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autorise la possession régulière de toutes ces églises et les cite chacune par leurs noms. A défaut des actes de fondation, c'était pour les religieux le meilleur titre de propriété, surtout à ces époques où la loi n'avait qu'une sanction très-imparfaite. Le pape Pascal II, voyageant à travers la France, s'arrêta plusieurs jours à La Charité; il consacra de ses mains, en 1107, la superbe église dont les voûtes et le clocher restent encore debout, et cette magnifique cérémonie, où le roi de France ainsi que les grands seigneurs se firent représenter (1), consacra la gloire et la haute puissance du prieuré.

Deux bulles furent scellées le même jour, l'une fixant les limites des possessions situées autour de La Charité sur les deux rives de la Loire; l'autre contenant la nomenclature des églises suffragantes dans les divers diocèses de France et à l'étranger. Cette dernière fut renouvelée en 1144 par le pape Luce II (2) en y ajoutant les possessions acquises dans l'intervalle. Les bulles suivantes ne contiennent plus de noms et ne touchent qu'à l'observation des réglements monastiques ou à la défense des priviléges des religieux.

Les confirmations des rois de France se joignent aux actes des papes. La première par Louis VI à l'abbaye de Cluni et à La Charité en 1119 (3) fut suivie des lettres de sauvegarde de Philippe-Auguste, Philippe-le-Bel, Jean-le-Bon. Henri

(1) Les anciennes chroniques racontent à l'occasion de cette brillante solennité la pêche merveilleuse de cent saumons dans la Loire, qui permit aux religieux de nourrir la nombreuse assistance. (Voyez entre autres: PERTZ, t. XXVI, p. 49; dom BOUQUET, t. XII, p. 19; t. XIV, p. 120.)

(2) Page 364. Ces actes pontificaux citent les noms de soixantequinze églises que l'on retrouve dans la liste des prieurés, p. 420, ei aussi dans l'inventaire de Colbert, p. 386. Elles sont restées soumises, excepté les étrangères, qui ont cessé d'entretenir les relations avec La Charité.

(3) Dom BOUQUET, t. XV, p. 510.

D'ACHERY, Spicilegium, in-4°,

t. XIII, p. 302. Les lettres des rois sont dans le Cartulaire.

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d'Angleterre et Alphonse de Portugal assurèrent également les possessions de La Charité dans l'étendue de leurs

royaumes.

Les grands feudataires, comtes de Champagne et de Nevers, ducs de Berry, confirmèrent les possessions acquises sous leurs prédécesseurs et firent des augmentations de donation. Les reconnaissances des évêques d'Auxerre se prolongèrent bien plus longtemps, à cause des immunités ecclésiastiques dont jouissait le prieuré. En 1094, Robert, comteévêque d'Auxerre et de Nevers, donne une confirmation générale pour les biens temporels et religieux (1) possédés dans ses deux fiefs; Laurent Pinon fit encore une déclaration solennelle des droits du prieuré en 1439 (2) et ses successeurs durent certainement remplir la même formalité.

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Les actes de donation revêtent les formes les plus variées jusqu'à la fin du treizième siècle. Le caractère le plus saillant chez l'un et l'autre des contractants, c'est l'insouciance des barons, absorbés dans leur vie de voyages et de combats, et la persévérance des moines qui conservent les terres en les mettant en rapport. Le maintien des propriétés entre leurs mains a été presque indéfini. La plupart des donations faites. au treizième siècle se retrouvent au dix-huitième (3), à peu

(1) Rebus tam ecclesiasticis quam etiam militaribus vel mundanis, p. 77(2) Page 85.

(3) Quelques exemples pris au hasard: le moulin Martin, près Bulcy, acquis au douzième siècle (p. 105), se

retrouve en 1610

près dans les mêmes conditions, sans progrès important, il est vrai, mais sans abandon du travail de la terre.

La donation est presque toujours entre-vifs et ordinairement accompagnée d'un versement par celui qui reçoit, ce qui n'implique pas l'idée de don gratuit. Il est impossible de se rendre compte du rapport de la somme versée avec les objets donnés; cette somme ne devait pas en représenter la valeur, comme pour une vente, mais il est bien certain qu'elle était le seul mobile de la donation.

Les actes de ce genre se firent surtout à l'occasion du départ des chevaliers pour les croisades. Hervé III de Donzy vient à La Charité faire bénir son voyage en Terre-Sainte et donne au prieuré un pré et divers droits (1). Humbaud Le Blanc abandonne ses biens de Pouilly, moyennant 1,300 sols, avec faculté de rachat s'il revient de Jérusalem (2). Le contrat avec Hugues de Narcy est encore plus explicite; Ja donation purement gratuite est consentie par le comte de Nevers et Itier, suzerain direct, qui reçoit une prime de 1,000 sols pour son consentement. Quelques années après, vers 1146, Hugues ayant pris la croix, se rend à La Charité pour supplier le prieur de l'aider dans son voyage; celui-ci veut bien accueillir favorablement sa demande et lui verse, à titre de libéralité, une somme de 300 sols (3). Quant à l'épouse du chevalier, réduite à un dénûment complet par le fait de cette donation, on lui accorde une prébende jusqu'à la fin de ses jours.

D'autres fois, les religieux se montrent moins exigeants

(p. 408). Le fief de la Charnaie, près Tronsanges, cédé par Jean Lepie à l'aumônier du couvent en 1188 (p. 172), est encore entre ses mains en 1707. Les maisons de Nevers, près la Revenderie, données par le comte Guillaume en 1166 (p. 154) paraissent encore en 1670. (1) Page 171.

(2) Page 88.

(3) Monachi dederunt ei, charitatis intuitu, trecentos solidos, P. 127.

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