Imágenes de páginas
PDF
EPUB

les ville et chastel d'Argentan, où ils meirent le siége; et lors les Anglois parlamentèrent. Et quand les bourgeois de dedans veirent les Anglois amusés à parlamenter, cognoissants que leur vollonté estoit de tenir, contre la cognoissance des Anglois et sans leur sceu, appellèrent aucuns de l'autre costé dont on parlamentoit, et leur demandèrent ung estendart, bannière ou enseigne, leur disants que là où ils mecteroient l'enseigne, venissent seurement, et les mecteroient dedans la place; et ainsy le feirent. Quand les Anglois les appercheurent entrer ens, ils se retournèrent au chastel, et incontinent une bombarde du siége des Franchois tira contremont la muraille d'icelluy chastel, et y feit trou assez grand pour y passer une charrette⚫ Lors les Franchois voyants le mur ainsy abbattu, ils assaillirent le chastel et le prindrent par le trou. Les Anglois de dedans se bouttèrent au donjon; mais assez tost se rendirent, de poeur d'estre prins d'assaut, et s'en allèrent ung baston au poing tant seulement.

En ceste saison estoit le roy de Franche à Louviers, et sa compagnie; vindrent le roy de Cécille, Regner (René), et Charles d'Anjou, comte de Maine, son frère, verslui; desquels le roy avoit espousé leur sœur ; et amenèrent avecques eux le vicomte de Loumaigne, le comte de Castres, le cadet de Labret, le baron de Traynel, chancellier de Franche; le sieur de Cullant, grand maistre-d'hostel; le comte de Tancarville, le comte de Dampmartin, le ma

reschal de la Fayette, messire Ferry de Loheren(Lorraine), messire Jean son frère, les sieurs de Blanville, de Montgascon, de Précigny, de Gaucourt, de Prailly, de la Bessière, de Chailly, de Monteil, de Brion, de Beauvois, de Han en Champaigne, d'Aigreville et de Malicorne; messire Theaude de Walpergues, messire Jehan du Cigne, messire Louis de la Rochette, messire Robinet d'Estampes, et plusieurs aultres barons, chevalliers et escuyers, jusques au nombre de deux cents lanches et archiers, sans les gens du duc d'Allenchon et ceulx du duc de Bretaigne, et des comtes de Dunois, d'Eu, de Clermont et de Saint-Pol. Toutes ces compagnies venues au service du roy de Franche, le roy feit mettre le siége devant le Chastel Gaillard, qui est moult fort et imprenable; car il est assis près de la rivière de Saine sur ung rocq, que nuls engins ne poeuvent grever. Lequel siége fust mis par le séneschal de Poitou, le sieur de Jaloignes, mareschal de Franche, messire Jehan de Bresay, Denys de Chailly, et autres, qui à mectre le siége se gouvernoient bravement et vaillamment ; et y estoit le en personne.

roy

CHAPITRE XVI.

Comment la ville de Gisors fust mise en l'obéissance du roy, et comment le roy et toute son armée alla devant Rouan pour sommer de rendre la ville.

DEUX ou trois jours avant le siége mis devant le Chastel Gaillard, ou environ, fust faicte la composition de la ville de Gisors par le séneschal de Poitou, et fust la ville rendue par ung escuyer nommé Paviot, et ung aultre nommé Pierre de Courcelles, parent de la femme du capitaine de Gisors, nommé Richard Marbery. Icelle avoit de belles terres en Franche; et pour ce feit tant que son mary fust content de rendre ladite place à ung jour nommé; et de faict la rendit et se feit Franchois, parmy ce que on lui deslivrast deux de ses enfants qui avoient esté prins à Pont-eau-de-Mer, et qu'il jouiroit des terres de sa femme que les Franchois tenoient. Et au mois d'octobre ensuivant, l'an mil quatre cent quarante-neuf, le roy manda au comte de Dunois et à ceux de sa compagnie qui avoient mis Argentan en son obéissance, et pareillement aux comtes d'Eu, de Saint-Pol, et à ceux de leurs compagnies, qu'ils vinssent vers lui atout leurs gens, par ce qu'il voulloit mettre la cité de Rouan en son obéissance. Sy vindrent hastivement à son com

MONSTRELET. T. XII. — MÉM. de J. du Clercq.

3

[ocr errors]

compa

mandement et chevauchèrent tant que la gnie du comte de Dunois se trouva en la campagne de Noeufbourg; et ceux des comtes d'Eu et de Saint-Pol s'assemblèrent de l'autre costel près de la ville de Rouan. Incontinent après se partist le roy de Franche, accompagnié du roy de Cécille et autres devant nommés; et chevaucha jusques au Pont-de-l'Arche, où ceux de la ville vindrent devant lui, faisants grande joie de son advénement. Et lors envoya sommer ceux de la ville et cité de Rouan, par ses héraux, qu'ils eussent à lui rendre et mettre en son obéissance ladite ville. Mais les Anglois qui estoient dedans ne voullurent souffrir que les héraux baillassent leur sommation; ains respondirent qu'ils retournassent en grande haste; et sy feirent-ils, car ils avoient esté en grand dangier de mort. Le roy scachant les manières que les Anglois avoient tenu à ses héraulx, feit passer touts ses gens d'armes ledit Pont-de-l'Arche, dont estoit conducteur le comte de Dunois; et les envova devant la cité de Rouan, où ils furent trois jours en grande puissance, combien qu'il feit en ces trois jours orde (sale) temps et ennuieux de pluye; et y eurent les gens de moult a souffrir, car ceux guerre de dedans feirent sur eulx moult grandes saillies, où y eust moult de belles armes faictes; et y fust prins à l'une desdites saillies ung escuyer franchois, nommé le bastard Soubriers, par son cheval qui cheut dessous lui. Les seigneurs Franchois se meirent en bataille devant ladite ville, et eavoyèrent

sommer par les héraux du roy pour la deuxiesme fois ceulx de la cité qu'ils se meissent en l'obéissance du roy; mais les Anglois ne voulurent souffrir qu'ils approchassent la ville, ne qu'ils parlassent au peuple; et ainsy s'en retournèrent comme les premiers. Et lors le comte de Dunois, voyant que nul de la cité ne faisoit semblant ne manière de vouloir rendre la ville, considérant aussi le temps et la saison qui estoit sur l'hiver, s'en retourna au giste ce tiers jour au Pont-de-l'Arche; et les gens de guerre allentour d'icelluy pont par les villaiges.

CHAPITRE XVII.

Comment les Franchois cuidèrent entrer en la ville de Rouan, par le moyen d'aucuns de la ville, mais le sieur Tallebot les reboutta, et en y eut plusieurs morts

EN ce temps, vindrent nouvelles au roy de Franche, lui estant au Pont-de-l'Arche, qu'auenus de la ville de Rouan se mectoient sur la muraille d'icelle ville dedans deux tours, et là gardoien ung pan de mur, adfin que les Franchois peussent par là entrer en la ville. Si fust envoyé le comte de Dunois celle part avecques l'armée, pour entreprendre ceste besongne; et incontinent se partirent les roys de Franche et de Cécille en

« AnteriorContinuar »