Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[blocks in formation]

INTRODUCTION.

Avant d'entrer dans le détail de l'histoire des paroisses, je crois utile de parler de l'origine et des transformations des diverses juridictions civiles entre lesquelles le diocèse de Châlons se trouvait anciennement divisé.

Ces divisions civiles sont relativement récentes. Je ne veux pas reprendre ici l'historique d'institutions qui ont subi les modifications les plus variées je ne parlerai pas des anciennes circonscriptions des cités gallo-romaines, de leurs démembrements successifs, à mesure que le système féodal s'établissait plus fermement et morcellait peu à peu le territoire en quelques grands états, en nombreuses seigneuries et en fiefs plus nombreux encore: ce grand mouvement s'opéra complètement avec la chute des Carolingiens et l'avènement de Hugues-Capet. Il ne faut pas qu'on se figure qu'à ce moment une hiérarchie bien exacte fut établie en France : la féodalité n'était pas une constitution régulière, un système certain, ce n'était qu'un amalgame de coutumes nées en quelque sorte spontanément, mais parfaitement appropriées

d'abord aux besoins d'une société qui cherchait et devait. longtemps encore chercher son véritable point d'appui.

D

Née des coutumes germaniques, développée dans l'anarchie sociale des Barbares, écrite dans la loi au neuvième siècle, triomphante au dixième, elle ne date son existence ◄ de elle s'est faite elle-même (1). La société, personne; au Xe siècle, ne comptait que deux classes: la noblesse et le clergé; ceux qui devaient plus tard prendre part au gouvernement des affaires, et bientôt enfin s'asseoir dans les conseils des rois, ceux-là ne comptaient pas encore, enveloppés sur la désignation générique de serfs; le royaume, comme on sait, n'occupait alors qu'une très-faible partie du territoire de la France; le reste appartenait aux comtes ou ducs de Flandres, de Vermandois, de France, de Normandie, de Bourgogne, d'Aquitaine, de Gascogne, de Champagne et de Toulouse (2); au-dessous venaient quelques barons moins puissants, quoiqu'encore presqu'indépendants, comme les comtes d'Anjou, de la Marche, d'Angoulême, et on calcule que le nombre total des seigneuries et des fiefs dépassait 70,000, dont cent d'une réelle importance (5).

Au VI siècle, la Champagne avait été confiée, par le roi Sigebert, à un duc qui fut investi de toute l'administration du pays, mais ces charges n'étaient pas encore héréditaires; au VII siècle, nous trouvons à la tête de la Champagne Drogon, fils de Pépin d'Héristall, et après lui (710), son frère Grimoald. Les années qui suivirent sont remplies de troubles et d'obscurités : les grandes familles commençaient déjà à vouloir considérer les grandes fonctions de l'Etat comme leurs propriétés, et, à ce titre, les fils de Drogon réclamèrent le duché de Champagne; Charles-Martel leur répondit en les faisant jeter en prison, où l'un mourut;

(1) Lavallée. Histoire des Français, tom. I, p. 211.

(2) On sait qu'alors la Bretagne était complètement indépendante. (3) Lavallée, loc. cit.

l'autre s'en retira en embrassant l'état ecclésiastique. On ne connaît plus après la suite de ces gouverneurs, qui entretenaient au-dessous d'eux des officiers à qui ils déléguaient une partie de leur autorité, comme au châtelain de Vitry. Quand se consomma le grand événement de la chute du dernier descendant de Charlemagne, la Champagne était détenue, à titre d'administrateur, par Herbert, comte de Vermandois, mais alors ces nouveaux souverains ne portaient que le nom de comtes de Troyes et ils ne devaient adopter celui de comtes de Champagne qu'au XIIIe siècle. Jusqu'à l'apparition de cet Herbert en effet, nous voyons nos rois intervenir directement, et souvent pour des questions de la plus mince importance, dans les affaires de notre pays, où d'ailleurs ils venaient pour faire de fréquents séjours à leur palais de Ponthion ou à celui d'Olonne, qu'ils possédaient également au bord de l'immense forêt du Der, dans une riche prairie où devait depuis s'élever Saint-Dizier. A cette époque, les véritables officiers de justice, comme aussi les seuls administrateurs de ces contrées, étaient les prévôts (prepositi), qui existaient sous la seconde race et devaient peut-être leur institution à ce grand génie organisateur qui fit l'empire Carolingien; dans la charte par laquelle Lothaire confirma Heribert II, en récompense de ses bons services, dans la possession du comté de Champagne, auquel il avait succédé après la mort de son frère Robert, parmi les témoins figure Gaudridus prepositus de Vitriaco (1) (án 968). En 1003, dans une donation d'Etienne Ier, fils et successeur d'Héribert, se trouve également Guillaume, prepositus de Vitriaco castro (2); une charte de Roger II, évêque de Châ lons, nous apprend qu'en 1055 ce prévôt se nommait Pierre, et ce devait être un personnage important, car il détenait

(1) Cette pièce est datée d'Olonne. (Arch. de l'Aube, fonds de SaintPierre de Troyes.)

(2) Arch. de la Marne: fonds de l'abbaye du Der.

alors plusieurs églises, entr'autres celle de Minecourt (1); enfin, à mesure que nous avançons, nous voyons ces officiers se multiplier, ou du moins des documents nous les font connaître en plus grand nombre on les trouve à Châlons (1134), à Sarry (1132), à Wassy, dès son origine, à SainteMenéhould, à Vertus, à Joinville; j'ai cité le nom de Sarry, village peu important, comme preuve que dès le XIIe siècle, des prévôts devaient exister dans la plupart des localités, mais je suis tenté de croire cependant que ce développement ne dut s'opérer que vers le milieu du XIe siècle au plus tôt; je crois en voir la preuve dans la présence d'un prévôt de Vitry comme témoin d'une donation à l'abbaye de Montier-en-Der, signe presqu'évident à mes yeux qu'à cette époque encore sa juridiction s'étendait jusque dans ces parages éloignés; du reste, parmi ces prévôts, quelques-uns acquirent immédiatement une prépondérance réelle, tels furent ceux de Vitry, de Sainte-Menéhould, de Vertus, de Châlons, de Wassy et de Joinville, desquels nous voyons de vastes circonscriptions dépendre pour l'exercice de la justice. Ce fut la comtesse Blanche qui régularisa la position des prévôts en Champagne en publiant la charte de l'année 1201 qui règle définitivement les fonctions, les gages de ces agents, leur mode de nomination, leur procédure; un passage de ce document établirait sans le moindre doute, à défaut d'autres preuves, l'existence bien antérieure de ces officiers A l'égard de l'amende, y est-il dit, qui se trouvera de plus de XX sols tournois, les prévôts n'en auront

[ocr errors]
[merged small][ocr errors]

:

plus comme autrefois XX sols à quelque somme que cette amende monte, mais la cinquième partie seulement (2).

[ocr errors]

La comtesse décida que les prévôts seraient amovibles; que pour les amendes inférieures à 20 sols, à moins du consen

(1) Arch. de la Marne fonds du chapitre Saint-Etienne.

(2) Il faut remarquer que ce règlement ne s'applique qu'aux prévôts des terres de la comtesse de Champagne, omnibus prepostis terre nostre. »

[ocr errors]
« AnteriorContinuar »