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le moyen âge, sur les rapports entre colons et seigneurs, sur les institutions, les mœurs et les usages d'une contrée encore peu connue à ces divers points de vue pendant cette période de son histoire. Il eût été facile, en effet, de toucher en quelques mots à chacun de ces points et à plusieurs autres encore; mais nous avons cru qu'il était meilleur de nous abstenir, par la raison que le cartulaire de Silos ne se prête pas dans une assez large mesure à un travail de ce genre. Riche en documents royaux et en bulles pontificales, les chartes privées antérieures à la fin du xe siècle Ꭹ sont trop clairsemées pour permettre une étude d'ensemble sur l'état de la société à cette époque. Cette œuvre ne pourra être entreprise avec quelque chance de succès qu'à partir du jour où l'Académie espagnole de l'Histoire aura réalisé son projet de publier quelques-uns des nombreux et très importants cartulaires dont elle a depuis longtemps la garde.

Nous espérons toutefois que les érudits feront bon accueil au présent travail, qui a du moins le mérite d'être le premier de ce genre publié sur les anciennes abbayes d'Espagne. Ce sera aussi notre excuse, si nous n'avons pas atteint le but, d'ailleurs bien modeste, que nous nous sommes proposé.

II

SOURCES DU RECUEIL DES CHARTES DE SILOS.

Les archives de Silos.

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-

Autres archives. Manuscrits et inventaires.
Ouvrages imprimés.

1. Nous avons dû puiser à plusieurs sources pour réunir toutes les pièces qui forment le cartulaire de l'abbaye de Silos. La première et la plus importante se trouve dans les archives de ce monastère, telles que les Bénédictins français ont pu les reconstituer.

B

IMPRIMERIE NATIONALE.

Il ne sera pas sans intérêt de dire quelques mots des vicissitudes. qu'elles ont traversées pour arriver jusqu'à nous.

Placées à une époque très ancienne, probablement dès le xie siècle, dans une salle voûtée voisine du vieux chapitre dit Capítulo del Santo, ces archives furent transférées peu après 1560 dans la grosse tour carrée qui formait alors l'angle sud-est de l'abbaye). La tour ayant été démolie en 1628, elles revinrent à cette date s'abriter sous les cloîtres (2). Une dernière translation eut lieu en 1750, et dès lors elles occupèrent une grande et belle pièce, que ses solides murailles, ainsi que sa porte et ses fenêtres bardées de fer, mettaient à l'abri d'un coup de main et protégeaient plus encore contre les dangers d'un incendie. Il est à regretter que ces sages précautions aient été si tardives. Le feu avait déjà à plusieurs reprises exercé ses ravages dans le monastère et les archives n'avaient pas complètement échappé à ses atteintes (3).

Pendant les guerres de l'Indépendance, au moment où l'abbaye, tour à tour occupée par les guerrilleros espagnols et par les colonnes françaises, était exposée à de terribles représailles, tous les documents de quelque importance furent mis en sûreté dans divers villages des montagnes voisines (4). On fut moins heureux de 1833 à 1837, au milieu des longs troubles occasionnés par les guerres civiles. Les partisans de don Carlos, qui avaient établi à Silos un hôpital militaire, transformèrent la salle des archives en un dépôt de poudre et de fusils. Les dégâts causés à cette époque furent considérables. Beaucoup de pièces, nous dit un témoin oculaire, furent dépouillées de leurs sceaux de cire ou de plomb, avec lesquels les soldats fabriquaient des flambeaux et des balles (5).

(1) Arch. de Silos, document B. XLV. 5, fol. 21 et 22; Ruiz, Histoire manuscrite, manuscrit n° 48, ad ann. 1623-1628. (2) Arch. de Silos, manuscrit n° 116,

fol. 29.

(3) Notamment dans les années 1254, 1350, 1384 et 1442 (Ruiz, fol. 173).

Voy. les chartes du 5 mai 1384, p. 446; du 24 février 1386, p. 449; du 14 mars 1442, p. 485-487.

(4) Surtout à Moncalvillo, à l'est de Silos (Memoriæ Silenses, t. I, fol. 176).

(5) Rodrigo Echevarría, dans le manuscrit intitulé Memoriæ Silenses.

Quelques religieux parvinrent néanmoins à sauver cette fois encore les précieux monuments de l'histoire de leur monastère, qui étaient en outre pour eux les titres de ses nombreuses possessions. Aussi, lorsque, à la suite de la suppression des ordres monastiques, un envoyé du gouvernement de la reine Christine vint au nom de l'État mettre la main sur les archives de Silos, n'y trouva-t-il guère que les débris négligés par les troupes carlistes. Des trois ou quatre mille pièces que renfermait ce riche trésor, trois cents seulement furent envoyées aux archives nationales de Madrid (1), où l'on n'en trouve plus aujourd'hui qu'une trentaine. Que sont devenues les autres ? Malgré toutes nos recherches, il nous a été impossible de le savoir. Celles l'abbé et les moines de Silos avaient réussi que à mettre en lieu sûr ont eu un meilleur sort. Les nouveaux habitants de Silos sont parvenus à les retrouver, et presque tous ces vieux parchemins ont repris leur place dans la salle des archives (2). C'est en les parcourant et en les mettant en ordre que, frappé de leur importance, nous avons eu la pensée de faire part au public érudit de tant de précieux titres historiques, encore presque tous inédits et inconnus.

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Les documents des archives de Silos sont contenus dans six grandes armoires, portant chacune une des six premières lettres

(1) Nous avons retrouvé à Ségovie, dans le palais épiscopal, parmi les papiers de Mr Rodrigo Echevarría, dernier abbé de Silos, mort en 1875 évêque de Ségovie, deux inventaires de toutes ces chartes. Par malheur, ils ne donnent qu'une simple nomenclature par numéros d'ordre, sans autre indication. Ces inventaires sont maintenant aux archives de Silos.

(2) On a même pu y faire quelques additions, dont la plus importante consiste dans l'acquisition des cinquante-cinq gros volumes in-folio dont se composaient les archives officielles de la Congrégation

bénédictine d'Espagne dite Congrégation
de Saint-Benoît de Valladolid, auxquels il
faut joindre deux volumes d'inventaire,
l'un chronologique et l'autre alphabétique.
Cette précieuse collection comprend trois
parties 1° Archivo de la Congregacion de
San Benito de Valladolid, qui va du vi
au XIX siècle (37 volumes); 2° Visita
general de monasterios, qui va de 1695
à 1818 (6 volumes); 3° Libros de Be-
cerro de las actas, decretos, etc. de los ca-
pítulos generales, de 1509 à 1805 (4 vo-
lumes). Elle se termine par une série de
huit volumes de duplicata.

B.

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de l'alphabet et renfermant soixante tiroirs numérotés en chiffres romains (1). Ce classement, exécuté avec beaucoup de soin et une parfaite exactitude, est l'œuvre de deux archivistes de l'abbaye, les PP. Aguilar et Saez, qui y travaillèrent de 1750 à 1777 (2).

II. Les archives de M. le duc de Frias nous ont fourni un nombre assez considérable de chartes, qui contribueront pour une bonne part à l'intérêt de cette publication. Elles ont trait en général aux droits féodaux de l'abbaye et furent extraites de ses archives en 1565, date à laquelle les connétables de Castille, ducs de Frias, devinrent les seigneurs incontestés de la ville de Santo Domingo de Silos (3). C'est pour nous un devoir de faire part à M. le duc de Frias des sentiments de gratitude que nous avons été heureux d'exprimer de vive voix à son illustre père, à l'époque où il voulait bien nous permettre l'entrée de ses riches archives de la calle de las Rejas, à Madrid.

L'Archivo histórico nacional de Madrid garde encore, nous l'avons vu plus haut, trente chartes du monastère de Silos, et parmi elles le privilège original accordé en 1076 par le Cid Campeador.

Nous avons étendu nos recherches aux archives de Simancas, à celles des cathédrales de Burgos et d'Osma, de l'abbaye de San Millan et du monastère des Dominicaines de Caleruega. Dans ces divers dépôts, plus ou moins riches en anciens documents, nous avons réussi, grâce à l'obligeance de MM. les bibliothécaires et archivistes, à recueillir quelques pièces inédites relatives à Silos.

III. Si abondante qu'ait été (1) Chaque pièce porte inscrits au dos : 1° la lettre de l'armoire; 2° le numéro du tiroir, en chiffres romains; 3° son numéro d'ordre dans le tiroir, en chiffres arabes; 4° la date et presque toujours une courte analyse du document.

(2) Arch. de Silos, «Libro de depósito ",

cette moisson de titres originaux

ad ann. 1753; Memoria Silenses, t. I,
fol. 136 et 197; manuscrit n° 78, fol. 116.

(3) La pièce des archives de Silos cotée
A. XIV, 52 (fol. 158), donne la liste des
documents qui furent alors remis entre
les mains du connétable D. Iñigo Fer-
nandez de Velasco, duc de Frias.

you

ou d'anciens vidimus, bien des documents nous auraient complètement échappé sans le recueil intitulé Regla o Becerro de Silos, et sans les divers inventaires des archives de l'abbaye.

à

1277

Le Becerro ou Cartulaire est un manuscrit formé de six cahiers de parchemin et comprenant un ensemble de 53 folios de 340 millimètres de haut sur 220 de large. Ce volume a gardé sa reliure primitive en cuir très épais, doublé d'une toile grossière dont il ne reste plus que quelques débris. Son titre promet malheureusement beaucoup trop. Le manuscrit ne renferme guère, en effet, que des privilèges accordés ou confirmés par Alphonse le Savant de 1255 Deux copistes y ont travaillé successivement. L'œuvre du premier s'étend jusqu'au folio 43 et a dû vraisemblablement être écrite en 1256. Elle comprend vingt-neuf documents royaux et se termine par la transcription d'une bulle du pape Urbain III. L'écriture en est très belle et presque partout fort bien conservée. Le travail du second copiste, d'une écriture moins soignée, remplit les dix derniers folios. Il ne contient que quatorze chartes, dont douze d'Alphonse le Savant et deux de son fils l'infant D. Sanche. Il fut écrit peu après 1283, date du dernier document.

On peut croire que l'abbaye de Silos possédait autrefois, comme presque tous les monastères de quelque importance, un cartulaire plus ancien et plus complet; mais il aura disparu de bonne heure dans l'un des incendies que nous avons mentionnés plus haut, et il n'en reste plus la moindre trace (1).

(1) Sahagun avait deux cartulaires, l'un de 1100, appelé Becerro gótico (écrit en lettres wisigothiques), et l'autre du xm' et du xiv siècle. Ils sont aujourd'hui aux archives nationales de Madrid, qui renferment en outre ceux de Celanova, de Rioseco et d'autres encore. Parmi ceux que nous avons vu ailleurs, mentionnons ceux de San Millan de la Cogolla (du xII° siècle, dans l'abbaye de ce nom), de Valvanera (x1° siècle, à Valvanera), de San Andres

d'Espinareda (parmi les manuscrits de
D. Pascual de Gayangos). Comme Saha-
gun, les monastères d'Oña et de Cardeña
possédaient chacun deux cartulaires, l'un
gothique et l'autre moins ancien. (Cf.
Berganza, Antigüedades de España, t. I,
p. 185, 193, 214; t. II, p. 181 et 371.)
Ces cartulaires ont disparu; les derniers
vieux moines d'Oña et de Cardeña que
nous avons pu interroger n'ont pas su
nous dire ce qu'ils étaient devenus.

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