissances en présence ne purent plus vivre en bonne intelligence'. Les papes, appuyés par les évêques et les synodes, combattaient depuis longtemps les rapports existants. Quoique les droits des seigneurs eussent un · caractère essentiellement laïc, et qu'on n'admît à cet égard aucun droit ecclésiastique, cependant on ne peut nier que les deux caractères réunis dans la même personne devaient influencer l'un sur l'autre. Tout à cette époque était considéré comme objet susceptible d'appropriation, même ce qui était du domaine ecclésiastique. C'était sur cette idée que reposait la force du pape après la mort d'Henri III et pendant la guerre qu'on a appelé la querelle des investitures. La lutte entre le spirituel et le temporel fut violente. Malgré cela, l'idée subsista que l'empereur était propriétaire de tous les évêchés d'empire, mais l'investiture par le sceptre passa à la puissance ecclésiastique. L'indépendance des évêques et des abbés à l'égard de l'empereur devint définitive par ce fait qu'ils étaient librement élus par les chapitres et les couvents. Grégoire VII avait donné la prépondérance à la puissance religieuse sur le pouvoir temporel 3; l'abaissement d'Henri IV ruina la puissance impériale, et la royauté perdit définitivement tout auxiliaire dans le pouvoir religieux, lorsqu'elle cessa de s'opposer aux idées de réforme. Telle était la situation des vassaux ecclésiastiques de l'empire au commencement du XII° siècle; pres

1 Les donations de comtés à des évêques ou des abbés sont fréquentes, ainsi en 928 on donne celui de Toul à l'évêque et en 1046 celui de Stoddenstaat à l'abbé de Fulda. Dronke, Codex diplom. fuldensis p. 349. Cf. Giesebrecht, II, 313, 398; Ficker, Forschungen, 11, 12 et s. Berchtold, Entwickelung der Landeshoheit 1, 65.

2 Giesebrecht, Geschichte der deutschen Kaiserzeit III.

3 Schulte, Die Macht der ræmischen Pæpste . . . 2o édit. Prague 1871, p. 26.

que indépendants comme les ducs, ils étaient propriétaires certains de territoires déterminés ', qui étaient des fiefs d'empire 2.

V. L'amoindrissement de l'importance de la fidélité. féodale et l'établissement de l'hérédité amenèrent un changement dans la tenue des comtés et des fiefs. Tandis que les Ottons avaient considéré les duchés comme des fonctions, des charges; depuis Henri IV, cette idée disparut pour faire place aux droits de famille. La puissance des ducs fut elle-même atteinte au regard des comtes, car s'ils pouvaient nuire anx intérêts de l'empire, ils ne pouvaient empêcher le mouvement de la formation des. territoires. Les anciennes idées étaient fort changées, car les duchés devinrent partageables depuis Frédéric I. D'ailleurs, il ne faut point croire que, par ces partages, les empereurs auraient pu beaucoup augmenter leur force et le nombre de leurs sujets. En effet, les vassaux seuls en auraient tiré cet avantage qu'au lieu d'être soumis à la puissance directe et sévère des ducs, ils n'auraient plus eu affaire qu'à un empereur, qui n'aurait eu ni la même puissance, ni la même autorité, et qui n'aurait pas osé l'exercer dans la position où il était par suite des guerres avec la papauté. Le fractionnement des duchés de Saxe et de Bavière marque le moment où la territoria

1 On ne peut trouver de contraste plus frappant que celui qui résulte des différences existantes entre les rapports du pape avec l'empereur depuis Otton le grand jusqu'à Henri III et les rapports entre les évêques et les empereurs. Urbain II, au concile de Milan de 1096, disait que le moindre prêtre l'emportait de beaucoup sur tous les rois.

* On ne veut pas dire que chaque possession d'un évêché fût considérée comme un fief, car si c'était un alleu qu'on avait acquis, le bien restait alleu. Quant aux donations qui émanaient des empereurs, c'étaient en général des fiefs. Ficker, Vom Heerschild p. 62 et s. pense que c'est seulement à partir de Frédéric I qu'on vit les princes ecclésiastiques entourés d'une suite militaire. Cf. Waitz, Gott. Gel. Anzeig. 1862. p. 170. Il n'y a pas de doute sur la possibilité pour l'empereur de reprendre le fief si le service n'en était pas fourni; c'est ainsi qu'un capitulaire de Conrad I de 1037 (Leges 11, 38) en reprit un pour toute la vie du possesseur. Cf. Pez. Thesaurus anecdotorum III, p. 206; W. Schmidt, Archivfür æsterreich. geschichte T. 34; Zapil. Alterthüm. d. deut. Rechts, II.

lité l'emporta, ce qui termina le règne de Frédéric II et la dissolution du duché de Souabe.

VI. Il y avait aussi beaucoup de pays: villes, châteaux, districts, qui relevaient directement de l'empire, mais qui n'exerçaient pas d'influence sur le développement des rapports sociaux. Ces territoires étaient tenus par des officiers royaux: Burgraves', (præfecti civitatum), baillis impériaux, advocati imperii (Reischsvogten) et baillis provinciaux, advocati provinciales (Landvogten). Ces officiers commandaient l'armée, rendaient la justice et levaient les revenus royaux. Ces territoires disparurent peu à peu par investiture, par concession héréditaire, vente, donation, engagement, consécration aux Églises, si bien qu'au commencement du XIII° siècle, ils ne formaient plus un appui réel pour le roi.

VII. Cette dissolution de la vie sociale par la féodalité fit naître l'idée de trouver une compensation dans l'hérédité de la puissance royale et la constitution d'une dynastie. Cela eut même lieu dans trois grandes maisons. royales; mais l'extinction de ces familles empêcha l'exemple d'être imité. C'est à partir de ce moment que les rois commencèrent à considérer leur pays comme une possession de famille3.

VIII. La territorialité ne se développa pas seulement

1 Sur la position des burgraves en général voyez Ficker, Reichsfurst. p. 82 et s.; C. Hegel. Die Grafen von Rinneck und Looz als Burggrafen von Mainz dans les Forschungen XIX, 571; XX, 215; Frenssorff. Dic ælteren Magdeburger Burggrafen dans les Forschungen XII,

295.

Sur les Landgraf et les Landgrafiats (comtés) voyez, Frank. Die Landgrafschaften des heil. ræmichens Reichs, Braunschweig, 1872; G. Schenk zu Schweinsberg Beiträge zur Frage nach der Bedeutung der Landgrafschaft, dans les Forschungen XVI. 525; Waitz, Wann wurde Hermann von Winzenburg Landgraf von Thüringen dans les Forschungen XIV, 23; Fr. Stumpf, Die Landgr. Hermann von Winzenburg dans les Forschungen XIV, 72.

2 Sous Otton I on disait : « Jure hereditario paternis eligitur succedere regnis. » (Annal. quedlimb, 936). Cf Grandidier II, 191; Giesebrecht II, 287, 550.

3 Voyez Giesebrecht, loc. cit. II, 289 et s. sur les divers actes de Conrad II relativement aux duchés.

dans les duchés, les évêchés, les margraviats et les comtés, mais aussi dans beaucoup de petits pays qui tenaient leur origine de l'exemption de la puissance comtale dont avaient joui les anciens biens libres, de concessions de biens impériaux devenus héréditaires par droit féodal, de biens d'Églises donnés à des avoués ou à des vassaux importants, etc., etc. Les possesseurs de ces seigneuries, châteaux, etc., avaient d'abord été placés sous la puissance des ducs, mais depuis la dissolution de cette. autorité, ils étaient devenus vassaux directs du roi'.

IX. Peu de pays conservèrent leur ancienne liberté comme la Zélande frisone et quelques parties de la Suisse 3.

X. Les pays des princes slaves étaient complétement indépendants et rattachés seulement à l'empire par un faible lien. Autrefois, ils avaient payé tribut, mais ils étaient ensuite entrés dans les liens féodaux de l'empire, et ils avaient été plus tard reconnus comme princes d'empire".

§ 69. La souveraineté (Die Landesherrlichkeit)".

I. A la suite de cette transformation intérieure (§68), l'empire se partagea en contrées dont les possesseurs acquérirent l'immédiateté dans l'empire, et la puissance ducale complète, puisque les anciens duchés n'existaient plus. A côté de ces possesseurs, quelques pays d'empire de

Ficker, Reichsfurst. p. 239 et s, donne une grande abondance de matériaux et de sources sur les partages des duchés.

Sur les Dinghofe voyez Zopfl, Altherthümer T.1 et Günther, Codex diplom. Rheno-Mosell. 1, 88, 98, 103, 106, 119.

3 Wiarda, Ostfriessche Geschichte 1781-1813, 10 v.; Wiarda, Von den Landtagen den Friesen in den mittleren Zeiten bei Upsalsbom, 1777.

Bohême, Silésie, Moravie, Poméranie, Micklenbourg.

5 Pfeffinger, Vitriarius illustratus; Ficker, Vom Reichsfürstenstande. I. ss (XII et XIII° siècle) Innsbruck 1861; Jos- Berchtold, Die Entwickelung der Landeshoheit in Deutschland in der Periode von Friedrich II. bis einschl. zum Tode Rudolphs von Habsburg I. München 1863; Berchtold, Die Landeshoheit Oesterreichs nach den echten und unechten Freiheitsbriefen. Münch. 1862; Maurer, mot

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