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devenir amis et alliés, s'attachèrent dès ce moment l'un à l'autre par des liens si étroits, que le duc de Bretagne, qui avait le projet d'aller en France pour marier, ainsi qu'on en était convenu, son fils aîné à la fille du roi Charles, confia sa femme, sa famille et son duché à la loyauté d'Olivier de Clisson.

CHAPITRE XVI.

Comment le duc de Berri prit possession du comté de Boulogne. — Comment il obtint de l'église de Saint-Denys un morceau de la tête de saint Hilaire de Poitiers.

Le comte de Boulogne et d'Auvergne' étant mort, le duc de Berri, oncle du roi de France, qui avait épousé madame Jeanne', nièce de ce seigneur, envoya le comte d'Étampes, son bien aimé cousin, prendre possession en son nom des comtés qui lui revenaient du chef de sa femme. Il possédait aussi le comté de Poitiers, que lui avait donné son père. De toutes les églises qui se trouvaient placées à ce titre sous sa dépendance, c'était celle de Saint-Hilaire, évêque de Poitiers, pour laquelle il montrait le plus de zèle et de dévotion. Il désirait la gratifier de quelque partie du corps de son glorieux patron. Il venait d'obtenir tout récemment des vénérables religieux de l'abbaye de Saint-Denys, où reposait ce corps, le menton du bienheureux martyr. Mais, non content de cette relique, il sollicitait depuis trois ans avec instance un petit morceau de la tête. Cette demande déplaisait à tous les religieux ; néanmoins, ils finirent par céder aux prières du duc, et remirent à monseigneur Louis, comte d'Étampes, et à messire Ascelin, trésorier de l'église de Poitiers, envoyés à cet effet, une petite partie de la tête de saint Hilaire : c'était un morceau triangulaire de la longueur et de la largeur de trois doigts environ, détaché de l'occiput vers l'oreille droite. Le duc reçut avec un vif sentiment de gratitude et de joie une si précieuse relique, la fit enfermer à l'instant même dans une tête

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circiter continentem concesserunt. Quam cum graciarum actionibus et ingenti leticia recepisset, cito post infra caput aureum gemmis preciosissimis insignitum ipsam reposuit, et ecclesie Sancti Hylarii dedit, precipiens ut cum solemni processione jocale reciperetur.

Quando particula illa concessa est, cum prenominato comite et regiis aurifabris de religiosis ecclesie beati Dyonisii dominus Guido Monselli pro tunc abbas, Johannes de Fonteneto, preceptor, Petrus Bidaudi, doctor in decretis et officialis ecclesie, Guillelmus de Roquemont, cantor, Philippus Godefridi elemosinarius presentes interfuerunt. Ad perpetuam quoque hujus concessionis memoriam super hoc instrumenta publica sibi fieri pecierunt; quorum unum in capsam in qua residuum corporis gloriosi quiescebat, aliud vero in archivis cartarum ecclesie posuerunt. Ut autem prefatus dux Bituricensis prefatum monasterium equivalenter compensaret, tantam porcionem capitis beati Benedicti et partem brachii ejus, quas reliquias cum difficultate magna a religiosis sancti Benedicti super Ligerim impetraverat, in quodam vase aureo et gemmis ornato collocavit, et, sicut promiserat, monasterio concessit, anno Domini millesimo quadringentesimo, ut loco suo dicetur.

CAPITULUM XVII.

Judei de regno expelluntur.

Judeorum superexcrescens usura, ubique regnum inficiens, multos ad odibilem egestatem dejecerat. Unde ipsi adversarii crucifixi non solum Francigenarum odium sibi acquisierant cunctorum, ymo quia et mulieres libere precio conducebant, ut earum lacte eorum parvuli alerentur, viros quoque christianos,

d'or enrichie de pierreries, et la donna à l'église de Saint-Hilaire, en recommandant qu'on la reçût en procession solennelle.'

La relique avait été remise au comte d'Étampes, en présence des orfévres du roi et de quelques uns des principaux religieux de l'abbaye, savoir monseigneur Guy de Monceaux, alors abbé de Saint-Denys, Jean de Fontenet, commandeur, Pierre Bidaud, docteur en décrets et official de l'église, Guillaume de Roquemont, chantre, et Philippe Godefroy, aumônier. Ces religieux demandèrent que, pour perpétuer le souvenir de cette concession, on en dressât deux actes publics, dont l'un fut déposé dans la châsse où reposait le reste du corps du saint, et l'autre dans les archives des chartes de l'abbaye. Le duc de Berri voulut de son côté donner aux religieux de Saint-Denys une compensation équivalente, il fit mettre dans un vase d'or enrichi de pierres précieuses un morceau de la tête de saint Benoît et une partie de son bras, reliques qu'il avait obtenues avec beaucoup de difficulté des religieux de Saint-Benoît-sur-Loire, et il en fit présent à l'abbaye, suivant sa promesse, l'an du Seigneur mil quatre cent, comme je le dirai en temps et lieu.

CHAPITRE XVII.

Les Juifs sont chassés du royaume.

Les usures des Juifs, qui devenaient de jour en jour plus odieuses, et qui s'étendaient sur tout le royaume, avaient réduit plusieurs familles à la plus affreuse misère. Aussi ces ennemis de Jésus-Christ s'étaient-ils attiré la haine de tous les Français. Comme ils osaient louer à prix d'argent des femmes pour allaiter leurs enfants, et qu'ils prenaient à gages des chrétiens pour le service de leur maison, il résultait

ut ipsis in omnibus subservirent, de cohabitacione virorum
Belial multa sepius oriebantur scandala; et cum religionem
christianorum haberent ludibrio, multi cum eis continue con-
versantes tepidi in fide reddebantur, et inconveniencia multa
ad ignominiam regni Francie sequebantur. Que cum ad regis
noticiam pervenissent, monitis salutaribus et precibus devote
regine consortis dilectissime acquiescens, quamvis immense pec-
cunie annuatim ab ipsis extorquerentur fisco regio applicande,
massam tamen fidelis trittici zizania infidelitatis eorum intoxicari
non est passus.
Sane edictali lege per civitates regni promulgari
statuit, ut omnes Judei, infra Natale Domini de regno recedentes,
sibi sedes quererent alienas, nisi vellent majestati regie contra-
ire, et sua mobilia ad fiscum regium applicari.

Mentem regis precibus et muneribus reiteratis vicibus conati
sunt immutare. At ubi se in vanum laborare ', omnia immo-
bilia, que
in urbibus jure hereditario possidebant, empcionis
titulo vendiderunt; et sic omnes abire libere sunt permissi
absque impedimento quocunque, exceptis duntaxat quatuor
qui Parisius degebant. Occasio detencionis eorum fuit, quoniam
tracti in causam coram preposito Parisiensi, accusati quod in
detestacionem crucifixi et christiane fidei quemdam conversum
ad fidem clam de nocte sustulerant, et interfecerant nequiter.
Quamvis, ipsis sceleste facinus negantibus, tunc probatum suf-
ficienter non fuerit contra ipsos, quia tamen prefatus conversus
cunctis notus reiteratis vicibus de violenciis illatis ab eisdem
querimonias fecerat, nec amplius videbatur, in suspicionem
venerunt quin crimen impositum commisissent. Quia igitur
vehemens presumpcio contra eos laborabat, in ipsos judicatum
Il est nécessaire, pour compléter le sens, de supposer dans le manuscrit l'omission
d'un mot tel que viderunt.

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souvent beaucoup de scandale de ce commerce avec les fils de Bélial. Comme les Juifs tournaient en dérision le culte des chrétiens, la plupart de ceux qui vivaient continuellement avec eux perdaient toute l'ardeur de leur foi. C'était une honte pour le royaume de France, et il s'ensuivait de graves inconvénients. Le roi, instruit de ces désordres, et se rendant aux sages conseils et aux prières de la reine, son épouse bien aimée, résolut, malgré les sommes considérables qu'on arrachait tous les ans aux Juifs et qui grossissaient son trésor, de séparer le bon grain de l'ivraie et d'éloigner les croyants du contact des infidèles. Une ordonnance, publiée dans toutes les villes du royaume, enjoignit aux Juifs de quitter la France avant la fête de Noël, et d'aller chercher un refuge à l'étranger, sous peine d'être réputés coupables de lèse-majesté et de voir leurs biens confisqués.

Les Juifs essayèrent à plusieurs reprises de faire révoquer cette décision, à force de prières et de présents. Voyant que leurs efforts étaient inutiles, ils vendirent tous les immeubles qu'ils possédaient par héritage dans les différentes villes. On leur permit alors de s'éloigner librement, et l'on n'en retint que quatre, qui demeuraient à Paris. Voici quel fut le motif de leur arrestation. Ils avaient été cités à comparaître devant le prévôt de Paris, comme accusés d'avoir, en haine de JésusChrist et de sa sainte religion, enlevé secrètement pendant la nuit un des leurs, qui s'était converti au christianisme, et de l'avoir méchamment mis à mort. Ils repoussaient cette accusation par un désaveu formel, et l'on ne put se procurer des preuves suffisantes de leur culpabilité. Néanmoins, comme le Juif converti, qui était connu de tout le monde, s'était plaint plusieurs fois des violences exercées sur lui par les accusés, et qu'il avait disparu, on les soupçonna d'être réellement coupables. D'après les fortes présomptions qui s'élevaient contre eux, ils furent condamnés à être promenés nus sur une charrette pendant quatre dimanches par les rues et les carrefours de Paris, et à être battus de verges jusqu'au sang. Après avoir subi cet affront deux dimanches, ils songèrent à se racheter du reste de leur peine. Ils obtinrent leur grâce par

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