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XXXVII. Une troisième lettre, du 9 mai, porte que le tribunal du Saint-Office de Rome a cassé le jugement que celui de Ravenne avait prononcé contre Salomon Moyse Viviani, qui, après avoir abjuré le judaïsme pour se faire chrétien, était revenu à la loi de Moyse en confirmant le décret de révocation, le Saint-Père a dit que : « La loi divine n'est pas de » la même nature que la loi humaine, mais une loi › de douceur, une loi de persuasion; la persécution, l'exil, les prisons ne conviennent qu'aux faux prophètes et aux apôtres des fausses doctrines. Plai› gnons l'homme qui ne voit pas la lumière, et même » celui qui refuse de la voir; la cause de son aveuglement peut servir aux desseins profonds de la Pro» vidence, etc. Sa Sainteté ayant présidé depuis une » congrégation du Saint-Office, elle a ordonné qu'il » ne soit jamais intenté contre personne de procès » pour cause de religion, sans la condition expresse ⚫ d'obliger le dénonciateur de comparaître en per › sonne devant le dénoncé, en présence des juges; elle a manifesté l'intention que tous les procès de » cette espèce soient conduits et jugés de manière » que jamais on n'ait recours à la peine de mort. Ges » dispositions prouvent combien de plaintes se sont » élevées contre le tribunal du Saint-Office, quoique celui de Rome se soit toujours fait remarquer par » son extrême plérance (1). »,

XXXVIII. Le dernier article de cette lettre est d'une vérité généralement reconnue; je crois l'avoir bien prouvé pour les trois premiers siècles de l'Inquisition, par l'histoire du grand nombre d'Espagnols qui, se

(1) Gazette de France du 22 mai 1816, μo 41.

voyant persécutés dans la Péninsule, se réfugièrent à Rome ou adressèrent leurs plaintes au pape après avoir beaucoup souffert dans les prisons de la Péninsule; et c'est ce qui m'a fait remarquer comme une inconséquence singulière que ces mêmes papes qui étaient si indulgens dans leurs propres états, approuvassent en même temps la rigueur extrême dont' l'Inquisition d'Espagne usait à l'égard de ses prisonniers, surtout des luthériens et des calvinistes du XVI siècle, qui n'étaient point relaps ; atrocité si grande, qu'il n'est pas étonnant qu'elle ait excité dans l'ame' des protestans une haine éternelle contre les papes et contre l'Inquisition. Peut-être que la cour de Rome, en adoptant ces maximes de douceur et de tolérance, se flattait que son système, une fois connu de tous les chrétiens, en engagerait un grand nombre à venir solliciter auprès d'elle leur absolution à prix d'argent,' et ferait verser dans le trésor pontifical les richesses qui furent l'objet presque constant de ses projets et de sa conduite.

XXXIX. Une autre lettre de Rome, du 11 janvier 1817, contient l'article suivant : « Le bruit court que

le Saint-Office sera réformé cette année. Il paraît » que ses fonctions ne s'exerceront que comme celles » des tribunaux ordinaires. Le gouvernement a pensé » qu'il serait dangereux de laisser subsister une corpo>> ration inutile et toujours armée contre les progrès de » la raison humaine. Vous pouvez croire que PIn» quisition a déjà cessé d'exister (1). Déjà en mars 186, on avait mandé de Rome que l'ambassadeur de Portugal avait communiqué une note diplomati

(1) Gazette de France du 31 janvier 1817, no 31.a

que au cardinal secrétaire d'état de Sa Sainteté, dans laquelle il demandait au nom de sa cour la condamnation du livre imprimé par l'inquisiteur Louis de Paramo, la suppression formelle et juridique du Saint-Office, et le rétablissement de l'autorité épiscopale dans tous ses droits anciens, pour tout ce qui serait relatif aux matières de foi (1).

XL. Enfin, les mesures justes et modérées que le souverain pontife a commandées, doivent servir de règle et de boussole aux juges de l'Inquisition d'Espagne qui vient d'être rétablie s'ils prennent le parti de décréter la publication de la procédure et des prisons, et la liberté sous caution des prisonniers, après la confession judiciaire qui aura été reçue dans le court délai voulu par la loi d'Espagne, j'avoue que moimême je ne craindrais plus de me présenter devant le tribunal ainsi réformé, pour y être jugé; et c'est là, je l'avoue, le rapport le plus important sous lequel j'aie pu considérer cette question.

XLI. Depuis l'impression de cet article, on a appris à Paris que l'inquisiteur général Mier-Campillo, évêque d'Almeria, venait de mourir; et que le roi Ferdinand VII avait nommé pour lui succéder, dans son emploi de grand inquisiteur, monseigneur Jérôme Castillon de Salas, évêque de Tarazone. Dieu veuille qu'il comprenne mieux que son prédécesseur l'esprit de l'Evangile, et la nécessité de former les procès d'Inquisition comme son vicaire général le fait dans son diocèse, c'est-à-dire, avec la publicité prescrite par les lois et les canons, et suivant les mêmes règles.

(1) Gazette de France du 5 avril 1816, no 94.

CHAPITRE XLV.

Autorités sacrées qui démontrent que l'esprit et la conduite du Saint-Office sont opposés à l'esprit de l'Evangile et de la religion chrétienne.

I. J'AI prouvé jusqu'ici, par le simple exposé des faits historiques, et par les réfléxions qui en ont été la conséquence nécessaire, que l'établissement du tribunal du Saint-Office, sa conduite, et les peines qu'il a coutume d'infliger aux hérétiques et aux hommes suspects d'hérésie, sont contraires à l'ésprit de douceur, de tolérance et de bonté, que le divin fondateur du christianisme à voulu imprimer à son ouvrage. Ce motif aurait dû suffire pour faire anéantir ce tribunal,' même dans le cas où il n'aurait pas été attentatoire à la souveraineté des rois, et à l'administration' de la justice qui a été confiée aux autres tribunaux.

II. Il y a néanmoins des hommes qui pensent autrẻment, soit parce que la procédure du Saint-Office leur est peu connue, soit parce que leur zèle pour la religion catholique n'est pas selon la véritable science prêchée par S. Paul, mais excité par la haine qu'ils portent aux hérétiques, et même à ceux des catholiques qui, comme moi, aiment et prêchent la tolérance.

III. Lorsque je publiai le prospectus de cet ouvrage, il y eut des personnes qui en parlèrent, et qui durent nécessairement se tromper, et être même injustes à l'égard de l'auteur, puisque, ne connaissant

pas encore l'Histoire critique, elles ne pouvaient en porter un jugement solide et éclairé, ni remplir à son égard les fonctions de juges impartiaux. D'autres jugèrent à propos de m'adresser des lettres anonymes, dont le ton annonçait visiblement l'absence de cet esprit de charité tant recommandé dans l'Evangile. L'auteur d'une de ces lettres, datée du 19 août 1817, ( après une sortie violente et pleine de calomnies,) ajoutait « Soyez de bonne foi, Monsieur ce n'est » pas à l'Inquisition que vous en voulez, car elle n'est plus que de nom : tous les coups que vous parais» sez diriger contre elle sont dirigés contre la religion » même : en attaquant les erreurs de quelques prêtres, » votre main téméraire compte ébranler l'arche sainte. » Voilà votre espoir insensé. » Mon ouvrage est publié ; que les lecteurs prononcent entre l'anonyme et moi. Je lui pardonne, de tout mon cœur, l'injure qu'il m'a faite (1).

»

(1) Quant aux autres insultes, que l'auteur de la lettre se déclare, et je promets de lui faire une réponse publique. En attendant, je l'invite à lire les Mémoires pour servir à l'Histoire de la révolution d'Espagne, par D. Jean Nellerto, en 2 vol. in-8", qui se vendent chez le libraire Delaunay, au Palais - Royal. Je croyais avoir quelque droit à attendre plus d'égards de plusieurs membres du clergé de France, d'après les faits qui ont été consigués dans le certificat suivant, d'un ecclésiastique français. « Je soussigné déclare et certifie que j'ai été, en qualité de clerc tonsuré, déporté par le décret révolutionnaire rendu dans le mois d'août de l'an mil sept cent quatre-vingt-douze, par la convention nationale, contre les ecclésiastiques non assermentés; que, m'étant rendu à Calahorra, ville épiscopale de la vieille Castille en Espagne, et ayant

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