Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Est-ce doncques celluy tant congneu Molinet? (1) C'est luy seul qui mouloit doulx mots en molin net. - Mais qui fut l'homme heureux qui tant luy en aprit? -Des cieulx vint l'influence en son sublime esprit.

--

N'eust-il nul précepteur, Greban ou maistre Alain? Son maistre qui cy gist fut George Chastellain. L'ensuivit il de près ? Est pair, ou s'il le passe? Tous deux on peult noter en regle et en espace. Mais à qui comparer les peust on sans mespris? L'un pour Virgile et l'autre est pour Ovide pris. - L'un doncques fut plus grave et l'autre plus facile ? -Plus humain fut Ovide et plus divin Virgile.

--

---

O tous deux bien heureux qui tels tiltres méritent!
Leurs engins, leurs vertus, de gloire les héritent
Qui pourra plus jamais à tels los parataindre
Nully qui sache plume en noir actrament teindre.
Combien a perdu donc la langue Gallicanne..
Par leur mort, elle est cheutte en basse Barbacanne.
En quel temps, soubs quels roys furent ils florissans?
Va lire leurs labeurs partout resplendissans.

Pourquoy se dirent ils Indiciaires lors ?

Pour ce qu'ils ont monstré d'histoire les trésors. - Las que peu de gens sont qu'on sçaiche avoir vescu! Ceulx cy font les gens vivre et la mort ont vaincu. Comment a nom ce lieu qui tels les a nourry?

- Valenciennes, val doulx, val insigne et flory. -- Où sont leurs monuments et précieux tombeaulx? En la bouche des bons et en leurs escripts beaulx. O Dieu! combien vault mieux tel tombe que de cuivre; D'autant que plume vole où métal ne peult suivre!

(1) Molinet mourut en 1508. J. A. B.

Georges Chastellain a laissé un grand nombre d'ouvrages en vers et en prose; quelques-uns seulement ont été imprimés. La bibliothèque royale possède quelques manuscrits de lui. Ces manuscrits sont inscrits sous les n°. suivants: 7392 mss. fr. 7686 mss. fr. 9837/14 mss. fr.

7427 mss. fr. -76552 mss. fr.

[blocks in formation]

[ocr errors]

8005/3 mss. fr.

8348 et

10025/13 mss. fr. 73852 mss.

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

fond de l'abbaye St. Germain des Près. Voici une note de ce que contiennent ces divers manuscrits.

Les n°. 73852 et 7423 renferment le même ouvrage. Le n°. 73851⁄2 est d'une assez mauvaise écriture du 16ème siècle Le n°. 7427 au contraire est d'une fort belle écriture gothique de la fin du 15ème siècle, sur parchemin, avec 8 jolies miniatures pages 7. 15. 24. 29. 40. 49. 60. 68. La miniature page 40 représente Job nu sur son fu mier et trois musiciens debout devant lui et cherchant à le distraire avec leurs instruments; l'un tient une mandoline, l'autre une petite harpe de la forme des harpes irlandaises, le troisième une vaste flûte de Pan. Le titre de ce manuscrit format in 4°. précède la table, ainsi qu'il suit.

Cy commence la table des Rubrices de ce présent traitie intitulé: De plusieurs remontrances selon le stile Jehan Bocace par manière de consolation adreschans à la royne d'Angleter

re fille à Regnier roy de Naples, de Cecille et de Jhérusalem. (1)

Cette reine d'Angleterre est Marguerite d'Anjou, femme d'Henry VI, qui après les mauvais succès de 1463 parvint à fuir d'Angleterre, arriva à l'Écluse et fut fort bien accueillie du duc Philippe-le-Bon, tandis qu'Édouard IV, de la branche d'York, faisait mettre à mort son mari. Elle était fille de René roi de Sicile, nièce de Charles VII, et cousine de la reine de Chypre.

Chastellain suppose qu'une princesse exilée (la reine d'Angleterre) s'adresse à lui pour lui demander ses conseils, et ainsi que dans tous les poèmes du temps il a une vision.

« Je me trouvay, dit il, ne sçais comment, en une cimetierre pleine de tombes richement ornées de pointes d'or et d'azur, de diverses armes de seigneuries et avec multitude de divers titres en lettres de couleur étoient estoffées aussi de diverses images de porphire et d'albâtre et de maintes autres précieuses matières. »

En contemplant ces tombeaux il reconnaît les insignes de princes Assyriens, Indiens, Persans, Grecs, Romains Bretons, Allemands, Italiens, Espagnols et Français. Au milieu du cimetierre était placé un temple de forme ronde dans lequel entre Georges Chastellain. Dans l'intérieur du

(1) Il a été imprimé à Paris par Galion du Pré l'an 1527 sous le titre de Temple de la ruine d'aucuns nobles malheureux tant de France que d'autres nations etrangères, à l'imitation de Bocace, J. A. B.

temple se trouvaient des tableaux qui représentaient la vie de ceux dont les tombeaux étaient placés dans l'enceinte extérieure, depuis Adam jusqu'au roi Jean de France. A ce moment entre dans le temple l'ombre du roi Richard d'Angleterre suivie de celles de deux rois d'Écosse qui traversent le temple et dont l'auteur lit à mesure les infortunes, écrites sur les murs du temple.

Suivent un grand nombre d'autres rois ou princes. Au chapitre 9 paraissent Jacques de Lalain, un des héros de l'époque et le favori de notre auteur, et Cornille bâtard de Bourgogne.

« Vinrent après, dit Chastellain, deux chevaliers en manteaux de larmes épintelés de sang rouge parmi, et dont les corps dessous reluisoient comme vericle; et portoient image de haute valeur, semblant de vertu et de noble affaire mais de pauvre et escarse destinée en longuesse de vivre. L'un si étoit messire Cornille bâtard de Bourgogne, l'autre messire Jacques de Lalain, tués en subit, l'un d'une picque, l'autre d'un coup de canon. Si se vinrent droit cy remontrer avec les autres, non pour eux douloir de leur mort ni des facteurs, mais pour arguer contre Fortune qui ne leur avoit souffert vie pour à haut contendre et de quoi avant demi vie leur avoit préparé si soudaine fin. »

Il consacre aussi un chapitre à Jacques Cœur. « Et combien, dit-il, qu'entre les hauts princes et les nobles barons enuis (avec peine) ont député siége à ceux de bas état, toutes voies telle peut-être la vertu de l'homme, telle sa fame et au

torité à son entrée que de l'issue qui forme son titre tel ou tel, on peut et doit faire narration à l'exigent de la cause. Ceci je dis pour clair homme noble à cause de vertu et de haut affaire, et de qui les nobles, si vertu leur est chère, ne doivent avoir vergogne de lui prêter escout; ce fut Jacques Coeur, argentier jadis du roi Charles, homme plein d'industre et haut engin, subtil d'entendement et haut emprendre; et toutes choses, comme hautes fussent, sachant conduire par labeur. Donc sa diligence et activité qui tout se convertissoit en allaires publiques et en chose de profit et de gloire à son maître, lant multiplia en bien que en l'état de sa vocation n'avoit pareil à lui. Au monde étoit venu de cent à cent mille; et de cent mille au nombre de millions par son sens. La gloire de son maître fit-il bruire en toutes terres, et les fleurons de sa couronne fit-il resplendir par les lointaines mers. Tout le levant il visita atout (avec) son navire; et n'y avoit en la mer d'orient mât revêtu si non des fleurs de lys. Alexandrie et Kaire lui étoient concédées portes, et ne voloient ses yeux qu'en la circuition du monde, pour tout seul l'estraindre; et quéroit à appliquer à lui seul par vertu, ce en quoi les diverses nations du monde labourent ensemble par divers regards. Donc envie crut dure sur lui et s'espentèrent les cœurs des hommes de son haut contendre. Mais comme fortune l'avoit mené au sommet de la haute périlleuse roche, là où le monter plus haut étoit impossible et le descendre naturel et de grand péril, lui véant toudis plus à

« AnteriorContinuar »