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le plus affligeant de nos désastres, et presque eu même temps l'aspect le plus consolant de nos ressources et de nos succès (1).

Jules Chifflet avait, ainsi que je viens de le dire, publié à Bruxelles chez Velpius, en 1634, la Chronique de Jacques de Lalain. J'ai collationné avec soin son édition avec le manuscrit. 118 de la bibl. du roi et je l'offre avec confiance au public comme l'ouvrage d'un amusant historien trop long-temps négligé et comme une peinture animée et intéressante des mœurs du 15. siècle.

Le N° 8407 paraît renfermer les actes originaux du roi d'armes de la Toison-d'or, actes d'après les quels G. Chastellain a composé sa Chronique de Jacques de Lalain. J'y ai retrouvé l'historique de presque toutes les emprises de Jacques de Lalain et ils se retrouvent textuellement intercalés dans la narration de G. Chastellain. On lit d'ailleurs au chapitre LXXVIII, lors qu'il rend compte du pas de la Fontaine des Pleurs, la phrase suivante:

« Et afin que sçachiez et croyez cestuy traicté estre vray, Toison d'Or, par l'ordonnance de duc de Bourgogne son prince et son souverain seigneur, les fit et eserivit au mieux qu'il put, non pas si authentiquement comme il eut bien voulu et que la matière le requéroit, car veritablement ce fut une noble et haute emprise, honorablement conduite du premier jusques en fin et bien digne de mémoire; si ne se devoit pas celer ni taire une si notable emprise. >>

Le Febvre de S. Remy étoit alors Toison-d'Or, ou roi d'armes de cet ordre. En comparant les

(1) Le Jouvencel de Jean de Beuil fait partie de cette collection,

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différentes pièces insérées au N°. 8407 avec les mêmes écrits dans Georges Chastellain on voit évidemment qu'il les a insérées telles qu'elles lui avoient été données et comme des bulletins officiels auxquels il se seroit donné de garde de rien changer:

A la tête du même manuscrit se trouvent un grand nombre de lettres de défi envoyées à différents chevaliers françois et étrangers par le sénéchal du Hainaut, Jean de Werchin.

Voilà tous les manuscrits de Georges Chastellain qu'il m'a été possible de me procurer. Je publierai dans cette collection son éloge du duc Philippe et le fragment de sa chronique de Bourgogne. Quant à ses autres ouvrages en prose, il m'est impossible de les retrouver; je n'ai épargné jusqu'ici aucune recherche pour y parvenir; je continuerai encore mes recherches, et si je suis assez heureux pour les découvrir je me hâterai de faire jouir le public des ouvrages d'un historien si inconnu, et digne cependant d'être placé au rang des écrivains les plus distingués de l'aurore de notre littérature. Je me contenterai maintenant de citer, d'après les chroniques manuscrites de Molinet, la table des chapitres suivants d'un ouvrage de Georges Chastellain qui ne nous est pas parvenu.

Les principaux exploits en armes du duc Charles, écrits par messire Georges Chastellain, chevalier, son Indiciaire.

I. Le premier grand exploit en armes du duc Charles fut son voyage en France, dont s'ensuivit la journée de Mont-le-Héry,

II. Le voyage de Liége, où, en la vertu de son père encore vivant, il humilia les liégeois qui depuis s'élevèrent contre lui nonobstant ôtages.

III. Comme son père le duc Philippe et lui allèrent à Dinant.

IV. Comme après le trépas de son père, à cause de Nuys assiégé des Liégeois, il alla au pays et le conquit tout d'un bout à l'autre, villes et châteaux, et les prit par siéges et par armes; gagna les dits Liégeois et les occit par bataille à Bruscan, entra dedans Liége par les murs qu'il fit abattre, ensemble les portes, et emporta leur perron à Bruges, et fit de grandes exécutions en la ville.

V. L'armée qu'il mena à Péronne à l'encontre des François, là où le roi en personne avec son connétable lui vint au devant pour rompre cette aigreur et emprise.

VI. Le retour de Péronne à Liége, la dernière fois, dont la cité fut arse, démolie et mise à perpétuelle désertion, le roi même étant venu avec lui à cette piteuse ruine.

VII. Le voyage d'Anvers et toutes les dépendances d'iceluy.

VIII. Le voyage de Beauvais et toutes les conditions.
IX. Le voyage de Rouen.

X. Le voyage et conquête de Gueldre.

XI. Le siège de Nuys, qui dura près d'un an, où il exposa chevance innumerable, et grande planté de vaillants hommes de guerre, et eut l'audace d'envahir l'empereur et la puissance de Germanie, son siége de Nuys bien gardé.

Les Magnificences du duc Charles recueillies par le méme Chastellain.

I. La première fut à Bruxelles, là où, lui assis en son frône, l'épée nue, que tenoit son écuyer d'écuyerie, fit convenir Gantois à compte et à genoux devant lui atout

leurs privilèges, et en présence d'eux les coupa et déchira à son plaisir, ce qui est de perpétuel record, et non oncque veu la pareille.

II. A Bruges en l'Eglise de Notre-Dame, où il tint sa première fête de la Toison-d'Or, en présence des ambassadeurs du pape, du duc de Guyenne, du roi de Sicile, du roi d'Arragon, du roi de Naples, du roi d'Écosse, du duc de Calabre et du duc de Bretagne.

III. La solennité de ses nopces, en la même ville de Bruges; les riches et somptueuses joûtes qui s'y firent, et les diverses excessives coûtanges et pompes montrées en la salle durant la fête.

IV. L'audience qu'il mit sus en son nouveau venir, ef comme il alla et repassa par diverses villes, où il se présenta en public spectacle de tout le monde pour ouïr tou

tes causes.

V. Comme sa magnificence fut montrée en son grand navire, qu'il maintint sur la mer fort longuement contre les François et le comte de Warvic.

VI. Comme à St. Omer, devant l'ambassade du roy, son trône bas et haut, sur terre et par-tout, étoit éterni d'or à cinq dégrès de haut tel que pareil n'avoit été vu.

VII. Comme il montra sa magnificence à Trèves, devant l'empereur Frederic, en maintes et diverses manières bien hautaincs.

VIII. La fête de la Toison-d'Or en Valenciennes, où il changea les manteaux d'écarlate en velours cramoisi, avec son entrée qui étoit pompeuse à merveilles, et joûtes et tournoys de même.

IX. La translation du corps de son père, le duc Philippe, par singulières cérémonies bien à recommander, dont il s'acquit los et gloire.

X. Comment il reçut à Gand l'ordre de la Jarretière.

XI. Comme il se vint seoir en son parlement à Malines

en habit ducal, et entra en la ville en ce même état, le chapeau en tête, que multitude de gens jugèrent être cou

ronne.

Le recueil imprimé des poésies du même Molinetcontient une pièce de vers de G. Chastellain que je n'ai vue dans aucun de ses manuscrits; c'est certainement la meilleure et la plus intéressante de celles qu'il a écrites. Elle a été réimprimée plus tard dans la Légende de maître Pierre Faifeu; c'est une revue historique des principaux évènements de son siècle. Elle a été complétée par Molinet. Les deux ouvrages dans les quels cette espèce de chronique en vers a élé imprimée étant devenus fort rares, je crois être agréable au public en la plaçant ici. Elle est écrite avec grâce et fait d'ailleurs partie nécessaire de l'histoire de ce temps.

Recollection des merveilles, advenues en nostre temps, commencée par très élégant orateur, messire Georges Chastellain, et continuée par maistre Jean Molinet.

Qui veult ouyr nouvelles
Etranges à conter ?
Je sçay les nompareilles
Qu'homme ne sçait chanter
Et choses advenues
Depuis long-temps en çà;
Je les ay retenues,
Et sçay comment il va

(1) Les faits et dits de feu de bonne mémoire maitre Jehan Molinet M. D. XL. Paris en la Rue-Neuve Notre-Dame, à l'enseigne de l'écu de France.

(2) La Légende de maître Pierre Faifeu mise en vers par Charles Bourdigné. Paris. De l'imprimerie d'Antoine Urbain Coutelier MDCCXXIII.

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