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ayant aperçu parmi les hérauts d'armes celui dudit duc, il le fit dépouiller des armoiries de son maître, et le chassa de sa présence, en le menaçant de la prison, s'il reparaissait à sa cour.

Après le dîner, le roi de France supplia son gendre bien aimé de rendre à l'abbaye de Saint-Denys le prieuré de Derhest en Angleterre, dont un de ses chevaliers s'était emparé. Le roi d'Angleterre y consentit volontiers; mais les Anglais s'opposèrent plus tard à l'accomplissement de cette promesse. De son côté, le roi Charles, sur la demande du roi d'Angleterre, pardonna à messire Pierre de Craon toutes les offenses qu'il avait commises envers la majesté royale en attaquant traîtreusement le connétable du roi'. En retour, le roi d'Angleterre, sur les prières du roi de France, accorda avec bonté et empressement au duc de Bretagne la restitution du comté de Richemond en Angleterre.

CHAPITRE XVII.

Présentation de la fille du roi de France.

Séparation des deux rois.

Madame Isabelle, que les deux rois avaient jusqu'alors attendue, arriva au camp avec un brillant cortège de nobles dames, parées de couronnes d'or et de pierreries, et montées sur des palefrois richement caparaçonnés. A l'aspect de tant de magnificence, on eùt cru voir cette assemblée de déesses dont parlent les poètes dans leurs fictions. Il serait trop long de décrire toute la pompe qui entourait la jeune princesse et attirait sur elle tous les regards. Je me contenterai de dire que, de mémoire d'homme, on n'avait jamais vu de reine, fiancée à un prince étranger, se rendre auprès de lui avec un tel luxe de chevaux, de chars et de litières, avec une si brillante escorte de barons et de chevaliers. Madame Isabelle arriva, au son des clairons et d'une

Suivant Froissart, Pierre de Craon dut sa grâce à l'intervention du duc de Bourgogne.

dyademate insignita, interim dum reges, modo quo superius dictum est, de tentoriis exeuntes, ad sepedictum pallum colloquium mutuum celebrarent, cum lituis et instrumentis musicis dulciter resonantibus ad locum paternum perducitur. Nec mora, ut eam honore debito prevenirent, Lencastrie et Glocestrie ducisse mox ad eam accesserunt. Cum duce eciam Aurelianensi Biturie et Burgundie duces affuerunt, qui eam in ulnis suscipientes ipsam regi Anglie Richardo honorifice obtulerunt. Quem cum bis flexis genibus salutasset, hac reverencia contentus, et sedem suam relinquens, eam cum pacis osculo dulciter amplexatus est in patris presencia, qui tunc ad eum verbum dirigens : « Ecce, inquit, filiam, fili mi, quam vobis promise<< ram, relinquo, rogans ut eam deinceps ut uxorem propriam diligatis.

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Quod cum libenti animo spopondisset, cum patri et parentibus osculum cum lacrimis prebuisset, eam ad Calesium duci fecit. Tunc regi Francie celebrans solemne convivium, eum solito curialius honoravit; nam non solum sibi dexteram sedem concessit, sed et fercula allata successive ministrari durante prandio fecit, de genere regali adhibitis comitibus, qui sibi honorifice servientes, panem et pocula regio more offerrent. Soli tunc discubuerunt reges; quibus, durante prandio, duces utriusque partis obsequiosi fuerunt, omnia ferculorum genera precedendo. Quo peracto, cum rex Anglie de manu ducis Lencastrie, et rex Francie de manu ducis Aurelianensis pocula cum speciebus sumpsissent, hec sequencia munera sibi invicem obtulerunt. Vas quidem auri solidum, speciebus porrigendis aptum, cum sumptuoso monili pater filio concessit; qui nec ingratus existens patri monile aliud presentavit. Cujus exemplum dux Lencastrie sequutus, unum aliud sibi dedit in valore excedens

musique harmonieuse, vers le pavillon de son père, au moment où les deux rois, sortis de leurs tentes, venaient de s'aboucher dans le lieu ordinaire de leurs conférences. Elle était vêtue d'une robe royale semée de fleurs de lis d'or, et portait sur sa tête un diadème d'or. Les duchesses de Lancaster et de Glocester s'avancèrent aussitôt à sa rencontre pour lui offrir l'hommage de leurs salutations. Les ducs d'Orléans, de Berri et de Bourgogne s'approchèrent également d'elle, la prirent dans leurs bras, et la présentèrent respectueusement au roi d'Angleterre. Elle le salua deux fois en fléchissant le genou. Le roi Richard, sans attendre une autre révérence, se leva et lui donua tendrement le baiser de paix en présence de son père, qui lui adressa ces paroles : « Mon fils, voici ma fille que je vous avais promise. Je «< vous la laisse, en vous priant de l'aimer désormais comme votre <<< femme. >>

Le roi d'Angleterre le promit de grand cœur, et lorsque la jeune reine eut embrassé en pleurant son père et ses parents, il la fit conduire à Calais. Il offrit ensuite au roi de France un banquet solennel, où il lui rendit les plus grands honneurs. Non seulement il le plaça à sa droite, mais encore pendant tout le dîner, il lui fit offrir les mets à mesure qu'ils étaient servis sur la table, et lui donna pour pannetier et pour échanson des comtes du sang royal qui lui prodiguèrent les plus grandes marques de respect. Les deux rois mangèrent seuls ce jour-là. Tant que dura le banquet, les ducs de France et d'Angleterre remplirent les fonctions de maîtres d'hôtel, marchant devant chaque plat qui arrivait. Après le dîner, le vin et les épices furent présentés au roi de France par le duc de Lancaster et au roi d'Angleterre par le duc d'Orléans. Puis les présents recommencèrent de part et d'autre. Le roi de France donna à son gendre un vase d'or massif pour offrir les épices, et un collier d'un grand prix. Le roi d'Angleterre, pour répondre à cette générosité, offrit aussi un collier à son beau-père. Le duc de Lancaster, imitant cet exemple, lui en offrit un autre d'une plus grande valeur, qui lui avait été donné autrefois par le roi Jean de France. Après cela, les deux rois s'avancèrent à

quod a Johanne rege Francie dono nuper acceperat. Hiis

peractis, cum reges equestres usque ad pallum processissent, et rex Anglie adamantem et saphirum ingentis valoris recipiens, et patris munera duobus dextrariis optimis compensasset tunc cum mutuo vale dicto pacis oscula miscuerunt, et sic quisque letus ad propria remeavit.

CAPITULUM XVIII.

Que duces Francie cum rege Anglie concluserunt.

Ne observanciarum ecclesiasticarum contemptor rex Anglie videretur, sed quod patri dilectissime consortis promiserat in conspectu divine majestatis cupiens corroborare, mensis novembris quarta die, Calesio ad ecclesiam sancti Nicholai in habitu regali et instrumentis precedentibus musicis accessit, perceptaque benedictione ab archiepiscopo Cantebrie, anulo ab eo benedicto dilectissimam sponsam subarravit. Peractis missarum solemniis, regine et sibi assistentibus Galicis lautum prandium celebravit, non sine muneribus eis factis; indeque secum duces Biturie et Burgundie retinens multis diebus, post habita secreta consilia, mature cum eis deliberavit que sequntur : Et primo quod in Anglie et Francie regnis tam per mare quam per terram inducie promulgarentur jurate, preciperenturque sub pena lese majestatis a cunctis inviolabiliter servari. Iterum quod pro pace amborum regnorum perpetua confirmanda, dominica qua cantaretur in Ecclesia sancta Dei Letare Therusalem, ambo duces cum ipso rege Anglie iterum convenirent. Ulterius quod, quindena Purificacionis beate Marie exacta, ambo reges ad utrumque qui se pro papa gerebat legatos mitterent, qui significantes eos viam cessionis concorditer

cheval jusqu'au pieu; là, le roi d'Angleterre reçut un diamant et un saphir d'une rare valeur, et donna en retour deux excellents destriers. Les deux princes se quittèrent alors en se donnant le baiser de paix, et retournèrent dans leur royaume satisfaits de leur entrevue.

CHAPITRE XVIII.

Conventions des dues de France avec le roi d'Angleterre.

1

Le roi d'Angleterre, voulant accomplir les cérémonies prescrites par l'Église, et confirmer en présence de la majesté divine les promesses qu'il avait faites au père de son épouse bien aimée, se rendit le 4 novembre à l'église de Saint-Nicolas de Calais, vêtu de ses ornements royaux et précédé d'un choeur de musiciens. Il reçut la bénédiction de la main de l'archevêque de Canterbury, et remit à la jeune reine l'anneau nuptial bénit par le prélat. Après la cérémonie, il offrit un magnifique banquet à la reine et aux Français qui l'accompagnaient, et les combla de présents. Il retint plusieurs jours auprès de lui les ducs de Berri et de Bourgogne, et eut avec eux des conférences secrètes, dans lesquelles ils arrêtèrent, après mûre délibération, les articles suivants : Que la trêve jurée serait publiée par terre et par mer dans les royaumes d'Angleterre et de France, et qu'il serait enjoint à tous, sous les peines réservées au crime de lèse-majesté, de l'observer inviolablement. Que, pour établir une paix perpétuelle entre les deux états, les deux ducs reviendraient conférer avec le roi d'Angleterre, le dimanche où l'Église chante Lætare Jerusalem. Que, après la quinzaine de la Purification de la Vierge, les deux rois députeraient des ambassadeurs vers les deux prétendants à la papauté, pour leur faire savoir qu'en vue de rétablir l'union ils avaient choisi d'un

Froissart dit que ce fut le jour de la Toussaint.

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