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VI.

Les recueils d'anecdotes.

Le livre des Choses

d'Israël de Wahb ibn Mounabbih.

Comme nous l'avons déjà dit (p. 14), on trouve dans les Mille et une nuits des histoires édifiantes, dont des Israélites sont les héros; notamment, une collection de dix-huit anecdotes. Quoi de plus naturel que de penser que c'est un juif qui les y a insérées? car les Arabes, qui n'aiment pas les juifs, n'ont guère dû songer à les glorifier. Et si c'est un juif, ce pourrait bien être l'auteur (l'éditeur, si l'on préfère) dont nous avons si longuement parlé.

Ces contes, dont le titre annonce qu'ils s'occupent de ceux qui ne se laissent pas séduire par le monde (opposé à la vie éternelle) sont extraits d'un livre de Wahb ibn Mounabbih, comme le prouve un passage du Al tibr al masbouk 1, qui lui attribue formellement la première de nos historiettes.

Ce livre de Wahb ne peut être que le fameux ouvrage des Choses d'Israël. Ce recueil, sur lequel H. Halfa ne donne d'ailleurs aucun détail, s'occupe, comme l'indique le nom qui figure au titre, non des juifs, mais des Israélites, sectateurs de la vraie religion et reconnaissant le

1 Édition de 1306, p. 41.
2 Edition FLUEGEL, 5, 40.

Messie'. Comme il est permis de le croire quand on examine les nombreuses citations qu'en font les Arabes ou les emprunts qu'ils donnent parfois sans citer leur auteur, mais qu'il est facile de reconnaître, c'est un recueil d'historiettes, généralement assez brèves, dont le but est de mettre en lumière l'idée juive de la rétribution divine en ce bas-monde : toute bonne action, surtout l'aumône, est récompensée ici-bas et même généralement assez tôt; toute mauvaise action est punie.

Vu le grand nombre de ces citations et de ces emprunts, ce livre doit avoir eu chez les Arabes et, par leur intermédiaire, chez d'autres, un succès considérable 2.

Mais il n'est pas de l'invention de Wahb, semble-t-il ; Wahb en aura certainement découvert le modèle dans la littérature hébraïque. Nous trouvons, en effet, dans la Mélusine, la mention d'un livre juif, le Hibbour maasiot, qui est, nous semble-t-il, lui-même s'il remonte au delà du XIII° siècle, ou dont le prototype, s'il ne dépasse pas cette époque, est la source principale du livre de Wahb.

Ce livre juif a certainement été populaire chez les

1 Sur cette distinction, voir LANE, Thousand and one Nights, 2, p. 456, note 33.

2 On trouvera au troisième appendice un essai de reconstitution de ce livre.

32, p. 569-574: Cinq contes juifs (par ISRAEL LÉVI.) « Les cinq historiettes suivantes, dit M. Lévi, sont extraites du Hibbour maasiot, recueil anonyme de contes, imprimé plusieurs fois au XVIe et au XVIIe siècles et dont il existe, entre autres, un manuscrit du XIIIe siècle. Elles n'ont aucune racine dans la littérature talmudique et midraschique en existe-t-il ailleurs d'analogues? >>

Nous avons reproduit ces cinq contes au quatrième appendice.

Israélites et, contrairement à ce que pense M. Lévi ', il doit avoir des racines dans la littérature talmudique; du moins plusieurs citations que nous donnons sous les contes du livre des Choses d'Israël nous semblent le prouver.

Quant à la date de ce livre juif, nous la croyons très ancienne. Il nous semble permis de penser qu'il était connu des juifs qui vivaient autour de Mahomet et qui y auront puisé certaines historiettes dont on retrouve la trace dans le Coran3.

Voir la note précédente et cfr. PERLES, Monatsschrift f. Gesch. u. Wiss. des Judenthums, 22, 17 et 33.

2 Surtout les citations du no 44.

3 Voir plus bas le livre des Choses d'Israël, nos 33, 50, 55, 62 et 67. Cfr. nos 43 et 44.

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VII.

L'auteur juif n'est-il pas le pseudo-Maïmonide ?

Ne serait-il pas possible de découvrir qui est ce juif converti, dernier éditeur des Mille et une nuits?

Il vaut peut-être la peine d'en faire l'essai, parce que le champ des recherches est assez restreint. Il est certain, d'une part, qu'il y a eu peu de juifs convertis à l'islamisme; d'autre part, il n'est pas douteux non plus que les juifs n'ont jamais eu beaucoup de goût pour les Mille et une nuits.

Or il existe un juif qui a eu ce goût, puisqu'il a traduit de l'arabe ou plutôt inventé un vrai conte des Mille et une nuits nous voulons parler du pseudo-Maïmonide.

Et le pseudo-Maïmonide, qui goûtait tant l'esprit arabe, n'a-til pas fini par se convertir à l'islamisme et, continuant ses travaux de romancier, n'a-t-il pas écrit les contes nouveaux des Mille et une nuits?

Pour donner quelque appui à cette conjecture, essayons de prouver les deux propositions que nous venons d'énoncer.

VIII.

Nombre restreint des juifs convertis à l'islamisme.

Le nombre des juifs convertis à l'islamisme ne semble pas fort considérable, avons-nous dit d'abord.

En effet, si dans les premiers temps de l'islam, il y a eu beaucoup de conversions de juifs ', il n'en fut plus de même dans la suite, à en juger du moins par le petit nombre des noms de convertis que citent les auteurs arabes. Si les historiens n'en mentionnent guère, les bibliographes n'en connaissent pas beaucoup plus : dans tout le livre de H. Halfa, si nous l'avons bien lu, on n'en rencontre que deux et, encore, ces deux ne s'occupent-ils pas de romans ou de contes; l'un est un juif qui, converti, s'est adonné à la poésie 3; l'autre, parvenant à de hauts emplois, a écrit une réfutation des doctrines juives'.

Pour notre question, il n'y a pas lieu, évidemment, de

1 Le traducteur arabe de GORION, Zakariyâh ibn Sacîde doit vraisemblablement, vu sa qualité de yéménite, rentrer dans la catégorie à laquelle appartient Wahb ibn Mounabbih. (H. HALFA, 2, p. 121 et GAGNIER, Josippon, Sive Josephi ben-Gorionis historiae judaicae libri sex... Oxonii... (1706, p. VIII).

2 TABARI, édit. de Leide, 1, p. 299.

de 1277, p. 113, etc.

3 H. HALFA, 3, p.

H. HALFA, 6, p.

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241-242.

471.

GAWZI, Adkiyâ, édit.

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