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qu'on défrichait la garenne du Bosc-Fichet, située à gauche de la route départementale du Neubourg à Beaumont-le-Roger, on y trouva de nombreux restes de constructions et de pavages anciens. On en a encore trouvé un peu plus loin, près du Moulin-dela-Forêt. Enfin, j'ai moi-même recueilli sur presque tous les points de mes explorations des boucles et des fibules en bronze argenté ou étamé, absolument semblables à ceux de l'époque mérovingienne qu'on a trouvés en Allemagne, en Angleterre et dans notre pays. En sorte qu'on ne saurait douter du séjour du peuple franc sur le sol où s'élève aujourd'hui la florissante petite ville du Neubourg, dont j'aurai à m'occuper tout particulièrement dans la seconde partie de mes recherches historiques.

CIMETIÈRE FRANC

DÉCOUVERT A MARTOT,

Près Criquebeuf-sur-Seine, canton de Pont-de-l'Arche.

MÉMOIRE DE M. L'ABBÉ COCHET,

Membre de la Société.

Martot, ancienne paroisse supprimée à la Révolution, n'est plus qu'une simple commune du canton de Pont-de-l'Arche (arrondissement de Louviers). Une partie de son territoire, surtout celle qui entoure le château de M. Grandin de l'Eprevier, est remplie de débris antiques. Partout il y a trace d'exploitations romaines, et une villa a dû précéder ici le manoir du moyen âge (1), devenu un château moderne.

Martot, occupé par les Gallo-Romains, le fut aussi au temps des Francs. Cette dernière civilisation, toute militaire, a laissé ici les traces de son passage. Un cimetière est tout ce qui en reste il est vrai; mais

(4) Au XIIIe siècle, l'abbé du Bec-Hellouin possédait à Martot un manoir qui, de 1260 à 1269, eut l'honneur de recevoir et de loger quarante-neuf fois l'archevêque de Rouen, Eudes Rigaud, lorsqu'il faisait, dans sa province ecclésiastique de Normandie, des visites devenues célèbres. La première fois que le grand inspecteur y paraît, c'est en avril 1260, et la dernière, ce fut en août 1269. Il aimait à s'y reposer de ses fatigues, et souvent il y séjourna cinq ou six jours, faveur dont il était avare. Il donne à ce lieu le nom de Maretot et de Marethot. Sa première visite à Martot eut lieu lors de son départ pour le pèlerinage de Saint-Gilles en Languedoc : a apud Maretot manerium abbatis de Becco ». Regest. visitat. archiepisc. Rothom., passim: édit. Bonnin, Evreux, 1846.

dans la tombe, elle y est descendue avec ses armes, son costume et son industrie.

Ce fut en 1851 que l'on découvrit le dortoir des vieux Francs, de ces hommes qui n'étaient plus idolâtres, mais qui n'étaient encore chrétiens que de nom. Ce cimetière, à présent situé sur le bord de la route départementale no 7, qui va d'Elbeuf au Pontde-l'Arche, est également traversé par le chemin qui conduit du château de M. Grandin au hameau appelé le Bas-de-Martot.

Ce champ funèbre, labouré depuis longtemps, a environ 50 mètres de long sur 30 de large. De cet étroit espace on a extrait à diverses reprises plusieurs tombereaux d'ossements qui furent portés au cimetière de l'église. On y a aussi rencontré bon nombre de sarcophages tant en pierre qu'en plâtre gâché. En 1855. j'ai encore vu en place les restes d'un cercueil de plâtre; il ressemblait à ceux de Caudebec-lès-Elbeuf, d'Ouville-la-Rivière et d'Epinay près Dieppe. Quant aux cercueils de pierre, j'en ai vu deux transportés sous la gouttière de la vieille église qui va disparaître (1). L'un d'eux était destiné à des enfants, et au moment de sa découverte il en contenait deux d'environ dix-huit mois. L'auge se compose de deux pièces, mais le couvercle, qui est d'un seul morceau, affecte la forme d'un toît. La pierre est le tuf de nos vallées si souvent employé dans les constructions gallo-romaines et dans nos vieilles églises romanes. Mesuré au dehors, ce petit sarcophage, profond de 35 centimètres, a donné 1 mètre 10 centimètres de long sur 33 centimètres

(4) M. Grandin va construire une nouvelle église, pour les besoins du hameau, dans le champ même de la sépulture des Francs.

de large. Un cercueil pareil a été trouvé par nous à Etretat en 1842 (1), et un autre à Bénouville-surOrne en 1839, par M. l'abbé Durand (2).

Chaque fois qu'une découverte était faite, pour une cause ou pour une autre, M. Grandin recueillait soigneusement les objets rencontrés par la bêche. De cette sorte, il a rassemblé chez lui une petite collection qu'il a malheureusement laissée disperser en cédant aux amateurs les pièces qu'ils désiraient. Le 28 septembre 1855, ayant eu l'occasion de visiter ce qui restait encore, voici les objets que j'y ai recon

nus.

Ce sont d'abord deux vases en terre grise, vernissés de noir au moyen de cette plombagine ou mine de plomb, si prodiguée sur les vases de la période mérovingienne. Leur forme se rapproche également de nos sucriers, et sur leur panse il est aisé de reconnaître ces raies, ces brisures, ces filets et ces entrelacs pratiqués à l'estampille qui caractérisent partout la poterie de cet âge.

Nous donnons ici deux vases francs semblables à ceux de Martot.

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(1) L'Etretat souterrain, 1re série, p. 25, pl. 2, fig. 3.

(2) Mém. de la Soc. des antiq. de Normandie, t. XII, p. 328.

3e Série, TOME IV.

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Nous avons remarqué avec plaisir un vase de verre heureusement échappé à la pioche des ouvriers. C'est une coupe unie de couleur olivâtre, haute de 4 centimètres et large de 10 centimètres. Sa forme hémisphérique, qui est celle de nos bols, a tout le

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cachet de l'époque. J'en ai rencontré une pareille à Envermeu en 1854 (1), et M. Akerman en a dessiné

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deux semblables rencontrées en Angleterre (2). Seulement les coupes franques et anglo-saxonnes que nous

(1) Proceedings of the Society of antiquaries of London, 1855, vol. III, p. 177.- Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie, t. XX, 4e livraison.

(2) Remains of pagan Saxondom, p. 14, plate 6.

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