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livrer à une entreprise nouvelle, il leur faut remonter à la source de leur pouvoir. Je suppose qu'il s'agisse d'établir une école : les select-men convoquent à certain jour, dans un lieu indiqué d'avance, la totalité des électeurs; là, ils exposent le besoin qui se fait sentir; ils font connaître les moyens d'y satisfaire, l'argent qu'il faut dépenser, le lieu qu'il convient de choisir. L'assemblée, consultée sur tous ces points, adopte le principe, fixe le lieu, vote l'impôt, et remet l'exé– cution de ses volontés dans les mains des select-men.

Les select-men ont seuls le droit de convoquer la réunion communale (tow-meeting), mais on peut les provoquer à le faire. Si dix propriétaires conçoivent un projet nouveau et veulent le soumettre à l'assentiment de la commune, ils réclament une convocation générale des habitans; les select-men sont obligés d'y souscrire, et ne conservent que le droit de présider l'assemblée (1).

Ces mœurs politiques, ces usages sociaux sont sans doute bien loin de nous. Je n'ai pas en ce moment la volonté de les juger ni de faire connaître les causes cachées qui les produisent et les vivifient; je me borne à les exposer.

Les select-men sont élus tous les ans au mois d'avril ou de mai. L'assemblée communale choisit en même temps une foule d'autres magistrats municipaux (2), préposés à certains détails administratifs importans. Les uns, sous le nom d'assesseurs, doivent établir l'impôt; les autres, sous celui de collecteurs, doivent le le

(1) Voyez Laws of Massachusetts, vol. 1, p. 150; loi du 25 mars 1786.

(2) Voyez Laws of Massachusetts, vol. 1, p. 150; loi du 25 mars 1786.

ver. Un officier, appelé constable, est chargé de faire la police, de veiller sur les lieux publics, et de tenir la main à l'exécution matérielle des lois. Un autre, nommé le greffier de la commune, enregistre toutes les délibérations; il tient note des actes de l'état civil. Un caissier garde les fonds communaux. Ajoutez à ces fonctionnaires un surveillant des pauvres dont le devoir, fort difficile à remplir, est de faire exécuter la législation relative aux indigens ; des commissaires des écoles, qui dirigent l'instruction publique, des inspecteurs des routes, qui se chargent de tous les détails de la grande et petite voirie, et vous aurez la liste des principaux agens de l'administration communale; mais la division des fonctions ne s'arrête point là: on trouve encore, parmi les officiers municipaux (1), des commissaires de paroisses qui doivent régler les dépenses du culte ; des inspecteurs de plusieurs genres chargés, les uns, de diriger les efforts des citoyens en cas d'incendie; le autres, de veiller aux récoltes; ceux-ci, de lever provisoirement les difficultés qui peuvent naître relativement aux clôtures; ceux-là, de surveiller le mesurage du bois, ou d'inspecter les poids et mesures.

On compte en tout dix-neuf fonctions principales dans la commune. Chaque habitant est contraint, sous peine d'amende, d'accepter ces différentes fonctions; mais aussi la plupart d'entre elles sont rétribuées, afin que les concitoyens pauvres puissent y

(1) Tous ces magistrats existent réellement dans la pratique. Pour connaître les détails des fonctions de tous ces magistrats communaux, voyez le livre intitulé: Town officer, by Isaac Goodwin; Worcester, 1827; et la collection des lois générales du Massachusetts en 3 vol. Boston, 1823.

consacrer leur temps sans en souffrir de préjudice. Du reste, le système américain n'est point de donner un traitement fixe aux fonctionnaires. En général, chaque acte de leur ministère a un prix, et ils ne sont rémunérés qu'en proportion de ce qu'ils ont fait.

DE L'EXISTENCE COMMUNALE.

- La

Chacun est le meilleur juge de ce qui ne regarde que lui seul. Corollaire du principe de la souveraineté du peuple. - Application que font les communes américaines de ces doctrines. commune de la Nouvelle-Angleterre, souveraine pour tout ce qui ne se rapporte qu'à elle : sujette dans toute le reste. - Obligation de la commune envers l'Etat. En France, le gouvernement prête ses agens à la commune. En Amérique, la commune prête les siens au gouvernement.

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J'ai dit précédemment que le principe de la souveraineté du peuple plane sur tout le système politique des Anglo-Américains. Chaque page de ce livre fera connaître quelques applications nouvelles de cette doctrine.

Chez les nations où règne le dogme de la souveraineté du peuple, chaque individu forme une portion égale du souverain, et participe également au gouvernement de l'État.

Chaque individu est donc censé aussi éclairé, aussi vertueux, aussi fort qu'aucun autre de ses semblables.

Pourquoi obéit-il donc à la société, et quelles sont les limites naturelles de cette obéissance?

Il obéit à la société, non point parce qu'il est inférieur à ceux qui la dirigent ou moins capable qu'un

autre homme de se gouverner lui-même ; il obéit à la société, parce que l'union avec ses semblables lui paraît utile, et qu'il sait que cette union ne peut exister sans un pouvoir régulateur.

Dans tout ce qui concerne les rapports des citoyens entre eux, il est donc devenu sujet. Dans tout ce qui ne regarde que lui-même, il est resté maître : il est libre, et ne doit compte de ses actions qu'à Dieu. De là cette maxime que l'individu est le meilleur comme le seul juge de son intérêt particulier, et que la société n'a le droit de diriger ses actions que quand elle se sent lésée par son fait, ou lorsqu'elle a besoin de réclamer son concours.

Cette doctrine est universellement admise aux Etats-Unis. J'examinerai autre part quelle influence générale elle exerce jusque sur les actions ordinaires de la vie; mais je parle en ce moment des communes.

La commune, prise en masse et par rapport au gouvernement central, n'est qu'un individu comme un autre auquel s'applique la théorie que je viens d'indiquer.

La liberté communale découle donc, aux États-Unis, du dogme même de la souveraineté du peuple; toutes les républiques américaines ont plus ou moins reconnu cette indépendance; mais chez les peuples de la Nouvelle-Angleterre, les circonstances en ont particulièrement favorisé le développement.

Dans cette partie de l'Union, la vie politique a pris naissance au sein même des communes; on pourrait presque dire qu'à son origine chacune d'elles était une nation indépendante. Lorsqu'ensuite les rois d'Angleterre réclamèrent leur part de souveraineté, ils se bornèrent à prendre la puissance centrale. Ils

laissèrent la commune dans l'état où ils la trouvèrent; maintenant les communes de la Nouvelle-Angleterre sont sujettes; mais dans le principe elles ne l'étaient point ou l'étaient à peine. Elles n'ont donc pas reçu leurs pouvoirs ; ce sont elles au contraire qui semblent s'être dessaisies, en faveur de l'Etat, d'une portion de leur indépendance: distinction importante, et qui doit rester présente à l'esprit du lecteur.

Les communes ne sont en général soumises à l'État que quand il s'agit d'un intérêt que j'appellerai social, c'est-à-dire, qu'elles partagent avec d'autres.

Pour tout ce qui n'a rapport qu'à elles seules, les communes sont restées des corps indépendans; et parmi les habitans de la Nouvelle-Angleterre, il ne s'en rencontre aucun, je pense, qui reconnaisse au gouvernement de l'Etat le droit d'intervenir dans la direction des intérêts purement communaux.

On voit donc les communes de la Nouvelle-Angleterre vendre et acheter, attaquer et se défendre devant les tribunaux, charger leur budget ou le dégrever, sans qu'aucune autorité administrative quelconque songe à s'y opposer (1).

Quant aux devoirs sociaux, elles sont tenues d'y satisfaire. Ainsi, l'Etat a-t-il besoin d'argent, la commune n'est pas libre de lui accorder ou de lui refuser son concours (2). L'État veut-il ouvrir une route, la commune n'est pas maîtresse de lui fermer son territoire. Fait-il un règlement de police, la commune doit l'exécuter. Veut-il organiser l'instruction sur un

(1) Voyez la loi du 23 mars 1786, Laws of Massachusetts, vol. 1, p. 250.

(2) Voyez Laws of Massachusetts, loi du 20 février 1786, vol, 1, p. 217.

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