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triomphe de l'eau: pourquoi le bœuf et la chèvre ne tuent-ils pas le porc? Sseu est le serpent; chen est le singe; or le feu triomphe du métal; pourquoi donc le serpent ne mange-t-il pas le singe? Le singe redoute le rat; celui qui mord le singe, c'est le chien; or le rat correspond à l'eau et le singe au métal; mais l'eau ne triomphe pas du métal; pourquoi donc le singe redoute-t-il le rat? Siu 戌,c'est la terre; chen 申, c'est le singe; or la terre ne triomphe pas du métal; pourquoi donc le singe craint-il le chien?» ').

Au cours de cette discussion, Wang Tch'ong a l'occasion de citer tous les animaux du cycle, à l'exception du dragon; mais cette lacune se trouve comblée par un autre passage du même auteur (Lonen heng, chap. XXIII, § yen tou) où nous lisons: « Tch'en est le dragon; sseu est le serpent, 辰為龍。巳為蛇。

1) Louen heng, § Wou che (chapitre III, page 23 ro de l'édition de 1791

du Han wei (song chou):且五行之氣相賊害。含血之蟲 相勝服。其驗何在。日寅木也。其禽虎也。戌 土也。其禽犬也。丑未亦土也。丑禽牛.未禽 羊也。木勝土。故犬與牛羊虎所服也。亥 水也。其禽豕也。巳火也。其禽也。子亦水 也。其禽鼠也。午亦火也。其禽馬也。水勝火。 故豕食地。火為水所害。故馬食鼠屎而腹脹。 日審如論者之言。含血之蟲亦有不相勝之 効。午馬也。子鼠也。酉雞也。卯兔也。水勝火。 鼠何不逐馬。金勝木。雞何不啄兎。亥豕也。 未羊也。丑牛也。土勝水。牛羊何不殺豕。巳 蛇也。申猴也。火勝金。何不食獼猴。獼猴 者畏鼠也。囓獼猴者犬也。鼠水獼猴金也・水 不勝金。獼猴何故畏鼠也。戌土也。申猴也。 土不勝金。猴何故畏犬。

Ainsi, on trouve exposée, dès le premier siècle de notre ère en Chine, la théorie complète de l'équivalence des douze animaux avec les douze caractères cycliques.

Peut-on remonter plus haut encore et retrouver en Chine des traces du cycle des douze animaux antérieurement au premier siècle de notre ère? Wang Ying-lin le croit, mais Tchao Yi le conteste. Nous allons montrer que c'est ce dernier qui a raison, car les textes qu'invoquent Wang Ying-lin et les érudits qui soutiennent la thèse que lui ne sont rien moins que probants.

Les Ordonnances mensuelles (chap. Yue ling) du Li ki disent que, pendant les trois mois de printemps, le Fils du Ciel mange du mouton; pendant les trois mois d'été, du coq; au milieu de l'année, du bœuf; pendant les trois mois d'automne, du chien; pendant les trois mois d'hiver, du porc.

Tcheng Hiuan (127-200) explique que le mouton est un animal qui correspond au feu; comme le printemps est encore froid, le Fils du Ciel mange du mouton pour mettre l'accord dans son tempérament (en le réchauffant) 羊火畜也。時尚寒,食 2. (Li ki, chap. XIV, p. 4 v°).

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K'ong Ying-ta (574-648) commente cette glose de Tcheng Hinan en montrant que, suivant la théorie qu'elle suppose, le coq correspond au bois; le mouton, au feu 1); le bœuf, à la terre; le chien, au métal; le porc, à l'eau; mais il a soin d'indiquer en même temps une autre théorie d'après laquelle le coq correspond au sigue yeou, c'est-à-dire au métal. C'est cette seconde théorie seule qui montre la liste des douze animaux correspondant aux douze caractères cycliques, et, puisque cette seconde théorie n'est supposée ni par le texte du Yue ling, ni par le commentaire de Tcheng Hiuan, on

1) Il semblerait cependant que, à s'en tenir au texte du Yue ling, le mouton dût correspondre au bois puisque c'est cet élément qui symbolise le printemps; de même, le coq devrait correspondre au feu, symbole de l'été.

voit que les cinq animaux mentionnés par le Yue ling n'ont aucun rapport avec le cycle des douze animaux.

Je ne crois pas non plus que le cycle des douze animaux soit nécessairement impliqué dans le texte du Yue ling où il est dit que, le troisième mois de l'hiver, on accomplit la cérémonie de faire sortir de ville un boeuf en terre. S'il est vrai, en effet, que le troisième mois de l'hiver soit marqué du caractère tch'eou H, lequel correspond au boeuf dans le cycle des douze animaux, on peut fort bien concevoir cependant que le choix du mois, comme celui de l'animal, aient été dictés ici par des considérations qui n'ont rien de commun avec la correspondance entre les caractères cycliques et les animaux; nous nous trouvons en présence d'un rite du labourage: au moment où l'hiver va prendre fin, on fait sortir dans la campagne un boeuf en argile, symbole de la victime expiatoire qui détourne sur elle tous les maux susceptibles d'atteindre le bœuf de labour. Cependant il faut reconnaître que la coïncidence de la désignation simultanée du douzième mois et de l'animal bœuf par le même caractère tch'eou n'apparaît pas comme fortuite dans le Heou Han chou où nous lisons: «Le dernier mois de l'année, on dresse six bœufs en terre en-dehors de tout ville qui est capitale de royaume ou préfecture de commanderie; tch'eou est (en effet) l'emplacement qui sert à renvoyer le grand froid» ti 是月也立 土牛六頭於國都郡縣城外,丑地以送大寒。 Pour expliquer ce passage, le commentaire de 676 ap. J.-C. ajoute: «Le Yue ling tehang kiu dit: La place occupée par ce mois se trouve en tch'eou; or tch'eou correspond au bœuf. Le froid allant atteindre son apogée, on fait sortir des images d'êtres qui le symbolisent afin de montrer qu'on le renvoie au loin et aussi qu'on fait par là remonter le principe yang». D'après cette glose, la raison pour laquelle on placerait hors de ville des boeufs en terre dans le douzième mois serait la raison suivante: lorsqu'arrive le douzième mois, on

veut témoigner que le froid de l'hiver va désormais décroître pour laisser place à l'ascension graduelle du principe yang vivifiant; on se propose donc de chasser au loin le froid; or le bœuf correspond au signe ch'eou qui désigne lui-même le mois du froid extrême; c'est donc le bœuf qui symbolisera le froid et c'est pourquoi on chassera son image hors de la ville. Bien que cette explication méconnaisse certainement la vraie signification du rite, elle n'en est pas moins importante parce qu'elle prouve que, dès l'époque où fut écrit le Heou Han chou, et peut-être dès l'époque même des Han postérieurs, le rite du bœuf de terre était interprété comme impliquant la corrélation entre un caractère cyclique et un nom d'animal; or cette corrélation n'a pu exister que si le cycle des douze animaux était constitué. Ainsi donc, le rite du boeuf de terre, tel qu'il apparaît dans les Ordonnances mensuelles ne suppose pas l'existence du cycle des douze animaux; il la suppose au contraire dans le texte du Heou Han chou, mais nous n'avons pas lieu d'en être étonnés puisque nous avons appris, par le texte de Wang Tch'ong '), que le cycle des douze animaux était connu sous la dynastie des Han postérieurs.

Je ne parle que pour mémoire des deux vers du Che king (Siao ya, 1. III, ode 6): «Dans le jour fauste keng-wou, nous avons choisi nos chevaux 吉日庚午差我馬. Il me parait bien invraisemblable qu'un texte aussi anodin suffise à prouver que le caractère wou 4 symbolisait le cheval au temps où cette ode

fut composée.

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Reste enfin, dans le Wou Yue tch'ouen ts'ieou, le passage où, décrivant la ville fortifiée que Wou Tseu-siu éleva pour Ho-lu (514-496 av. J.-C.), roi de Wou, l'auteur dit: Wou se trouvait dans la position marquée par le caractère cyclique tch'en,

1) Cf. p. 79-80.

ce qui est la place où est le dragon; c'est pourquoi, sur la porte méridionale du petit rempart, on fit avec des plumes rebroussées deux protubérances de baleine (?) 1) pour représenter les cornes d'un dragon. Yue se trouvait dans la position marquée par le caractère cyclique sseu, ce qui est la place occupée par le serpent; c'est pourquoi, sur la grande porte méridionale il y eut un serpent de bois qui se tournait vers le Nord et qui avait la tête rentrée, pour montrer que Yue était sous la dépendance de Wou» 2). Si ce texte était digne de créance, il établirait que, dès l'an 500 avant notre ère, les caractères tch'en et sseu correspondaient respectivement au dragon et au serpent, ce qui suppose l'équivalence du cycle des douze caractères et du cycle des douze animaux. Mais on ne saurait tirer une conclusion aussi grave d'un témoignage unique et fort peu sûr; le Wou Yue tch'ouen ts'ieou, en effet, a été rédigé par Tchao Ye (app. Tchang-kiun #), qui vivait au premier siècle de notre ère; Tchao Ye a pu introduire dans son récit des conceptions qui avaient cours de son temps mais dont la présence aux dates où il les rapporte constitue un véritable anachronisme.

En conclusion, le cycle des douze animaux était familier aux Chinois dès le premier siècle de notre ère; il est possible qu'il soit un peu plus ancien, mais rien jusqu'ici ne permet de le prouver et toutes les probabilités tendent à nous faire croire qu'il n'a pas pu être introduit en Chine antérieurement au premier ou au second siècle avant notre ère. C'est l'opinion à laquelle aboutissait déjà

1) Le caractère ne se trouve pas dans le dictionnaire de K'ang-hi; le sens que je lui attribue est hypothétique.

2) Wou Yue tch'ouen ts icou, chap. II, p. 2 r° et v° de l'édition de 1791 du Han

Wei tsong chou: 吳在辰。其位龍也。故小城南門上 反羽為兩鯢鱙以象龍角。越在巳地。其位蛇 也,故南大門上。有大蛇北向首内。示越屬 於吳也。

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