J'accepte avec plaisir un présage si doux. Que tardons-nous? Faisons ce qu'on attend de nous : Mais plutôt demeurons. Que faisois-je? Est-ce à moi, Soit vertu, soit amour, mon coeur s'en effarouche. ARSACE. La haine sur Titus tombera tout entière. Non, ne la voyons point; respectons sa douleur: Ah! la voici, seigneur, prenez votre parti, Hé quoi, seigneur! vous n'êtes point parti! ANTIOCHUS. Madame, je vois bien que vous êtes déçue, Il vous cherche vous seul. Il nous évite tous. ANTIOCHUS. Il ne m'a retenu que pour parler de vous. BÉRÉNICE. De moi, prince? ANTIOCHUS Qui, madame BÉRÉNICE. Et qu'a-t-il pu vous dire? ANTIOCHUS. Mille autres mieux que moi pourront vous en instruire. Quoi! seigneur!... BÉRÉNICE. ANTIOCHUS. Suspendez votre ressentiment. D'autres, loin de se taire en ce même moment, Mais moi, toujours tremblant, moi, vous le savez bien, Adieu, madame. BÉRÉNICE. O ciel! quel discours! Demeurez. Prince, c'est trop cacher mon trouble à votre vue : Vous voyez devant vous une reine éperdue, Qui, la mort dans le sein, vous demande deux mots. Vous craignez, dites-vous, de troubler mon repos; Et vos refus cruels, loin d'épargner ma peine, Excitent ma douleur, ma colère, ma haine. Seigneur, si mon repos vous est si précieux, Si moi-même jamais je fus chère à vos yeux, Éclaircissez le trouble où vous voyez mon âme : Que vous a dit Titus? ANTIOCH US. Au nom des dieux, madame.... Quoi! vous craignez si peu de me désobéir! ANTIOCHUS. Je n'ai qu'à vous parler pour me faire hair. Je veux que vous parlez. BÉRÉNICE. ANTIOCHUS. Dieux! quelle violence! Madame, encore un coup, vous louerez mon silence. BÉRÉNICE. Prince, dès ce moment, contentez mes souhaits, ANTIOCHUS. Madame, après cela, je ne puis plus me taire. Hé bien, vous le voulez, il faut vous satisfaire. BÉRÉNICE. Quoi? ANTIOCH US. De vous déclarer Qu'à jamais l'un de l'autre il faut vous séparer. BÉRÉNICE. Nous séparer! Qui? Moi? Titus de Bérénice? ANTIOCHUS. Il faut que devant vous je lui rende justice : BÉRÉNICE. Nous séparer! Hélas, Phénice! PHÉNICE. Hé bien, madame, Il faut ici montrer la grandeur de votre âme. BÉRÉNICE. Après tant de sermens, Titus m'abandonner! Titus, qui me juroit.... Non, je ne le puis croire : ANTIOCHUS. Quoi! vous pourriez içi me regarder.... BÉRÉNICE. Vous le souhaitez trop pour me persuader. Non, je ne vous crois point. Mais, quoi qu'il en puisse être, Pour jamais à mes yeux gardez-vous de paroître. (A Phénice.) Ne m'abandonne point dans l'état où je suis. Hélas! pour me tromper je fais ce que je puis. Ne me trompé-je point? L'ai-je bien entendue? ARSACE. Moins que jamais, seigneur, il faut vous éloigner. ANTIOCHUS. Moi! je demeurerai pour me voir dédaigner? Et dans quel temps encor? dans le moment fatal ARSACE. Et de quel soin, seigneur, vous allez-vous troubler? Dans huit jours, dans un mois, n'importe, il faut qu'il passe. Demeurez seulement. ANTIOCHUS. Non, je la quitte, Arsace ACTE QUATRIÈME. SCENE I. - BÉRÉNICE. “་་་ Phénice ne vient point! Momens trop rigoureux, BÉRÉNICE. Chère Phénice, hé bien! as-tu vu l'empereur? PHÉNICE. Qui, je l'ai vu, madame, Et j'ai peint à ses yeux le trouble de votre âme. J'ai vu couler des pleurs qu'il vouloit retenir. Vient-il? BÉRÉNICE. PHÉNICE. N'en doutez point, madame, il va venir. Mais youlez-vous paroître en ce désordre extrême ? Remettez-vous, madame, et rentrez en vous-même Laissez-moi relever ces voiles détachés, Et ces cheveux épars dont vos yeux sont cachés. Laisse, laisse, Phénice: il verra son ouvrage. |