Imágenes de páginas
PDF
EPUB

CHAPITRE X.

Comment la cité de Liseux, Neufchastel et ceux de la ville de Mante, se rendirent au roy; et de l'entrée du roy à Vernoeul; et comment le chastel de Loigny fust remis en l'obéissance du roy.

Le comte de Dunois, lieutenant général du roy de Franche, le comte de Saint-Pol, et les autres qui avoient esté à Pont-Eau-de-Mer, se partirent et chevauchèrent ensemble devant la cité de Liseux pour y mectre le siége. Mais quand ceux de la ville apperceurent sy grande multitude de gens, ils considérèrent que la ville ne pouvoit longuement durer ne résister à sy grande puissance; et doubtèrent aussy qu'elle ne fust prinse d'assaut, et qu'elle ne fust pillée, périe et destruite; parils meirent la cité en l'obéissance du roy de Franche, par le conseil de leur évesque, qui s'y gouverna pour le roy très grandement, puisqu'il se rendit au roy plusieurs menues places allencontre dudit Liseulx.

quoy

Après ces choses, se partist le roy de Franche de Chartres, le jour de Saint-Loys, à belle et grande compagnie; et alla au giste à ChasteauNeuf, qui, ce jour, se rendit aux comtes de Dunois, d'Eu et de Saint-Pol, et ceux de leurs compagnies, qui estoient de cinq à six mille combattants.

Et pareillement se rendit la ville de Mante sur Seine; et estoient dedans icelle ville de sept à huict vingts combattants, dont estoit chief et capitaine ung nommé Sainte-Barbe; lesquels s'en allèrent à Rouen, leurs corps et leurs biens saufs. Et le lendemain entra Charles, roy de Franche, à Vernoeul, à grand estat et noble compagnie; lequel y fust moult honorablement receu, et à grande joye de ceux de la ville, lesquels allèrent aux champs au-devant de lui, atout les processions, faisants fusées, et criants Noel! parmi la ville. Le roy estant à Vernoeul, se rendit à lui le chasteau de Loigny, par un escuyer du pays de Normandie, nommé le sire de Sainte-Marie, capitaine dudit chastel, pour messire Franchois de Surienne, dit l'Arragonois, seigneur de ladite place, qui avoit marié sa fille audit escuyer. Lequel escuyer meit les Franchois par le donjon, sans le sceu des gens. de guerre, qui estoient deux cents combattants, logiés en la bassecourt par icelui messire Franchois, pour la garde dudit chastel. Lesquels, quand ils appercheurent les Franchois, se cuidèrent saulver et mectre à deffense; mais pour ce qu'ils furent trop foibles, ils feurent prins en ladite basse-court. Leurs chevaux et leurs biens demeurèrent prisonniers à la vollonté du roy. Et fust faicte ceste entreprise par le séneschal de Poitou, lequel n'y fust point en personne. La femme dudit messire Franchois estoit dedans ledit chastel, laquelle s'en alla atout ses biens, estant mal contente de son gendre.

CHAPITRE XI.

Comment les villes de Vernon sur Saine, Gournay et le chastel d'Essay feurent mis en l'obéissance du roy de Franche.

Le jeudy dix-septiesme jour du mois d'aoust, fust mis le siége devant Vernon-sur-Saine, par les comtes de Dunois, d'Eu et de Saint-Pol, et autres de leurs compagnies; laquelle ville estoit moult bonne place, et y avoit ung fort chastel et ung autre petit sur le pont, nommé Véronnet, dont estoit capitaine le fils du comte d'Ormont, d'Irlande, qui avoit pour la garde deux cents et quarante combattants, valliants gens, lesquels promeirent rendre la place le samedy ensuivant, à heure de prime, en cas qu'ils ne fuissent secourus en dedans ce jour. Dedans lequel jour ne feurent secourus, pource que les autres Anglois n'osoient desgarnir Rouan. Pour laquelle cause rendirent la ville aux Franchois et s'en allèrent, leurs corps et biens saul's; et demourèrent ceulx de la ville paisiblement sans rien perdre. Aucuns jours après, le capitaine de Gournay, nommé Guillaume Couvren, Anglois, rendit la ville de Gournay aulx comtes d'Eu et de Saint-Pol, parmy certain traictié et appoinctement faicts entre eux. Puis se partist roy de Franche de Vernoeul, et s'en vint à

le

Évreux, grandement accompagnié, où il fust honorablement receu des habitants de la ville, en criant Noël! et les rues tendues, comme à Vernoeul; et là coucha une nuict; et le lendemain se partist pour aller à Louviers, où il fust semblablement receu à grande joie. En ce temps, les Anglois des ville et chastel d'Essay allèrent pescher à ung estang assez près de ladite ville; sy vint à la cognoissance du duc d'Allenchon, lequel y alla secrètement et les print; et puis les mena devant la ville d'Essay, laquelle ils lui feirent rendre.

CHAPITRE XII.

Comment Fescamps, le chastel de Harecourt, le chastel de Chambrois et la Rocheguyon feurent rendus au roy.

DURANT les choses dessusdites, ceux de la garnison de Dieppe, pour le roy de Franche, sceurent qu'il y avoit peu d'Anglois pour la garde de l'abbaye de Fescamps, qui est port de mer; sy y allèrent secrètement et la prindrent. Assez tost après y arriva une nef qui venoit d'Angleterre, en laquelle il y avoit quatre-vingts Anglois qui venoient pour estre en leur aide, lesquels les Franchois laissèrent descendre pour les prendre tous prisonniers. Eo ceste saison le comte de Dunois et ceulx de sa compagnie meirent le siége devant le chasteau de Ha

recourt, qui est bel et fort; et là feirent des belles approches, esquelles fut tué d'ung canon ung vaillant homme franchois de la garnison de Louviers; et pareillement fust tué ung Anglois d'une coullevrine sur le portal de la basse-court. Les Anglois estoient dedans de six à sept-vingts, dont estoit capitaine le bailly dudit Harecourt, nommé messire Richard Forqueval, lequel fust deshonnoré et pendu à la porte du boullovert. Les Franchois qui devant estoient, s'efforcèrent de jetter canon, et du premier coup perchèrent tout outre les murs de la bassecourt. Alors les Anglois doubtèrent et promeirent rendre la place en cas qu'ils ne seroient à certain jour les plus forts aux champs, auxquels il ne se trouvèrent point; et par tant, rendirent le chastel le cinquiesme jour de septembre, lequel ils avoient tenu par l'espace de quinze jours, et s'en allèrent leurs corps et vies saufs. Et le dix-huitiesme jour de septembre ensuivant fust assiégé le chastel de Chambrois par les comtes de Dunois, de Clermont et de Nevers; le sieur de Laval, le sieur de Cullant, grand maistred'hostel du roy, le sieur de Blanville, les sieurs de Vernoeul, de Gaucourt et de Bersay; les baillys de Berry et d'Évreux, et plusieurs aultres chevalliers et escuyers, lesquels n'y feirent guères ; mais enfin le comte de Clermont feit composition avecques les Anglois qui dedans estoient, qui feurent trouvés environ deux cents testes, qui s'en allèrent leurs corps et vies saufs. En ce mesme temps, se

« AnteriorContinuar »