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rendit la ville de Neufchastel de Lincourt aux comtes d'Eu et de Saint-Pol, qui avoient mis le siége dès le huitiesme jour dudit mois; et, pendant qu'ils y feurent, prindrent la ville d'Essay. Assez tost ung Anglois de Galles, nommé Edouard, capitaine de la Rocheguyon, parce que sa femme estoit de Franche, et parente à messire Denys de Chailly, laquelle avoit de belles terres au pays de Franche, par l'admonestement, prières et enhortement de sa femme, rendit aux gens du roy de Franche la Rocheguyon, qui estoit une très forte place sur la rivière de Saine; et se feit Franchois, moyennant qu'il deut jouir des terres de sa femme estants en l'obéissance des Franchois.

CHAPITRE XIII.

Comment le duc de Bretaigne entra en Normandie et meit en l'obeissance du roy les villes de Coustance et de Saint-Loup (Saint-Lô); et le duc d'Allenchon print la ville d'Allenchon.

EN ceste saison, le duc de Bretaigne, accompagnié d'Arthus de Bretaigne, connestable de Franche; du comte de Laval, du sieur de Loheac, mareschal de Franche; du sieur de Montauban, mareschal de Bretaigne, et de plusieurs autres chevalliers et escuyers, jusques au nombre de six mille combattants, a y comprendre trois cents

à

lanches et leurs compagnies d'archiers des gens du roy de Franche, dont estoient conducteurs icelluy Loheac, messire Geoffroy de Couvran et Joachim Rohault, se partist de sa duché de Bretaigne et entra en la Basse-Normandie ; et, avant partir, laissa son frère messire Pierre de Bretaigne, sur les marches de Fougières et d'Avrence (Avranches), pour la garde du pays, atout trois cents lanches, puis mena son armée devant la ville de Coustance, et y meit le siége. Mais les Anglois qui estoient dedans, voyants le peuple qui estoit devant eux, se rendirent le jour ensuivant. Et alla mectre le siége devant Saint-Loup (Saint-Lô ), laquelle se rendit le seiziesme jour dudit mois de septembre; et s'en allèrent les Anglois, leurs corps et leurs vies saufs, lesquels estoient deux cents combattants, dont estoit capitaine messire Estienne Pouchon. En ce temps-là, le duc d'Allenchon à point, par le consentement et aide des bourgeois et autres habitants de la ville d'Allenchon, print ladite ville; et s'enffuirent et retirèrent les Anglois dedans le chasteau, lequel incontinent fust assiégé paricelluy, atout huict vingts lanches, et en la fin se rendirent les Anglois.

CHAPITRE XIV.

Comment le comte de Foix se partist de son pays et alla mectre le siége devant Mauléon, et comme le roy de Navarre vint pour cuider lever le siége, puis s'en retourna sans rien faire, et se rendit en la ville au comte de Foix; et du sieur de Luce qui se rendit Franchois atout six cents combattants.

Au mois de septembre dessusdit, le comte de Foix, accompagnié des comtes de Comminges et d'Estraict (Astarac), du vicomte de Lautrec, son frère, et de plusieurs barons et chevalliers du pays de Foix, de cinq à six vingts lanches et de dix mille arbalestriers, partist de son pays de Biarne (Béarn) et chevaucha, ainsy que dict est, accompagnié, par le pays des Basques jusques devant la ville de Mautléon de Selle, où il meit le siége; et assez tost après ceux de la ville, doubtants qu'ils ne fussent prins d'assault, se rendirent par composition; et lors se retirèrent dans le chastel les Anglois, lequel chastel est le plus fort de la duché de Guyenne; car il est merveilleusement hault, assis sur un hault et dur rocq. Le comte sçavoit qu'il y avoit peu de vivres dedans; et pour ce y meit le siége de touts costés. Quant le roy de Navarre sceut ces nouvelles

1. Mauléon de Soule, en Gascogne.

là, il feit son mandement de toutes parts pour aller lever le siége, et chevaucha avecq six mille combattants arragonois, gascons, anglois et navarrois, jusques à deux lieues près de la ville, en cuidant lever le siége. Mais quant il sceut la puissance et fortification de ceux qui y tenoient le siége, il feit reculer et retraire ses gens, puis envoya ses messagers vers le comte de Foix pour parlamenter avecques lui, lequel lui envoya seureté de venir. Sy vint le roy de Navarre à petite compagnie à ung quart de lieue près du siége, atout sa seureté, où estoit le comte, auquel il dit que, veu qu'il avoit espousé sa fille, dont il avoit belle lignée, et attendu l'affinité qui pour ce debvroit estre entre eulx, il se donnoit grande merveille comment il avoit assiégé ladite place sur sa sauvegarde, veu que le connestable en estoit capitaine de par luy pour le roy d'Angleterre, auquel il avoit promis la garder encontre tout. Le comte de Foix, son gendre, lui respondit qu'il estoit lieutenant du roy de Franche ès pays d'entre Guyenne et les monts Espérans (Pyrénées), et sy estoit son subjet et son vassal; et que, par son commandement, comme son lieutenant, avoit mis le siége devant le chastel; et pource, janais pour homme ne s'en lèveroit jusques à ce qu'il fust en l'obéissance du roy de Franche. Mais en toutes choses à lui possibles il l'aideroit et conforteroit, comme père de sa femme, réservé contre le roy de Franche, ses subjets et alliés. Après ceste response s'en retourna le roy de Na

varre et son ost en son pays. Quand ceulx du chastel veirent qu'ils ne pouvoient estre secourus, tendu la grande nécessité qu'ils avoient, rendirent le chastel au comte de Foix. Assez tost après, le sieur de Luce, accompagnié de six cents combattants portants des croix rouges, lequel estoit homme du roy de Franche à cause dudit chastel, alla faire en la main du comte de Foix hommaige au roy de Franche; et incontinent le serment fait, s'en retourna atout sa compagnie en sa maison, portants touts des croix blanches, dont leurs femmes et enfants feurent moult esbahis. Après ces choses, le comte de Foix retourna en son pays.

CHAPITRE XV.

Comment le chastel d'Yexmes se rendit aux Franchois; de la prinse des ville et chastel d'Argentan; et comment le roy de Cécille et son frère vindrent servir le roy de Franche; et du siége qui fust mis devant le Chastel Gaillard.

LE vingt-uniesme jour du mois de septembre, l'an dessusdit quarante-neuf, les comtes de Dunois, de Clermont et de Nevers, et plusieurs autres en leur compagnie, meirent le siége devant le chastel d'Yexmes, lequel fust, par les Anglois qui dedans estoient, rendu ; et s'en allèrent, leurs corps et leurs vies saufs. Ce fait, les Franchois allèrent devant

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