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processionnellement par l'archevêque et les chanoines de la cathédrale. passa la nuit dans le palais archiepiscopal. Le lendemain, il alla à cheval et simplement vêtu au-devant de son bien aimé cousin jusqu'à deux lieues de Reims. Les deux rois se tendirent la main; après avoir échangé les salutations et les compliments d'usage, et s'être donné le baiser de paix, ils se dirigèrent vers la ville, et y entrèrent en grande pompe. En tête du cortège étaient les chevaliers, précédés d'une troupe considérable d'écuyers. Ils étaient escortés d'un grand nombre de hérauts d'armes, et marchaient au son des trompettes de guerre et d'une musique bruyante composée de toutes sortes d'instruments. Venaient ensuite Jean comte de Nevers, fils du duc de Bourgogne, et Louis, frère de la reine de France, qui n'avaient pas encore été armés chevaliers. Derrière eux s'avançaient les rois de France, de Bohême et de Navarre, marchant à pas lents, ensemble et de front, et precédés de trois écuyers, qui étaient chargés de veiller à la garde de leurs personnes et qui portaient les manteaux et les épées de leurs maîtres. Messire de la Roche-Guyon et messire Robert de Boissay, chambellans du roi et quatre autres officiers du même rang se tenaient à droite et à gauche des rois, pour écarter la foule des cavaliers. Les ducs de Berri, d'Orléans et de Bourbon fermaient le cortége avec les autres seigneurs d'Allemagne et de Bohême et les prélats qui avaient été mandés à cette fête. Le roi de Bohême fut ainsi conduit solennellement et à pas lents jusqu'à l'abbaye de Saint-Remi, dont les salles, les chambres et tous les appartements devaient servir de logement au roi. On avait tendu partout des tapis de laine; mais on remarquait surtout des tentures de soie brodées d'or, représentant des traits de l'histoire des anciens rois, et de riches étoffes habilement travaillées, auxquelles on pouvait justement appliquer ce mot d'Ovide: La maind'œuvre était au-dessus de la matière.

Que omnia cum quadam aviditate videndi transiens, non sinerent ejus aspectum saciari, et magnificenciam cognati sui regis Francie, cum hoc sibi peregrinum videretur, multipliciter commendaret, mox affuit dominus Robertus prefatus, qui consequenter ad dicta : « Et hec omnia, inquit, prin<<< ceps excellentissime, rex vobis dat, rogans ut munusculum recipientes gratanter, die crastina, si placet, secum pran<< deatis. >>

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Cognato regraciando annuit quod poscebat. Sed cum ea die, interim dum dominice Annunciacionis celebrarentur missarum solemnia, incliti duces Biturie et Borbonii propter hoc ipsum adiissent, ut adduceretur decencius, rubore perfusi et cum displicencia magna redierunt, regi Francie refferentes quod tunc non poterat quod promiserat complere. Verum utique referebant; sed excusacio vicio non carebat. Nam omnibus notum erat quod rudissimus existens, et incomptus moribus, curialitates regias penitus negligebat, guleque et vino deditus, commessaciones cotidianas reiterans, nunc ventre pleno se jam sopori dederat ; et sic in convivio regio, amore sui sumptuosissime preparato, non potuit interesse. Quamvis inde dampnum multum aulici, me audiente, assererent ex absencia ipsius consequtum, rex tamen, de hoc non curans, adventum ejus usque ad diem alterum expectavit, venientemque cognatum excepit amicabiliter, sibique et suis commilitonibus in ipso prandio quadraginta fercula fecit dapsiliter ministrari.

Tunc in disco principali, triplici ornato solio, Navarre, Francie et Boemie reges consederunt, ceterique sessionis ordinem tenuerunt secundum auctoritatem singulorum, quibus eciam servierunt aule regie officiarii principales; et breviloquio utens, nil ibi defuit quod deceret regiam majestatem. Convivio

Le roi de Bohême regardait en passant toutes ces merveilles avec la plus vive curiosité. Il ne pouvait se lasser de les admirer, et se répandait en éloges sur la magnificence extraordinaire de son cousin le roi de France. Alors messire Robert de Boissay, s'avançant vers lui conformément à l'ordre qu'il en avait reçu : « Très excellent prince, lui <«< dit-il, le roi vous donne toutes ces choses; il vous prie de daigner << accepter ce léger présent, et de venir dîner demain avec lui. »>

Le roi de Bohême remercia son cousin et accepta son invitation. Le lendemain, pendant qu'on célébrait la messe du dimanche de l'Annonciation, les illustres ducs de Berri et de Bourbon allèrent par déférence chercher le roi de Bohême; mais ils revinrent bientôt confus et mécontents annoncer au roi que Wenceslas ne pouvait se rendre à son invitation. Le motif qui l'en empêchait était peu honorable. Cependant les ducs disaient la vérité. Ce prince, de moeurs grossières et déréglées, ne se piquait guère de cette courtoisie qui convient aux rois, et pour satisfaire sa gloutonnerie et son ivrognerie, il se plongeait journellement dans d'ignobles orgies. Ce jour-là il s'était endormi après s'être gorgé de mets comme à son ordinaire, et il ne put par conséquent assister au repas somptueux que le roi avait fait préparer en son honneur. J'ai entendu dire aux gens de la cour que son absence avait causé beaucoup de frais inutiles. Le roi cependant n'en montra nul souci; il attendit sa visite pour le lendemain, l'accueillit très affectueusement et lui fit servir à lui et à sa suite un dîner splendide composé de quarante plats.

Les rois de Navarre, de France et de Bohême s'assirent à la table d'honneur, autour de laquelle on avait dressé trois trônes. Les autres convives prirent place, chacun selon son rang. Ils furent servis par les principaux seigneurs de la cour. En un mot, ce banquet fut digne de la majesté royale. Il y avait une grande quantité de vaisselle d'or. Après le dîner, lesdits rois entrèrent dans une chambre, où ils trouvè

igitur non sine fluxu aureorum vasorum celebrato, prefati reges cameram ingredientes secretam in cathedris palliis aureis adornatis consederunt; ibique modica mora facta, cum post vinum et species se vale dixissent mutuo, rex Boemie ad hospicium rediit. Curialitates regie amplius et successivis feriis continuate fuissent; sed rex se senciens solita egritudine aliqualiter vexari, optimatum consilio, eadem die cognatum adiens, cum ipso secretum habuit colloquium, indeque rediens, fratre duce Aurelianensi relicto, die sequenti recessit, et versus Parisius flectit iter.

In hoc secreto colloquio, ut dicebant qui secretis ex officio assistunt, rex Boemie promisit antistites et clericos regni sui congregare ob unionem Ecclesie; quod diu neglexerat. Consenciit iterum ut ducis Aurelianensis filius neptam suam, filiam marchionis Moravie, desponsaret, que, ultra paternam hereditatem, regum Boemie, Hungarie et Cracovie heres unica dicebatur.

Post recessum autem regis Boemie, ambassiatores solemnes, sicut statutum fuerat, in Alemaniam missi sunt; qui, vota cleri et prelatorum regni audientes, retulerunt quod valde bene dispositi erant ad acceptandum cum Francis viam cessionis, sed ad confirmandum vota iterum erant legaciones iterande.

rent des siéges ornés de tapis d'or. Ils restèrent là quelques instants pour prendre le vin et les épices; après quoi ils se séparèrent, et le roi de Bohême retourna chez lui. Les fêtes auraient duré encore plusieurs jours si le roi n'eût commencé à se ressentir de son mal. D'après le conseil de ses principaux seigneurs, il alla le même jour trouver son cousin, et eut avec lui une conférence secrète. Après cette entrevue, il laissa à Reims son frère le duc d'Orléans, et partit le lendemain pour Paris.

Suivant le récit de ceux à qui leurs fonctions donnent entrée aux conseils, le roi de Bohême promit dans cette conférence de convoquer les prélats et le clergé de son royaume pour traiter de l'union de l'Église ; ce qu'il avait long-temps négligé de faire. Il consentit aussi au mariage du fils du duc d'Orléans avec sa nièce, la fille du marquis de Moravie, qui devait joindre, disait-on, à la succession de son père l'héritage des rois de Bohême, de Hongrie et de Pologne.

Après le départ du roi de Bohême, on envoya en Allemagne une ambassade solennelle, ainsi qu'il avait été convenu. Les envoyés s'informèrent des voeux du clergé et des prélats de ce pays, et revinrent annoncer qu'ils étaient très disposés à accepter, de concert avec la France, la voie de cession, mais qu'il fallait envoyer une seconde ambassade pour obtenir la confirmation de ces vœux.

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