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Poitou; car les Anglois chargèrent l'effort sur ses gens et sur ceux du bailly d'Evreux, que gouvernoit le sieur de Mauny, tellement qu'ils gaignèrent du costé où ils estoient en bataille, deux coulevrines sur eux. Et lors le séneschal descendit à pied, et feit descendre ses gens; puis assaillit si durement les Anglois, qu'il les reboutta par l'ung des bouts de la bataille, la longueur de quatre lanches, et recouvra les deux coulevrines; et à ceste reboutte, morurent sept cents Anglois. Ce véants, les autres Franchois se portèrent si valliamment, qu'ils eurent la victoire, et leur demoura le camp; et là fust fait chevalier le comte de Chastre, frère du comte de la Marche; Godefroy de Valoingnes, frère du comte de Boulogne et d'Auvergne, et le sieur de Vauvert, fils du comte de Villars; le sieur de Saint-Sévère, le sieur d'Allanchon, et plusieurs autres.

CHAPITRE XXV.

Comme la ville de Vires et autres villes feurent mises en l'obéissance du roy de Franche; et du siége mis debvant la cité de Bayeux; et comme on l'assaillit par deux fois, et enfin fust rendue par composition.

APRÈS la desconfiture que feirent les Franchois sur les Anglois, à la bataille de Fourmigny, les seigneurs franchois allèrent mectre le siége devant

la ville de Vires. N'y fust gueres, car messire Henry de Morbery, qui estoit prisonnier, en estoit capitaine; si feit tant par composition, que les Anglois qui dedans estoient de trois à quatre cents, s'en allèrent, leurs corps et leurs biens saufs, dedans Caen. Après la ville de Vires rendue, le connestable de Franche, le sieur de Laval, et autres, qui estoient en leurs compagnies, se partirent et s'en allèrent vers le duc de Bretaigne, soubs qui ils estoient, lequel duc, avec la compagnie dessusdite, alla mectre le siége en personne devant Avranche, et le tint trois semaines; et cependant feit faire des grandes approches et feit battre la muraille d'engins, tellement, que ung nommé Lampot, qui en estoit capitaine, rendit icelle ville d'Avranche au duc de Bretaigne, et s'en alla, ung baston au poing tant seulement, et ses compagnons pareillement, qui estoient de quatre à cinq cents. Pareillement se rendit la place de Couloigne, qui est une forte place, et imprenable, tant qu'il y ait à manger; car elle est toute assise sur une roche en la mer, près du mont Saint-Michel. Ils étoient dedans de quatre-vingts à cent Anglois; lesquels s'en allèrent, leurs corps et leurs biens saufs, à Chierbourg.

Assez tost après la prinse de Vires, les comtes de Clermont, de Chastres, et aultres de leurs compagnies, qui avoient tenu le siége devant Vires, allèrent mectre le siége devant Bayeulx; et se logerent ès faulxbourgs du costel devers Carentan, les

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comtes de Dunois lieutenant genéral du roy de Franche, de Nevers, d'Eu; les sieurs de Cullant, grand maitre d'hostel du roy, et de Jalloingnes, son frère, d'Orval, de Bueil, et plusieurs aultres chevalliers et escuyers; et de l'aultre costel, ès faulxbourg des cordeliers, se logèrent le sieur de Montenay, conduiseur des gens du duc d'Allenchon, Pierre de Louvain, Robert Corungam (Cunningham), et grand nombre de francs archiers. Le siége clos de tous costés, les Franchois battirent fort la ville de canons, bombardes et autres engins, par l'espace de seize jours continuellement ; et tellement l'oppressèrent de mines et trenchis, qu'elle estoit preste à assaillir. Mais le roy de Franche avoit pitié de la destruction de la cité, et ne le volut consentir; néanmoins sans leur congié ne sceu, et sans aucune ordonnance, d'ardeur que les gens de guerre avoient de gaigner, ils assaillirent la cité deux fois en mesme jour ; et il y eust de belles armes faictes d'un costel et d'autre; et s'y portèrent de tout costé très valliamment ; et en y eust des morts des deux lez, tant des traicts, comme des couleuvrines; mais en la fin, les Franchois se retraierent sans rien faire, pour tant qu'ils ne l'assaillirent que d'ung costel, et sans ordonnance de leur capitaine; et fust leur faute, car s'ils l'eussent assaillie par l'ordonnance des capitaines et de deux costels, sans faulte nulle elle euist esté prinse d'assault. D'icellui assault fust fort espouvanté le seigneur de Mathago, car il y eult tués de valliants gens anglois,

Età ceste cause parlementaicellui Mathago avecques le comte de Dunois et autres sieurs Franchois, et rendit la cité aux Franchois, et s'en alla à Chierbourg, lui, Jannequin Vacquier, et touts les autres Anglois qui soubs eux estoient, ung baston en leurs poings seulement, lesquels estoient nombrés à neuf cents Anglois des plus valliants gens de guerre qui fuissent en Normandie de leur parti; et issirent de la cité, par la porte du chastel. Les Franchois leur laissèrent à aucuns, pour l'honneur. de la gentillesse, une partie de leurs chevaux, pour porter les damoiselles et aultres gentillesfemmes; et avecques ce, leur feirent délibvrer des charettes pour porter aulcunes des plus notables femmes des Anglois, qui s'en alloient avecques leurs maris; lesquelles faisoient piteulx doeuil à veoir, car il partit d'icelle ville, de trois à quatre cents femmes, sans les enfants, dont il en y avoit grand nombre. Les unes portoient les petits berceaulx où estoient leurs enfants, sur leurs testes; les autres portoient les petits enfants sur leur col; les autres autrement, le mieux qu'elles pouvoient; et en tel estat se partirent les Anglois et leurs femmes, qui estoit pitié à regarder.

CHAPITRE XXVI.

Comment les Franchois prindrent Bricquebecq et Valloingnes; et du siége qui fust mis debvant Saint-Sauveur-le-Vicomte, et comme enfin la ville fust mise en l'obéissance du roy de Franche.

APRÈS la conqueste de la cité de Bayeux, le comte de Dunois, atout son ost, passa la rivière d'Orne; et aussi feit le comte de Clermont et ceux de sa compagnie; puis menèrent leurs gens vivre sur le pays, en attendant la venue du connestable de Franche et de ses gens ; lesquels cependant prindrent Bricquebecq, et meirent le siége devant Valloingnes, laquelle se rendit assés tost après, parce que le lieutenant du capitaine qui en avoit la garde, de par le roy d'Angleterre, s'estoit fait Franchois. Ils estoient dedans six vingts Anglois, lesquels allèrent, leurs corps et leurs biens saufs, à Chierbourg. Cependant, les mareschaulx de Franche et de Bretaigne meirent le siége devant Saint-Sauveur-le-Vicomte, qui est une moult belle place, et une des plus fortes de Normandie. Illecq feirent tous si valliamment et grandement leur debvoir, qu'en peu de temps meirent ceux de la place en grande nécessité, et les oppressèrent fort de trenchis; et à l'avancement fust occis ung valliant escuyer du pays de Berry, d'ung traict; lequel on

MONSTRELET. T. XII. MÉM. DE J. DU CLERCQ.

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