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Forme de la lance qui porte 10 pieds 2 de long

Vue en grand

des Armoiries

DESSIN EXÉCUTÉ EN 1790

(Archives municipales de Beauvais.)

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LE

DRAPEAU DE JEANNE-HACHETTE

ET LES

ARMES DE BEAUVAIS.

En 1850, un savant membre de l'Institut, M. Paulin Paris, émettait quelques doutes « sur les hauts faits » de JeanneHachette et contestait l'authenticité du drapeau conservé à l'Hôtel-de-Ville de Beauvais. Une longue discussion s'engagea, dont le résultat fut d'établir d'une façon certaine les deux points suivants :

1° Pendant le siège de 1472, Jeanne Laisné, surnommée plus tard Hachette, s'empara d'un drapeau bourguignon.

2o Le drapeau conservé à l'Hôtel-de-Ville n'est pas et ne peut pas être le drapeau pris par Jeanne Laisné.

Mais la discussion de 1850 ainsi que ses conclusions sont aujourd'hui tombées dans l'oubli. Un érudit distingué, M. Tamizey de Larroque, reprenant la première thèse de M. Paulin

T. XII.

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Paris, s'étonne que la ville de Beauvais ait élevé une statue à Jeanne-Hachette (1). De loin, s'écrie-t-il,

De loin c'est quelque chose, et de près ce n'est rien.

M. Edouard Fournier est tenté de dire presque aussi affirmativement que M. Paris, à propos des dames de Beauvais : Elles ont toutes été des Jeanne-Hachette..... à l'exception de JeanneHachette (2). » On lit encore dans le Dictionnaire historique de Bachelet et Dezobry, et dans celui de Grégoire, que l'existence de Jeanne-Hachette est niée ou contestée par plusieurs historiens.

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D'un autre côté, tous les habitants de Beauvais sauf un bien petit nombre sont toujours persuadés que le drapeau conservé à l'Hôtel-de-Ville est bien le drapeau pris par JeanneHachette en 1472.

Nous croyons donc faire œuvre utile en remettant sous les yeux du public les principales pièces du débat. La tâche nous sera facile; le regretté M. Mathon ayant réuni un dossier fort complet, que ses héritiers ont bien voulu nous confier. Comme on le verra, la discussion fut ardente, mais elle ne dégénéra jamais en personnalités blessantes et ne froissa aucune susceptibilité légitime.

I.

Le 27 juin 1172, l'armée de Charles le Téméraire arrivait devant Beauvais et donnait immédiatement l'assaut sur plusieurs points à la fois. Que ce début n'inquiète pas le lectenr. Nous n'avons nullement l'intention de refaire à notre tour l'histoire du siège; nous voulons seulement mettre en lumière l'héroïque

(1) De l'existence de Jeanne-Hachette. (Revue des questions historiques; octobre-décembre 1866.)

On lit, au

(2) L'esprit dans l'histoire, troisième édition (1879). contraire, dans la deuxième édition: « Je sais que Commines n'a pas dit un mot d'elle; mais, à défaut de l'historien, le roi lui-même a parlè... C'est assez, pour que, aux yeux même d'un douteur tel que moi, JeanneHachette soit une héroïne incontestable. >>

conduite des femmes de la ville et le Jeanne.

"

haut fait de notre

« ceux de

A la porte du Limaçon, dit le Discours du Siège (1), la ville firent bonne et aspre résistance, en tirant de leurs arcs, arbalestres, couleuvrines, et de grosses pierres que leurs femmes, fils et filles portoient sur la muraille, tellement qu'il y eût plusieurs Bourguignons tuez..... » A la porte de Bresles, « les Bourguignons ne furent pas moins vaillament recueillis que de l'autre part par lesdits habitans, lesquels à l'ayde de leurs femmes et filles qui leur portoient sur la muraille grosses pierres de toute sorte, avec grande quantité de trousses de flesches et de pouldres et s'y gouvernèrent si vaillamment que par la grâce de Dieu l'honneur et la force leur demeura, tant parce qu'en livrant ledit assault, qui fut beaucoup plus fort et aspre à ladite porte de Bresle qu'à celle de Limaçon, l'on y apporta le précieux corps et digne chace de la glorieuse vierge saincte Angadresme, native de Beauvais, en requérant son ayde et bon secours envers Dieu à l'encontre desdits Bourguignons.....

« Et n'est à oublier qu'au dit assault, pendant que les Bourguignons dressoient eschelles et montoient sur la muraille, l'une desdites filles de Beauvais, nommée Jeanne Fourquet, sans autre baston ou ayde, print et arracha à l'un desdits Bourguignons l'estendart qu'il tenoit, et le porta en l'église des Jacobins. » On lit aussi dans un historien contemporain (2) : « In ea oppugna

(1) Cette intéressante relation, écrite certainement par un témoin oculaire, a été publiée pour la première fois à Beauvais, en 1622, chez G. Vallet, en la chastellenie près Saint-Barthélemy. Une nouvelle édition parut, en 1762, chez Desjardins, suivie de la Description du Beauvaisis, par Jacques Grévin. L'imprimeur réunit le nom des deux ouvrages sur le faux-titre, et c'est de là qu'est venue l'erreur qui a fait attribuer cette relation à J. Grévin. Le Discours du Siège a été aussi réimprimé par Cimber et Danjou dans les Arch. curieuses de l'Hist. de France (1TM série, t. 1), et par Techener dans le Bulletin du Bibliophile (nov. 1843 et janvier 1844). On le trouve encore dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de Picardie (t. v, 1842), mais d'après une copie manuscrite complètement remaniée et augmentée c'est-à-dire dénaturée par un écrivain du XVII ou du XVIIIe siècle.

(2) Robert Gaguin: Compendium super Francorum gestis; Paris, 1507.

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