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« Quarante et un ans plus tard, cinq cents ans après la venue à Nancy de Jeanne, le projet fut repris, mais le choix de l'emplacement fut plus judicieux et le texte gravé sur la plaque a été relevé, non dans un récit plus ou moins déformé par l'imagination d'un chroniqueur, mais sur un des seuls documents officiels où trace de ce voyage ait été conservée, le procès de condamnation ».

M. des Robert lit alors le texte gravé sur l'inscription et ajoute:

« Les dépositions de plusieurs témoins nous donnent quelques autres renseignements sur le voyage de Vaucouleurs à Nancy:

« La Pucelle fut accompagnée par son cousin germain: Durand Laxard ou Lassois, appelé par elle son oncle en raison d'une assez grande différence d'âge; un homme d'armes de la garnison de Vaucouleurs, Jean de Metz, les escorta jusqu'à Toul. Ce sont les deux premières personnes qui eurent foi dans sa mission.

<< De Toul, elle se rendit, par un détour, à Saint-Nicolas de Port, pour y honorer les reliques de l'évêque de Myra, devenu patron de la Lorraine », ajoute Pfister.

« Au duc, elle conseilla de reprendre sa femme légitime et le vieux souverain ne tint pas grief à la jeune fille de son franc parler, car il lui donna quatre francs et un cheval noir. « Nous ne connaissons rien d'autre sur le séjour de Jeanne à Nancy.

« Pour Siméon Luce, ce voyage à Nancy fut « une suprême « épreuve à laquelle la curiosité sympathique du jeune duc de « Bar et la crédulité superstitieuse du vieux duc de Lorraine << avaient fourni l'occasion de soumettre Jeanne et le sceptique << Robert de Baudricourt s'était empressé de la saisir ».

<< Peu après le retour à Vaucouleurs, ce fut le départ pour la France, l'arrivée à Chinon, la délivrance d'Orléans, le sacre du roi à Reims, l'échec devant Paris, la trahison à Compiègne, la gêole et la mort à Rouen, et l'entrée dans le ciel de gloire, dans l'immortalité.

<< Inconsciemment un raprochement se fait dans mon esprit: aux derniers jours de juillet 1914, c'est à quelques mètres d'ici que prit départ celui qui devait conduire l'autre chevauchée libératrice.

<< Par celui-là également la France fut sauvée.

« Je n'ai pas été le seul à faire ce rapprochement. Un descendant de ceux que Jeanne bouta hors de France, il y a cinq siècles, écrivait dans le Times, du 26 mars dernier :

< Esprit incarné de la France, qui l'avait bien compris, « Foch va au repos l'année où elle célèbre le 500° anniversaire << de cette autre grande œuvre de délivrance: celle de Jeanne « d'Arc.

<< Tous deux avaient en commun leur piété simple, leur foi << inébranlable, leur tranquille courage, la conviction qu'au<< dessus de l'individu il y a le pays, qu'au-dessus de l'homme << il y a le bien et le mal et que la guerre n'est pas un but, car << au-dessus d'elle il y a la paix ».

< Réunissons donc dans un même hommage la mémoire de << deux grands chefs militaire qui vécurent à un demi-millé<< naire d'intervalle: la paysanne de Domremy et le maréchal << de France: Jeanne d'Arc et Foch! >>

M. Devit, maire de Nancy, auquel la Société, comme vient de le dire son président, est particulièrement reconnaissante d'avoir fait assumer par la Ville les frais de cette commémoration, répond par l'allocution suivante:

Monsieur le Président, Messieurs,

<< Au nom de la municipalité, je remercie bien vivement la Société d'Archéologie lorraine et du Musée historique lorrain d'une initiative qui nous permet de commémorer le passage à Nancy de celle qui, suivant la juste expression d'un éminent panégyriste, nous apparait «< comme l'incarnation même du patriotisme dans ce qu'il a de plus désintéressé et de plus pur ».

« La solennité qui nous réunit en ce lieu complète, d'une façon très heureuse, celle à laquelle Nancy prit part, le 28 juin 1890, dans un sentiment unanime d'admiration et de reconnaissance. Ici, c'est l'humble fille des champs qui, sans jamais se laisser abattre, atteste de sa foi dans les destinées de la France et la sainteté de sa mission. Là-bas, où nous irons tout à l'heure, c'est la vierge guerrière qui, après avoir triomphé de l'indifférence et du doute, chevauche à la tête de ses troupes, serrant ferme et tenant haut l'étendard de la délivrance.

« A ce double titre et sous ce double aspect, il nous appartnait de la glorifier et de perpétuer sa mémoire. Honneur, Messieurs, vous soit rendu pour y avoir contribué avec une noble ardeur.

<< Et pour terminer, laissez-moi vous dire, M. le Président, combien nous applaudissons à votre pieuse pensée de magnifier dans un même élan de nos esprits et de nos cœurs. Jeanne la grande libératrice, et Foch, le grand libérateur ».

Ces deux discours sont discrètement applaudis, tandis que la foule se disperse pour assister à la cérémonie militaire, place de la Carrière. La Société d'Archéologie peut être fière de son initiative et heureuse du succès qu'elle a remporté.

Promenades-conférences de la saison d'été 1929

A. G.

La Société d'archéologie lorraine a organisé cette année, de concert avec la Société des amis du Musée lorrain, une série de conférences-promenades qui ont eu un grand succès.

Le 10 mai, M. E. des Robert a présenté les collections du Musée lorrain, après avoir rappelé l'histoire du Palais ducal. Son dessein a été moins de donner une description minutieuse des objets exposés qu'une idée d'ensemble des collections. Le Président de la Société d'archéologie lorraine a tenu à insister particulièrement sur les récentes et nombreuses acquisitions du Musée et a montré ce que deviendrait le Musée lorrain lorsque la partie du Palais occupée par l'Ecole primaire supérieure serait mise à la disposition de la Société d'archéologie. M. Ch. Sadoul a présenté ensuite la section de l'art rustique.

Le 23 mai, M. Pierre Marot a dirigé une excursion à SaintNicolas de Port et Varangéville. A Saint-Nicolas de Port, après avoir fait l'histoire de l'église, il a étudié l'architecture de l'édifice et l'iconographie des vitraux. A Varangéville, il présenta successivement l'église, qui est un type d'édifice de la fin du xv" siècle, et les vestiges romans du prieuré qu'il importerait de conserver intacts.

Le 6 juin, M. André Philippe, conservateur du Musée des Vosges et archiviste de ce département, dirigea une très intéressante excursion à Epinal; il fit visiter d'abord l'église SaintMaurice dont il a écrit une très savante monographie, malheureusement épuisée, mais qui sera bientôt rééditée. Il présenta ensuite les riches collections du Musée qui sont trop peu connues en Lorraine. Les membres de la Société d'archéologie ont pu admirer la galerie des tableaux, les collections lapidaires, la série intéressante des dessins réunis par Charles Oulmont et légués par lui à Epinal. Ils ont pu constater avec quel goût

et quelle science le Musée des Vosges était classé. Un catalogue, qui est sous presse, fera connaître bientôt à tous l'œuvre que M. André Philippe a réalisée au Musée départemental des Vosges.

Le 14 juin, M. Demeufve a fait au Musée lorrain une conférence très documentée et très originale sur la céramique lorraine. Il a retracé l'histoire de cette industrie et, en usant des pièces conservées au Musée, a montré comment on pouvait identifier les différents produits de la céramique lorraine. Cette conférence si instructive a montré combien il serait utile de posséder une bonne histoire de la céramique lorraine. M. Demeufve serait tout désigné pour écrire un tel livre.

Cette conférence a été suivie d'une visite à l'église des Cordeliers et à la chapelle ducale, dirigée par M. Pierre Marot. La Revue lorraine illustrée publiera prochainement un article où une partie de l'exposé de M. Pierre Marot sera reproduit.

Le 22 juin, M. Pierre Marot fit visiter l'Hôtel de la Monnaie et les Archives départementales, il résuma l'histoire du Trésor des chartes de Lorraine et des principaux fonds conservés aux Archives qui ont été classés et inventoriés par ses laborieux prédécesseurs, Henri Lepage et M. Emile Duvernoy. Il présenta ensuite les documents les plus curieux qui constituent la réserve » des Archives.

Des conférences seront organisées pendant la saison d'hiver sur l'histoire de la Lorraine et de Nancy. Nous espérons qu'elles seront suivies avec autant d'assiduité que les excursions.

NÉCROLOGIE

M. L'ABBÉ DEMANGE

Notre confrère, M. l'abbé Modeste Demange, est mort à Nancy le 17 juillet 1929, dans sa 70° année. Né en 1859 à Bruley (canton de Toul-Nord), il fut vicaire de la cathédrale de Toul, puis curé de diverses paroisses de l'arrondissement de Toul. En dernier lieu, il avait été aumônier des bénédictines de Roville-aux-Chênes (Vosges), puis, à partir de 1927, aumônier des petites sœurs des pauvres de Nancy.

Entré dans notre Société en 1886, il a donné à son Journal et à ses Mémoires de savantes études dont on trouvera la liste dans la Table générale publiée en 1903 par M. Sadoul, puis au Bulletin de 1907 une étude sur la grotte de Saint-Amon, et à celui de 1908 la monographie de Saulxerotte (canton de Colombey). En outre, il a publié en 1888 un petit volume très érudit sur Le saint clou de Toul.

Il s'est acquis un autre titre à la gratitude des historiens lorrains en offrant aux Archives de Meurthe-et-Moselle de très précieux documents provenant du chapitre de Toul, entre autres trois cartulaires, onze bulles et plus de soixante-dix chartes originales, le tout dans un excellent état de conservation. Voulant faire entrer ces trésors dans un dépôt public. il aurait pu se contenter de les léguer; il préféra les donner de son vivant, dès 1920, et cette libéralité lui valut à juste titre les palmes académiques. On trouvera dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes de 1920, p. 446-447, un aperçu de cette importante collection.

Ceux qui ont à se servir des travaux de M. l'abbé Demange apprécient leur information précise et consciencieuse et la prudence de leurs conclusions. Ceux qui l'ont connu se rappellent sa grande modestie, son aménité, son désir de rendre service. Notre Société est heureuse de l'avoir compté parmi ses membres et d'avoir accueilli la plupart de ses travaux. E. D.

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