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le pays et tombe entre les mains de ses adversaires1.

La mort de Louis de Tarente, survenue le 26 mai 1362, compliqua la situation. Ses frères, redoutant un nouveau mariage de la reine avec Louis de Duras, précipitèrent la fin de ce prince. Urbain V conseilla à Jeanne de s'unir à Philippe, le fils du roi Jean Il le Bon. La reine repoussa son avis et déclara qu'elle préférerait à cette union la retraite dans un ermitage 2. L'infortunée avait vécu en discorde constante avec Louis de Tarente. Elle crut trouver l'époux de ses rêves en la personne de Jayme III de Majorque qui passa quelques mois avec elle et trouva la mort en Roussillon. Sentant qu'elle avait besoin d'un soldat énergique pour défendre sa couronne, le 28 décembre 1375, à Avignon, elle contracte par procureurs une quatrième alliance avec un seigneur de petite lignée, Othon de Brunswick 3.

La malédiction divine semblait peser sur la maison d'Anjou. Jeanne et sa sœur Marie perdirent leurs enfants. Marie elle-même (1366), puis Robert et Philippe de Tarente (1364 et 1373) moururent à leur tour. Louis de Hongrie ne cachait pas son impatience de succéder à sa belle-sœur. Le royaume de Naples était livré de plus en plus à l'anarchie. Le SaintSiège y envoyait des légats qui demeuraient impuissants. Ils prédisaient des catastrophes qui, en effet, se produisirent lors de la révolution de 1381*.

1. G. DE BLASIIs, article cité, p. 379 et sq.; F. Tocco, Studii Francescani, Naples, 1909, p. 339-352.

2. CERASOLI, dans ASPN, t. XX (1895), p. 73-75.

3. SAUERLAND, Quellen, t. VIII (1905), p. 206-216.

4. CERASOLI, recueil cité, t. XXIV (1899), p. 325-328, et MARTIN-CHABOT, art. cité.

CHAPITRE II

LA PAPAUTÉ ET L'EMPIRE

? 1.

Henri VII et l'expédition d'Italie.

Le 1er mai 1308, l'assassinat d'Albert de Habsbourg sur les rives de la Reuss ouvrit la succession au trône

BIBLIOGRAPHIE.

Sources: Les relations diplomatiques de Clément V et Henri VII ont été bien éclairées par les publications de J. SCHWALM, Reise nach Italien im Herbst 1898 dans Neues Archiv, t. XXV (1900), p. 724-735; Reise nach Frankreich und Italien im Sommer 1903, ibid., t. XXIX (1904), p. 585-595, 606-632; Nachlese zu früheren Reiseberichten, 1904, ibid., t. XXX (1905), p. 417-447; Beiträge zur Reichsgeschichte des 14 Jahrhunderts aus dem Vaticanischen Archive, ibid., t. XXV (1900), p. 559-570; Neue Aktenstücke zur Geschichte der Beziehungen Clemens' V zu Heinrich VII dans Quellen, t. VII (1904), p. 220250 et de H. OTTO, Die Eide und Privilegien Heinrichs VII und Karls IV mit ungedruckten Aktenstücken, ibid., t. IX (1906), p. 316-378. P. GACHON, Étude sur le ms. G. 1036 des Archives de la Lozère; pièces relatives aux débats du pape Clément V avec l'empereur Henri VII, Montpellier, 1894 (mémoires de jurisconsultes préparatoires aux Clémentines Romani principes et Pastoralis cura).

Les documents relatifs à l'expédition d'Italie sont insérés dans F. BONAINI, Acta Henrici VII, Florence, 1877. — G. DÖNNIGES, Acta Henrici VII, Berlin, 1839. J. SCHWALM, Constitutiones et acta publica, t. IV, pars prior (Monumenta Germaniae; Legum sectio IV), Hannover, 1906. E. WINKELMANN, Acta Imperii inedita, Innsbruck, 1885, A. THEINER, Codex, t. I.

t II, p. 213-268.

Une relation de l'expédition de Henri en Italie a été écrite par l'é. vêque Nicolas de Butrinto. l'édition de BALUZE, Vitae, t. II, col. 11431230 est préférable à celle de E. HEYCK, Innsbruck, 1888; cf. aussi ALBERTINO MUSSATO, De gestis Heinrici VII.

Monographies.

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G. HEIDEMANN, Die Konigswahl Heinrichs von Luxemburg im Jahre 1308 dans Forschungen zur deutschen Geschichte,

d'Allemagne. Philippe le Bel, ne pouvant espérer la couronne impériale pour lui-même, essaya de la faire poser sur la tête de son frère Charles de Valois et se hâta de briguer les suffrages des princes électeurs en sa faveur. Pour réaliser son rêve ambitieux et étendre son hégémonie en terre d'Empire, l'appui de la papauté lui était indispensable. Le roi de France s'empressa de le solliciter avec son indiscrétion coutumière, à la seconde entrevue de Poitiers.

Clément V se trouva dans un réel embarras : s'il n'osait s'aliéner le monarque, il craignait aussi, en accroissant la puissance de Philippe, de ne pouvoir plus se dérober à une protection qui, de jour en jour, devenait plus lourde et plus gênante. Il sentait le besoin d'opposer au roi un Empereur. Il eut grand soin, en conséquence, d'éluder les demandes du souverain. Il intervint, à dessein, trop tard et très mollement, en faveur de Charles de Valois et laissa pleine liberté aux électeurs de poursuivre leurs intérêts na

t. XI (1871), p. 43-78; Zur Geschichte und Politik Peters von Aspalt, ibid., t. IX (1869), p. 259-335. R. POEHLMANN, Zur deutschen Konigswahl vom Jahre 1308, ibid., t. XVI (1876), p. 357-364 (avec documents); Der Römerzug Kaiser Heinrichs VII und die Politik der Kurie, des Hauses Anjou und der Welfenliga, Nüremberg, 1875. A. LEROUX, La royauté française et le Saint-Empire romain dans Revue historique, t. XLIX (1892), p. 241-288 (article vieilli). O. MASSLOW, Zur Romfahrt Heinrichs VII, Tübingen, 1891. G. SOMMERFELDT, Die Romfahrt Kaiser Heinrichs VII (1310 bis 1313), Konigsberg, 1888; Die Konigswahl Heinrichs von Luxemburg, Strasbourg, 1891. — K. WENCK, Clemens V und Heinrich VII, Halle, 1882 (avec documents; ouvrage encore excellent); Französischen Werbungen um die deutsche Königskrone zur Zeit Philipp's des Schönen und Clemen's V dans Historische Zeitschrift, t. LXXXVI (1901), p. 253-269. -F. GREGOROVIUS, Storia della citta di Roma nel Medio Evo, Roma, 1901, t. III, p. 210-259. G. LIZERAND, Clément V et Philippe IV le Bel, Paris, 1910, p. 161-249, 349-360 (concerne surtout les relations diplomatiques de Henri VII, Philippe le Bel et Clément V). W. ISRAEL, König Robert von Neapel und Kaiser Heinrich VII. Zweiles Kapitel. Heinrich VII und Robert; Die Ereignisse bis zur Krönung Heinrichs in Rom, Berlin, 1903. V. SAMANEK, Zur Beurteilung der Herrschaftsverhältnisse Kaiser Heinrichs VII in Italien dans Historische Vierteljahrschrift, t. XII (1909), p. 77-91.

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tionaux. Sa politique triompha. Le 27 novembre 1308, Henri de Luxembourg était élu; et le pape, au grand dépit de Philippe le Bel, s'empressait de confirmer l'élection (26 juillet 1309) et de fixer la cérémonie du couronnement, à Saint-Pierre de Rome, pour le 2 février 1312'.

Issu d'une famille sans prestige, Henri VII s'imagina acquérir l'autorité qui lui manquait en ceignant la couronne impériale et en rétablissant le Saint Empire romain. Sa pensée première fut de descendre en Italie. L'annonce de ses projets souleva l'enthousiasme des Gibelins. De parole facile et d'abord agréable, épris de justice, magnanime et chevaleresque, Henri s'illusionnait grandement sur la mission qu'il se croyait destiné à remplir. Il rêvait de restaurer la paix dans la péninsule; mais, jusqu'alors, les expéditions des empereurs en Italie n'avaient abouti qu'à provoquer la haine des factions qui désolaient les cités.

Les préparatifs d'Henri VII inquiétèrent Clément pour le pouvoir que le Saint-Siège exerçait encore en Italie, et que le transfert de la papauté sur les bords du Rhône avait fortement ébranlé. A l'empereur il opposa immédiatement le roi Robert de Naples, autour duquel s'était rallié le parti guelfe. Bien plus, le 19 août 13102, une bulle nommait le prince recteur de la Romagne, province récemment cédée au Saint-Siège par l'Empire et dont le retour aux mains de ses anciens maîtres pouvait être redouté. Le pape n'arrêta pas là ses mesures de défiance : à Lausanne, le 11 octobre 3, en présence de légats, Henri jura fidélité à l'Église, confirma tous les privilèges concédés à celle-ci par ses prédécesseurs, promit de respecter

1. G. LIZERAND, p. 160-180.

2. Regesta Clementis V, n. 10347. 3. DÖNNIGES, t. II, p. 123,

l'intégrité des États pontificaux et de n'y exercer aucun acte de juridiction. Pour masquer ses manœuvres, Clément avait auparavant, le 1er septembre', invité le clergé, la noblesse et les villes d'Italie à accueillir amicalement le roi des Romains. Il semble même un moment lui assurer son concours, en déléguant près de lui quelques-uns de ses cardinaux.

La première chevauchée de la petite armée impériale elle comptait cinq mille hommes s'annonça glorieuse. Guelfes et Gibelins, dans un élan d'enthousiasme, oublièrent leurs vieilles querelles et accoururent au-devant de Henri lui rendre des honneurs. L'entente dura peu. Quoi que désirât le roi des Romains, du seul fait de la pénétration sur le sol italien, il devenait le chef du parti gibelin et, comme tel, était contraint d'épouser ses querelles. Le 12 janvier 1311, six jours après qu'il eut reçu la couronne de fer dans l'église Saint-Ambroise, le sang coulait dans les rues de Milan et les della Torre se trouvaient dépossédés de la seigneurie.

La chute rapide de cette puissante famille guelfe suffit à révolutionner l'Italie. Lodi, Crémone, Crema, Brescia fermèrent leurs portes à l'empereur. D' «< ange de paix » Henri, par la force des choses, se convertit en un conquérant que l'exaltation guelfe compara à Barberousse et à Frédéric II. Les sièges sanglants de Crémone et de Brescia frappèrent les esprits. Les guelfes empêchèrent le passage des troupes impériales en Toscane et les obligèrent à se replier sur Gênes. Là Henri s'embarqua le 16 février 1312, pour aborder au port de Pise, le 6 mars, et gagner Rome, le terme de son voyage, par le littoral de la Méditerranée.

Les plus amers déboires l'attendaient dans la Ville

1. RINALDI, 1310, § 9 et BONAINI, t. I, doc. XXVI-XXXVIII.

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