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parrain (1) et qui, en 1612, préside avec plusieurs autres pothiers » à l'inventaire des biens délaissés par honorable homme Augustin Conrade, « maistre pothier en euvre blanche et autres couleurs, en forme de fayance (2). »

Et maintenant, où notre Jacobo Sarodo s'est-il retiré en quittant Nevers? Une première réponse nous est fournie bien à propos et d'une façon très-imprévue par un des membres éminents du Comité des travaux historiques et des sociétés savantes. M. L. Doüet d'Arcq, rendant compte d'un mémoire publié dans la Société archéologique du dépar tement d'Ille-et-Vilaine, sous ce titre: De la Verrerie et des Vitraux peints dans l'ancienne province de Bretagne, cite ces paroles de l'auteur, M. Auguste André, directeur honoraire du musée archéologique de Rennes : « Tout le pays nantais était plein des établissements industriels de ces gentilshommes verriers d'au-delà des monts. Leurs fourneaux s'allumaient et y chauffaient partout... » Il ajoute ensuite (3): « Au seizième siècle, il est souvent fait mention de ces gentilshommes verriers. Nous citerons, entre plusieurs autres, des lettres données à Châteaubriant, le 13 juin 1551, qui permettent à Theseo Mutio, gentilhomme italien, natif de Bologne, de pouvoir faire en France toutes espèces de verreries à la façon de Venise. D'autres, datées de Paris, 12 juillet 1566, qui sont une confirmation d'exemption d'impôts pour les gentilshommes verriers du royaume. Au

(1) Le premier jour de septembre 1602 a esté baptizé le filz de honorable homme Laurens Gambin et de honeste femme Margueritte Massey (alias Macet, Massé). Ses parrins et marrène, honorable homme Julles Gambin, grand-père dudit enfant, honeste fils Jehan Ponté et honeste femme Marye More. Et a nom Julles. » (Archives du greffe de Nevers.)

(2) Archives de Nevers, série GG. 16. Nous avons publié pour la première fois une analyse de ce très-curieux document dans les Archives paroissiales de Nevers, paroisse Saint-Laurent. (Almanach de la Nièvre, 1875, 2° partie.)

(3) Revue des sociétés savantes, 7 série, t. II, p. 87.

mois d'août 1597, Henri IV, se trouvant au camp devant Amiens, accorde à Jacques et Vincent Sarode, frères, et à Horace Ponté, leur neveu, un brevet pour l'établissement d'une verrerie de cristal à Melun. « Lesquels, portent les lettres, ayant cy-devant et depuis longtemps tenu les fourneaulx et verreries de cristal en noz villes de Lyon et Nevers, ont acquis une telle réputation en la perfection de leurs ouvraiges, que la plupart des verres dudit cristal, desquels l'on c'est servy en nostre court et suitte, et par tout nostre royaume, ont esté apportez desdictes villes de Lyon et de Nevers, etc. Que lesdits Sarode et Ponté nous ont fait dire que s'il nous plaisoit de leur permettre de dresser une verrerie en nostre ville de Melun..., le verre deviendroit moins cher et pourroit mieux approvisionner la ville de Paris (1). »

verso.

(1) Archives nationales, registre des ordonnances X 1a 8643, folio 59, Nous sommes heureux de publier en note le texte entier de ces lettres-patentes, d'après une double copie qui nous a été adressée très-obligeamment par M. Lemaire, archiviste de la préfecture de Seine-et-Marne, à Melun, et par notre collègue M. René de Lespinasse. M. Gabriel Leroy, archiviste de la ville de Melun et correspondant du ministère, avait déjà fait connaître l'existence de ce curieux document dans la Revue des sociétés savantes en 1869, 4° série, t. IX, p. 572.

Henry par la grace de Dieu roy de France et de Navarre, a tous presens et advenir, salut. Comme chacun scait assez quel bien proffict et utillité est provenu a tous les royaulmes et républiques par le moyen des arts et sciences, seul fondement de leurs richesses et embellissemens, et combien les hommes qui, par leur long estude, dilligence et expérience les ont inventez et introduictz, ont été recongneuz, honnorez et recompensez d'ung si louable labeur afin que tant par leur tesmoignage que par la prospérité de leurs mérites les autres fussent poussés d'ung mesme désir à rechercher, à leur exemple, non seulement la perfection des premières inventions, mais encore à trouver avec plus haulte contemplation plus haultes et belles choses non congneues à l'antiquité, pour s'acquerrir par là une honnorable louange ainsy qu'ont faict noz chers et bien amez Jacques et Vincent Sarrode frères et Horace Ponté leur nepveu gentilzhommes en l'art et science de verrerie lesquels ayant cy-devant et depuis long temps tenu les fourneaulx de verrerie de cristal en noz villes de Lyon et Nevers ont acquis T. II, 3. série.

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A quelques jours de là, le 5 septembre 1597, les échevins de Nevers délivraient à maître Pierre Gouneaul, leur receveur des deniers communs, un mandat de payement, sur les deniers de sa recette, « au seigneur Jaques Sarodo et Orace Ponte, maistres de la verrière de ceste ville de Nevers »,

telle réputation en la perfection de leurs ouvraiges que la pluspart des verres dudit cristal desquels l'on c'est servy en nostre court et suitte par tout nostre royaulme ont esté apportez des villes de Lyon et Nevers, mais d'aultant qu'en les allant quérir si loing la despence qui se faict à les apporter les rend beaucoup plus chers, sur ce que lesdits Sarrode et Ponté nous ont faict dire que s'il nous plaisoit leur permectre de dresser une verrerie en nostre ville de Melun ils y déployeroient vollontiers le plus beau et exquis de leur art et science et y feroient des ouvraiges par le moyen desquels nostre ville de Paris capitalle de nostre royaulme seroit grandement acommodée et y seroient lesdits verres a meilleur marché qu'ils ne sont pour le peu de distance qu'il y a de l'ung à l'autre et la commodité de les transporter par la rivière, scavoir faisons que nous mettons en considération la grande expérience desdits de Sarrode et Ponté audict art et science de verrerie et le fruict et utillité qui en reviendra en nostre dite ville de Paris et au public, nous leur avons de nostre grace spécialle, plaine puissance et autorité royalle, permis octroyé et acordé, permectons octroyons et acordons, par privilége particulier, par ces présentes qu'ils puissent tenir en nostredite ville de Melun une verrerie de cristal et y faire construire ung fourneau a y faire par eulx et leurs ouvriers dudit art des verres de cristal et telles autres choses qu'ils adviseront deppendantes dudict art pour le service et usaige tant de nostre court et suitte que des habitans de nostre dite ville de Paris et de tous autres qui en vouldront achapter, pour par lesdits Sarrode et Ponté tenir en nostre dite ville de Melun ladicte verrerie aux mesmes droicts et honneurs, priviléges, franchises, immunitez, libertez et exemptions tant pour eulx que pour leurs serviteurs et marchands, vendeurs en gros et destail mannans et conduisans ladite marchandise de verrerie et matière dont est composé le verre, par eau et par terre, en la mesme sorte et manière qu'ils ont bien et deuement joy et usé par le passé et sans fraulde en nosdites villes de Lyon et Nevers, jouissent et usent encores a present suivant la confirmation de leurs priviléges que nous et noz prédécesseurs roys, leur en avons successivement accordé, la coppie desquelz priviléges vériffiez en nostre court de Parlement, Chambre de noz comptes et Court des aydes à Paris, est cy attachée soubz le contrescel de nostre chancellerie sans

d'une somme de 12 écus soleil pour huit douzaines de verres de cristal envoyées à Paris, « pour faire des présents, à la sollicitation d'un procès qu'a la ville... La quittance, datée du dernier jour de décembre, n'est signée que d'Horace Ponté.

Deux ans plus tard, un autre mandat, daté du 23 mai 1599, est délivré, « au seigneur Vincent Sarrodo, ung des maistres de la verrière de ceste ville », pour une somme de 49 écus 30 sols, à raison de « trente-trois douzaines de verres de cristal raffiné qui ont esté présentez et envoyez en la ville de Paris, scavoir à monsieur de La Grange Courtin, douze douzaines; à monsieur de Laulnay, six douzaines; à monsieur Vivian, six douzaines; à monsieur Verne, trésorier à Molins, six douzaines ; à monsieur Jolly, trois douzaines. >> Le reçu, daté du 16 juillet 1599, est signé de Marcoroli Sarodo.

Durant ces trois dernières années, le seigneur Jacques ne fait à Nevers que de rares apparitions; peut-être organise-t-il sa troisième verrerie à Melun. Il ne paraît pas cependant y avoir fait un bien long séjour en cette ville (1); et c'est à

qu'il soit besoing les speciffier ny desclarer par cesdites présentes, par lesquelles afin que lesdits Sarrode et Ponté puissent mieux recueillir le fruict du labeur qu'ils employeroient en ladicte verrerie nous avons dit et déclaré disons et declarons, voullons et nous plaist qu'en nostre dicte ville de Paris ny à trente lieues à la ronde d'icelle, il ne s'establira à l'advenir autre verrerie de cristal que celle desdits Sarrode et Ponté, révoqué et révoquons par cesdictes présentes. N'entendons touteffois préjudicier aux verreries de Feugère et de Pierre qui se trouveront establiez et s'establiront cy après es environs de nos dictes villes de Paris, Melun et ailleurs partout nostre royaume...

» Donné au camp devant Amyens au moys d'aoust l'an de grâce mil cinq cens quatre vingts dix sept et de nostre règne le neufiesme signé Henry, et sur le reply, par le roy: de Neufville. »

(1) M. Lemaire, archiviste départemental de Seine-et-Marne, nous écrit que l'établissement de la verrerie à Melun a bien été autorisé, mais qu'on doute qu'il ait jamais été effectué. Peut-être le classement méthodique des archives judiciaires de la ville fournira-t-il quelques indications! — Il y a bien eu une verrerie à Melun, puisqu'un des quais en emprunte le nom, mais elle n'était pas antérieure au dernier siècle.

Paris même que le vaillant artiste est allé s'établir. Un nouveau mandat délivré par les échevins, le 6 juillet 1603, nous apprend en effet que maître Laurent Thonnellier, receveur de l'hôtel commun, est invité à payer « au seigneur Orace Ponté, maistre de la verrière de Nevers », la somme de 93 écus 40 sols, revenant à la somme de 281 livres, savoir: 63 écus 40 sols, tant pour verres de cristal pris en la verrière de Paris, pour faire présent à plusieurs seigneurs du conseil, que pour autres yerres aussi de cristal, pris en la verrerie de Nevers, pour porter à Moulins et faire présent à messieurs les Trésoriers généraux, et 20 écus qui ont été prêtés à monsieur l'élu Destrappes, échevin, étant à Paris pour les affaires de cette ville, par le seigneur Jacques Sarodo, maître de la verrerie dudit Paris.

En vérité, ce Jacobo Sarodo n'était pas seulement un grand industriel, comme on dirait de nos jours, ce devait être un véritable artiste dans le sens large et noble de ce mot.

Et voici qu'en effet notre érudit collègue M. de Laugardière nous signale un Poème sur l'art de la verrerie, et la comparaison de l'homme à un verre, par Jacques Sarode, en 1594, petit in-4° manuscrit sur papier, avec corrections et ratures, indiqué dans le catalogue des livres, imprimés et manuscrits de la bibliothèque de feu M. d'Aguesseau, doyen du conseil (1).

Ce manuscrit, avec corrections et ratures, était sans doute l'autographe de l'auteur; il était en français, car il figure au paragraphe des Poëtes françois, après les œuvres de Ronsard et de des Portes; les poètes italiens ont leur paragraphe à part.

C'est là malheureusement tout ce que nous pouvons dire de l'ouvrage de Jacques Sarode. Peut-être, quelque jour, nous sera-t-il donné d'y revenir, si tant est que ce manuscrit existe encore et qu'une bonne fortune nous le fasse retrouver!

(1) Paris, Gogué et Née de La Rochelle, libraires, 1785, in-8° ; page 208, n° 3178.

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