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investivit, salvo et retento jure suo et cujuslibet alterius persone, retentoque sibi et suis perpetuo dominio et laudimio si venderetur, ac tascam faciendam. De quibus omnibus et singulis dictus Salvator voluit sibi fieri puplicum instrumentum. Actum Aquis, etc. presentibus, etc. et me Guillelmo Autrici de Sistarico notario publico, in comitatibus provincié et Forcalquerii, auctoritate illustrissime domine Johanne Regine Jerusalem et Sicilie ac dictorum comitatuum comitisse constituto, qui hanc cartam scripsi et signo que meo consueto signavi1. >>

153. Je n'ai qu'une observation à faire sur le texte ; c'est que si, en général, l'accapitum était la même chose que l'emphyteose, dare in accapitum vel in emphyteosim, cependant il comporte un autre sens. Dans l'acte de 1344, il signifie la prestation que l'emphyteote donnait, une fois pour toutes, au seigneur foncier, en entrant en possession: quod acapitum predictus Salvator sepedicto nobili tradidit et assignavit. C'était le droit d'entrée, pro acapito sive intragio 2.

154. La lecture des actes anciens est non seulement curieuse, mais elle est encore très instructive, car elle rectifie bien des idées fausses. Ainsi, sur la foi de certains déclamateurs, j'avais longtemps cru que les lois révolutionnaires qui privèrent les seigneurs de tous droits utiles sur les propriétés roturières, étaient des lois justes, parce qu'elles n'avaient fait que réparer les effets d'une spoliation antérieure. J'étais tout-à-fait dans l'erreur, et je l'avoue bien que fort peu enclin à prôner l'ancien régime, il est positif, au contraire, que presque

1 Notaire G. Autric, fo 16.

Notaire Mille, à Manosque.

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2 Acte du 2 février 1343. Notaire G. Autric. Notaire Mille, à Manosque.

toutes les redevances seigneuriales provenaient d'une aliénation de propriété foncière. Ordinairement le cens était modique, et si la propriété était autrefois grevée de charges très lourdes, il faut s'en prendre aux abus du système féodal, et non point au titre qui la constituait. Celui-ci était toujours pur de fraude ou de violence, et il n'est pas vrai, qu'à une époque antérieure, le peuple ait été dépouillé de la propriété par les seigneurs. On n'en rencontre nulles traces.

Ce qui est vrai, c'est que les habitudes différaient des nôtres ; c'est que la manière de gérer la propriété n'était pas la même ; c'est, qu'au lieu d'affermer ses terres, le propriétaire foncier préférait les bailler à cens et les aliéner au moyen d'un contrat d'emphytéose. La convention était donc pure dans son essence. Ce qui était abusif, c'était le droit de lod que le propriétaire du domaine direct percevait à chaque mutation à titre onéreux de la propriété, mais la cause de cet abus résidait ailleurs, le titre n'en était pas moins inattaquable.

155. La puissance féodale se manifestait si peu dans le contrat d'emphytéose, que les roturiers y avaient souvent recours. En voici des exemples.

Par acte en date du 15 juin, Raymond Gasqui, fils à feu Isnard, donna en emphytéose à Jean Bruni, de Manosque, une vigne, à l'acapit de un florin, c'est-àdire, moyennant la somme de un florin une fois payé, et à charge d'une redevance annuelle de seize deniers. En conséquence, il l'investit de la dite vigne, en se réservant seulement la directe et seigneurie 1.

Notaire Mille, à Manosque.

1 Notaire Isnard Hospiti. N. Les premières feuilles du sumptum manquant, on ne peut savoir en quelle année les actes reçus par ce notaire ont été passés. Mais ils sont antérieurs à 1389, ainsi qu'il appert de la quittance mise au bas d'un acte.

Le contrat suivant fut encore passé entre roturiers. « Anno quo supra die XXII Junii Petrus Passeroni, de Manuasca, dedit ad acapitum et in emphyteosim Johanni Fornelascii, dicte loci, quandam vineam sitam in territorio de Petraviridi; loco dicto in Cassanhis, pro acapito solidorum 7, quod acapitum confessus fuit habuisse, retinuit dominium et senhoriam et servicium XII denariorum 1. » S'il était nécessaire, je pourrais multiplier les exemples.

Il est vrai que le contrat d'emphytéose était plus particulièrement à l'usage des seigneurs. Mais la fréquence des baux de cette nature par eux passés s'explique facilement. Ils étaient propriétaires de la plus grande partie du sol, et leurs noms devaient, par conséquent, revenir plus souvent dans les actes notariés. Mais ce serait une erreur capitale de croire qu'eux seuls pratiquassent le bail emphyteotique. Tout propriétaire d'un franc aleu pouvait passer des baux semblables, et retenir le domaine direct, en imposant au preneur une redevance annuelle. Cette faculté résulte des lettres patentes concédées, le 11 avril 1386, à la ville de Moustiers par la reine Marie. Ces lettres, entre autres choses, reconnaissent et confirment l'usage dans lequel sont les habitants de cette ville d'aliéner leurs propriétés par baux emphyteotiques perpétuels, ainsi que le droit de percevoir lod à chaque mutation 2. 156. Cependant le droit féodal avait influé sur le 1 Notaire Isnard Hospiti. N. Ceci n'est pas contraire à ce que j'ai dit ci-dessus. Pothier parle du droit de prélation. Pocquet de Livonière parle du droit de retrait. Ce sont deux choses essentiellement différentes. V. Sup. nos 112 et 113.

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Notaire Mille, à Manosque.

2 Archives des Bouches-du-Rhône. Cour des comptes, pacis, fo 85.

bail emphyteotique en ce sens, que nous avons vu un exemple du cas où le bailleur exerça le retrait, alors que, dans le dernier état du droit féodal, il est convenu que cette espèce de bail, ainsi que le bail à rente foncière, n'y était pas sujet1. Qu'induire de là? C'est que depuis le XIVe siècle, le bail emphytéotique s'était modifié de manière à priver le bailleur du retrait. Mais il n'en reste pas moins acquis qu'à cette époque, et antérieurement, il existait à son profit. Cela, d'ailleurs, ne fait rien à la question de savoir si toute personne usait et pouvait user du bail emphytéotique. Or l'affirmative est hors de doute.

157. J'ai dit que cette espèce de bail avait lieu à des conditions modérées. La prestation était ordinairement en argent. D'autres fois elle se faisait en nature, c'est-àdire, en denrées telles que blé, vin, huile. D'autres fois on y ajoutait quelques produits de la basse-cour. Ainsi, dans un bail à emphytéose du 8 décembre 1378, une vigne hermas, vineam hermam, ce qui signifie, je crois, une vigne plantée dans un sol maigre, est baillée moyennant l'acapit d'une poule, unius galline, et la rente de deux coupes et demi de vin, à prendre à la cuve, solvendarum anno quolibet ad tinam dicti Guillelmi3.

2

158. Le bail emphyteotique était toujours perpétuel. Je ne connais pas d'exemple du contraire. Tous les actes que j'ai consultés, et il m'en a passé beaucoup par les mains, portent, dedit ad acapitum seu emphyteosim perpetuam. A cette époque, au moins dans le pays dont

Pocquet de Livonière. Traité des fiefs, p. 455.

2 Mesure usitée dans la Haute-Provence, contenant 20 litres. 3 Notaire Jean Autric. Notaire Mille, à Manosque.

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je rapporte les usages, la perennité était la conséquence obligée de l'acapit ou emphyteose.

159. Toutes les terres n'étaient pas possédées sous cette tenure quasi féodale. Il en était beaucoup qui ne devaient de prestation à personne. C'étaient de véritables francs aleux. Quand une pareille terre était aliénée, le vendeur savait bien le dire, et le contrat portait que la propriété était libre, franca de omni servitio. D'ailleurs, il portait en lui la marque évidente de la franchise, puisqu'il n'y était question ni de cens ni de lod.

160. Dans les idées de nos ancêtres, le bail à emphytéose constituait une véritable aliénation, la propriété échappait pour toujours au bailleur et passait sur la tête du preneur, avec tous ses droits utiles, sauf le cens dont elle demeurait chargée, et le droit de lod à payer à l'occasion. Il est remarquable que, nulle part, le bailleur ne se préoccupe d'assurer le paiement de la redevance ou canon, en stipulant la résolution du contrat à défaut de paiement de la redevance. Il en était de même pour la vente. Pour l'un et pour l'autre contrat, on s'en rapportait aux principes généraux du droit, qui ont toujours tenu l'aliénation pour résoluble, en cas de non paiement du prix.

161. Quelquefois la redevance était double. Il y avait le cens et le sur-cens. On entendait par ce dernier mot un cens que quelqu'un s'était retenu sur un héritage déjà chargé envers un autre d'un premier cens1. C'était, j'imagine, la redevance que le premier emphyteote imposait à un second emphytéote en lui transmettant la propriété. Je trouve un exemple de sur-cens dans un

1 Pothier, traité du cens, t. 1, p. 175, no 7. — T. 9, p. 756, no 13.

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