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PRÉFACE.

Le 20 mai 1856, la Société d'histoire et d'archéologie de Genève perdait celui de ses membres qui, dès l'origine, avait pris la part la plus considérable à ses travaux et contribué le plus largement à son activité scientifique nous avons nommé Edouard Mallet. Unissant à une grande facilité de travail des connaissances étendues et variées, il n'était demeuré étranger à aucune partie de l'histoire de notre pays et s'était spécialement consacré à la période de cette histoire antérieure au seizième siècle. Il avait entrepris, sur cette période si obscure, un ensemble d'investigations et d'études qu'il poursuivait dans les conditions imposées de nos jours à la science historique. Il ne prenait en effet pour base de ses recherches que des documents authentiques ou des récits contemporains des temps qu'il voulait étudier, et c'était en puisant, sans système préconçu, aux véritables sources de l'histoire, qu'il s'efforçait de remettre en lumière non-seulement les faits d'ordre politique, mais encore les institutions civiles et la vie intime des populations. C'est cet esprit d'impartialité et de scrupuleuse critique qui a valu

aux opuscules et aux mémoires historiques de Mallet une faveur méritée.

En vue du but qu'il s'était proposé, Mallet avait exploré tous les ouvrages renfermant des données certaines sur l'ancienne histoire de Genève et il avait réuni, en outre, avec une ardeur infatigable, une multitude vraiment étonnante de matériaux encore inédits. Actes publics et privés, comptes financiers, sentences judiciaires, registres des Conseils et des corporations religieuses: tous ces documents, transcrits de sa main dans diverses archives suisses et étrangères, comprenaient, au moment de sa mort, plusieurs milliers de pages d'une écriture serrée, monument palpable de sa prodigieuse activité. Malheureusement il n'a pu utiliser qu'une très-petite portion de cette mine abondante de matériaux, car il a publié à peine quatre cents des documents compris dans sa collection. Les uns ont été édités par lui dans des sections distinctes de quelques-uns de nos volumes, et comprennent entre autres toutes les pièces des Archives de Genève antérieures à 1250. Les autres ont été imprimés, comme pièces justificatives, à la suite des mémoires approfondis qu'il a consacrés à l'étude de plusieurs points importants et particulièrement difficiles de l'histoire de Genève, notamment l'élection des Evêques, le développement des franchises municipales, l'influence de la Maison de Savoie et l'épiscopat d'Aimon du Quart.

Ces publications, fort importantes et justement appréciées, ne s'appliquaient, comme nous l'avons dit, qu'à une faible étendue du champ que Mallet se proposait de parcourir, et la majeure partie des documents rassemblés par ses soins demeuraient inédits. Tous ces trésors, résultat d'un labeur de vingt années, devaient-ils être entièrement perdus pour la science? Les amis des études historiques ne tardèrent pas à exprimer le désir que les matériaux recueillis par notre collègue fussent mis à la portée du public. La confiance et la libéralité de Madame Edouard Mallet ont permis à la Société d'histoire et

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d'archéologie de Genève de travailler à la réalisation de ce

vœeu.

En se chargeant d'une mission aussi étendue qu'honorable, notre Société a dû se demander quelle marche il lui convenait d'adopter. Mallet venait d'achever un mémoire sur l'épiscopat d'Aimon du Quart (Février 1304-Octobre 1311) et il avait l'intention de continuer, dans une série de monographies analogues, l'étude approfondie de l'histoire de Genève au quatorzième et au quinzième siècle. Fallait-il suivre le même plan, et, tout en renonçant à remplacer notre collègue au point de vue de l'élaboration historique, mettre au jour les documents qu'il avait réunis sur les évêques postérieurs à Aimon du Quart? ne convenait-il pas mieux de diriger d'abord notre attention sur les temps les plus anciens de l'histoire du pays et d'affermir ainsi nos premiers pas, avant de tenter des excursions dans les siècles suivants? Cette dernière marche a paru la plus logique. La Société a donc décidé qu'elle arrêterait la première série de ses travaux à la fin de l'année 1311.

Pour la période antérieure à cette date, on découvrait encore dans les portefeuilles de Mallet plus de trois cents pièces inédites. Un nombre à peu près égal de chartes imprimées par lui se trouvent disséminées dans les volumes qui précèdent celui-ci. Les autres documents se rapportant aux mêmes siècles doivent se chercher dans les écrits des historiens et géographes anciens, dans les collections de bulles des Papes ou des Conciles, dans les recueils de diverses Sociétés et dans d'autres ouvrages rares ou volumineux, tels que ceux de Guichenon, Spon, Besson, Valbonnais, Cibrario et Promis, Wurstemberg, etc. En présence d'une pareille dispersion de matériaux, on pouvait avoir la pensée de reproduire dans un seul recueil non-seulement les pièces inédites, mais en même temps toutes les chartes imprimées, servant de base authentique à l'histoire du diocèse de Genève; de former ainsi, comme on l'a fait récemment dans d'autres pays, une

grande collection que nous eussions également eu le droit de nommer: Monuments de l'histoire de Genève, ou Codex diplomaticus genevensis. Mais la réflexion a promptement démontré

que si cette publication eût peut-être été utilement entreprise et bien conduite par Mallet au début de ses travaux historiques, elle ne pouvait plus, lorsqu'une grande partie de l'œuvre avait été accomplie sous une autre forme, offrir une valeur scientifique proportionnée aux soins et aux dépenses qu'elle eût entraînés. Ceux qui basent leurs recherches sur les textes, consulteront toujours plus volontiers les ouvrages originaux. Quant aux personnes beaucoup plus nombreuses qui, tout en s'intéressant d'une manière sérieuse à l'histoire nationale, se préoccupent moins des termes mêmes des documents que des données qu'ils renferment, elles préféreront sans doute un ouvrage moins volumineux, d'une acquisition plus facile, et qui contienne, dans une langue plus usuelle que celle des vieilles chartes, le recueil complet et l'analyse exacte des faits et des renseignements historiques puisés aux sources.

Afin de réaliser ce dernier plan et de mettre en même temps entre les mains des historiens la partie inédite des investigations de Mallet, pour les années antérieures à 1312, la Société a estimé que deux travaux devaient être entrepris de concert, savoir la mise au jour des chartes non encore publiées et la rédaction d'un Régeste ou Répertoire analytique et chronologique de tous les documents imprimés relatifs à l'histoire de Genève.

Telles sont les deux publications dont le soin nous a été confié; elles ont été poursuivies simultanément.

L'une et l'autre devant être comprises dans le même cadre, nous avons jugé que, pour la période dont il s'agissait, les limites territoriales ne pouvaient s'arrêter ni à la ville de Genève ni aux possessions temporelles de son évêque, mais devaient embrasser l'ensemble du diocèse. On sait que ce

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