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de ce nom, et Henry VI, roy d'Angleterre, fils du roy Henry, et de Catherine de Franche, sœur au roy Charles dessusdit, prindrent d'eschelles et par emblées, les Anglois, les ville et chastel de Fougières, situés en la duché de Bretaigne, à l'entrée de Normandie, laquelle duché de Normandie, de Guienne, et d'autres moult grandes seigneuries au royaume de Franche, icelluy roy d'Angleterre possessoit. Icelluy roy d'Angleterre avoit environ vingt-huit ans, et en son age de huict à dix ans, par les guerres et divisions qui avoient esté au royaulme de Franche, avoit esté couronné roy de Franche à Paris, par les grandes conquestes, persécutions et batailles que le roy Henry son père y avoit faits, par lesquelles il avoit conquis une partie du royaume, et en avoit déboutté le roy Charles VI, aisné, qui plus n'avoit de fils. Et sy le roy Henry eust survécu Charles VI, son beau-père, il eust appréhendé tout le royaume; lequel royaume lui avoit esté donné par icelluy Charles VI. Mais, par la pourvoyance divine, qui ne voullut souffrir le droit héritier du royaume de Franche fust privé de son héritaige, le roy Henry d'Angleterre, environ quarante-huit jours avant que le roy Charles VI mourust, vint à clorre son dernier jour, et mourut au bois de Vincenues, emprès Paris, délaissant le roy Henry dessusdit, son fils d'ung an ou environ. Après laquelle mort du roy Henry et du roy Charles VI, Charles, fils dudit Charles, daulphin de Franche, alla à puissance d'armes,

que

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ner roy

en la cité de Reims, et illecq (là) se feit courronde Franche. Et depuis son courronnement reconquesta Paris, Ponthoise, et la pluspart de son royaume, tellement que les Anglois ne tenoient mès audit an quarante-huit, que les duchés et seigneuries dessusdites.

CHAPITRE II.
ITRE

Comment le roy de Franche envoya signifier au duc de Sombreset (Sommerset) que la ville de Fougières lui fust rendue et restituée avec touts les biens qui avoient esté prins dedans.

LE roy Charles estant monté à cheval au Moustier, et parti pour aller à Bourges en Berry, sa ville, on lui vint signifier comment les Anglois avoient prins Fougières, environ six cents combattants, dont estoit chief un chevallier arragonnois, nommé messire Franchois de Suriennes, et pillé la ville, laquelle estoit riche et puissante, et peuplée de très nobles bourgeois et autres riches marchands. Pour lesquelles nouvelles, le roy alla à Chynon; et là, par délibération du conseil, incontinent envoya le sieur de Cullant, son grand maistred'hostel, Guillaume Cousinot, son conseiller, et Pierre de Foncer (Fontenay), son escuyer d'escurie, en ambassade devers le duc de Sombreset (Sommerset), gouverneur de Normandie, de par le roy

d'Angleterre, pour lui sommer et requérir qu'il voulsit (voulût) rendre et délibvrer lesdites ville et chastel de Fougières, et faire rendre et restituer les biens et marchandises qui dedans avoient esté prins; lequel duc de Sombreset dict qu'il désavouoit ceux qui les avoient prins, supposé qu'il en fust iceulx, et pour ce ne se melleroit ne entremetteroit de les faire rendre.

Le duc de Bretaigne l'envoya pareillement sommer et requérir de rendre ou faire rendre et réparer lesdites ville et chastel de Fougières, auquel ledit duc feit pareille response qu'il avoit faite aux ambassadeurs du roy de Franche. Quand le duc de Bretaigne oyt ladite cause dudit duc, considérant les maux infinis qui polroient estre faits par icelle prinse, envoya en ambassade devers le roy de Franche, l'évesque de Resnes (Rennes), et le sieur de Quemenay (Guémené), pour lui remonstrer et faire sçavoir comment les Anglois avoient prins sa ville et chastel de Fougières, sur les tresves entre les roys de Franche et d'Angleterre, èsquelles le duc estoit comprins nommément avecques tous ses pays et seigneuries; et pour ces choses, considéré qu'il estoit son vassal et nepveu, le supplioit et requéroit de lui aider et donner confort à recouvrer sadite ville, ainsi que ung seigneur est tenu à secourir son vassal. Auxquels ambassadeurs de Bretaigne, le roy de Franche respondit, que pour ces causes il avoit envoyé son ambassadeur vers le duc de Sombreset; et semblablement avoit envoyé hastivement

par-devers le roy d'Angleterre, Jehan Havart, son escuyer tranchant, pour le sommer de rendre ladite ville; et pour ce falloit attendre la venue et retour de iceux, et scavoir leur response, devant que on peust par autre manière besongner en ceste matière. Mais au cas que ils ne vouldroient rendre ladite ville, le roy promectoit secours et confort au duc de Bretaigne son nepveu, allencontre des Anglois, et lui aideroit à recouvrer sadite ville de Fougières de tout son pouvoir.

CHAPITRE III.

Comment la ville et chastel du Pont-de-l'Arche feurent prins des gens du roy de Franche par subtylle voye; et comment le seigneur pays de Bretaigne promeit de servir le roy de Franche.

du

L'AN ensuivant, mil quatre cent quarante-neuf, après Pasques, les ambassadeurs du roy Charles retournèrent de Rouan et d'Angleterre, à Chynon, devers le roy, lequel, après avoir ouy la response, envoya devers le duc de Bretaigne, le comte de Dunois, le seigneur de Bretigny (Précigny) et autres, pour prendre et recepvoir pour lui et en son nom d'icelluy duc, et barons et seigneurs du pays, le serment de servir le roy leallement, tant que la guerre dureroit, ou cas qu'il se meit en armes, pour les ayder et secourir allencontre des Anglois; et lesquels

duc, barons et seigneurs le promirent ainsi; ce que pour plus seurement entretenir, baillèrent leurs scels, lesquels feurent portés au roy. Et tout incontinent ce fait, le duc de Bretaigne manda de toutes parts à ses subjets, amis et alliés, qu'ils le voulsissent ayder et secourir à soy vengier des Anglois, et recouvrer sa ville de Fougières. Et à ceste occasion et pour lui complaire, messire Jehan de Bresay chevalier, natif du pays d'Anjou, capitaine de Louviers; Robert de Flocque, dict Flocquet, escuyer, du pays de Normandie, bailly d'Evreux; Jacques de Clermont, escuyer du pays de la Dauphiné ; le sieur de Maugny et Guillaume de Bigars, entreprindrent de prendre les ville et chastel du Pontde-l'Arche, sur la rivière de Saine, à quatre lieues près de Rouan au-dessus, par le moyen d'un marchand de Louviers, lequel souvent menoit charroy par ledit Pont-de-l'Arche, pour aller à Rouan, et véoit qu'il n'y avoit guères de gardes à icellui pont. Et vindrent le sieur de Bresay et avecques lui aucuns gens de pied, eux embuscher près dudit lieu, du costel devers la porte Saint-Houin; et Robert de Flocque, atout quatre à cinq combattants à cheval, plus près de la ville, devers le bois, du costel dudit Louviers. Icelluy marchand, le jeudi devant l'Ascension, ou mois de may, se partist de Louviers pour aller à Rouan, ainsi qu'autrefois il avoit fait; et en passant pria le portier qu'il lui voulsist bien matin ouvrir la porte du chastel, et qu'il lui donneroit le vin, lui faisant accroire qu'il voulloit

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