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tails, donnés par J. du Clercq, sur les mœurs, les lois, les arts et les lettres; à cette époque on les a réunis de manière à présenter un tableau, aussi vrai qu'intéressant, du quinzième siècle. C'est un préliminaire utile à la lecture de J. du Clercq, et on le lira avec plaisir en tête de cette Chronique.

J.-A. BUCHON.

DE

JACQUES DU CLERCQ

ET DU FRUIT QU'ON EN PEUT TIRER,

PAR FR. BARON DE REIFFENBERG.

LES personnes habituées à la lecture des anciens conçoivent difficilement l'intérêt que présentent nos gothiques annales. Chez les historiens grecs et latins, les événements se pressent, s'accumulent, se rapportent tous à un centre commun. Dans les beaux temps de leurs républiques, les Romains et les Grecs étaient des factieux qui conspiraient pour le salut ou la prospérité de la patrie. On dirait qu'il n'y avait d'intéressant dans le monde que Rome, Athènes ou Sparte, et que le reste était fait pour servir d'ornement à leur gloire. Qu'était-ce que Afrique, auprès des projets ambitieux d'un trihun? A côté de Périclès ou de César, l'Asie se monMONSTRELET. T, XII. MÉM. DE J. DU CLERCQ. b

T

trait bien petite. Il paraîtrait que l'histoire a suivi – la distribution maintenue dans notre littérature, partagée en classique et en romantique. Là, les unités de temps, d'action et de lieu sont observées, parfois, aux dépens de la vérité; ici on les viole sans scrupule, on se laisse entraîner par les événements qui prescrivent impérativement les règles au lieu de s'y soumettre. D'un côté il y a plus d'art, de l'autre plus de conscience; et comme nous courons après la franchise en littérature, faute d'en mettre dans nos transactions sociales, nous oublions parfois les mensonges pompeux des TiteLive et des Hérodote, pour les récits grossiers mais fidèles de nos chroniqueurs. Les historiens dit Montaigne, sont ma droite balle. Mais il semble qu'il préférait la causerie des mémoires à l'ensemble. imposant de ces grands tableaux, qui représentent toute une époque. Celle où nous vivons aurait pu le satisfaire de tous côtés les mémoires abondent; chacun se croit obligé d'accumuler les matériaux : quand se montrera l'architecte?!!

Les Mémoires de Du Clercq ne sont ni un plai. doyer ni un acte d'accusation; il écrit simplement ce qu'il a vu', ce qu'on lui a conté. Son style est incorrect et diffus, ses phrases interminables, surchargées de répétitions, s'enchaînent au moyen des pronoms relatifs; et souvent même restent sus pendues comme un roc. Le dialecte de sa province

les

introduit dans le récit une foule de locutions barbares, rendues plus méconnaissables encore par fautes des copistes. Plus timide que superstitieux, il n'ose omettre aucun prodige, le moindre conte populaire; mais, comme s'il rendait tout bas hommage à la vérité, il a soin d'ajouter qu'il s'en rapporte à ce qui en est. Une multitude de circonstances ignobles ou puériles prennent place à côté des événements les plus graves. Quand il parle de ce qui s'est passé dans des 'contrées éloignées, il tombe en des fautes grossières; mais ce qui regarde la France et son pays lui est bien connu. Seul il a fait connaître, sans dissimulation, les désordres que tolérait la facilité de Philippe, et les horribles excès commis par l'avidité de ses courtisans. Le caractère du duc de Bourgogne et de son fils, celui de Louis XI, ne sont point tracés expressé ment; mais Du Clercq fournit des couleurs précieuses pour cette peinture. En le lisant avec une curieuse attention, on recueille chez lui une foule de détails de mœurs que rejette l'historien proprement dit, quoiqu'ils donnent de l'individualité, et ce qu'on appelle de la couleur, aux choses et aux personnes. Enfin, il répond, par des faits, aux déclamations, de ces critiques chagrins, qui s'obstinent à voir, dans l'éveil de la raison publique, une émeute; dans la génération nouvelle, une race dépravée et maudite, indigne des siècles passés ; et

b.

ce service, qu'à son insçu il rend au bon sens et à la philosophie, il faut lui en tenir compte. Présentés par d'autres que par lui, ou par ses contemporains, ces faits seraient réputés calomnieux; mais que dire à un apologiste du jour qui s'achève, et de celui qui commence, s'il vivait il y a près de quatre cents ans?

Du Clercq traverse une époque d'environ vingt années. Les événements qu'il raconte ont été retracés par Monstrelet, Commines 2, et Olivier de la Marche 3. Le premier a tout les défauts de Froissart, excepté sa partialité pour les Anglais, et s'approprie rarement les qualités louables de l'écrivain qu'il continue. Mais il est juste d'ajouter que la principale cause de sa diffusion, la multiplicité des pièces originales qu'il conserve, est précisément ce qui le rend précieux à ceux que n'effraie pas une instruction pénible, pourvu qu'elle soit solide. Le curé de Meudon lui reproche d'étre baveux comme un pot à moutarde. C'est encore là une de ces bouffonneries de Rabelais, auxquelles bien des gens font semblant de trouver du sel et d'entendre malice. Le style d'Olivier de la Marche,

I.

Il commence en 1400 et finit en 1444. Voyez la préface du tome I et du tome X de cette édition de Monstrolet. 2. Il commence en 1464 et finit en 1498. 3. Il commence en 1435 et finit en 1492.

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