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CHAPITRE VI.

DEPUIS LE COMMENCEMENT DU XII SIÈCLE JUSQU'EN 1534.

Lubeck. Son origine. Ses accroissements sous Henri le Lion et sous les empereurs Frédéric 1er et Frédéric II. - Ses priviléges.

Bataille de Bornhoeved.

FormaDescription

Révolutions intérieures.

tion de la Hanse. Grandeur de Lubeck.

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-- George Wullenwewer et Marc Meier.

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Leurs vastes

projets. Premières démarches de Wullenwewer en Danemark et en Suede. Bogbinder et Mynter.

Démar

ches de Meier auprès de Henri VIII. — Rapports inédits sur Activité diploles affaires de Danemark et de Lubeck. matique de l'archevêque de Lund. Traité du 9 septembre 1533 entre 'le Danemark et les Pays-Bas.

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de quatre ans. Traité des Lubeckois avec Henri VIII. Christophe d'Oldenbourg. Condottieri germaniques. Waldstein. Déclaration de guerre de Lubeck contre le Danemark et le duc de Holstein. - Progrès rapides de Christophe en Danemark. - Le peuple se lève en faveur de Christiern II. Élection de Christian III par les nobles.

Le pirate Clément. Demande de subsides. — Mynter et Bogbinder à Copenhague. - Revers de Christophe d'Oldenbourg. - États-généraux de Malines.

Au commencement du XIIe siècle, le christianisme, nouvellement implanté dans le Nord, n'avait pas encore anéanti toutes les coutumes païennes, ni tempéré l'humeur sauvage des populations scandinaves. Une

partie des bords de la Trave et l'île de Rugen étaient encore occupées par des tribus slaves qui répandaient le sang humain sur la face de leurs idoles et leur portaient le fruit de leurs pirateries comme une offrande digne d'elles.

Godeschalc, roi des Hérules ou Obotrites, jeta, l'an 1066, les fondements de Lubeck, qui devait être un jour dans ces contrées, un des foyers de la civilisation, un des remparts du christianisme. La Trave déroulait ses larges flots au pied de cette ville, la mer Baltique s'ouvrait devant elle. La nature elle-même lui indiquait la route qu'elle devait suivre pour s'agrandir. Elle lança ses bateaux de pêcheurs sur les flots, puis ses bâtiments de transport, et conquit le commerce du Nord. Quand elle se fut enrichie, elle attira sur elle les regards envieux des états voisins, et fut forcée de prendre les armes pour résister à leur ambition. Cependant elle n'était encore qu'un bourg, que les Rugiens avaient saccagé, lorsqu'en 1144, Adolphe II, comte de Holstein, la releva et la plaça au rang des villes. Elle devint bientôt florissante; mais sa prospérité excita la jalousie du suzerain, Henri le Lion, duc de Saxe, au point qu'il défendit d'y vendre autre chose que des comestibles. Un incendie ayant consumé Lubeck en 1156, le duc profita de cet événement pour engager Adolphe à lui en faire cession sur la promesse de la rebâtir. Henri tint parole et ayant fait de Lubeck une nouvelle ville, il y appela des peuples du Nord, en leur promettant toute liberté de commerce. Ce fut alors qu'il y établit ces fameux statuts qui eurent pour base ceux de la ville de Soest en Westphalie. Lubeck obtint le droit de nommer, pour

diriger les affaires, six bourgmestres, qui, à leur tour, choisissaient douze autres magistrats destinés à leur servir d'assesseurs. Néanmoins les bourgmestres devaient, chaque année, obtenir du duc l'autorisation de rendre la justice. Après la chute de Henri le Lion, l'empereur Frédéric Ier, de cette maison de Hohenstaufen, si libérale pour les villes d'Allemagne, si despotique pour les villes d'Italie, prit Lubeck sous sa protection particulière, lui accorda la franchise de péages presque par toute la Saxe, et conféra aux bourgmestres et aux échevins le droit de rendre la justice. Les bourgeois ne furent plus tenus au service de la guerre, mais seulement à défendre leur ville; ils élisaient leurs prêtres, les présentaient à l'évêque, et ne pouvaient être jugés dans tout l'empire que d'après leurs propres lois (1). Dans la suite, elle fut attaquée par Canut VI, dit le Pieux, et subjuguée par Waldemar II, son frère, qu'un diplôme de l'empereur Frédéric II mit en possession de toutes les provinces septentrionales depuis l'Elbe, en suivant le bord méridional de la Baltique, jusqu'aux embouchures de la Dwina et jusqu'en Livonie: mais les Danois, qui l'avaient maîtrisée par la force, la révoltèrent par leur oppression. Après vingt années de souffrances, Lubeck résolut de secouer le joug qui pesait sur elle. Un jour, au mois de mai, pendant cette fête solennelle du printemps, qu'on célèbre encore dans plusieurs provinces d'Allemagne, une troupe de bourgeois cachant leurs armes sous leurs habits de bal, entrent dans la salle où le chef des troupes danoises présidait à la fête, s'empa

(1) Art de vérifier les dates; Lebas, Hist. d'Allemagne, t. I, p. 336.

rent de lui et de ses officiers, puis courent à la forteresse, et le tocsin sonne, et toute la population, réunie par la même pensée, entraînée par la même colère et le même besoin de liberté, s'élance sur les remparts, attaque ses ennemis, les enchaîne, les massacre, et démolit en quelques instants la forteresse et les cachots. Mais ils n'avaient encore accompli que le premier acte d'un drame sanglant. Les Lubeckois implorent l'appui de Frédéric II, qui donna à leur cité le titre de ville libre et les armoiries de l'empire, l'aigle noire à deux têtes tenant le globe d'or entre ses serres redoutables, emblème que Charlemagne avait emprunté aux empereurs de Constantinople qui avaient voulu symboliser de cette manière leur double domination en Orient et en Occident. Frédéric confirme et étend les priviléges de la ville en 1226 (1). Personne ne pouvait élever une forteresse près de ses murs, la parole des bourgeois suffisait sans qu'il fût besoin d'ôtages; l'empereur promit de nommer son mandataire (rector) parmi les habitants de la ville ou des environs. Plus tard il fut arrêté que quiconque aurait reçu une charge d'un seigneur quelconque ne pourrait être conseiller à Lubeck; que le père et le fils, ou deux frères, ne pourraient remplir en même temps ces fonctions. Personne ne pouvait disposer de son héritage en faveur d'un étranger, d'un chevalier, d'un prêtre, d'un courtisan, non plus que prêter de l'argent à un prince, à un seigneur, revêtu du pouvoir soit temporel, soit spirituel (2).

(1) Le 11e volume de la Revue de Paris, 1838, a publié un brillant article de M. Marmier sur Lubeck. J'en ai fait ample nsage.

(2) Lebas, Histoire d'Allemagne, t. I, p. 336.

La protection de l'empereur ne mit pas les Lubeckois à l'abri de la vengeance de Waldemar; le 27 juillet 1227, les deux partis se rencontrèrent dans la plaine de Bornhoeved. A la tête des alliés venus au secours de Lubeck se trouvait Adolphe IV, comte de Schaumbourg. L'aile gauche était commandée par le valeureux bourgmestre Alexandre de Soltwedel; l'aile droite par le duc Albert Ier de Saxe, géant de taille et

de courage; le centre par Gérard II, archevêque de

Brême.

L'armée danoise, dix fois plus nombreuse que celle des confédérés, avait pour chefs Waldemar II, roi de Danemark, Othon, duc de Lunebourg, Abel, duc de Sleswig.Le combat s'engage. Les confédérés s'élancent intrépidement contre leurs ennemis; mais ils avaient pris une position fatale. Des tourbillons de poussière flottent devant eux, et les rayons d'un soleil ardent les aveuglent. En vain ils cherchent à surmonter par leur courage le danger qui les menace; la nature elle-même lutte contre eux. La situation du terrain, l'éclat de la lumière, trompent leurs efforts, et pendant ce temps, les Danois, usant de tout leur avantage, combattent sans relâche. Harassées de fatigue, abattues, découragées, les troupes de Lubeck commencent à lâcher pied. Le comte Adolphe s'élance avec colère au milieu de leurs rangs, les rappelle à leur devoir et cherche à les rallier. Mais sa voix n'est plus écoutée; ses soldats se débandent et font volte-face. Déjà les Danois s'avancent serrés l'un contre l'autre, et poussant des cris de victoire. Désespéré de voir son armée fuir ainsi devant l'ennemi, le comte se jette à genoux et invoque avec des larmes, le secours de

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