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d) Ibid., n. 14 (Vivès, t. IX, p. 253): « Negando speciem intelligibilem, tota pars intellectiva non habet ante actum intelligendi obiectum sibi praesens in se nec in aliquo repraesentante; ergo, negando speciem intelligibilem, nihil in intellectiva parte erit sufficienter natum gignere actum intelligendi » .

e) Ibid., n. 17 (Vivès, t. IX, p. 257): « Dico quod non tantum intellectus patitur ab obiecto reali imprimente talem speciem realem, sed ab illo obiecto, ut in specie intelligibili, patitur passione intentionali, et illa passio est receptio intellectionis, quae est ab intelligibili in quantum intelligibile est, relucens in specie intelligibili, et istud pati est intelligere ».

f) Ibid., n. 21 (Vivès, t. IX, p. 275): « Intelligo quod intellectus de se est ratio immediata recipiendi utrumque actum; ipsi actus tamen inter se sunt ordinati quando obiectum non est natum esse praesens in se, quia tunc oportet prius naturaliter esse illum actum quo obiectum est praesens ut intelligibile quam illum qui elicitur circa obiectum intelligibile ut praesens ».

g) Ibid., n. 23 (Vivès, t. IX, p. 279): « Species intelligibilis praecedit actum [intelligendi] naturaliter ».

h) Ibid., n. 26 (Vivès, t. IX, p. 286): « Prius natura potest esse sine posteriori nisi in priori sit necessitas respectu posterioris, ut est in subiecto respectu proprii accidentis; sed species [intelligibilis] est prior actu intelligendi et non facit necessitatem respectu actus intelligendi, tum quia intellectio est voluntaria per participationem, quia intelligimus cum volumus; tum quia, non obstante quod intellectus habeat speciem intelligibilem, potest impediri ab actione ». D'après le Commentaire d'Oxford, ce Théorème s'établit ainsi :

• Intellectionem intelligibile natura praecedit. Quod est quoniam passio praesupponit agens; - E) [sed] intellectus patitur ab obiecto reali ut in specie intelligibili, patitur passione intentionali et illa passio est receptio intellectionis, quae est ab intelligibili in quantum intelligibile est, relucens in specie intelligibili, et istud pati est intelligere. [Insuper] omnis actio circa aliquid est. - F) [Sed] intelligo quod intellectus de se est ratio immediata recipiendi actum utrumque; quia oportet prius naturaliter esse illum actum quo obiectum est praesens ut intelligibile quam illum qui elicitur [ab intellectu] circa obiectum intelligibile ut praesens. [Sed] illud circa quod est intellectio, alterum est [ab intellectu]».

Quelle raison péremptoire, je le demande, peut nous forcer à voir dans le libellé de Joannes Canonicus, savoir:

Intelligibile intellectionem precedere necesse est autre chose qu'une découpure prise dans le Commentaire d'Oxford? Que si, contre une chance neuf militent en faveur de cette solution, comment soutenir que le court libellé de Joannes Canonicus authentique incontestablement les XXIII chapitres où tant de propositions, conformes à la doctrine de Guillaume d'Ocham, contredisent le plus directement du monde la doctrine constante, de Duns Scot?

A ce compte il n'y a pas de raison pour ne point restituer à Albert le Grand la Philosophia pauperum, (Duhem, Le système du monde, t. V, ch. 11, n. 4, p. 465), à S. Bonaventure et à S. Thomas tant d'ouvrages que, pour des raisons notablement moins fortes, la critique moderne avait rélégués parmi les Opera spuria.

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X.

Combien d'hypothèses fort plausibles ne peut-on pas émettre qui, d'une part, justifient le mot « Theorema » ou < Theoremata Scoti» venu sous la plume de Joannes Canonicus, sans authentiquer pour cela, d'autre part, la compilation que nous ont donnée Maurice, Cavellus et Wadding? Enumérons-en quelques unes.

A) De même que Duns Scot avait extrait d'Aristote un certain nombre de textes et les avait réunis sous le titre de Conclusions Métaphysiques, ainsi des fidèles de Scot ont pu découper dans ses œuvres un certain nombre de passages qu'ils ont nommés Théorèmes de Scot. De fait, l'on trouve dans les Theoremata plusieurs propositions qui ne détonnent pas avec l'enseignement ordinaire de Scot dans ses ouvrages authentiques. Mais suit-il de là que les XXIII chapitres des Théorèmes soient sortis de la plume du Subtil Maître ?

B) Supposons, tout au contraire, un adversaire de Scot, un fidèle d'Ocham, qui recueille en Scot un certain nombre de propositions, mais les fait suivre de commentaires qui les combattent et les censurent. Nous aurons encore des Théorèmes de Scot, mais criblés, censurés, rejetés. De fait, certains chapitres des Theoremata nous présentent bien des textes s'accordant bien avec la doctrine constante du Subtil,

mais suivis de Scolies qui les refutent et, dirai-je le mot, les exécutent. Suit-il de là que non seulemant les propositions, mais les commentaires soient de Scot et nous donnent sa doctrine?

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C) Un docteur cathédrant rédige pour ses élèves une série de propositions dont ils auront à faire usage dans les joûtes de dialectique si fort appréciées à cette époque disputeuse. D'élève à élève cette liste parvient à tel étudiant qui déjà possédait les groupes A et B. Réunir le tout ensemble est affaire si simple que rien ne l'est davantage. Néanmoins, le premier titre Theoremata Scoti» restera sans que le possesseur des listes prenne souci, ou même ait l'idée de le modifier. Et de quel maître cathédrant sont les propositions du groupe C? Sont-elles des thèses, qu'il veut que ses élèves soutiennent, ou des thèses qu'il n'a formulées qu'en vue de les faire attaquer? Sur une liste les scolies peuvent passer pour des moyens que l'élève développera dans la soutenance; sur telle autre liste les scolies paraissent offrir des moyens pour attaquer les propositions. Sur d'autres listes, nul développement dans un sens ou dans l'autre, mais un mot jeté, un simple mot, un bout de phrase, véritable hiéroglyphe pour quiconque ne l'a pas lui-même tracé! Et encore ! On trouve tout cela dans les Theoremata édités par Maurice, Cavellus et Wadding. Suit-il du fait que les listes A, B, C, suit-il, malgré leur titre initialement donné, que la plume de Scot, voulant mettre au jour un ouvrage, ait écrit la totalité des listes A, B, C, ou même une seule d'entre-elles ?

D) Un docteur trouve un thème de leçon, un thème à divisions rigoureuses, et pleines de choses: Finis, intra et extra. - Extra, quanto perfectior, tanto plurium. - Intra, quanto perfectior, tanto pauciorum. Forma, intra et extra. Intra, quanto perfectior, tanto pauciorum. Extra, plurium, etc. ». Belle leçon à développer. Elle se trouve ajoutée aux listes A, B, C, qui elles ne renferment que des sujets sans liens d'idée ni de mots. De qui est le projet de leçon ? Que vient-il faire dans la collection? Qui l'a rangé tout près de colonnes entières de textes découpés, sans plus, dans Aristote? L'on trouve tout cela dans les Theoremata. Et de là suit-il que les XXIII chapitres, ou même un seul soit

sorti de la plume de Scot, de Scot voulant composer l'ouvrage que les éditeurs Maurice, Cavellus et Wadding nous présentent, sous le titre Scoti Theoremata, comme un arsenal de dialectique, où chaque mot est pesé méticuleusement à sa valeur exacte, alors que, oublieux de ce qu'ils avaient dit, naïvement ils déclarèrent que l'auteur de si profondes pensées aurait eu grand peine à s'y reconnaître, tant elles se trouvent les unes avec les autres en confusion, et même en contradiction!

Notez que, pour expliquer le titre Theoremata Scoti» sous la plume de Joannes Canonicus, nous avons supposé au moins une liste de propositions, sinon écrites par Duns Scot lui-même, au moins découpées dans ses ouvrages et rapportées sous le nom de Théorèmes avec des scolies de partisans qui les défendent, ou d'adversaires qui les corrigent et les réfutent. Mais pouvons-nous être bien sûrs que Joannes Canonicus ne s'est pas laissé abuser? L'esprit critique était-il, à cette époque, si scrupuleux sur la paternité littéraire que Joannes Canonicus n'ait pu céder à la tentation d'exalter Duns Scot s'il a cru que sa gloire pouvait gagner quelque chose à l'attribution de propositions dont il n'était pas certain que Duns Scot fût l'auteur? Toujours est-il que Joannes Canonicus, jusqu'à Zerbi en 1482, est le seul qui cite, et seulement une fois, et seulement quant à la teneur d'une proposition, qui cite quelque chose des Theoremata; de tous les contemporains de Scot, disciples ou adversaires, jusqu'en 1482, Joannes Canonicus est le seul qui ait prononcé le nom de Theoremata.

Nous ne savons rien des mœurs intellectuelles de Joannes Canonicus. Et rien ne nous assure que sa citation n'ait pas eu lieu trente ou même quarante ans après la mort de Duns Scot.

Et, fût-il soucieux, ce que nous ne savons nullement, de garder les règles de la critique en fait de paternité littéraire, Joannes Canonicus était-il à même de s'assurer sur l'original, trente ou quarante ans après la mort de Scot, si la liste – je ne dis plus toutes les listes des XXIII chapitres - mais la liste dont il cite un fragment et qui, admettons-le, circulait sous le nom de Scot, était bien réellement de Scot lui-même ? Lorsqu'on réfléchit aux attributions d'ouvrages, faites de

bonne ou de mauvaise foi, dont S. Thomas et S. Bonaventure ont été victimes de la part de leurs admirateurs, il n'est que sage, en critique externe, de ne pas accepter, tout au moins pour l'ensemble des XXIII chapitres des Theoremata, l'unique témoignage de Joannes Canonicus, fût-il autorisé quant à l'unique point de sa citation; et cela, parce qu'il suffit d'une lecture pour juger, en critique interne, du caractère chaotique, hétéroclite et contradictoire de cette informe compilation. Il ne faudrait, à notre avis, pas moins que le manuscrit même de Duns Scot pour nous assurer, vu son caractère interne, que la compilation en XXIII chapitres nommée Theoremata Scoti est bien authentiquement du Subtil Maître.

Que si le texte du De primo Principio et la citation de Joannes Canonicus ne peuvent absolument pas forcer la conviction touchant l'authenticité des Théorèmes, aux yeux de quel critique le fait qu'ils aient été, 170 ans après la mort de Scot, invoqués par Zerbi et publiés, plus tard encore, par Maurice de Port, Cavellus et Wadding, ces deux-ci s'en remettant au jugement du premier éditeur, aux yeux, dis-je, de quel critique ce fait constituerait-il pour leur authenticité une base suffisamment solide? Que des hommes aussi attachés à la gloire de Scot, aussi pénétrés de ses principes, aussi bons liseurs de ses textes, n'aient pu réussir, malgré une souplesse d'interprétation allant jusqu'au prodige, à mettre les XXIII chapitres en cohérence les uns avec les autres et avec la doctrine constante de Scot, ce fait-là doit-il être retenu pour ou contre l'authenticité des Theoremata?

Et que devient la thèse de Sbaralea?

Conclusion: pour nous la chose est évidente: l'écrit publié par Maurice de Port sous le nom de Scoti Theoremata n'est pas un ouvrage que Jean Duns Scot ait composé. Loin donc d'être à sa place parmi les œuvres authentiques du Subtil Maître, il doit dans son ensemble et sans la moindre hésitation possible, être mis au nombre des Spuria Scoti. Telle est, après un examen que nous avons, croyons-nous, très méticuleusement conduit, notre appréciation catégorique et définitive.

P. DÉODAT MARIE, DE BASLY, O. F. M.

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