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Le roi, témoin des progrès que faisaient chaque jour la peste et la contagion parmi le peuple, crut devoir éviter la chaleur du mois. d'août et la maligne influence d'un air pestilentiel, et se retira avec ses oncles, les princes du sang et les seigneurs de sa cour dans le duché de Normandie, où l'épidémie n'avait pas encore pénétré. Mais dans le cours des deux années suivantes, le même fléau attaqua toutes les provinces du royaume. Ainsi la mortalité dura trois ans, ne finissant en un lieu que pour commencer en un autre. Cependant le Dieu. de miséricorde daigna enfin exaucer les prières de l'Église, et accueillit avec faveur les voeux fervents de tant de chrétiens. Il rendit la santé et la force à ceux qui avaient survécu au fléau.

CHAPITRE V.

Événements mémorables qui eurent lieu cette année dans plusieurs parties du monde.

Au mois de novembre, on aperçut pendant huit nuits consécutives une comète qui jetait un éclat extraordinaire, et dont la queue était tournée vers l'occident. Au dire des astrologues, cette apparition annonçait la mort de quelques rois ou des révolutions prochaines. Les gens de savoir et d'expérience y voyaient plutôt le présage de révolutions, lorsqu'ils considéraient les événements qui se passaient alors. En effet, pendant que la main du souverain juge humiliait la France dans la personne de son chef, ainsi que nous l'avons dit, presque tous les états de la chrétienté étaient agités par les horreurs de la guerre, les révoltes et les trahisons. Aussi, en comparant le présent au passé, trouvait-on que cette année méritait d'être appelée l'année des prodiges.

Sane qui pestiferum scisma Ecclesie impacienter ferebant cardinales dominum papam Benedictum obsessum in palacio papali Avinionensi diu tenere stupebant, nil monstruosius estimantes quam discordancia membra velle viribus capiti dominari. Iterum in Bonifacium pro summo pontifice se monstruose gerentem Romani odio inexpiabili laborantes eum ad mortem querebant velut exulem proscriptum et rei publice adversarium, sic cupientes in ipsum suos injuriatos concives vindicare.

Dum sic Ecclesie sponse Christi competitores cupidi tractarentur, quibus ascribebatur imperialis dignitas non magis prospera succedebant. Nam Manuel, Grecie imperator, se Turcorum hostilibus discursibus asserebat non posse resistere, et nisi subsidiarii pugiles mitterentur, in brevi famosissima urbe Constantinopoli privaretur. Theutonici eciam imperii electores dominum Winceslaum, regem Boemie, regis Francie cognatum, filium imperatoris deffuncti, quem a viginti annis citra jam dominum designaverant, spreverunt, duceque Bavarie in imperatorem electo, regem Francie rogantes ut eorum electioni faveret.

Non minori animi levitate Sicculi quemdam Lendislaum vel Lancelotum nomine super se principem statuerunt, expulso rege suo domino Ludovico Andegavie et Provencie domino, qui ob hoc coactus est Franciam repetere, ut regi Francie dilectissimo cognato et defferentibus lilia de tanta prodicione querimonias defferret, eorum auxilium implorando.

Inter Portugalenses et Gotos Hyspanos ingenti strage peracta, rex Hyspanie coactus est regem Francie rogare, ut regno suo fere ad ultimam necessitatem redacto, pii genitoris morem sequens, de Gallorum mercenario conductu subveniret, et ne regi Portugalie faveret.

Ceux qui détestaient le déplorable schisme de l'Église, étaient indignés de voir que les cardinaux s'obstinaient à tenir si long-temps monseigneur le pape Benoît assiégé dans le palais pontifical d'Avignon; c'était à leurs yeux une chose monstrueuse que les membres rebelles voulussent faire la loi à leur chef. D'un autre côté, les Romains animés d'une haine implacable contre Boniface, qui avait l'impudence de se dire souverain pontife, l'avaient exilé et proscrit comme un ennemi public, et n'aspiraient qu'à le faire mourir pour venger les outrages qu'il avait faits à leurs concitoyens.

Pendant que les ambitieux compétiteurs de l'Église, épouse de Jésus-Christ, étaient ainsi traités, ceux qui étaient revêtus de la dignité impériale n'étaient guère plus heureux. Manuel, empereur de Grèce, déclarait qu'il ne pouvait plus résister aux attaques des Turcs, et que, si on ne lui envoyait du secours, il perdrait bientôt Constantinople, sa capitale. Les électeurs de l'empire d'Allemagne, dégoûtés de monseigneur Wenceslas, roi de Bohême, cousin du roi de France, qu'ils avaient choisi pour leur souverain depuis plus de vingt ans, venaient d'élever à l'empire le duc de Bavière, et ils priaient le roi de France d'approuver ce nouveau choix.

Les Siciliens ne montrèrent pas moins d'inconstance. Ils se donnèrent pour maître un certain Ladislas ou Lancelot, et chassèrent leur roi, monseigneur Louis, duc d'Anjou et comte de Provence, qui forcé de regagner la France vint se la France vint se plaindre d'une telle trahison au roi son bien aimé cousin et aux princes du sang, et implorer leur assistance.

Il se livra une sanglante bataille entre les Portugais et les Espagnols. Le roi d'Espagne fut obligé de prier le roi de France de prendre en pitié son royaume réduit à la dernière extrémité, et de vouloir bien, à l'exemple du roi son généreux père, lui envoyer un corps mercenaire de Français et ne point se déclarer en faveur du Portugal..

Rex Scocie legatos regis Karoli honorifice recipiens inter progenitores amborum jurata federa instantissime peciit confirmari ob mortalem discordiam, que solito acrius vigebat inter ipsum et regem Anglie Richardum. Is repetitis vicibus sacramentis firmaverat quod, parte Hybernie, que sibi suberat, reformata, quietum sompnum non duceret, donec regnum Scocie subjugasset. O mortalis ignorancia, non previdens que sibi futura essent, et quod proximo per suos erat regno et vita proditorie privandus!

CAPITULUM VI.

Aurelianis et Lancastrie duces mutuo confederantur.

Quo proficisci volebat regi Francie dilectissimo patri cum recommendacione humili nunciis et apicibus notum fecit. Quod ut comperit dux Henricus, qui inter duces Francie exulabat, et opportunitatem illatas injurias vindicandi, ne ad hoc sibi coadjutores deessent, cum duce Aurelianis militare pactum secretissimum iniit. Quod quia nonnulli postmodum reprobantes ipsi duci Aurelianis detrahebant, hoc solum tamen in substancia continebat, quod ambo principes sine intermissione affectum vere dilectionis servando, quilibet erga amicos benevolus et erga adversarios hostis existeret, et in cunctis agendis negociis salutem et honorem amici verbo factoque proposse diligenter procuraret, servaret et deffenderet. Item et contra quascunque singulares personas, contra quoscumque principes, cujuscumque status, auctoritatis vel preeminencie existerent, unus alterum tueretur, quamdiu fedus induciale duraret inter reges, exceptis tamen dominis confederatis ipsi duci Aurelianis, qui sequntur. Placuit enim ipsi ut ab hoc pacto rex Francie

Le roi d'Écosse reçut avec les plus grands égards les ambassadeurs du roi Charles, et demanda instamment la confirmation des traités d'alliance jurés entre les deux couronnes. Il craignait les suites de la haine implacable qui régnait entre lui et Richard, roi d'Angleterre. Richard avait juré à plusieurs reprises qu'après avoir rétabli l'ordre dans la partie de l'Irlande qui lui était soumise il ne dormirait point en repos qu'il n'eût conquis l'Écosse. O aveuglement des mortels! il ne prévoyait pas le sort qui l'attendait; il ne savait point que bientôt il allait être privé traîtreusement du trône et de la vie par ses sujets.

CHAPITRE VI.

Alliance contractée entre les ducs d'Orléans et de Lancaster.

Le roi d'Angleterre adressa un message à son beau-père bien aimé le roi de France pour lui notifier sa résolution. A cette nouvelle, le duc Henri, qui était en exil à la cour de France, pensa que le moment était venu de venger ses injures. Il chercha des amis pour l'aider dans son dessein et conclut une alliance secrète avec le duc d'Orléans. Quelques personnes désapprouvèrent plus tard cette alliance et en firent des reproches au duc d'Orléans. Cependant elle renfermait pour toute clause, que les deux princes conserveraient l'un pour l'autre un sincère et durable attachement, qu'ils auraient les mêmes amis et les mêmes ennemis, et qu'en toutes circonstances ils protégeraient, garderaient et défendraient réciproquement de paroles et de fait, selon leur pouvoir, la vie et l'honneur de chacun d'eux. Ils devaient en outre, tant que durerait la trêve conclue entre les deux rois, se prêter un mutuel appui contre tous les particuliers ou princes, quels que fussent leur rang, leur crédit et leur puissance. Le duc d'Orléans excepta toutefois ses alliés le roi de France, la reine et leurs enfants, les ducs de Berri, de Bourgogne et de Bourbon, et même les rois de Bohême et de Hongrie avec leurs oncles les marquis de Moravie, et pareillement tous ceux qui étaient descendus ou qui descendraient

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