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deux batailles, dont l'une fust à la porte Beauvoisine, près de la justice, où estoient le sieur Cullant, le sieur Delval, les sieurs de Blanville et de Bureulx (Bureau), et de Jaloingnes, mareschal de Franche; et plusieurs autres; lesquels ne feurent pas à pied, fors seulement les archiers, qui ne se bougièrent de leur place. L'autre bataille fust entre les Chartreux et la ville, où estoit le comte de Dunois, lieutenant-général; les comtes de Clermont, de Nevers, d'Eu, de Sainct-Pol, le séneschal de Poitou, messire Robert de Flocque, bailly d'Evreux ; et plusieurs autres chevalliers et escuyers. Il vint devers eux ung homme de la cité leur dire qu'il estoit temps d'entrer, et que chacun feit son debvoir. Et lors descendit à pied le comte de Dunois et tous ses gens; et marchèrent jusques à la muraille de la ville, où ils dressèrent ung peu d'eschelles qu'ils avoient entre lesdites tours, pour monter contremont le mur. Là feurent faits chevaliers, Charles de la Fayette, le sieur d'Aigreville, maistre Guillaume Cousinot, Jacques de la Rivière, bailly de Nivernois, Robert de Harenville, et plusieurs autres qui grandement feirent leur debvoir sur la muraille. Le sieur de Taillebot (Talbot), qui estoit sur le mur, et véant ce, atout grande compagnie de gens d'armes et de traits anglois, comme tout forcené, vint pour reboutter les Franchois, qui jà estoient partie montés sur le mur, lesquels très valliamment se combattirent; mais à la fin leur convint laisser la muraille et

guerpir (quilter) le champ, car ils estoient encoires trop peu montés. Et feit tant le sieur de Tallebot, par sa vaillance, qu'il fut maistre de la cité et des deux tours; et là feurent, que pris qua tués, environ soixante personnes, tant des Franchois que de ceux de la ville qui les aydèrent; dont les aucuns saillirent és fossés du haut des tours; les autres eschappèrent.

CHAPITRE XVIII.

De la prinse de la ville et cité de Rouan, sauf le palais et le chastel.

APRÈS les Franchois feurent, ainsy que que dict est, rebouttés par les Anglois jus de la muraille de la ville et cité de Rouan, et que les roys de Franche et de Cécille, qui estoient arrivés à Darnestal, veirent que la puissance de la cité n'estoit bien jointe ne unie avecques les autres de la ville qui s'estoient mis ès tours, ils s'en retournèrent au Pont

de-l'Arche; et touts les gens de guerre et la puissance s'en allèrent logier par les villaiges sur la rivière de Saine. Le lendemain, ceux de la ville de Rouan, pour la grande poeur et frayeur qu'ils avoient eue de l'assaut, doubtants que la ville ne fust prinse d'assaut, et par ce pillée, désolée et destruicte, et aussi pour esviter l'effusion du sang, qui polroit advenir par la prinse d'icelle cité, en

seil,

voyèrent l'official d'icellui lieu et aultres au Pontde-l'Arche, devers le roy de Franche, pour avoir de lui ung sauf-conduit pour aucuns des plus notables gens d'église, nobles, bourgeois, marchands et autres de la cité, lesquels voulloient venir devers lui ou les seigneurs de son grand con, pour trouver et faire aucun bon traictié et appoinctement. Sy leur fust délibvré ledit saufconduit; et ce jour, atout leur sauf-conduit à la seureté du roy, vindrent, c'est assavoir pour ceux de la cité, l'archevesque dudit lieu avecques plusieurs autres, et pour le duc de Sombresset, gouverneur de par le roy d'Angleterre, de la duchié de Normandie, lequel estoit dedans Rouan, aucuns chevalliers et escuyers, au port de SainctOuen, à une lieue près du Pont-de-l'Arche; auquel port ils trouvèrent pour le roy de Franche, le comte de Dunois, le chancellier, le séneschal de Poitou, messire Guillaume Cousinot, et plusieurs autres. Illecques parlamentèrent longue et bonne piéche les ungs avecques les autres, tant que l'archevesque et ceux de la cité feurent d'accord et contents de rendre la ville de Rouan, et la mectre en l'obéissance du roy de Franche, et en promirent faire leur debvoir, parmi ce que touts ceux de la ville et cité qui voldroient demourer, demoureroient alout leurs biens sans rien perdre, et qui s'en voldroient aller s'en iroient. Et ainsi se partirent les Anglois et Franchois, les ungs pour aller au Pont-de-l'Arche, les autres à Rouan; mais

de

pource qu'ils y arrivèrent tard et de nuict, ne peurent faire leur response ce jour jusqu'au lendemain, qui fust le dix-huitiesme jour d'octobre, lequel jour ceux qui avoient esté vers les Franchois, s'en allèrent en la maison de la ville pour relater devant le peuple l'appoinctement et les parolles qu'ils avoient eus avecques les gens du roy Franche. lesquels parolles et appoinctement feurent très agréables à ceux de la ville et desplaisants aux Anglois. Lesquels quand ils perceurent la vollonté et grand désir que le peuple avoit au roy de Franche, se partirent mal-contents de l'hostel de ville, et se meirent touts en armes, et puis se retirèrent au palais, au pont sur les portaux et au chastel de la ville. Quant ceux de la ville cognurent leur contenance, ils se doubtèrent fort; et pour ce se ineirent pareillement en armes, et firent grand guet et grande garde tout le jour, qui fust samedi, et la nuict semblablement contre iceux Anglois; puisenvoyèrent hastivement celle nuict ung homme au Pont-de-l'Arche au roy de Franche, lequel y arriva au poinct du jour, faire sçavoir au roy de Franche qu'il les vinst hastivement secourir, et qu'ils le mectroient dedans la ville. Le dimanche au natin, dix-neuviesme jour du mois d'octobre, ceux de la ville, qui touts estoient en armes, s'esmeurent contre les Anglois très asprement, tant qu'ils gagnèrent sur eux les murs et portaux de la ville, et les chassèrent touts ensemble au palais, pont et chastel de la ville; et à ceste heure le comte

de Dunois et plusieurs autres, qui près estoient de ladite ville logiez, montèrent hastivement à cheval pour secourir les habitants de la ville allencontre des Anglois; et fust le bailli d'Evreux frappé d'ung cheval de sa compagnie, qui lui rompit la jambe, pour ce qu'il n'avoit eu le loisir de prendre son harnois, lequel fust porté au Pont-de-l'Arche pour guérir; et eust le gouvernement et garde de ses gens le seigneur de Mauny. Tantost après partist le roy du Pont-de-l'Arche, grandement accompagnié de gens d'armes, pour tirer à Rouan; et feit charger son artillerie pour faire assaillir Saincte-Catherine, que les Anglois tenoient. Mais cependant le comte de Dunois les feit rendre, voyant la ville estre contre eux, et on leur bailla ung héraut du roy pour les conduire en allant trouver le roy, ainsi qu'ils passoient le pont de Sainct-Ouen; lequel leur dit qu'il ne prinssent rien sans payer; et ils lui respondirent qu'ils n'avoient de quoi payer. Lors le roy leur feit bailler cent francs : lesquels estoient au nombre de six-vingts, puis les laissa aller. Le roy s'en alla logier à Saincte-Catherine, le comte de Dunois et les autres gens de guerre estoient à la porte Martinville, auquel vindrent vers eux, les gens d'église, nobles, bourgeois, marchands et habitants de la ville, qui leur apportèrent les clefs, en disant qu'il pleut au seigneur de Dunois boutter dedans la cité, tel et sy grand nombre de gens l'armes qu'il lui plairoit. Lequel leur respondit qu'il feroit leur vollonté. Et après plusieurs pa

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