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A prier avec vous jour et nuit assidus,

Me prêtent de leurs vœux le secours salutaire,
Et pendant ces trois jours gardent un jeûne austère.
Déjà la sombre nuit a commencé son tour:
Demain, quand le soleil rallumera le jour,
Contente de périr, s'il faut que je périsse,
J'irai pour mon pays m'offrir en sacrifice.
Qu'on s'éloigne un moment.

(Le chœur se retire vers le fond du théâtre.

SCÈNE IV

ESTHER, ÉLISE, LE CHOEUR.

ESTHER.

O mon souverain roi,

Me voici donc tremblante et seule devant toi !
Mon père mille fois m'a dit dans mon enfance
Qu'avec nous tu juras une sainte alliance,
Quand, pour te faire un peuple agréable à tes yeux,
Il plut à ton amour de choisir nos aïeux :
Même tu leur promis de ta bouche sacrée
Une postérité d'éternelle durée.

Hélas! ce peuple ingrat a méprisé ta loi;
La nation chérie a violé sa foi;

Elle a répudié son époux et son père,

Pour rendre à d'autres dieux un honneur adultère :
Maintenant elle sert sous un maître étranger.
Mais c'est peu d'être esclave, on la veut égorger :
Nos superbes vainqueurs, insultant à nos larmes,
Imputent à leurs dieux le bonheur de leurs armes,
Et veulent aujourd'hui qu'un même coup mortel
Abolisse ton nom, ton peuple et ton autel.
Ainsi donc un perfide, après tant de miracles,
Pourrait anéantir la foi de tes oracles,
Ravirait aux mortels le plus cher de tes dons,
Le saint que tu promets et que nous attendons?
Non, non, ne souffre pas que ces peuples farouches,
Ivres de notre sang, ferment les seules bouches
Qui dans tout l'univers célèbrent tes bienfaits;
Et confonds tous ces dieux qui ne furent jamais.
Pour moi, que tu retiens parmi ces infidèles,
Tu sais combien je hais leurs fêtes criminelles,
Et que je mets au rang des profanations
Leurs tables, leurs festins et leurs libations;

Que même cette pompe où je suis condamnée,
Ce bandeau dont il faut que je paraisse ornée
Dans ces jours solennels à l'orgueil dédiés,
Seule et dans le secret, je le foule à mes pieds;
Qu'à ces vains ornements je préfère la cendre,
Et n'ai de goût qu'aux pleurs que tu me vois répandre.
J'attendais le moment marqué dans ton arrêt,
Pour oser de ton peuple embrasser l'intérêt.
Ce moment est venu ma prompte obéissance
Va d'un roi redoutable affronter la présence.

C'est pour toi que je marche accompagne mes pas
Devant ce fier lion qui ne te connaît pas;

Commande en me voyant que son courroux s'apaise, Et prète à mes discours un charme qui lui plaise : Les orages, les vents, les cieux te sont soumis : Tourne enfin sa fureur contre nos ennemis.

SCÈNE V

(Toute cette scène est chantéc.)

LE CHOEUR.

UNE ISRAELITE, seule.

Pleurons et gémissons, mes fidèles compagnes :
A nos sanglots donnons un libre cours;
Levons les yeux vers les saintes montagnes
D'où l'innocence attend tout son secours.
O mortelles alarmes !

Tout Israël périt. Pleurez, mes tristes yeux :
Il ne fut jamais sous les cieux
Un si juste sujet de larmes.

TOUT LE CHOEUR.

O mortelles alarmes!

UNE AUTRE ISRAELITE.

N'était-ce pas assez qu'un vainqueur odieux
De l'auguste Sion eût détruit tous les charmes,
Et traîné ses enfants captifs en mille lieux?

TOUT LE CHOEUR.

O mortelles alarmes !

LA MÊME ISRAÉLITE.

Faibles agneaux livrés à des loups furieux,
Nos soupirs sont nos seules armes.

TOUT LE CHOEUR.

O mortelles alarmes !

UNE ISRAELITE.

Arrachons, déchirons tous ces vains ornements Qui parent notre tête.

UNE AUTRE.

Revêtons-nous d'habillements
Conformes à l'horrible fête
Que l'impie Aman nous apprête.

TOUT LE CHOEUR.

Arrachons, déchirons tous ces vains ornements
Qui parent notre tête.

UNE ISRAELITE, scule.
Quel carnage de toutes parts!

On égorge à la fois les enfants, les vieillards,
Et la sœur, et le frère,

Et la fille, et la mère,

Le fils, dans les bras de son père!
Que de corps entassés, que de membres épars,
Privés de sépulture!

Grand Dieu, tes saints sont la pâture
Des tigres et des léopards.

UNE DES PLUS JEUNES ISRAELITES.

Hélas! si jeune encore,

Par quel crime ai-je pu mériter mon malheur?
Ma vie à peine a commencé d'éclore :
Je tomberai comme une fleur

Qui n'a vu qu'une aurore.

Hélas! si jeune encore,

Par quel crime ai-je pu mériter mon malheur?

UNE AUTRE.

Des offenses d'autrui malheureuses victimes,
Que nous servent, hélas! ces regrets superflus?
Nos pères ont péché, nos pères ne sont plus,
Et nous portons la peine de leurs crimes.

TOUT LE CHOEUR.

Le Dieu que nous servons est le Dieu des combats:
Non, non, il ne souffrira pas
Qu'on égorge ainsi l'innocence.
UNE ISRAELITE, seule.

Eh quoi! dirait l'impiété,

Où donc est-il ce Dieu si redouté
Dont Israël nous vantait la puissance?

UNE AUTRE.

Ce Dieu jaloux, ce Dieu victorieux,
Frémissez, peuples de la terre,

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