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Varages, confirma cette vente, investit la veuve Ardouin, et toucha et quittança le lod ou trézain1. L'exemple est concluant. Il prouve, jusqu'à l'évidence, que le droit de percevoir lod n'était pas seulement l'apanage de la noblesse.

166. Cet acte mentionne un point de fait important, relatif à la capacité de la femme mariée pour contracter. Il parait qu'il était d'usage que femme et mari ne pussent s'obliger par le même acte. En effet, le notaire fait renoncer les vendeurs, entre autres, juri dicenti virum et uxorem in eodem contractu, seu instrumento, obligari non posse, et la femme spécialement, beneficii legis Julie de fundo dotale. Il convenait d'en prendre

note.

167. Remarquons que lod et trézain étaient synonymes. Les actes que j'ai cités s'en expliquent. En voici d'autres aussi explicites.

<< Laudavit et confirmavit suum que trezenum habuisse confessus fuit. »

<< Precio triginta florenorum auri francorum a prestatione laudimii sive trezeni 3. >>

Je ne crois pas qu'il puisse s'élever de doute raisonnable sur le sens que je donne au mot laudum employé dans les anciens actes. Ce mot qui signifiait d'abord approbation, a ensuite plus particulièrement désigné une espèce d'impôt établi au profit du seigneur féodal, lequel s'élargit au bénéfice de toutes sortes de personnes, en vertu de cette loi de notre nature qui veut que tout abus tende perpétuellement à augmenter. Quant

1 Notaire G. Autric, fo 40. ro.

Notaire Mille, à Manosque.

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2 Acte sans date, notaire Hospiti. Notaire Mille, à Manosque. 3 Acte 17 août, notaire Hospiti. - Notaire Mille, à Manosque.

au sens du mot laudum ou laudimium, il est clairement expliqué par du Cange, « laudatio, quod domino feudi pro facultate alienandi feudum, exsolvitur1. »

Ajoutons que par un édit, les droits de lod avaient été rendus uniformes en Provence.

Dans l'origine, ils étaient à Forcalquier de 20 deniers par livre 3; plus tard ils furent réduits à 12 deniers.

168. Le contrat d'échange n'avait rien de remarquable. Seulement quand les propriétés échangées étaient possédées à titre d'emphytéose, il fallait que la convention fut approuvée par le seigneur foncier, qui percevait le droit de lod. Quant à lui, l'échange constituait une aliénation. « Hac vero die presenti dictus Guillelmus Marini, veniens ad presenciam prefati domini Jacobi, humiliter supplicavit eidem quod sibi predictam permutationem terre supradicte laudaret et licenciam daret accipiendi possessionem ipsius. Nec non confessus fuit predictus dominus Jacobus habuisse laudimium, ad dictorum viginti quinque solidorum precium supradictum. » C'est-à-dire, que le droit de trezain que touchait le seigneur s'élevait à vingt-cinq sous : « dato precio dicte terre ratione trezeni vigintiquinque solidorum 5. »

169. Dans cet acte, ce sont deux femmes qui contractent, sous l'autorité et en présence de leurs maris. Le

1 Gloss. sup. vo Laudatio.

2 Archives de Reillanne, registre viridis, fo 69, 1re armoire, 4e et 5e cases.

3 Archives des Bouches-du-Rhône, viridis, fo 79.

4 Acte du 3 février 1343. Notaire G. Autric, fo 5

à Manosque.

5 Acte du 3 février 1343. Notaire G. Autric, fo 5 à Manosque.

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Notaire Mille,

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suivant contient la ratification donnée par une femme à une aliénation de bien dotal que le mari avait faite. C'est la femme qui parle :

« Que Caterina presens, sciens, prudens et intelligens, que dixit et fecit dictus maritus ejus, et confitens quod dicta venditio facta de voluntate et mandato ejusdem, ipsam venditionem habuit ratam et gratam et pro majoris cautele suffragio, ipsam faciti de novo, promitens de evictione teneri, et defendere dictum emptorem, et omnes expensas que fierent ratione deffencionis vel evictionis integraliter resarcire, de quibus stabit verbo ipsius domini Jacobi vel procuratoris ipsius. Promisit insuper mihi notarii, stipulanti et recipienti, nomine quo supra, quod si aliquod dampnum vel alique expense fierent, et evenirent dicto emptori, quod dictus dominus Jacobus posset eam in quocunque loco et in quacunque curia, et coram quocunque Judice convenire, et specialiter in curia Reginali Magistrorum rationalium civitatis Aquensis, et solvere et restituere integraliter omnia in quibus fuerit condempnata; obligans propterea omnia bona sua presencia et futura, renunciando Legi Julie de fundo dotali et omni auxilio muliebri; et juri et exceptioni per que posset contra venire; et juravit omnia et singula supradicta efficaciter observare et integraliter adimplere. Volens quod de predictis fiat unum vel plura publica instrumenta, dictanda tociens quosciens opus fuerit ad utilitatem ipsius domini Jacobi, et tradenda ipsi vel procuratori suo; de quibus ego dictus Guillelmus notarius, ad preces et mandatum. dictorum conjugium, de predictis notam recepi et redigi in mundum et publicum instrumentum1.

1 Acte du 17 avril 1343. Notaire G. Autric, fo 9. Notaire Mille, à Manosque.

170. Indépendamment de la garantie, dont l'étendue était laissée à la discrétion du garanti, et de la renonciation faite par la femme à se pourvoir contre l'aliénation en vertu de la loi Julia; l'acte contient cette singularité, que le notaire prend sur lui de stipuler pour et au nom de la partie intéressée. Ce n'était pas une licence de la part de Guillaume Autric qui, en cela, ne faisait que se conformer à un usage reçu. En effet, toutes les fois que la partie, au profit de laquelle la stipulation était faite, n'était pas présente, le notaire acceptait et recevait pour elle, tanquam persona publica. C'était de style invariable.

171. Une clause fort remarquable se trouve encore dans cet acte, ainsi que dans tous ceux qui ont été passés postérieurement. Quand la matière le comportait, la partie obligée soumettait ses biens présents et à venir à certains tribunaux qu'elle spécifiait. Quelquefois la soumission était générale, et comprenait tous les tribunaux de Provence. D'autres fois elle était restreinte à quelques-uns, et excluait nommément certains autres. Les exclusions les plus fréquentes s'appliquaient, soit à la Cour des comptes, curia camera rationum; soit aux tribunaux ecclésiastiques. Mais les prêtres qui contractaient ne manquaient jamais de se soumettre spécialement à ceux-ci. La raison en est facile à comprendre.

172. Au commencement les parties ne s'obligeaient que sur leurs biens. Plus tard elle soumirent encore leur personne à l'action des tribunaux, c'est-à-dire, qu'elles se mirent, par une stipulation expresse, dans les liens de la contrainte par corps. Se submiserunt custodibus et carceribus curiarum Reginalium. Nous

en verrons de fréquents exemples. Mais pourquoi cette soumission, tantôt générale, tantôt spéciale, et tantôt exclusive? Elle avait nécessairement sa raison d'être.

173. Il est indubitable, qu'alors comme aujourd'hui, chaque tribunal exerçait sa juridiction dans un ressort déterminé. C'étaient, d'abord, les justices seigneuriales; puis le tribunal supérieur de la viguerie, qu'on désignait sous le nom de curia regia; ensuite les tribunaux des premières et secondes appellations siégeant à Aix, puis la Cour des comptes, que j'ai toujours vu nommer curia camera rationum1. Enfin le sénéchal, devant lequel on recourait en dernière analyse.

174. On comprend très bien comment il se faisait que les parties fussent soumises, pour l'exécution de leurs conventions, aux tribunaux de leur domicile, et, par une conséquence naturelle, à ceux qui avaient pouvoir de connaitre des sentences des juges inférieurs. Mais ce qu'on ne s'explique pas, c'est qu'une stipulation expresse fut nécessaire pour cela. Evidemment, le tribunal du domicile, si la cause était personnelle, ou celui de la situation des biens, si elle était réelle, devait avoir juridiction. Il n'était pas besoin de s'y soumettre. Cependant la chose se faisait toujours. Il doit y en avoir une raison qui m'échappe.

On comprend encore, quoique cela fasse difficulté, que les parties pussent se soumettre à des tribunaux étrangers, soit sous le rapport du domicile, soit sous celui de la situation des biens. A la rigueur, cette dévolution du pouvoir judiciaire se conçoit, et il paraît que les tribunaux de Provence l'acceptaient sans réclamation. Je crois même qu'ils l'accueillaient avec plaisir, car 1 Piton, Histoire d'Aix, p. 519.

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