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cessité de favoriser les églises, les couvens, et les communautés de moines dominicains, peut-être à cause que l'inquisiteur général Rocaberti, le confesseur du roi, Diaz, et les trois exorcistes, étaient dominicains. L'un des trois démons insinua que la reine elle-même avait eu quelque part au maléfice : mais il est à croire que cette circonstance n'aurait pas empêché de rétablir le roi dans la faculté d'avoir des enfans. Le procès comprend quatre pièces de plus de mille feuillets; s'il était imprimé, quel sujet de réflexions!

ARTICLE II.

Consultation contre les abus que commettent les inquisiteurs.

I. Ce fut sous le règne du même prince que fut convoquée la grande Junte, composée de deux conseillers d'état, de deux membres de chacun des Conseils de Castille, d'Aragon, d'Italie, des Indes, des ordres militaires et des finances, et d'un secrétaire du roi, sous-secrétaire de la secrétairerie d'état du Nord. Le ministre secrétaire du roi s'exprimait ainsi : « Les altercations survenues dans toutes sortes d'affaires entre les inquisiteurs et les juges royaux ordinaires, sur des points de juridiction et » de priviléges, sont si multipliées, qu'il en est » déjà résulté des inconvéniens considérables, qui » ont troublé la tranquillité des peuples, et empêché » l'administration de la justice, comme on le voit > encore dans quelques provinces, par l'effet des récla

»mations continuelles que les deux autorités emploient » l'une contre l'autre. Ces motifs engagent le roi » à charger l'assemblée de proposer une règle fixe,

claire et déterminée, pour prévenir de pareils abus, » et propre à garantir au tribunal de l'Inquisition le » respect qui lui est dû, en même temps qu'elle » servira de barrière contre les inquisiteurs qui » voudraient s'immiscer dans les affaires étrangères à l'institution du Saint-Office. Le roi ordonna que les six conseils qui avaient envoyé chacun deux de leurs membres pour former la junte, communiquassent à celle-ci tous les papiers qui pourraient lui servir pour l'objet que Sa Majesté venait de lui soumettre.

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II. Le 21 mai 1696, la grande Junte fit son rapport, et elle y disait «Par l'examen que la junte a » fait des papiers qui lui ont été remis, elle a reconnu › combien est ancien et général dans tous les domai» nes de Votre Majesté où l'Inquisition est établie, le » désordre qui règne dans les différentes juridictions, » à cause de l'infatigable soin des inquisiteurs à » étendre toujours leur pouvoir avec tant d'arbi

traire et si peu de retenue, quant à l'usage, » aux circonstances et aux personnes, qu'ils n'ont » presque rien laissé à faire à la juridiction ordi» naire, et qu'ils ont enlevé l'autorité à ceux qui » doivent l'administrer. Il n'y a aucune sorte d'af» faires ( quelque étrangère qu'elle soit à leur ins»titut et à leurs attributions) dont ils ne s'arro» gent la connaissance, sous quelque prétexte plus ou >> moins illusoire; aucun homme (quelque indépen» dant qu'on le suppose de leur autorité ) qu'ils »ne traitent comme s'il était leur sujet immédiat,

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» en le forçant d'obéir à leurs décrets, en prononçant » contre lui des censures, des amendes, la prison et » (ce qui est plus funeste encore) en attachant à » son nom l'infamie, inséparable de ces différentes » peines.

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III. La plus légère offense, le moindre tort envers leurs domestiques, attire leur vengeance, et ils » le punissent comme s'il s'agissait d'un crime con>> 'tre la religion, sans observer ni règle ni mesure. >> Non-seulement ils étendent leur juridiction sur leurs >> familiers et sur les individus qui dépendent d'eux, » ils la font valoir avec une rigueur semblable sur les >> affaires relatives à leurs esclaves. Ce n'est pas assez » pour eux d'exempter de toute charge et de tout » impôt les personnes et les biens de leurs officiers, quelque grands que soient les priviléges accordés » aux uns et aux autres; ils prétendent encore faire » jouir leurs maisons du droit d'asile, en sorte qu'un >> criminel ne peut en être enlevé, même en ́vertu » d'un ordre de la justice; et si, malgré leur pré» tention, l'autorité publique veut user de son droit, » en y faisant saisir les coupables, ils osent s'en » plaindre comme de la violation sacrilège d'une église.

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IV. » Ils manifestent dans la conduite des affaires » et dans le style de leurs lettres officielles, l'inten» tion d'affaiblir dans l'esprit des peuples le respect » que l'on doit aux juges royaux ordinaires, et même » de faire mépriser l'autorité des magistrats supé» rieurs ce n'est pas seulement à l'égard des ma» tières contentieuses et qui regardent la justice qu'on les trouve répréhensibles; ils affectent encore une » certaine manière indépendante de penser sur les

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» objets d'administration et d'économie publique,

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qui leur fait méconnaître les droits du souve

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V. » L'effet de tant d'abus a été de faire naître des » plaintes de la part des sujets, la division parmi les >> ministres, le découragement dans les tribunaux, et » la nécessité des soins pénibles que Votre Majesté » s'est fréquemment imposés pour juger les différens » et les prétentions réciproques. Cette conduite parut » si intolérable, même dès l'origine, à Sa Majesté >> l'empereur Charles V, qu'en 1535 il jugea néces»saire de suspendre l'exercice de la juridiction temporelle que le roi Ferdinand, son aïeul, avait accordée aux inquisiteurs; et cette suspension dura dix ans » dans les royaumes d'Espagne et en Sicile, jusqu'au » moment où le prince D. Philippe II, qui gouvernait » la monarchie pendant l'absence de son père, réta» blit le Saint-Office dans le même droit, mais avec » des restrictions et des mesures qui n'ont été que >> trop mal observées depuis; parce que l'extrême » modération avec laquelle on s'est comporté à » l'égard des inquisiteurs, leur a inspiré la har» diesse de se prévaloir de cette tolérance, pour » devenir entreprenans, et pour oublier si complet» tement tout ce qu'ils ont obtenu de la pieuse li» béralité de nos rois, que déjà ils assurentet osent » soutenir, avec une opiniâtreté extraordinaire, » que la juridiction qu'ils exercent sur les affaires » et les personnes de leurs ministres, officiers, fa»miliers et domestiques, est apostolique, ecclésiastique, indépendante de toute autorité sécu» lière, quelque puissante qu'elle soit. C'est sur cette prétention que les tribunaux du Saint-Office se

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» fondent pour étendre leurs priviléges et leur auto» rité sur des personnes, des choses et des questions » qui ne sauraient en dépendre; pour appliquer l'usage » des censures à des matières qui n'appartiennent » point à cette discipline ecclésiastique, et pour élu» der les résolutions, les lois et les pragmatiques > royales.....

VI. Cependant, Sire, toute la juridiction exercée » par les tribunaux du Saint-Office sur des séculiers, dans des affaires qui ne regardent pas notre sainte >> foi catholique ni la religion chrétienne, appartient » à Votre Majesté, dont elle n'est qu'une concession » purement temporaire et subordonnée aux restric» tions, aux modifications et aux révocations que » Votre Majesté peut y apporter, en vertu de son in» dépendante et souveraine volonté; cette vérité est » susceptible d'une démonstration si claire et si évi» dente, qu'elle ne peut paraître obscure qu'à celui qui ferme les yeux pour ne pas voir la lumière....

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VII. » Ils méconnaissent avec ingratitude la faveur distinguée qu'ils ont reçue à cet égard; ils »nient la dépendance où ils sont de Votre Majesté, » et dont elle seule peut les excepter; et, pendant qu'ils refusent de se soumettre aux lois canoniques qu'ils connaissent, aux bulles apostoliques qu'ils ont et aux décrets royaux qu'ils ont dans leurs >> archives, ils imaginent des raisons et des prétextes >> illusoires qui n'ont aucun fondement, pour jus>>tifier leurs entreprises et leurs attentats....

» vues,

VIII. » La junte, considérant combien les mesures »> employées jusqu'ici ont été inutiles..... n'hésiterait » pas un seul instant à proposer, comme dernier re

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