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LES VITRAUX

DE L'ÉGLISE SAINT-ETIENNE

(ÉGLISE CATHÉdrale)

SANCTUAIRE, TRANSEPTS, CHEUR ET NEF PRINCIPALE.

L'inventaire des richesses artistiques de nos églises a été plusieurs fois demandé par l'Etat aux Sociétés savantes de France. Ce n'est pas sans raison. Ce travail importe beaucoup à la conservation de nos objets d'art. Fait plutôt, il eût épargné à l'art religieux des pertes irréparables. S'il eût existé avant 1790, que d'objets spoliés par la Révolution eussent pu être restitués aux églises qui les possédaient ! Et depuis la réouverture de nos temples à la fin du dix-huitième siècle, que de précieuses épaves de la tourmente révolutionnaire leur eussent été conservées ! Aujourd'hui, on cherche en vain ces objets dans les églises auxquelles ils avaient été donnés ou rendus. C'est donc une pensée toute de conservation qui a inspiré le projet d'inventaire des richesses artistiques de nos églises, et nous sommes heureux de nous y associer par cette étude exclusivement consacrée à la description des vitraux de Saint-Etienne, église cathédrale de Châlons. Ces vitraux, dont la restauration se poursuit activement, composent avec les pierres tombales qu'admirent les connaisseurs toutes détériorées et mutilées qu'elles soient arrivées jus

qu'à nous, la partie la plus intéressante du mobilier de notre église.

Dans divers articles, parus la plupart dans les volumes de notre Société (1), nous avons décrit déjà quelques verrières de nos chapelles et de nos nefs collatérales. Un travail d'ensemble que nous réservons pour l'année prochaine, embrassera tous les vitraux de ces mêmes chapelles absidales et des collatéraux de l'édifice. Nous consacrons notre travail de cette année à l'étude des verrières du sanctuaire, du chœur et des transepts, et enfin de ce qui reste de vitraux peints dans la nef principale de notre cathédrale.

I.

Trois fenêtres éclairent l'abside dans la pârtie supérieure de l'édifice. Les vitraux en sont remarquables par la douceur de leurs tons; le bleu en forme la note dominante: c'est le fond sur lequel sont peints les personnages. La bordure de ces vitraux est variée à chaque division de fenêtre. Ces trois verrières sont les seules historiées du sanctuaire. Les autres fenêtres placécs à droite et à gauche, sur les côtés du sanctuaire, n'ont que des grisailles, grisailles à la vérité très harmonieuses, à dessins très variés, tels que fleurons, quatre-feuilles, entrelacs, etc., et relevées par des points et des raies de couleur, qui produisent un excellent effet. Toutes ces verrières, au nombre de six seulement, verrières historiées et grisailles, semblent remonter à

(1) Voir les Mémoires de la Société d ́Agriculture, Sciences et Arts de la Marne, volumes 1882-1883, 1883-1884, et le Journal de la Marne, du 26 janvier 1885.

une époque rapprochée de la construction de cette partie de l'église toutes, elles sont des œuvres du XIII° siècle.

Les trois verrières historiées du fond de l'abside résument, comme dans un argument, le grand poème de la religion chrétienne en Champagne. Ce poème aura sa synthèse plus complètement exposée dans la grande rose du portail septentrional, tandis que les parties les plus importantes s'en développeront, au gré de la dévotion de nos pères, dans les fenêtres des collatéraux, qui feront, comme nous l'avons dit, l'objet d'une dernière étude.

Ainsi, à chacun des trois tympans des fenêtres du sanctuaire, on remarque la glorification du Christ, celle de la Sainte-Vierge, celle enfin de saint Memmie, apôtre de Châlons.

Le tympan de la fenêtre centrale, composé de six lobes rangés autour de la scène du milieu, représente la résurrection générale. Au centre de la rose, le Christ ressuscité est assis avec une couronne sur la tête sous une architecture, sorte de trône avec dais supporté par des colonnes; il tend les bras à ceux qui ressuscitent. Le nimbe crucifère qui entoure sa tête, rend cette attribution incontestable. Au-dessus de lui, deux anges sonnent de la trompette; autour et au-dessous, les morts ressuscitent; on les voit levant la pierre qui les recouvrait, et sortant du tombeau.

La verrière est partagée ensuite dans toute sa longueur par un meneau; elle renferme dans ses deux divisions les personnages suivants : dans la première de droite, à commencer par le haut, le Christ portant le nimbe crucifère, et couronné ; il a les pieds nus, est assis sur un trône, et bénit de la main droite ; de la gauche, il soutient un livre avec fermoir.

Au-dessous est peinte une crucifixion. Le soleil et la lunc sont placés à droite et à gauche du Christ, au-dessus de sa tête, qui est entourée du nimbe crucifère.

Le titulus est de grande dimension; il porte écrit: IHC NAZ (1), c'est-à-dire Jésus de Nazareth. Au bas de la croix, sont debout, à droite la Sainte-Vierge, chaussée, les mains jointes, et à gauche, saint Jean l'évangéliste, pieds nus, comme doivent l'être les apôtres, et tenant un livre dans sa main.

Pour troisième et dernier sujet, la Vierge, couronnée et nimbée est assise dans une chaire, sous un arc trilobé, elle tient de la main droite une rose avec la tige, de la gauche l'Enfant-Dieu, au nimbe crucifère, qui bénit. Les draperies du bas de la robe de la Vierge ont disparu elles ont été remplacées par un morceau dépareillé, appartenant peutètre à la verrière de la Passion (7° travée, collatéral sud).

Tels sont donc les trois personnages qui remplissent le côté droit de la fenêtre centrale: le Christ assis, le Christ en croix, la Vierge-Mère.

Le côté gauche de la même fenêtre est occupé par les trois principaux patrons de l'Eglise de Châlons, saint Etienne, premier martyr, saint Memmie, apôtre et premier évêque de Châlons, et saint Alpin, le plus populaire de nos évêques, pour l'incomparable service qu'il rendit à nos pères en désarmant par sa prière Attila, vainqueur, aux portes de notre cité.

Saint Etienne est habillé en diacre; il porte la dalmatique et tient le livre des évangiles fermé. Près de lui, à

(1) M. Charles de Linas a observé que cette formule IHC NAZ, Jesus Nazarenus, reproduite tantôt in extenso, tantôt en abrégé dans les verrières ou les émaux, avait toujours été usitée en Allemagne, au moyen âge, pour le titulus, dans la crucifixion; il n'y a jamais rencontré un seul exemple du IHS XPS si fréquent à Limoges. (Article de M. C. de Linas sur les Crucifix champlevés polychromes. Revue de l'Art chrétien, octobre 1885.)

Faudrait-il voir une influence allemande dans cette partie de nos vieux vitraux ?

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