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La fête commence par la procession qui a lieu à l'issue de la messe paroissiale. Les statuettes des saints patrons et le drapeau de la jeunesse précèdent le clergé, et les notables de la commune accompagnent le Saint-Sacrement. Après la rentrée du cortège, la musique va donner des aubades aux autorités. Jadis la danse commençait sur la Place à l'issue des vêpres. Le bailli, le maïeur et les échevins ouvraient le bal par la danse d'honneur où figuraient les plus jolies demoiselles de la réunion. Le capitaine de la jeunesse dirigeait toutes les réjouissances, qui se terminaient ordinairement par les Durmenés.

Mons, le 1er septembre 1901.

ALPH. GOSSERIES

A SPIENNES '

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Ce fut dans sa séance du 6 mai 1865 que le Conseil communal de Mons, adoptant les conclusions de la section des travaux publics, décida qu'il serait créé dans notre ville un système de distribution d'eau potable, au moyen des fontaines du Trou de Souris et de La Vallière, à Spiennes. Les deux sources furent acquises en même temps. Cette décision avait été précédée d'une polémique sur laquelle il est inutile. de revenir ici; qu'il nous suffise de rappeler que, de 1852 à 1865, la question des eaux » a fait couler des flots d'encre. On jugea d'abord que, pour le moment, les eaux du Trou de Souris suffiraient à la consommation; ce ne fut qu'en 1897 ou 1898, que le Conseil songea à compléter le système décrété en 1865, et résolut de capter la réunion de sources nommée La Vallière, dont les eaux météoriques ont une filtration parfaite, meilleure que celle de l'enrochement du modeste Trou de Souris, qui, durant une période de près de 30 années, nous a été si utile. Ce fut en 1871 que la Trouille fut détournée et la ville alimentée d'eau potable. Les travaux de captation, exécutés cette année par un spécialiste étranger, ont attiré un grand nombre de visiteurs curieux de voir, ou de revoir, le joli et pittoresque village à cayaux. On connait la renommée archéologique de Spiennes, au point de vue préhistorique surtout, et les curieuses découvertes faites sur son territoire et dans les environs.

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• Commune de l'arrondissement de Mons et à 65 kil. de Bruxelles. En 1900, plus de trente sources ont été captées, toutes sous le nom de La Vallière,

Nous avons aussi fait ce pèlerinage à plusieurs reprises durant nos villégiatures automnales, et il en est résulté ce travail'.

La tradition rapporte que Louis XIV assiégeant Mons et ayant pris ses quartiers à l'abbaye de Bethléem, se promenait à Spiennes accompagné de la duchesse de La Vallière; la belle dame avait soif, et tentée par la limpidité de l'eau d'une source, elle en goûta et la trouva si bonne qu'elle donna son nom à la fontaine et y laissa choir une bague, d'aucuns disent un bracelet.

Nous avons vu jadis un anneau, assez vulgaire d'ailleurs, qui avait été trouvé dans la fontaine de La Vallière; il faisait partie alors de la collection de l'abbé Lairein, le savant curé d'Estinnes-au-Mont, qui n'attribuait pas à sa bague une origine illustre, tout en faisant remarquer la coïncidence à ses visiteurs.

Ajoutons que l'on montre encore la maison qu'occupa Madame de La Vallière pendant le siège de Mons. Cette maison est située à Rouveroy, à 15 kilom. de la ville assiégée. La duchesse, bien gardée, était là à l'abri du bruit et de tout danger.

Voilà certes un joli conte! Quelle royale idylle que cette idylle royale du roi soleil et de la petite violette qui se cache sous l'herbe », selon l'expression de Madame de Sévigné. Le fait est qu'à vingt ans, disait son admirateur Arsène Houssaye, La Vallière était une âme plutôt qu'un corps, ses grands yeux semblaient s'ouvrir dans le ciel, elle était belle comme une vision qui ne touche pas à la terre. « Elle fut unique! Dans les tableaux cyniques des erreurs royales, elle se détache ainsi qu'une belle et pure figure drapée dans son

1900.

Présenté au Cercle archéologique, dans la séance du 9 décembre

• Mlle de La Vallière et Madame de Montespan. Études historiques sur la Cour de Louis XIV, Paris. Plon, 1860.

repentir; elle expia durant trente-six années d'austérités au Carmel, le crime d'avoir trop aimé son roi'. »

"Heureux s'il (Louis XIV) n'eût eu, dit Saint-Simon, que des maitresses semblables à Mme de La Vallière, arrachée à elle-même par ses propres yeux, honteuse de l'être, encore plus des fruits de son amour reconnus et élevés malgré elle modeste, désintéressée, douce, bonne au dernier point, combattant sans cesse contre elle-même, victorieuse enfin de son désordre par les plus cruels effets de l'amour et de la jalousie, qui furent tout à la fois son tourment et sa ressource, qu'elle sut embrasser assez au milieu de ses douleurs pour s'arracher enfin, et se consacrer à la plus dure et à la plus sainte pénitence'!, Voilà un bel éloge de la part du terrible duc.

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Revenons à notre idylle. Malheureusement pour les cœurs sensibles, comme nous l'insinuions plus haut, ce joli et poétique récit n'est qu'une fable! « une de ces fausses légendes »', comme le dit quelque part Francisque Sarcey, « qui se sont, on ne sait trop comment ni à quelle époque, glissées dans l'histoire, et dont un érudit, grand fureteur d'archives, parvient un jour à démontrer la fausseté », ceci n'est pas pour nous, bien entendu. « Ainsi il semble avéré à présent que Guillaume Tell n'a jamais existé, ou que, s'il y a eu un brave Suisse de ce nom, il n'a jamais traversé de sa flèche la pomme posée, par ordre du tyran, sur la tête de son fils. Tout ce que l'on peut dire au sujet de ces légendes, qui sont presque toutes poétiques, c'est qu'il est fâcheux pour la vérité qu'elles ne soient pas vraies. Vraies ou fausses, on ne les arrachera pas de l'âme des peuples où elles se sont formées... »

Et M. Sarcey ajoute plus loin : « On n'arrache pas de gaité

La femme dans la famille et dans la société. Bruxelles, s. d.

• Mémoires de Saint-Simon, t. vIII, p. 77. Paris, Hachette, 1857.

3 Le sens du mot légende est absolument travesti dans le langage courant; dans le sens primitif, c'était un récit d'une sérieuse autorité historique.

de cœur, on ne supprime pas dédaigneusement une légende qui compte six siècles d'existence, comme celle du héros suisse "... avec ou sans pomme.

Notre légende est moins respectable et il serait par trop naïf de ne pas la secouer un peu; quelques lignes, quelques dates pour cela.

Louise-Françoise de la Baume le Blanc, duchesse de Vaujour, puis de La Vallière, naquit en 1644, vint à la cour de France en 1661, à 17 ans ; elle quitta celle-ci définitivement en 1674 pour entrer au couvent des Grandes-Carmélites de Chaillot où elle passa 36 années dans la retraite et mourut le 16 juin 1710, âgée de 66 ans '.

Le 15 de mars 1691, année que le chiffre marquait des deux côtés comme le fait remarquer l'historien de Mons De Boussu, les Français investirent Mons et en formèrent le siège. Louis XIV s'y rendit avec les princes du sang ; il manqua même d'y être tué par un boulet de canon; son pavillon était à Bélian où la cour se divertissait.... La ville capitula le 8 avril; les Français y entrèrent le 103.

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'Nous possédons deux portraits de la duchesse, par Larmessin (1679). Le premier est en grand costume de cour; le second, en carmélite, porte l'inscription suivante: Très noble et très pievse særr Lovise de la Miséricorde cy derant appelée dans le monde Louise-Françoise de la Baume le Blanc, duchesse de la Vallière et de Vavjour, et fille de Laurens de la Baume le Blanc, chevalier, seigneur de la Vallière, baron de Maisonfort, capitaine-lieutenant de la cavalerie légère de France, et de Dame Françoise le Prevost, etc., cette illustre fille ayant généreusement quitté la cour, et ses charmes, et renoncé au monde et à son fuste trompeur, c'est retirée dans le monastère des religieuses Carmélites au faubourg Saint-Jacques, à Paris, où elle a pris l'habit de l'ordre le 2me de juin 1674, et l'année suivante a fait profession pour y terminer, par la grâce de Dieu, heureusement ses jours.

Bethleem, vulgò Bėlian, abbaye fondée en 1225. Voyez les Annales du lainaut, par VINCHANT, t. II, p. 329; Dom BERLIÈRE, Monasticon Belge, t. 1, p. 464; CHARLES ROUSSELLE, Annales du Cercle archéologique de Mons, t. 11, p. 74; etc.

3 L. DEVILLERS, Inventaire analytique des archives de la ville de Mons, t. I, p. xx de la préface.

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