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and. MAYEUR.

HISTOIRE

DE

L'ABBAYE D'IGNY

CHAPITRE I.

Fondation de l'Abbaye d'Igny (1127)

Origines de l'Ordre Cistercien. La Charte de Charité. Saint Bernard; son rôle dans l'Église, son amitié avec l'Archevêque de Reims, Renauld II de Martigny, ses relations avec le diocèse de Reims. Il apaise des troubles à Reims. Renauld en reconnaissance fonde l'abbaye d'Igny. Charte de fondation. Chartes de confirmation. Dédicace du monastère. Première dotation. Saint Bernard au concile de Reims, 1132, Mort de Renauld. Troubles pendant la vacance. Saint Bernard refuse le siège de Reims. Election de Sanson de Mauvoisin. Amitié de Saint Bernard et de Sanson. Saint Bernard au concile de Reims en 1148. Intérêt qu'il porte à l'abbaye d'Igny.

EPUIS la mort de l'illustre patriarche Saint Benoît, la vie cénobitique en Occident avait passé par diverses oscillations de ferveur et de relâchement.

D

Sa règle, fruit d'une expérience consommée, monument d'une admirable sagesse, saisissait l'homme tout

entier, en donnant satisfaction à la fois aux besoins de l'âme et à ceux du corps. Aussi avait-elle fait longtemps fleurir d'innombrables monastères. Mais l'infirmité humaine, qui compromet les plus saintes institutions, l'ayant peu à peu laissé dépérir, plusieurs réformateurs étaient venus successivement infuser au vieux tronc une sève nouvelle c'étaient Saint Benoît d'Aniane, au neuvième siècle, Bernon et Saint Odon de Cluny, au dixième, et Saint Robert de Molesmes, le fondateur de Citeaux, à la fin du onzième. La réforme de Saint Benoit d'Aniane n'était point parvenue à jeter d'assez profondes racines; Cluny, après un siècle et demi d'incomparable prospérité, succombait sous le poids de sa fortune; mais à Citeaux étaient réservées de plus longues et de plus glorieuses destinées.

Saint Robert en avait jeté la première semence dans les forêts de la Bourgogne (1098); et cet humble grain de sénevé allait bientôt devenir, sous la bénédiction du ciel, le plus bel arbre monastique qui ait orné le champ de l'église. Noble rejeton de la famille des comtes de Clermont de Tonnerre en Champagne, accoutumé dès sa plus tendre jeunesse aux pratiques de la vie religieuse, favorisé de dons extraordinaires qui faisaient présager ses destinées supérieures, embrasé du zèle de la discipline, Robert, suivi d'une vingtaine de moines, avait quitté Molesmes dont il était abbé, afin de mener la vie plus parfaite vers laquelle il soupirait et qu'il ne pouvait réaliser dans sa communauté. Le désert de Citeaux, racontent les chroniqueurs, était tout hérissé d'épines, et l'on n'y rencontrait que des bêtes féroces. Ce fut en ce lieu déshérité que Robert et ses compagnons fixèrent leurs pas. Sûrs de l'appel divin et fortifiés par la prière, ils triomphèrent, à force d'énergie, de

travail et de privations, des difficultés sans nombre qui se dressaient devant eux. Le monde n'eut d'abord pour eux que du dédain, mais le dédain ne tarda point à se changer en admiration.

Forcé par l'ordre du pape Urbain II de retourner dans son premier monastère, Robert fut remplacé successivement, à la tête de l'abbaye naissante, par deux hommes tout célestes, S. Albéric et S. Etienne Harding, qui l'avaient accompagné au désert, et qui complétèrent l'œuvre dont Dieu lui avait inspiré la pensée.

Albéric n'eut rien de plus pressé que de placer la fondation naissante sous la protection immédiate du Saint-Siège; puis il s'appliqua à introduire parmi ses moines la stricte observance de la règle de Saint Benoît. A la suite d'une révélation de la sainte Vierge, il donna aux religieux l'habit blanc, à l'exception du scapulaire qui resta noir; enfin il établit les frères lais ou convers pour exercer les divers métiers et laisser aux moines le temps de vaquer aux offices du chœur.

Etienne compléta la législation ébauchée par Albéric. Saint Benoit n'avait établi entre les monastères aucune hiérarchie. Si l'on excepte les quelques monastères groupés autour de Subiaco, entre lesquels il y avait un lien de confraternité, et qui formaient un corps par leur soumission à un abbé principal, tous les autres monastères répandus dans l'Occident vivaient comme autant de familles distinctes, isolées les unes des autres et sans aucune subordination mutuelle: ils ne relevaient que de leur abbé, qui était tout pour eux, mais qui devait être avant tout un père. Déjà Saint Odon de Cluny avait tenté un premier essai d'organisation; il avait introduit dans l'ordre monastique une sorte de

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