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Officiellement, Li est haut commissaire impérial, directeur général de la défense des frontières maritimes du Nord, surintendant du commerce, gouverneur du Prince impérial, membre du conseil privé, gouverneur général de la province de Pe Tche-li, comte de l'empire avec l'appellation Sou y; en pratique, c'est l'homme le plus important de l'empire chinois.

Li, ou Li Hong-tchang (avec son surnom), ou Li Tchong-tang (avec son titre de grand Secrétaire), dans un pays dont se sont emparés les Mandchous au dix-septième siècle, n'appartient pas à la race conquérante; c'est un Chinois de pur sang. Il est né la deuxième année du règne de l'empereur Tao Kouang, c'est-à-dire en 1823, à Senchou, dans le district de Ho-Fei, dans la province de Ngan-houei. C'est donc aujourd'hui un homme en pleine possession de ses facultés. Il est arrivé aux hautes fonctions qu'il occupe aujourd'hui par son intelligence et ses capacités militaires.

Ses débuts furent modestes. Son père, lettré pauvre et obscur, l'éleva honorablement, malgré ses ciuq enfants dont Li était le second. Le jeune homme passa ses examens avec succès et il eutra à l'Académie des Hanlin en 1848. Puis il retourna dans sa province natale, où il jouait un rôle assez effacé, lorsqu'une grande rébellion, qui ébranla les assises du trône des Mandchous, vint le tirer de la position médiocre dans laquelle il végétait.

C'est pendant la rébellion des TaiPing que Li devait montrer ces qualités d'énergie et de finesse qui ont été, dans des circonstances heureuses, la cause de sa fortune rapide. Les Tai-Ping, partis de la province méridionale du Kouangsi, étaient remontés jusqu'au Yang-tseuKiang, et après avoir pris Nankin en 1853 et avoir fait leur capitale de cette ville importante, envahissaient les provinces centrales et orientales de l'empire. Lorsqu'ils pénétrèrent dans le Nganhouei, Li se mit à la tête d'une petite force, et ne tarda pas à être employé comme secrétaire par le tout puissant Tseng Kouo-fan, gouverneur général des Deux-Kiang et commandant militaire des quatre provinces de Kiang-sou, Nganhouei, Kiang-si et Tche-kiang, le père du

ministre actuel de Chine en France.

L'appui d'un semblable personnage promettait à Li un avancement rapide; en effet il devient juge provincial au Tche-kiang, tout en restant officier, et en 1861, sur une proposition de Tseng, il est nommé au poste important de gouverneur (Fou-tai) de la province de Kiang-Sou, qu'il s'agissait d'arracher aux rebelles, maîtres de la capitale Soutcheou et de plusieurs autres villes importantes.

Li, durant sa campagne contre les Tai-Ping, eut à deux reprises différentes l'occasion de faire preuve de vigueur. La première contre l'aventurier américain Henry Burgevine, qui avait succédé à son compatriote Ward dans le commandement de l'armée connue sous le nom de «Ever victorious Army», Tchang chang kiun, chargée d'opérer contre les rebelles. Burgevine réclamait un arriéré de solde pour ses troupes et, dans un moment de colère, frappa au visage le banquier chinois Taki, qui gardait les fonds. Li demanda au consul américain de faire arrêter Burgevine - ce qui ne fut pas accordé d'ailleurs mais il obtint que le trop bouillant citoyen des Etats-Unis fut remplacé par le capitaine Holland, de l'infanterie de marine anglaise.

La seconde preuve d'énergie que donna Li n'est pas à son honneur.

Le 5 décembre 1863, la grande ville de Sou-tcheou, dans la province de KiangSou, se rendait au major Gordon, commandant des troupes anglo-chinoises. Le général anglais avait donné sa parole d'honneur que les chefs rebelles (wang) auraient la vie sauve; mais dès que Li les eut en son pouvoir, soit que leur attitude insolente l'eût irrité, soit qu'il craignît que, tant que des chefs aussi influents existeraient, l'anéantissement de lenr parti ne fût chose impossible, il les fit immédiatement exécuter.

La colère de Gordon ne connut pas de bornes lorsqu'il vit les cadavres décapités des huit chefs rebelles, et il se mit à la recherche du Fou-tai avec l'intention de mettre à mort, de sa main, l'homme qui n'avait pas respecté la parole donnée. Fort heureusement, Li Hong-tchang, prévenu à temps, évita pendant quelques jours de se rencontrer avec l'officier anglais, qui, dans son

premier mouvement d'indignation, eût probablement coupé court à la carrière Idu futur vice-roi.

La Gazette de Pékin, du 14 novembre 1863, renferme un décret dans lequel il est dit, entre autres choses, que «Li Hong-tchang, depuis qu'il remplit le poste de gouverneur du Kiang-Sou, a montré beaucoup de prudence et de prévoyance et que sa tactique habile a complètement réussi. Il s'est emparé à différentes reprises de plusieurs villes, et il a obtenu de grands honneurs sur le champ de bataille. Et maintenant la prise de Sou-tcheou le rend encore plus digne de louanges. Comme marque de son entière approbation, il est agréable à Sa Majesté de lui conférer le titre honorifique de gouverneur du Prince impérial et de lui faire cadeau d'une jaquette jaune ».

A la fin de la campagne contre les Tai-Ping et à la suite de nouveaux services rendus par lui, particulièrement avec une flotte devant Nankin, l'Empereur conféra au Fou-tai du Kiang-Sou la noblesse héréditaire de troisième rang (Pe-comte) et la plume de paon à deux yeux (chouang yen hoa ling).

Deux ans plus tard, Li Hong-tchang remplaçait son protecteur Tseng comme Gouverneur général des deux Kiang, un des postes les plus importants de la Chine: c'est le seul gouvernement de l'Empire qui embrasse trois provinces: Kiang-Sou, Ngan-houei, Kiang-si, arrosées par le Yang-Tseu-Kiang.

Le 21 juin 1870, le consul de France, M. Fontanier; son chancelier, M. Simon; l'interprête de la légation, M. Thomassin et sa femme, des prêtres, des sœurs de la charité, des négociants russes, étaient massacrés à Tien-Tsin par une foule surexcitée contre les étrangers par de faux rapports. Tseng Kouo-fan était alors vice-roi du Tche-li: soit qu'il eût demandé son changement, soit qu'il se fût montré hostile aux réclamations de la France, on lui choisit un successeur qui ne fut pas suspect d'avoir été mêlé aux massacres. Li avait été envoyé au printemps combattre les rebelles dans le Chen-si; on le rappela pour lui confier le poste occupé par son ancien patron. Chose curieuse, lorsque le successeur de Li, Ma, eut été assassiné à Nankin, en

| juillet 1870, Tseng reprit son ancien gouvernement des Deux-Kiang, protecteur et protégé faisant un véritable chassé-croisé.

Tseng Kouo-fan mourut deux ans plus tard à Nankin, le 12 mars 1872. 11 n'avait que soixante-cinq ans. La Chine perdait en lui un de ses plus grands hommes d'Etat, et Li son protecteur; mais l'ex-secrétaire du général en cher des armées contre les Tai-Ping était devenu le plus formidable rival de son ancien maître.

La mort de Tseng Kouo-fan laissait le champ libre à l'ambition de Li. Il ne redoutait plus que deux de ses collègues; mais l'un, Tso Tsung-Tang combattait les mahométans de Kachgarie, et il ne devait revenir de sa campagne que malade, aigri, insupportable: on l'envoya gouverner les deux Kiang pour remplacer l'autre rival de Li, Chen Paochen, qui s'était laissé mourir fort à propos.

Li est donc aujourd'hui le vrai maître de la politique de son pays. Il a su placer un grand nombre de ses créatures dans des postes importants. Son propre frère Li Han-tchang est même l'un des gouverneurs généraux de l'une des dix-huit provinces. La longue minorité des empereurs Tong-Tche et Kouang-Su aura d'ailleurs contribué beaucoup à affirmer son influence. Lorsque Tong-tche mourut, le 12 janvier 1875, beaucoup crurent que Li, à la tête de son armée, peu éloigné de Péking, profiterait de l'établissement de la nouvelle régence pour tenter un coup d'Etat et se substituer, lui Chinois, à l'occupant mandchou du trône du Céleste-Empire. A-t-il craint de ne pas réussir? A-t-il véritablement le respect de son faible souverain? A-t-il reculé pour mieux sauter? L'avenir seul nous l'apprendra.

Depuis cette époque l'influence de Li Hong tchang a été grandissante. C'est lui qui, après l'attaque de l'expédition du colonel anglais Horace Browne, qui se rendait de Birmanie au Yunnan, et l'assassinat à Manwyne de l'interprète Augustus R. Margary, conduisit avec Mr. (maintenant Sir) Thomas Wade, ministre d'Angleterre à Pékin, les négociations terminées par une convention signée à Tchefou, le 13 septembre 1876.

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<< LI. C'est une comparaison très juste. Veuillez, je vous prie, me faire part de vos idées, quant au meilleur moyen de faire progresser mon pays.

« MORI. Votre question est sérieuse et je n'oserais me risquer à donner une réponse. Je viens d'arriver dans cet immense pays et je n'en connais pas encore l'état intérieur. Toutefois, pour augmenter sa prospérité, la première chose à faire est de choisir les personnes dont les capacités les rendent plus propres que d'autres à s'occuper d'un semblable sujet. Ceci vous semblera clair. Cependant, à moins qu'il n'y ait trente Li Hong-tchang de plus en Chine, la besogne ne peut être exécutée. «LI (souriant). Pourquoi ditesvous cela? Il y a cent Li Hong-tchang en Chine. << MORI. Cela peut être; mais à quoi servent-ils, s'ils n'occupent pas leurs

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vraies places dans des postes comme ceux de gouverneurs des dix-huit provinces ou de ministres du Tsong-li Yamen? Dans mon humble opinion, ces jeunes gens qui étudient en ce moment en Amérique, auront, lorsqu'ils seront devenus hommes, une influence semblable à celle que possède aujourd'hui Votre Excellence, et ils iront loin.

«LI. Je suis tout à fait de votre avis. C'est moi qui ai fait partir ces jeunes gens pour l'Europe, et je place en eux de grandes espérances pour l'avenir».

Mais si le ministre chinois connaît les avantages qu'il peut tirer de l'Europe, il n'en désire que ce qui pourra, à son point de vue, relever la Chine. Il n'a donc cure ni de la littérature ni des arts de l'Occident; il n'en souhaite que la force militaire et ce qui peut l'augmenter: télégraphes et chemins de fer, qu'il ne fera construire toutefois que lentement, car il ne veut pas être à la merci de l'étranger, et il attend, pour donner à ses plans un plus grand développement, qu'il ait un personnel chinois suffisant. Il nous donne bien la mesure de l'amitié qu'il nous porte lorsqu'il écrit, dans un document secret, au premier ministre du roi de Corée: «On combat les poisons par les poisons, et les étrangers par les étrangers».

Il lui a été impossible jusqu'à présent de résister ouvertement à l'invasion étrangère; il a été obligé de céder devant les Japonais à Formose, devant les Anglais en acceptant la convention de Tchefou, devant les Russes en signant le traité de Kouldja; mais, lorsque l'occasion lui a semblé favorable, il a engagé la lutte pacifiquement. C'est ainsi qu'il a mis le négociant Tong King-Sing à la tête de la compagnie de navigation à vapeur dite la Chinese merchants steam navigation Company, subventionnée par lui pour transporter le riz et faire la concurrence aux entreprises anglaises et américaines sur la côte et sur le Yang-Tseu-Kiang. Mais, comme l'a dit M. Mori, il faudrait trente Li Hong-tchang pour régénérer cet empire de 400 millions d'habitants qui, semblable à un vase trop plein, déborde sur les pays voisins.

La Chine aura-t-elle le temps d'attendre la grande révolution sans laquelle elle perdra son unité. Elle est poussée de toutes parts: une nation plus jeune,

plus active, plus entreprenante, surveille ses moindres fautes pour en profiter: le Japon est prêt à recueillir les épaves échappées au Céleste Empire, et désireux de s'emparer de la suprématie dans l'Extrême-Orient. Li Hong-tchang seul sera impuissant à conjurer la tempête; s'il eût été capable de le faire, il y a sept ans déjà qu'il eût pu montrer qu'il en avait le désir.

grand de six pieds et mince; il a les traits fins, l'œil vif, et beaucoup de bonhomie pleine d'une aimable brusquerie, se traduisant d'une manière toute méridionale par des gestes, dont les Chinois sont généralement très sobres. Dans ses familiarités, s'il tient sa longue pipe à bouquin de jade et à fourneau de cuivre, il vous en frappe fréquemment le bras lorsqu'il veut attirer particulièrement l'attention sur un point de la conver

Enfin, pour terminer un portrait phy-sation. D'autres fois, surtout lorsqu'il sique de l'homme d'Etat chinois, que nous devons à un ami, très au courant des choses de l'Extrême-Orient, et qui se cache sous le pseudonyme de T. Choutze:

«Li Hong-tchang a beaucoup de distinction dans toute sa personne. Il est

discute la solution d'une affaire, sa main, comme le couteau d'exécuteur, s'abat de haut en bas; ce geste, qui lui est très familier, signifie que les têtes sont tombées: ce qui n'a jamais l'air de lui causer autre chose que de la bonne humeur ».

KAO.

CONGRÈS INTERNATIONAL DES ORIENTALISTES.

Monsieur,

ONZIÈME SESSION.

PARIS, 5-12 Septembre 1897.

Les Orientalistes réunis à Genève, au mois de septembre 1894, ont décidé, à l'unanimité, que le prochain Congrès se tiendrait à Paris dans le courant de l'année 1897.

Les Orientalistes français se sont concertés afin de fixer la date, de constituer les différentes sections et de tracer provisoirement le tableau des travaux auxquels ils se proposent de se livrer avec le concours de leurs Collègues des différents pays de l'Europe, de l'Amérique et de l'Orient, afin de soutenir l'essor pris depuis plus de vingt ans par l'étude des Langues, de l'Histoire et de l'Archéologie orientales.

Nos Collègues ont été d'avis de fixer la durée du Congrès du 5 au 12 septembre 1897, et vous trouverez, Monsieur, dans le tableau ci-joint, la liste des sections dans lesquelles ils verront s'inscrire avec le plus vif plaisir tous les savants qui voudront bien se rendre à l'appel qui leur sera adressé.

Veuillez agréer, Monsieur, les expressions de ma considération la plus distinguée. Le Président, CHARLES SCHEFER.

Paris, Mai 1896.

Un avis publié ultérieurement fera connaître les facilités qui seront accordées aux Orientalistes par les Administrations des chemins de fer et l'emploi des journées pendant leur séjour à Paris.

M. ERNEST LEROUX a été désigné pour être le trésorier et l'éditeur du Congrès. Il a été décidé que la cotisation serait fixée à Vingt francs.

Protecteur du congrès: M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE.

Commission permanente. Président: M. CHARLES SCHEFER, Membre de l'Institut, Administrateur de l'Ecole des Langues Orientales vivantes, rue de Lille, 2.

Vice-Président: M. BARBIER DE MEYNARD, Membre de l'Institut, Président de la Société Asiatique, Professeur au Collège de France, boulevard de Magenta,18. Secrétaires: MM. MASPERO, Membre de l'Institut, Professeur au Collège de France, avenue de l'Observatoire, 24. HENRI CORDIER, Vice-Président de la Commission Centrale de la Société de Géographie, Professeur à l'Ecole des Langues Orientales vivantes, place Vintimille, 3.

Membres: MM. E. AYMONIER, Directeur de l'École Coloniale, rue du Général Foy, 46. Eм. GUIMET, Directeur du Musée Guimet, place d'Iéna. JULES OPPERT, de l'Institut, Professeur au Collège de France, rue de Sfax, 2. G SCHLUMBERGER, de l'Institut, avenue d'Antin, 27. EM. SENART, de l'Institut, rue François 1er, 18. Marquis DE VOGUE, de l'Institut, rue Fabert, 2.

Trésorier et Éditeur du Congrès: M. ERNEST LEROUX, rue Bonaparte, 28.

Commission générale

d'organisation.

Première Section, Langues et Archéologie des Pays Aryens: a) Langues et Archéologie de l'Inde: MM. BARTH, BRÉAL, SENART, VINSON. Secrétaire: M. SYLVAIN LEVI. b) Iran: MM. CARRIÈRE, DIEULAFOY, DROUIN, BLOCHET. Secrétaire: M. MEILLET. c) Linguistique: MM. BRÉAL, V. HENRY, PAUL BOYER, Ed. SPECHT. Secrétaire: M. LOUIS DUVAU.

Deuxième Section, Langues et Archéologie de l'Extrême-Orient: a) Chine et Japon: MM. CORDIER, DEVERIA, GUIMET, DE ROSNY, ED. SPECHT. Secrétaire: M. ED. CHAVANNES. b) Indo-Chine, Malaisie et Polynésie: MM. AYMONIER, BONET, CORDIER, MARRE. Secrétaire: M. P. LEFEVRE-PONTALIS.

Troisième Section, Langues et Archéologie Musulmanes: MM. BARBIER DE MEYNARD, DEREN BOURG, HOUDAS, SCHEFER. Secrétaire: M. CASANOVA.

Quatrième Section, Langues et Archéologie Sémitiques: a) Araméen, Hébreu, Phénicien, Ethiopien: MM. Ph. BERGER, RUBENS DUVAL, Marquis DE VOGÜÉ. Secrétaire: M. L'Abbé CHAвот. b) Assyrie: MM. HEUZEY, J. OPPEKT, L'Abbé QUENTIN, THUREAU-DANGIN. Secrétaire: R. P. SCHEIL.

Cinquième Section, Egypte et Langues Africaines: MM. GUIEYSSE, Le Général HANOTEAU, LEFEBURE, MASPERO, PIERRET. Secrétaires: MM. RENE BASSET et MORET.

Sixième Section, Orient, Grèce. Relations de l'Hellénisme avec l'Orient. - Byzance: MM. D. BIKÉLAS, E. LEGRAND, G. SCHLUMBERGER. Secrétaires: MM. JEAN PSICHARI et THEODORE REINACH.

Septième Section, Ethnographie, Folklore de l'Orient: MM. Le Prince ROLAND BONAPARTE, Le Docteur E.-T. HAMY, GIRARD DE RIALLE. Secrétaire: M. F. GRENARD.

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